Ce matin (soir) au début de cette homélie, avec vous, j'ai envie de jouer à ce jeu télévisé qui a eu un grand succès durant de nombreuses années, mais comme je ne regarde jamais la télévision, je ne sais pas s'il est encore au programme. Il s'agit des chiffres et des lettres. Ce jeu nous permettra de mieux entrer dans la dynamique de l'évangile de ce jour. Voici, pour les chiffres, 10, 365, 245, 9 et 2 et en ce qui concerne les lettres, veuillez trouver l'anagramme de Marie. Donnons d'abord sens à tous ces chiffres. 10 pour les dix commandements évidemment. 365, non pas pour les jours d'une année civile mais pour les 365 interdits recensés dans l'Ancien Testament. 245, toujours dans l'Ancien Testament, représente les 245 prescriptions auxquelles il y a lieu d'obéir. 9 pour les béatitudes qui nous font découvrir que dans le Christ nous quittons le champ de la loi pour entrer dans celui du bonheur et enfin, le chiffre deux pour les deux commandements d'amour de Jésus. Il y a donc dans l'Ancien Testament 620 lois et interdits et seulement deux dans le Nouveau. Mais ces deux-là accomplissent les 620 anciens. Quant aux lettres, Marie est entre autre l'anagramme d'aimer, à l'image des lois du Christ.
Toute la loi et les prophètes se résument ainsi en deux commandements. Et il est important de souligner que les prophètes ont passé beaucoup de leur temps à dénoncer les excès du cultualisme et les abus de pouvoir de certaines lois. Par ces deux commandements nous entrons donc dans une nouvelle ère, celle de l'amour de Dieu et de son prochain. Comme le disait une des jeunes en préparant cette célébration : " penser à Dieu, c'est pas purée !". Nous pourrions effectivement estimé qu'aimer Dieu est quelque chose de difficile car nous ne vivons pas avec lui comme nous vivons avec nos amis, nos proches. Il n'est pas évident de le vivre dans la vie de tous les jours. Il est vrai qu'il est constamment présent même si nous n'y pensons pas.
Toutefois, la loi de Jésus est claire : tu aimeras le Seigneur ton Dieu. Aimer n'est simplement un sentiment qui nous traverse. L'amour est une route sur laquelle nous marchons. Il est un faire, une construction qui dépend de nous pour qu'il y ait un avenir possible. Un peu comme si l'amour ne se suffisait pas à lui-même. Il n'est pas un sommet mais plutôt départ de la vallée suivi d'escapades sans fin. Aimer Dieu, c'est cela : avoir foi en l'Amour tout-puissant, au-delà de l'amour. Aimer Dieu mais comment aimer Dieu ? Peut-être en nous attardant quelques instants sur l'évangile du jour et surtout en soulignant le lien existant entre ces deux lois d'aimer Dieu et d'aimer son prochain. Il est vrai que le prochain est souvent plus proche de nous que Dieu lui-même. C'est ce que nous pourrions penser au premier abord.
Or Jésus est à nouveau très précis quant à ce second commandement. Il est second dans son énoncé mais pas dans son contenu puisque le Christ affirme : " et voici le second, qui lui est semblable ". " Semblable ", cela ne veut pas dire identique car l'être humain n'est pas encore Dieu. Non, " semblable " doit se comprendre autrement, il s'agit de reconnaître qu'il y a interpénétration des deux commandements, ils ne peuvent pas être compris de manière dissociée comme étant deux entités indépendantes. Le commandement de l'amour du prochain est semblable au commandement de l'amour de Dieu, c'est-à-dire que c'est dans l'amour de l'autre que je peux pleinement vivre de l'amour du Tout-Autre. Dieu me demande de l'aimer mais pas seulement dans une relation privilégiée entre Lui et moi, mais aussi d'apprendre à le découvrir, à le reconnaître et puis à l'aimer dans tous ceux et celles qui croisent ma route.
C'est en ce sens que l'amour n'est jamais atteint et toujours à construire. Si c'est vrai, par le Christ, nous découvrons qu'il est tout à fait possible d'aimer Dieu, que c'est quelque chose à portée de mains. Aimer Dieu, ce n'est pas tourner sa tête vers le Ciel et s'y engouffrer. Non aimer Dieu, c'est le chercher et le trouver en l'autre. Si Dieu vit en moi, il vit alors en chacune et chacun de nous. Dieu se laisse ainsi découvrir dans toute les relations de confiance, qu'elles soient d'amour ou d'amitié. Il est au c½ur de cette rencontre. De la sorte tout temps donné à l'autre n'est plus quelque chose d'humain mais bien de divin. Ne cherchons plus à aimer Dieu dans un ailleurs, ce n'est pas là qu'il réside. Aimons Dieu là où il est, en notre prochain. C'est-à-dire en vous, en moi.
Amen.