12e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Mt 10, 26-33

L'évangile de ce jour est la suite du discours missionnaire de Jésus à ses apôtres -dont le début a été lu dimanche passé- ...sauf que la liturgie a sauté un passage qu'il faut restituer afin de comprendre la raison de l'exhortation de Jésus. On pourrait donc commencer la lecture par ces quelques versets :

Jésus continua à dire à ses apôtres : " Je vous envoie comme des brebis au milieu des loups...

Prenez garde aux hommes : ils vous livreront aux tribunaux, ils vous flagelleront dans leurs synagogues...

Vous serez traduits devant des gouverneurs et des rois à cause de Moi : ils auront là un témoignage, eux et les païens.

Lorsqu'ils vous livreront, ne vous inquiétez pas de savoir comment parler ou que dire : ce que vous aurez à dire vous sera donné à cette heure-là. Ce n'est pas vous qui parlerez, c'est l'Esprit de votre Père qui parlera en vous...".

Tous les documents du Nouveau Testament -évangiles et lettres apostoliques- préviennent les disciples de Jésus : il ne faut pas croire que l'annonce de la Bonne Nouvelle et de l'Amour de Dieu va susciter l'enthousiasme du monde et attirer la sympathie générale. S'il est des personnes qui feront bon accueil au message, certaines demeureront indifférentes, et même beaucoup d'autres se dresseront violemment contre ! La persécution ne sera jamais un phénomène accidentel : elle constitue presque un test de l'authenticité de l'évangélisation.

Evidemment cette annonce fait peur, elle risque d'arrêter l'élan missionnaire : c'est pourquoi Jésus poursuit par une exhortation pressante, répétée trois fois aujourd'hui : " NE CRAIGNEZ PAS !

Elle est développée en trois points.

1. ON NE PEUT SE TAIRE : IL FAUT PARLER

Ne les craignez pas ! Rien n'est voilé qui ne sera dévoilé, rien n'est secret qui ne sera connu. Ce que je vous dis dans l'ombre, dites-le au grand jour ; ce que vous entendez dans le creux de l'oreille, proclamez-le sur les terrasses.

La Bonne Nouvelle n'a rien d'ésotérique, elle n'est pas un enseignement réservé à des initiés, il n'y a pas des secrets comme l'insinuent des romanciers..... Alors que certains voudraient le cantonner dans la zone privée, l'Evangile ne peut pas être enclos entre les murs des chapelles, il doit impérativement retentir partout et être proposé à toutes les libertés.

Ne nous faudrait-il pas retrouver le courage et l'audace de l'annonce ?

Evidemment si les chrétiens se contentent d'être d'honnêtes citoyens, gentils et bien élevés, si l'Eglise se limite à des ½uvres philanthropiques, les Pouvoirs accepteront des gens qui suppléent à leurs insuffisances, ils leur verseront même des subsides. Mais si, refusant d'être bâillonnée, l'Eglise continue de proclamer que le Règne de Dieu vient par Jésus mort et ressuscité, elle sera espionnée, soupçonnée, menacée.

2. REMPLACER UNE CRAINTE PAR UNE AUTRE

Ne craignez pas ceux qui tuent le corps mais ne peuvent tuer l'âme. Craignez bien plutôt Celui qui peut faire périr âme et corps dans la géhenne.

Est-ce qu'on ne vend pas deux moineaux pour un sou ? Pourtant pas un ne tombe à terre indépendamment de votre Père...

Ne craignez pas : vous valez mieux que tous les moineaux.

On ne se débarrasse pas de la crainte à coup de volonté, par une décision d'héroïsme -d'ailleurs Jésus lui-même n'a-t-il pas connu l'angoisse à Gethsémani et au Calvaire ?... Ce qu'il faut, c'est que la crainte de Dieu - qui est respect de sa personne, souci passionné de sa volonté, amour filial - soit plus forte que l'appréhension, normale, devant la haine et la perspective de la souffrance.

Tout disciple de Jésus doit être convaincu de sa valeur unique aux yeux de son Père du ciel : il peut donc s'abandonner avec confiance entre ses mains. Quelles que soient les menaces, il doit être "prêt à justifier notre espérance devant ceux qui lui en demandent des comptes"( 1 Pi 3, 15). Saint Pierre qui écrit cela a pourtant fait l'expérience de sa faiblesse et de sa lâcheté lors de l'arrestation et de l'interrogatoire de son Maître. Mais il a pu ensuite se jeter en pleurant aux pieds de son Seigneur qui ne lui ménageait pas son pardon.

JESUS, AVOCAT DE CEUX QUI L'AURONT DEFENDU

Quiconque se déclarera pour moi devant les hommes, je me déclarerai pour lui devant mon Père aux cieux.

Mais quiconque me reniera devant les hommes, je le renierai moi aussi devant mon Père aux cieux.

A travers l'histoire, l'Eglise est responsable de la Vérité du Christ et de la réalisation de son projet d'amour. Dans la faiblesse, nous sommes ses témoins. Cette mission peut nous coûter cher. La Croix demeure le signe de l'âpreté du combat, de la colère et de la haine de certains.

Mais le condamné du Golgotha a été glorifié par son Père : son sang est puissance d'intercession pour ceux et celles qui l'auront défendu sur la terre. Comme la charité, la mission assure le pardon de la multitude des péchés.

" Heureux ceux qui ont lavé leurs robes dans le sang de l'Agneau" proclamera l'Apocalypse ( 7, 14).

N'AYEZ PAS PEUR !

En octobre 1978, le nouveau pape Jean-Paul II, sur la place St Pierre, lançait à la foule étonnée le cri qui allait devenir célèbre : " N'ayez pas peur !". Cet appel fut immédiatement compris par les ouvriers polonais auxquels il le redira lors de son premier voyage dans son pays l'année suivante.

Non, il ne fallait pas courber l'échine : on pouvait, on devait se dresser contre un régime totalitaire. Ce fut le point de départ d'un processus qui allait aboutir à l'écroulement du communisme.

Quels murs se dressent aujourd'hui entre les hommes et les peuples ? Les puissances oppressantes sont-elles fortes de leur organisation ou de nos craintes accumulées ?

En affrontant les épreuves, le chrétien se découvre fils d'un Père à qui il peut se remettre entièrement ; il s'étonne d'énoncer un message que lui souffle l'Esprit ; et il reste confiant que le Crucifié sera son avocat.

Dans les périls de l'apostolat, le disciple découvre en quel Dieu il croit.