2e dimanche de l'Avent, année B

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Avent
Année liturgique : B
Année: 2002-2003

Mc 1, 1-8

Il avait les cheveux teint en rouge mais un rouge très vif. Une boucle d'oreille à chaque oreille, un piercing sur la langue, un dans le nez et quatre sur l'arcade sourcilière gauche. Enfin, sur son cou apparaissait la tête d'un serpent qui était tatoué. Le choc était déjà suffisant pour ne pas en rajouter avec des détails concernant sa tenue vestimentaire. Et voilà qu'il s'avance tout en confiance vers un groupe de personnes qui ne le connaissaient pas. Elles sont légèrement intriguées et c'est plutôt un euphémisme. Une certitude, il ne fait pas partie de leurs relations et espèrent que leurs enfants ne fréquentent pas ce type de garçon. Il vient vers elles, s'arrête et se met à leur parler de ce qu'il croit, ce qui le fait vivre. Ces personnes, elles s'étonnent de son bon sens, de la profondeur de ses propos et voilà qu'elles se mettent à discuter avec lui. Qui aurait cru cela alors qu'elles avaient tant de préjugés au départ.

Des préjugés nous en avons tous et c'est tant mieux parce que s'il n'y avait pas de préjugés pourrions-nous vraiment nous rencontrer ? C'est vrai, il y des préjugés favorables. Quand nous voyons quelqu'un pour la première, même sans le vouloir, nous l'observons, nous repérons des signes qui nous rassurent, nous constatons que nous avons les mêmes codes de conduite en société et j'en passe. De manière quasi-naturelle, nous mettons en place ces préjugés. Ils nous réconfortent dans la rencontre des différences. Puis il y a les autres, ceux que nous n'arrivons pas à dépasser. Nous n'avons plus de repères et voilà que nous avons alors des préjugés négatifs. Ils sont parfois justifiés, nous faisons confiance à nos intuitions. Mais il arrive également que parce que nous nous sommes enfermés dans certains préjugés nous passons à côté d'une occasion de rencontre, de mûrissement personnel, de découverte. Ces préjugés-là tuent les relations humaines.

Il me semble qu'un parallélisme pourrait être fait avec l'époque de la prédication de Jean le Baptiste. Les contemporains du Christ ont dû également dépasser un certain nombre de préjugés pour partir à sa rencontre et surtout être capable d'entendre ce qu'il avait à dire ou mieux encore à proposer comme chemin de vie. Et voilà qu'au c½ur du désert de notre propre histoire, de ce désert où il fait bon venir se poser, se reposer pour mieux reprendre la route, voilà qu'une voix du plus profond de notre être nous crie : préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route. Nos chemins intérieurs sont un peu comme nos caves ou nos greniers : lieux idéaux pour accumuler un ensemble de choses. Elles sont là, parfois depuis des années et elles encombrent. Tout comme nous aussi nous sommes parfois encombrés de tant de choses : des paroles qui ont dépassé notre pensée, de gestes que nous n'arrivons pas à comprendre, d'actes qui ont fait souffrir, de blessures qui n'arrivent pas à se cicatriser. Et tout cela nous encombre, c'est-à-dire nous empêche de nous mettre debout et d'avancer pour, à notre propre rythme, vivre de cette vie qui nous est promise en Dieu.

Alors aujourd'hui nous sommes conviés à vivre un moment de souvenir, à nous rappeler tout ce qui nous encombre pour mieux pouvoir nous désencombrer de nous-même et des autres. Il ne s'agit certainement pas d'oublier. En effet, il nous est impossible de décider d'oublier. Non il s'agit de nous rappeler des événements, des mots, des gestes. De nous en rappeler pour les intégrer à notre histoire. Reconnaître que c'est aussi par eux que je suis qui je suis aujourd'hui. Que j'ai été tant façonné dans le bonheur que dans les épreuves.

Faire acte de souvenir pour que ce dernier devienne douceur à ma mémoire. Je ne comprendrai sans doute jamais tout mais cela importe peu. En effet, nous chante St Jean dans sa première Lettre, " si notre c½ur nous condamne, Dieu est plus grand que notre c½ur et il connaît toute chose ". C'est sans doute une des phrases les plus libératrices de tout le Nouveau Testament. Oui, Dieu est plus grand que notre c½ur, c'est pourquoi il nous invite à entrer sans crainte dans une démarche de réconciliation avec lui. Même si certaines choses nous échappent encore, Dieu dans son infinie bonté viens prendre notre main pour nous relever. Entrer en réconciliation avec Dieu, c'es entrer dans une démarche de mémoire, de souvenir, non pas pour se culpabiliser mais pour se libérer de tout ce qui nous empêche de devenir nous-mêmes. Dieu n'a pas de préjugés, il nous aime tel que nous sommes et veut avant tout notre bonheur sur cette terre. Il est plus grand que notre c½ur. Puissions-nous ne pas l'oublier.

Amen.