La très longue montée de Jésus vers Jérusalem ( commencée en Luc 9, 51) a abouti : suivi de ses disciples, il fait une entrée triomphale dans Jérusalem, acclamé par la foule qui, accueillant un descendant de la famille royale de David, est persuadée que Jésus est le Messie et qu'il va déclencher l'insurrection générale contre les Romains. Mais très bizarrement, au lieu de foncer vers le palais de Pilate, Jésus entre dans le temple et se met à en chasser les vendeurs : " La maison de prière a été transformée en caverne de bandits"(19,46)- ce qui provoque la furie des Grands Prêtres bien décidés désormais à le supprimer.
Loin de fuir la menace qui pèse sur lui, Jésus chaque jour s'installe sur l'esplanade du temple et y enseigne. Saint Luc note que "tout le peuple, suspendu à ses lèvres, l'écoutait "( 19, 48). Mais à trois reprises, ses ennemis tentent de le déstabiliser.
Ces trois débats sont importants car ils font connaître quelles sont les grandes certitudes qui habitent Jésus à la veille de son exécution.
D'abord arrivent les grands prêtres et les scribes qui demandent à Jésus sur quelle autorité il s'appuie pour parler et agir comme il le fait. Jésus les remballe car ils ne veulent pas se prononcer sur la valeur du baptême de Jean-Baptiste. Par la parabole des vignerons, il montre qu'il a percé leur dessein : le tuer ; mais il les avertit qu'ils vont déchoir de leur rôle ( 20, 1-19)
Ensuite les mêmes lui envoient des indicateurs qui, après une entrée en matière flatteuse, le questionnent au sujet d'un problème grave : " Faut-il ou non payer l'impôt à César ?". La réponse de Jésus est célèbre : il distingue nettement les domaines : " Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu"?"(20, 20-26)
Survient la 3ème polémique, sujet de l'évangile du jour :
Alors s'approchent quelques Sadducéens, gens qui contestent qu'il y ait la résurrection.
En effet, le sort des défunts était demeuré très obscur dans la foi d'Israël pendant des siècles. C'est au milieu du 2ème siècle avant Jésus, lors d'une guerre qui avait causé beaucoup de victimes, que s'était dressée l'espérance. Si Dieu est juste, il ne peut permettre que ses fidèles et leurs ennemis aient le même sort : donc on pouvait croire que les morts pour la foi ressuscitent. LIRE la 1ère lecture avec la magnifique confession de foi des jeunes Juifs acceptant le martyr parce que persuadés que Dieu les fera vivre.
Mais le débat n'était pas clos : les grands prêtres avec le parti des Sadducéens refusaient cette croyance qui ne se trouvait pas dans la Torah, les cinq premiers livres de la Bible qui, pour eux, contenaient tout l'essentiel à croire. En s'appuyant sur une antique coutume écrite dans la Loi de Moïse ( Quand un homme meurt sans enfant, son frère doit épouser la veuve pour lui donner une descendance - Loi dite du lévirat : Deut 25, 5), ces hommes proposent à Jésus une histoire folle pour tourner l'idée de résurrection en ridicule :
Il y avait 7 frères. Le 1er prend femme et meurt sans enfant. Le 2ème épouse la veuve et lui aussi meurt sans enfant. Ainsi des 7. D'où la question finale : "Eh bien, cette femme, à la résurrection, duquel d'entre eux sera-t-elle la femme ^ puisque les 7 l'ont eue pour femme ?".
La réponse de Jésus comporte deux parties :
1. PAS DE MARIAGE DANS LE MONDE A VENIR
Jésus leur dit : " Les enfants de ce monde se marient. Mais ceux qui auront été jugés dignes d'avoir part au monde à venir et à la résurrection d'entre les morts ne se marient pas car ils ne peuvent plus mourir :
ils sont semblables aux anges, ils sont fils de Dieu".
C'est une erreur grossière d'imaginer l'autre monde sur le modèle du nôtre. La sexualité a pour but de prolonger la vie sur terre : tout couple mortel se donne une descendance. Mais dans "le monde-à-venir" (expression juive), chaque personne est vivante en soi, elle n'a plus besoin de trouver un partenaire pour se survivre dans l'enfant. Il n'y a plus de temps, plus de mort. Rien que l'amour éternel.
2 . CERTITUDE DE LA RÉSURRECTION
Jésus poursuit : "Quant à dire que les morts doivent ressusciter, Moïse lui-même le fait comprendre dans le récit du Buisson ardent quand il appelle le Seigneur "le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac, le Dieu de Jacob". Il n'est pas le Dieu des morts mais des vivants ; tous vivent en effet pour lui" Contre les sadducéens, Jésus prend le parti des pharisiens et il affirme nettement la foi en la résurrection. L'argument, dit-il, peut même en être découvert dans la Torah, base unique de la foi sadducéenne : dans la scène du Buisson ardent, lorsque YHWH s'est révélé à Moïse dans le désert du Sinaï, il s'est présenté comme le Dieu personnel des trois Patriarches. Si Dieu conclut une Alliance avec eux, il ne peut les abandonner à la mort puisqu'il est juste !
Sinon la mort serait plus puissante que Dieu. Et Dieu ne serait pas Dieu. Dieu est un Vivant, il donne sa Vie, la Vie éternelle aux croyants.
Il y avait là dans l'auditoire quelques scribes du parti des pharisiens et évidemment, eux, ils applaudissent Jésus :
Quelques scribes prenant la parole dirent :" Maître, tu as bien parlé".
Et on n'osait plus l'interroger sur rien.
CONCLUSION :
Ces trois débats soulignent donc les certitudes de Jésus, ce qui l'anime alors même qu'il sait qu'il va mourir. Ces assurances doivent être les nôtres si nous voulons être ses témoins même au prix de notre vie.
1) Il sait qu'il est "le fils bien-aimé du Père" (20, 13) et pas seulement un prophète ; il a autorité pour enseigner et accomplir son dessein ; certes ses ennemis vont le tuer mais du coup ils seront dépossédés de l'héritage, lequel passera dans toutes les nations. Jésus se voit comme la pierre d'angle sur laquelle s'édifiera sa nouvelle communauté ouverte à toutes les nations (20, 17)
2) Jésus ne vient pas réaliser une révolution politique, fonder une nation parmi les autres : que César continue à exercer son pouvoir mais sans jamais bafouer les droits de Dieu.
3) Et enfin si Jésus prévoit sa fin prochaine (ses ennemis se dévoilent), il est absolument sûr que la mort n'est pas anéantissement. Il ressuscitera et ainsi il permet à ses disciples d'accepter, eux aussi, de mourir pour lui afin de retrouver, comme Lui et avec Lui, une Vie nouvelle, éternelle, qui dépasse tout imagination.