Chers s½urs et frères,
Je crains que dans ma vie j'aie plus souvent reproché ma situation à Dieu que je l'en aie remercié ! C'est dans mon caractère spirituel que j'accepte très vite les événements positifs dans ma vie et son ambiance comme fait accompli sans réfléchir à une relation avec la grâce de Dieu en moi. Mais je dénonce très vite le Dieu absent quand il y a des incidents dans ma biographie. Je sais qu'une manière différente doit être préférée mais j'ai plus tendance à la critique de Dieu sur une chose problématique qu'au remerciement pour une chose agréable...
Nous avons entendu les lignes de la lettre aux Romains : C'est l'apôtre qui nous demande de ne pas nous conformer aux habitudes de ce monde. La raison de cette demande n'est pas les réserves contre la société mais surtout une alternative dans la manière de réagir. L'auteur de la lettre recommande un changement de l'attitude fondamentale vis-à-vis du monde :
Il dit : « ...laissez Dieu vous transformer et vous donner une intelligence nouvelle. Vous pourrez alors discerner ce que Dieu veut : ce qui est bien, ce qui lui est agréable et ce qui est parfait. »
On voit que la lettre à la communauté chrétienne n'accepte pas une passivité spirituelle mais invite à une réaction active comme réponse à la réalité de la vie commune et de la vie religieuse. Le christianisme de Saint Paul n'est pas un mouvement discret mais un groupe qui observe bien les réalités et qui réagit.
L'option de saint Paul vient de la tradition de Jésus. Nous avons bien entendu la réaction de Jésus : Un de ces disciples, Pierre, est choqué de la décision de Jésus d'aller à Jérusalem. Tous savent bien que le chemin à Jérusalem sera une catastrophe pour Jésus, il sera le chemin de la mort sûre.
« Non, cela ne t'arrivera pas », dit Pierre. Pierre lui fait des reproches. Jésus est furieux. Il n'accepte pas les craintes de Pierre et il refuse lui-même ses reproches et sa proposition de ne pas aller à Jérusalem.
Premièrement on est surpris de la réaction tellement négative de Jésus. L'attitude de Pierre paraît très honnête pour défendre la vie de Jésus.
Une vue un peu approfondie dans le texte explique la réaction de Jésus : Sa critique de Pierre se trouve dans le texte d'évangile :
« Va t'en loin de moi ... ! Tu es un obstacle sur ma route car tu ne penses pas comme Dieu, mais comme les êtres humains. »
Cette péricope parle de Pierre comme un exemple d'un être humain. C'est la faiblesse des hommes et la méfiance des gens qui sont thématisés dans le texte : Ce qui manque c'est la souveraineté d'accepter la réalité, la confiance avec laquelle l'homme est invité à agir sans oublier le contexte de la force de Dieu.
Non seulement la lettre aux Romains mais aussi l'évangile de Matthieu renvoie à la charge de la présence dans le monde actuel et réel : C'est la suite qui est notre tache ! Jésus ne parle pas d'autre chose que de la suite avec son postulat de l'abnégation :
« Si quelqu'un veut venir avec moi, qu'il cesse de penser à lui-même, qu'il porte sa croix et me suive. » (24)
On est étonné de la radicalité de Jésus dans ce contexte : cela semble comme une sorte de destruction de soi, un refus de soi-même. C'est une interprétation très dure, très forte. Mais je ne pense pas que c'est l'intention du message de ce texte :
Il est évident que l'évangile parle de la suite des chrétiens. Dans la tradition de l'histoire de l'église il y avait des interprétations différentes et des manières distinctes comment suivre Jésus. Il y avait et il y a toujours des mouvements plus radicaux que d'autres concernant l'abnégation. À la fin on constate des vocations différentes entre les chrétiens sur la manière de vivre comme fidèles. Les uns sont très rigides, les autres restent plus libéraux et plus détendus.
Il n'est pas important de décider qu'elle sorte de vie chrétienne est la vraie vie, la manière la plus authentique. Je ne pense pas que Jésus avait l'intention de nous imposer la meilleure façon de vivre en chrétiens.
C'est surtout la décision personnelle de vivre comme chrétien, vivre dans une société avec une perspective accueillante pour les marginaux et les pauvres, parler de Dieu et de son message de la résurrection avec un style qui exprime la joie et le bonheur d'être fidèle et moins l'expression d'une tristesse permanente à la recherche du renoncement absolu.
Amen !
Source :
Ulrich Luz, Das Evangelium nach Matthäus (Mt 8-17) (EKK I/2), Solothurn/Neukirchen 21996, 484-495.