Notre cher Jean-Baptiste est quand même un oiseau curieux : il vit dans le désert, il est vêtu d'un poil de chameau et d'une ceinture de cuir autour de ses reins, et il mange des sauterelles. C'est un homme du minimum : il se contente du minimum pour lui-même. D'autre part, c'est un homme du maximum : il est assez exigeant, il demande la conversion de tout un peuple, il prédit que Dieu va faire le grand nettoyage, que le temps est devenu très limité et qu'il faut se dépêcher. La cognée se trouve déjà à la racine des arbres. C'est l'Avent, on attend la venue du Christ, le petit enfant Jésus. Par sa venue même comme enfant, il prêche la douceur, l'amour, la grâce et la miséricorde pour tous, surtout pour les pécheurs et les malheureux. Comment réconcilier ces deux figures, ces deux messages ? Jean-Baptiste n'a-t-il donc rien compris de l'évangile ? Ou est-ce que c'est plutôt Jésus qui est le naïf ? Mais on a parfois tendance à oublier que Jésus lui-même pouvait être très sévère, là où il rencontrait de l'hypocrisie au lieu d'ouverture de c½ur et d'esprit. Là, il ne lui restait que la colère pour exprimer ce qu'il avait dans son c½ur. En fait, briser l'atmosphère d'indifférence est très difficile. Jésus lui-même la dit quand il parlait de Jean le Baptiste. En fait il dit : nous avons chanté une lamentation, et vous n'avez pas pleuré, nous avons joué à la flute, et vous n'avez pas dansé. Qu'est-ce que vous voulez en fait ? On peut se plaindre du fait que Jean-Baptiste a été trop sévère. On peut dire : il faudrait plutôt mettre l'accent sur la joie de la bonne nouvelle que Jésus nous a apporté. Mais est-ce qu'on se réjouit vraiment pour cela ? Car quand Jésus vient avec toute sa douceur, l'annonce de la miséricorde, le pardon des péchés, on aurait peut-être la tendance à penser que c'est pour les autres. Nous, nous faisons de notre mieux. C'est peut-être un peu le problème de notre temps : nous avons déjà nos interprétations toutes prêtes. On sait ce que l'on veut entendre. On sait surtout très bien ce que l'on ne veut plus entendre. L'indifférence n'est pas toujours le manque de c½ur ou de l'esprit, mais c'est le manque d'ouverture. Nous avons peut-être justement trop dans notre c½ur et dans notre esprit pour écouter librement. L'Avent, c'est créer le vide et le désert pour mieux écouter, aplanir la route pour que le Seigneur puisse vraiment venir et entrer chez nous. L'Avent, c'est se contenter du minimum pour recevoir le maximum : le don du Fils de Dieu lui-même. Aplanir la route pour nous débarrasser de tout ce qui gêne en nous l'ouverture de c½ur. Nous avons parfois besoin d'un Jean-Baptiste et sa prédication un peu violente ; cela nous choque et nous réveille de notre sommeil. Ne dis pas : nous avons Abraham pour père, car Dieu peut susciter des enfants à Abraham à partir des pierres mortes. Pour nous cela peut signifier : ne disons pas trop rapide que nous sommes éduqués chrétiennement, que nous avons envoyé nos enfants à une école catholique et que nous nous comportons comme de bons citoyens. Tout cela est bien vrai. Ma la question est : est-ce que nous sommes des vrais croyants, est-ce que nous sommes prêts à le devenir ? Est-ce que nous avons une foi vivante ? Beaucoup de nos traditions sont mortes ; ce n'est plus parce que tes parents étaient catholiques, que toi tu l'es. Il faut faire un nouveau choix, bien délibéré. La cognée se trouve déjà à la racine des arbres, mais Dieu ne va pas couper les arbres qui portent du fruit. A nous à voir les signes du temps. C'est un peu le message de Jean-Baptiste traduit pour aujourd'hui. Je pense que nous vivons un temps de purification : la vraie mentalité des gens est en train de sortir. C'est une bonne chose ; cela nous permet justement de recevoir le baptême dans l'eau que Jean-Baptiste propose, un baptême de purification de l'intérieur, de notre mentalité profonde. Mais après Jean-Baptiste viendra celui qui nous plongera dans le feu et l'amour du Saint-Esprit : après le vide, vient la plénitude, après l'eau le vin de la fête. Mais il faut d'abord se laisser vider pour bien en pouvoir profiter.
2e dimanche ordinaire, année A
- Auteur: Lens Patrick
- Temps liturgique: Temps ordinaire
- Année liturgique : A
- Année: 2007-2008