25e dimanche ordinaire, année C

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 1997-1998

Qui paie ses dettes s'enrichit et on ne prête qu'aux riches. L'argent ne fait pas le bonheur mais on ne peut pas vivre sans argent. Il faut mourir riche. Heureusement, il est avec le ciel quelques accommodements. Il est vrai que le temps c'est de l'argent et que comme l'a rappelé la première lecture de ce soir, l'argent n'a pas d'odeur. De toute façon, il faudra toujours faire contre mauvaise fortune bon coeur. Voici quelques lieux communs qui expliquent le thème de notre eucharistie de ce soir et qui ont été expliqués par Léon Bloy en 1901.

Dieu ou l'argent, semble nous dire l'Evangile, j'aurais certainement aimé un autre texte pour célébrer la reprise de la messe de 19 heures préparée par différentes équipes de jeunes. Mais Dieu nous attend souvent ailleurs que là où on l'espérait.

Mieux encore, Il nous surprend comme s'Il se laissait aller à quelques égarements moraux. Il félicite le gérant trompeur, il nous invite à faire des amis avec de l'argent trompeur. L'argent sale et blanchi pour parler en termes contemporains n'a pas l'air de Le déranger. Et malgré tout, Jésus nous annonce que nous ne pouvons servir à la fois Dieu et l'Argent. Il ne me restait plus qu'à faire une prière de demande pour que le Père m'envoie l'Esprit afin de tenter de comprendre cette si forte contradiction du texte. Mais finalement, il n'y a peut-être pas de contradiction comme telle, surtout si l'on lit ce texte à la lumière des données historiques qui permettent de comprendre les us et coutumes de l'époque. Et voici une clef possible. Le gérant est malhonnête c'est vrai mais contrairement à ce que l'on croit, il trompait non pas son Maître mais bien les débiteurs.

En effet, à cette époque, il paraissait normal pour tout le monde, que le gérant se paye sur le montant à devoir au Maître. Si le Maître prêtait disons pour un montant de cent francs, le gérant demandait au débiteur d'écrire 120 sur le reçu et de cette façon il s'enrichissait allègrement. En augmentant ainsi la dette, il mettait souvent le débiteur en difficulté de paiement. L'historien Josèphe raconte que lorsque Hérode Agrippa Ier, était au bord de la faillite, en 33-34 de notre ère, il emprunta de l'argent par l'entremise d'un agent d'une banque du Proche Orient. Il du écrire 20.000 drachmes sur son reçu alors qu'il reçut 2500 drachmes de moins.

Tout devient alors lumineux par rapport à notre texte de ce soir. Un jour un gérant reçoit son C4, pour éviter ce renvoi, la prudence et la sagesse s'imposent. Cette situation critique l'oblige à redevenir honnête, à ne pas profiter de la fragilité de personnes plus pauvres que lui et surtout à cesser de diviniser l'argent comme il l'avait fait jusqu'à présent. Zachée me revient alors en mémoire. L'argent ne pourra jamais être moteur de mon existence, il doit rester au niveau d'un moyen et non d'une valeur. Ma seule divinité est au plus profond de moi, là, où Dieu a trouvé sa place.

En effet, c'est dans notre nudité que nous entrons dans la vie éternelle. Sur terre, l'argent ouvrait les portes facilitait les relations. Arrivé là-haut, plus rien, pensent certains. Pourtant, il y aura l'argent qui a intéressé Dieu, celui que nous avons partagé avec amour, et même parfois donné assez follement. Les gens que nous avons aidé sont là pour le redire au Père, nous ne sommes pas nus mais merveilleusement habillés par notre générosité ; nous ne sommes pas sans relations, il y a tous ceux qui nous accueillent joyeusement. Les rabbins de l'époque avaient déjà saisi cela puisqu'ils disaient : "le riche aide le pauvre en ce monde, mais le pauvre aide le riche dans le monde à venir". Tout est question d'amour. Nous ne sommes pas des étrangers pour le Dieu d'amour, nous étions nous-mêmes amour en donnant.

Servir Dieu devient alors transformer l'argent en Amour. Nous sommes devant un choix difficile de banque : banque d'égoïsme ou banque d'amour. L'évangile nous invite à choisir cette dernière. Et le Père nous dit : Déposez votre Amour sur votre livret-épargne du Coeur Au nom de Jésus Christ Ressuscité je vous en donnerai au moins 100 fois plus. Amen.