2e dimanche de l'Avent, année C

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Avent
Année liturgique : C
Année: 2000-2001

Ce matin (soir) en ce temps d'Avent, nous sommes conviés à faire taire en nous tous les bruits, les soucis qui nous encombrent. Non pas faire le vide mais plutôt à vivre un silence, un silence profond tout habité de ce que nous sommes pour laisser, à nos rythmes respectifs, venir en nous la présence de celui que nous attendons. Au c½ur même de ce désert une voix crie à nous : "préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route et tout homme verra le salut de Dieu". Y a-t-il plus belle promesse que celle-là : voir le salut de Dieu. Savoir que toutes et tous un jour nous vivrons en Dieu, être en présence éternelle de sa divinité. Se lover à jamais dans la chaleur de Dieu. C'est un don qui nous est offert mais pour pouvoir le recevoir, il y a lieu de se préparer car sans préparation nous risquons de passer à côté d'une telle merveille. Nos vies sont tellement encombrées, nous courons tellement après le temps que ce dernier devient une valeur plus précieuse que l'or.

C'est à ce temps d'intériorité que nous sommes invités aujourd'hui. Aplanir tout ce qui en nous nous empêche de devenir pleinement nous-mêmes. Ce chemin se fera d'ici quelques minutes, après un temps de silence par une procession avec imposition des mains. Cette démarche est d'abord et avant tout une démarche de conversion, un signe public de demander à l'Esprit de Dieu de nous accompagner sur le chemin de nos vies, de nous montrer la route qui conduit à la lumière véritable et de nous aider à reconnaître face à lui tous les manques d'amour qui jalonnent nos journées. Ce sont nos manques d'amour, nos inattentions, nos paroles parfois un peu dures, nos égoïsmes et nous pourrions continuer d'allonger la liste que nous posons ce matin (soir) en Dieu. Ayant accompli un tel geste, nous croyons en toute confiance que Dieu nous accordera par l'absolution son pardon. Mais qu'est-ce que le pardon de Dieu ?

Pour nous aider à entrer dans ce mystère, je voudrais vous raconter l'histoire suivante, peut-être vous l'ai-je déjà raconté, c'est possible, je ne me le rappelle plus. Tant pis et puis, c'est de toute façon agréable d'entendre plusieurs fois la même histoire. Cette histoire je l'ai entendue il y a une dizaine d'années en Angleterre. Imaginez-vous un instant que vous mourrez. Au moment précis de votre mort, lorsque vous quittez cette terre, vous vous retrouvez au ciel dans une superbe salle de cinéma aux sièges extrêmement confortables, écran géant, Dolby stereo, j'en passe et des meilleures. Vous voilà confortablement assis attendant que quelque chose se passe. Et vous êtes là avec une certaine paix intérieure. Puis voilà que par derrière l'écran apparaît un ange qui vous souhaite la bienvenue. Cher ami, dit-il, vous allez maintenant assister à la projection privée du film de votre vie. Vous y reverrez tous les événements que vous avez traversés, vous redécouvrez tout ce que vous avez dit, pensé. L'ange vous souhaite un bon film et s'en va à nouveau par derrière l'écran. Au fur et à mesure de la projection, vous vous enfoncez dans votre fauteuil pour ne finalement plus voir que les lettres "Fin" juste au-dessus du bord du siège de la rangée précédente. Et voilà que l'ange revient espérant que vous avez passé un bon moment. Vous êtes quant à vous plutôt livide, blême. Et voilà que l'ange vous dit : "vous vous êtes sans doute étonnés de vous retrouver seul dans une aussi grande salle. Et bien tous les sièges vides vont maintenant être pris par tous ceux qui ont été les acteurs et actrices dans le film de votre vie. Nous allons faire une seconde projection avec eux et ils verront vraiment qui vous étiez lors de votre pèlerinage sur terre". A ce moment là, l'horreur vous envahit. Et bien, concluait le prédicateur anglais, c'est pourquoi nous avons toutes et tous besoin du pardon de Dieu. En effet, le pardon de Dieu, c'est qu'il n'y ait jamais, je dis bien jamais cette seconde projection. De la sorte le pardon divin n'est pas un oubli puisqu'il restera toujours la première projection.

Pardonner n'est pas oublier. Non pardonner c'est d'abord et avant tout une affaire de souvenir. Ces souvenirs douloureux qui nous ont été infligés ou que nous avons commis. Ils font partie de notre histoire. La démarche de pardon vis-à-vis de Dieu, démarche éminemment subjective, nous invite à nous libérer de nous-mêmes, de ce poids qui nous empêche d'avancer en vérité, pour un jour voir le salut de Dieu. Amen.