On connaît les critiques sans cesse ressassées contre l'Eglise : le procès Galilée, les débauches des Borgia, les crimes de l'Inquisition, les richesses du Vatican, etc., etc. Mais il y a un péché bien plus grave car il a été enseigné par les papes, les évêques, les prêtres pendant des siècles : "Le début de la messe est facultatif" !!!??? Incroyable ! Il a fallu attendre la fin du XXème siècle, avec le concile Vatican II (1963), pour que, enfin, l'Eglise revienne à la vérité primitive :
" Dans la célébration de la liturgie, la sainte Ecriture a une importance extrême. Aussi faut-il promouvoir le goût savoureux et vivant de l'Ecriture( §24)... " Le rituel de la messe sera révisé de telle sorte que se manifeste plus clairement le rôle propre ainsi que la connexion mutuelle de chacune des parties " (§ 50)... " Les deux parties - càd. la liturgie de la Parole et la liturgie eucharistique- sont si étroitement unies entre elles qu'elles constituent un seul acte de culte. Aussi le Concile exhorte vivement les prêtres à enseigner activement aux fidèles qu'il faut participer à la messe entière, surtout le dimanche (§ 56).
Sans doute sommes-nous encore nombreux à nous rappeler comment, gamins, entrant en catimini dans le fond de l'église, nous regardions pour voir si, sur l'autel, le voile était encore déposé sur le calice. S'il l'était, ouf !, "nous étions en règle" car on nous apprenait au catéchisme que nous n'avions raté que "l'avant-messe" facultative !
Lorsque vous vous rendez à un repas d'amis ou à une réception officielle, considérez-vous que le début - les salutations, les échanges, les conversations - sont un "hors d'½uvre" facultatif ? Quand le pape, Mr Bush, Mr Chirac, notre roi offrent une réception, croyez-vous qu'un seul invité se permette d'arriver en retard et dédaigne les discours d'ouverture ? Or à la messe, c'est DIEU LUI MEME QUI INVITE.
Car la messe suit un déroulement semblable à celui des réceptions : d'abord conversation et puis repas.
1. CONVERSATION : LA LITURGIE DE LA PAROLE
La rencontre commence d'abord par un temps d' échanges. A travers une suite de lectures tirées du Livre des Ecritures saintes, Dieu s'adresse à son peuple : il lui redit son amour, lui rappelle ses promesses et son histoire, l'encourage dans ses épreuves, lui apprend à vivre selon ses volontés, lui offre des modèles (Jérémie, Paul...) L'homélie qui termine cette partie a pour but d'expliquer cet enseignement de Dieu et de l'actualiser dans la vie quotidienne. De leur côté, les fidèles écoutent avec attention ces instructions, ils tâchent d'en pénétrer le sens afin de mieux comprendre le dessein de Dieu sur eux. En échange, ils s'adressent à leur Seigneur en unissant leurs c½urs aux prières que le prêtre dit en leur nom ; ils répondent aux invitations que celui-ci leur adresse et qui ont pour but de souder l'assemblée dans la même intention. En chantant des cantiques, en lançant de vibrants AMEN, l'assemblée confesse sa foi, affirme sa joie d'être là dans la Maison de son Dieu, elle exprime sa confiance : "Nous croyons en Toi, nous sommes sûrs de ton amour". Cette liturgie est donc bien un échange, un dialogue entre le peuple et son Seigneur.
2. REPAS : LA LITURGIE DU PAIN
Ensuite, éclairés par l'enseignement du Seigneur, sûrs de son pardon mais aussi conscients de notre faiblesse, nous entrons dans la seconde partie de la célébration. Au nom de tous, on apporte à l'autel ce que le Christ a demandé : un peu de pain et de vin. Tous, nous élevons notre c½ur, nous le tournons vers le Seigneur...Nous nous joignons au prêtre dans la Grande Action de Grâce ( sens du mot Eucharistie) qui fait mémoire de la Dernière Cène de Jésus avec les siens : "La nuit où il fut livré, Jésus prit le pain..."
Il ne s'agit pas d'une évocation d'un passé révolu (comme on observerait une minute de silence en mémoire des morts) : par la force de l'Esprit, le don du Corps et du Sang du Christ s'effectue AUJOURD'HUI POUR NOUS. Car le Seigneur est Vivant, Il est présent, il vient au c½ur de notre vie actuelle. Autour de cette mémoire, nous évoquons l'histoire des hommes, l'Eglise du ciel et celle de la terre, nos proches, nos défunts, le monde entier avec ses grandeurs et ses misères. Car la Croix est l'axe du monde . " Par Lui, avec Lui,..." : En Eglise, nous offrons le Christ glorieux qui, par son don total sur la croix, fait miséricorde au monde, le restitue dans l'unité de l'amour et nous entraîne vers le Père. Heureux de partager la même foi, refusant tout racisme, toute jalousie, toute rancune, main dans la main, manifestant notre unité, nous chantons la magnifique PRIERE DU SEIGNEUR( Le Notre Père). Et nous nous avançons afin de recevoir avec piété et reconnaissance, en toute humilité, le Corps du Christ. La musique nous soutient dans un long moment d'adoration et de gratitude.
Voyez-vous l'importance de bien écouter la Parole de Dieu et de saisir l'union intime des deux parties de la messe ? Loin d'être une "avant-messe" facultative que l'on subit avec ennui, tout le début nous fait entendre la Parole de Dieu. Nous l'écoutons avec nos oreilles, nous disons notre accord...mais saurons-nous mettre toutes ses exigences en pratique ? Non. Avouant notre faiblesse, nous venons manger cette même Parole qui est devenue Pain consacré et que nous pouvons assimiler, faire nôtre. Car chaque dimanche, l'hostie que nous mangeons semble identique mais chacune est différente car elle est devenue la Parole à "dévorer". Lecture écoutée et Hostie consommée portent ensemble la Lumière de Vérité et la Force de la Vie. Et si, en présentant l'Hostie, le prêtre dit à chacun : "LE CORPS DU CHRIST" ( auquel il répond AMEN), il faudrait peut-être qu'à la fin de la distribution, le prêtre lance sur l'assemblée : " MAINTENANT NOUS SOMMES LE CORPS DU CHRIST".
Sur la montagne de la Transfiguration (évangile de ce 2ème dimanche), alors qu'il s'est mis en route vers Jérusalem où, il le sait, on va le tuer, Jésus vit un moment extraordinaire de prière. Moïse et Elie, les deux géants de l'histoire de son peuple, l'entourent pour l'encourager et l'assurer qu'il est dans la vérité tandis que la voix du Père retentit : " CELUI-CI EST MON FILS BIEN-AIME : ECOUTEZ-LE ".
Ainsi, chaque dimanche, nous nous retrouvons dans une église pour un rendez-vous avec Jésus. Le Père nous presse d' écouter son Fils, d' accueillir ses paroles afin de le suivre sur le chemin de l'amour qui accepte la croix. Chemin ardu et qui nous fait peur. Mais le Fils se donne à manger pour nous combler de sa Présence réelle. Nous pouvons sortir et rejoindre notre milieu de vie. Quelque part dans le monde, s'est réalisé ce pour quoi Jésus est allé sur la croix : réunir dans son amour les hommes et les femmes pour les faire UN.