Au fur et à mesure que Jésus approche de Jérusalem, la rumeur enfle : voici un homme qui s'appelle IESHOUAH( "Dieu Sauveur"),il est descendant de la famille royale de David, il proclame que le Royaume de Dieu approche et en outre il réalise des guérisons spectaculaires !!! Evidemment l'effervescence monte : des foules de plus en plus nombreuses se mettent à le suivre, convaincues qu'il va déclencher l'insurrection dans la capitale.
" Allons z'enfants de la Patrie . Le jour de Gloire est arrivé ..." !!.....
Pourtant dès le point de départ, Jésus a été très clair : il n'est pas un révolutionnaire politique, il n'appelle pas aux armes, son dessein est tout autre qu'on ne le pense.
Un jour où la foule qui le suivait était particulièrement nombreuse, Jésus va à nouveau essayer de mettre les choses au point. Il va préciser les conditions de sa "suivance"
De grandes foules faisaient route avec Jésus.
il se retourna et leur dit : "Si quelqu'un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et s½urs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple".
Il avait déjà prévenu qu'il venait apporter la division dans les familles. Le croyant doit s'attendre à ces déchirures douloureuses et réagir en conséquence car la décision pour Jésus ne supporte pas de compromission : il ne faudra pas céder aux pressions de ceux que l'on aime et dont on partage la vie. Non qu'il faille les quitter (on ne voit jamais Jésus briser les ménages) mais le croyant doit tenir ferme et garder ses convictions même s'il encourt reproches et critiques de la part de ses proches.
Et ce n'est pas seulement les heurts familiaux que le disciple va affronter mais il devra même "préférer Jésus à sa propre vie" !
La foi en Jésus n'est pas une croyance en des idées religieuses, une inscription anodine dans une organisation honorable, l'adhésion à un programme si héroïque soit-il.
La foi n'est pas une opinion privée, cachée dans le secret de la conscience : elle est VIE AVEC ET POUR JESUS.
La foi est DON A UNE PERSONNE, un AMOUR DU CHRIST, un engagement tel qu'il peut aller jusqu'à l'obligation de donner sa vie pour Jésus.
Le témoignage se rend au risque éventuel du martyre.
Jésus le précise de suite :
Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher derrière moi ne peut pas être mon disciple.
Quelle annonce choc pour tous ces suiveurs qui rêvaient d'écraser les ennemis ! Annonce tellement dure, tellement inacceptable qu'elle est la phrase de Jésus la plus répétée dans les évangiles
Pourquoi les évangélistes insistent-ils à ce point sur cette formule ? A leur époque, les premières communautés chrétiennes sont sous haute surveillance des autorités, en butte à l'hostilité. Déjà des chrétiens ont été traduits devant les tribunaux, flagellés, jetés en prison ; certains ont été mis à mort. Il est donc nécessaire de rappeler à tous que cette haine n'est pas un hasard : elle avait été annoncée par Jésus et par ses apôtres qui en furent les premières victimes.
La foi peut être dangereuse !
L'expression, devenue classique, "porter sa croix" ne signifie donc pas d'abord accepter les coups du sort, les accidents, les revers de fortune. Elle ne nous appelle pas non plus à nous mépriser, à nous infliger des sévices, à nous faire souffrir "pour expier".
La croix est un châtiment, une condamnation portée par les puissants contre ceux dont les opinions et les comportements sont jugés inacceptables.
Porter sa croix est donc accepter de subir les conséquences d'une foi authentique, souffrir parce que l'on est chrétien : moqueries, sarcasmes, mais aussi carrière entravée...perte d'honorabilité, coups, prison...menaces contre la vie.
Jésus explique par deux petites paraboles :
Quel est celui d'entre vous qui veut bâtir une tour et qui ne commence par s'asseoir pour calculer la dépense et voir qu'il a de quoi aller jusqu'au bout ? Car, s'il pose des fondations et ne peut pas achever, tous ceux qui le verront se moqueront de lui : " Voilà un homme qui commence à bâtir et qui ne peut pas achever !!".
Et quel est le roi qui part en guerre contre un roi et qui ne commence par s'asseoir pour voir s'il peut, avec 10.000 hommes, affronter l'autre qui vient l'attaquer avec 20.000 ?
S'il ne le peut pas, il envoie, pendant que l'autre est encore loin, une délégation pour demander la paix.
Jésus n'a qu'un projet qu'il est décidé à accomplir : inaugurer sur terre le Royaume de son Père, faire que Dieu règne à la place des idoles. Il s'agit donc bien de bâtir et de guerroyer :
Edifier la nouvelle humanité capable d'atteindre le ciel, de rejoindre Dieu : ...OUI MAIS... ce sera en grimpant sur la croix.
Vaincre les puissances ennemies : ...OUI MAIS ...ce sera en offrant sa vie.
Ces tâches sont immenses, bien au-dessus de nos possibilités.
Où acquérir tout ce qui serait nécessaire pour réussir ?
L'entreprise demande au disciple de bien réfléchir avant de s'engager. Il faut au préalable s'asseoir, c'est-à-dire s'arrêter, prendre le temps de la réflexion : suis-je capable d'aller jusqu'au bout ?...
Jésus répond par un paradoxe :
De même celui d'entre vous qui ne renonce pas à tous ses biens,ne peut pas être mon disciple.
On semblait nous demander de disposer de moyens énormes pour réaliser le projet de Dieu avec Jésus : et voilà que - retournement total - Jésus appelle le disciple à se dépouiller.
En effet l'homme qui demeure attaché aux biens de ce monde ne pourra jamais participer au combat spirituel. Il est vaincu d'avance.
Saint Paul, lui, comprendra ce renoncement obligatoire : rejeté par beaucoup, objet de vexations, condamné, jeté en prison, il s'exclamera :
"C'est dans la faiblesse que je suis fort !".
Notons que l'apôtre, pas plus que Jésus, n'a imposé aux chrétiens de quitter tout. Sauf les apôtres itinérants, les premiers chrétiens garderont leurs biens, seront tenus de gagner leur vie, d'élever leurs enfants. Mais ils veilleront à ne pas mettre leur c½ur dans leurs possessions, et à s'entraider les uns les autres en cas de nécessité.
La leçon de ce jour est dure, terrible même ! Nous tremblons face à de telles exigences. Mais si nous ne les pratiquons pas au plus vite, qu'avons-nous à dire à une société qui prêche tout le contraire ?