Un dictateur d'un pays venant de prendre son indépendance, voulait montrer son autonomie vis-à-vis de l'ancienne colonie. Il décida d'effacer dans la mesure de ses possibilités toutes les traces rappelant l'ancien pouvoir colonial. Pour ce faire, en matière de roulage, il voulut changer la conduite des automobilistes qui avaient appris à conduire à droite. Il décréta alors que l'année suivante, à partir du 1er janvier, tous les véhicules rouleraient dorénavant à gauche. Mais comme il souhaitait qu'un tel changement se fasse plutôt en douceur, il proposa à son peuple de le faire en deux étapes. Pendant une période de trois mois, d'abord les camions rouleront à gauche et si cela fonctionne convenablement, les voitures le feront après. Vous imaginez le chaos sur les routes d'un tel pays qui sans doute n'existe que dans la tête de celui qui a inventé cette blague. Pour vivre une certaine sécurité, nous avons donc besoin d'un code de la route connu par tout un chacun.
Par cet exemple, nous reconnaissons que les lois sont nécessaire pour vivre en société. Personne ne peut s'en passer et les psychologues nous rappellent à quel point les lois, les règles sont essentielles à la construction et la structuration d'un être humain. Les lois sont donc importantes mais à condition qu'elles ne se détournent pas de leur finalité et qu'elles sont édictées pour le bien de toutes et de tous. Elles sont des moyens permettant la réalisation de chaque être humain car comme le rappelle la première lecture, elles sont sagesse et intelligence. C'est pourquoi, les lois qui iraient à l'encontre de cette vérité fondamentale devraient être non seulement ignorées mais également désobéies puisqu'elles sont une insulte au droit qu'elles sont censées servir. Il en va ainsi dans notre société civile, dans notre Eglise et il en va également de même dans l'exercice et la pratique de notre foi. Je m'explique.
Si nous pratiquons notre foi par notre présence en ce lieu, par des moments de prière, des gestes de solidarité et de tendresse, nous le faisons car nous avons la conviction qu'ils sont les signes extérieurs de ce qui habite au plus profond de nous-mêmes. Nos paroles, nos gestes, nos actions sont en cohérence avec ce que nous sommes. Il n'y a pas de fracture. Mais en est-il toujours ainsi ? Tim Guénard, auteur et conférencier français qui est venu récemment dans notre région pour témoigner de sa vie d'enfant abandonné et attaché à un poteau le long d'une route par sa maman à l'âge de trois ans, raconte qu'à neuf ans il avait été placé chez une fermière connue comme chrétienne dans le village. Toutefois, cette femme ne lui donnera pas le goût de Dieu. Bien au contraire. Il dira d'elle : " ce qui me révolte le plus, c'est que cette sale bonne femme se dit chrétienne. La bigote m'interdit, sous prétexte que je ne suis pas baptisé, de manger viande et ½ufs. Ma nourrice-bourreau me pousse à l'église, non pour découvrir Dieu, mais pour y cirer bancs et parquets ". Quelques jours plus tard, il refusera de retourner à l'église car dit-il " je refuse d'entrer dans l'église de cette nourrice brevetée catho qui m'offre l'enfer au lieu du ciel ". Le témoignage de Tim Guénard peut nous sembler caricatural et très éloigné de ce que faisons et de qui nous sommes.
L'évangile de ce jour nous invite cependant à vivre un chemin d'introspection. Oh certainement pas pour nous mettre à nous culpabiliser car nous ne sommes pas parfaits, que Dieu soit-disant attendrait encore plus et mieux de nous. Non, cette théologie là est heureusement complètement dépassée. Par contre, Jésus nous convie à ce chemin de vérité. Suis-je en accord avec moi-même ? Suis-je juste dans mes relations, dans mes paroles ? Suis-je apôtre de Dieu par le témoignage de ma vie dont mes pensées, mes actes traduisent la foi qui m'habite ? Les réponses à ses différentes questions sont essentielles pour la transmission de la foi. Si celle-ci se transmet par contagion, il ne s'agit plus de beaux discours, de belles affirmations sans lendemain. Non la foi devient plutôt une manière d'être et de vivre. A ces questions, je ne puis répondre à votre place. Donnons-nous alors le temps d'envoyer notre réponse à Dieu. C'est une affaire personnelle entre Lui et chacune et chacun de nous.
Comme l'évangile nous l'a dévoilé aujourd'hui, Dieu semble ne pas aimer l'hypocrisie. Il attend de nous une certaine vérité. Que jamais nous n'oublions que la vraie foi ne se contente pas seulement de bons sentiments. Elle se traduit dans nos actes et nos attitudes.
Amen.