2e dimanche ordinaire, année B

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2002-2003

Permettez-moi de vous parler de ma grand-mère. A l'aube de sa vie éternelle, ce qu'elle appréciait le plus au monde je crois, c'était qu'un de ses enfants ou petits-enfants, vienne chez elle le samedi soir non pas pour passer la soirée avec elle spécialement mais plutôt pour pouvoir se rendre à la messe du dimanche matin à 8 heures à laquelle elle ne pouvait plus assister vu son âge. L'un d'entre nous y allait muni de sa custode. La voici, c'est ce qui me reste d'elle aujourd'hui. Puis nous rentrions à la maison familiale pour lui préparer une petite table décorée d'un napperon, d'une petite croix, de quelques fleurs et de la custode contenant l'hostie. Avec elle, nous regardions ensuite la messe télévisée. Comme m'a grand-mère était une femme de grand goût, elle regardait l'eucharistie proposée sur Antenne 2, vous savez celle qui est sous la direction des frères dominicains de France. Elle avait vraiment beaucoup de goût et qui sait si ma vocation n'est pas née devant le petit écran. Cela nous faisait du bien d'entendre une prédication dans notre langue puisque celle de 8 heures était en flamand. Nous l'accompagnions de la sorte dans sa démarche de croyante et nous étions tous impressionné par la ferveur de sa foi durant cette heure-là.

Un témoignage qu'aucun de ses descendants n'a pu oublier jusqu'à ce jour. Pourquoi vous parlez de ma grand-mère me direz-vous ? Tout simplement parce que je vois un lien entre son exemple et les lectures de ce jour. Ce qui est frappant tant dans le récit de Samuel entendu dans la première lecture que dans celui de l'évangile de Jean, c'est que nous n'allons pas directement à Dieu. Nous allons à Dieu par d'autres personnes : le prophète Elie pour Samuel, Jean-Baptiste pour les premiers apôtres. C'est comme s'il y avait une triangulation entre Dieu et nous. Je trouve cela en effet plutôt rassurant.

Il est vrai que j'ai toujours eu énormément de difficultés, voire même d'incompréhension personnelle, avec cette idée de l'appel. Comme si Dieu nous appelait en ligne directe. Je n'y ai jamais cru. Cela m'a toujours paru quelque chose d'irréaliste. Si je parle en " je ", c'est parce que je ne veux pas heurter celles et ceux qui pensent avoir vécu ce type d'expérience spirituelle. C'est leur vérité et elle leur appartient. Pourtant l'appel de Dieu existe bien mais il est d'abord et avant tout un appel à vivre la vie. Il y a aussi les affirmations du type : " Dieu m'a dit ", " Jésus veut que je fasse ceci ". Je n'ai jamais compris comment il était possible d'affirmer cela mais peut-être que je manque un peu de foi. Dieu parle-t-il en ligne directe à certains et serait muet pour presque l'humanité entière ou encore, cette dernière serait-elle atteinte de surdité ? Je n'en sais rien mais en tout cas cela semble aller tout à fait à l'encontre des lectures de ce jour.

Si Dieu s'adresse à un membre de son peuple, il le fait par l'intermédiaire d'une tierce personne qui partage notre condition humaine et c'est sans doute cela une des merveilles du dessein divin. Dieu me parle, aujourd'hui encore, mais par un des miens. Il n'utilise pas des moyens magiques, exceptionnels, surnaturels. Non, il me demande tout simplement de prendre le temps de le trouver, le rencontrer dans les paroles de quelqu'un que je croise. Dieu nous parle par l'intermédiaire que chacune et chacun d'entre nous. De la sorte, nous devenons, ici sur cette terre non seulement images de Dieu mais également paroles de Dieu. Dieu a donc vraiment besoin de nous. Il y a comme une responsabilité à laquelle nous sommes appelés. Nous sommes chacune et chacun à notre manière des témoins de la présence divine sur cette terre. Nous pourrions peut-être même aller jusqu'à affirmer que la relation entre Dieu et tout individu se vit de la manière suivante. Nous pouvons nous adresser directement à lui dans l'intime de notre c½ur, dans le silence de notre être. Nous lui parlons comme à un ami avec les mots de la tendresse et de la confiance. Et Dieu, il nous répond. Il nous répond toujours.

A nous de découvrir de quelle manière. Dieu s'adresse à nous par les mots, les gestes de l'un d'entre nous. Je vais donc à Dieu par l'autre, c'est toute l'importance de la transmission de la foi. Lorsque je l'ai rencontré personnellement, je m'adresse à lui directement et Lui, Dieu, il vient à moi par un de mes contemporains. La boucle est ainsi bouclée. La relation est ainsi triangulée mais Dieu n'est-il pas Trinité ? Et nous, ne sommes-nous pas appelés à partager sa divinité ?

Amen.