3e dimanche de Carême, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : A
Année: 2007-2008

Troisième dimanche de Carême A : le 24 février 2008

Après un dîner bien arrosé, Pierre Dac et Francis Blanche sont montés sur les planches et ont improvisé un sketch qui restera gravé dans la mémoire de tous ceux et celles qui l'ont entendu. Il s'agissait du Sar-Rabin-Dranat-Duval. A un moment donné, Pierre Dac demande à Francis Blanche jouant le Sar-Rabin-Dranat-Duval, c'est-à-dire un homme ayant des voyances et pouvant dire des choses que personne d'autre ne pouvait deviner, s'il était capable de donner le numéro de la carte d'identité d'un spectateur se trouvant dans le public. Le Sar-Rabin-Dranat-Duval répond qu'il peut le dire. A cela, Pierre Dac demande une fois encore : « vous pouvez le dire ? ». Oui, répond le voyant. Pierre Dac invite la foule à applaudir le Sar-Rabin-Dranat-Duval de sa performance alors qu'il a juste dit qu'il pouvait le dire mais sans jamais dévoiler ce fameux numéro de carte d'identité. Il en aurait bien été incapable d'ailleurs. Il a suffit à Francis Blanche de prétendre qu'il pouvait le dire pour que la salle applaudisse à tout rompre.

Tout au contraire, dans l'évangile de ce jour, sans que rien ne lui soit demandé, Jésus à sa manière dévoile la vie privée de la Samaritaine. Ce n'est pas sans incidence car comme le souligne l'évangéliste : « beaucoup de Samaritains de cette ville crurent en Jésus, à cause des paroles de la femme qui avait rendu ce témoignage : 'Il m'a dit tout ce que j'ai fait' ». Le Christ a ainsi pu voir en elle. Non pas pour la juger et encore moins pour la condamner mais pour mieux partir à sa rencontre. En agissant ainsi, il lui permet d'être pleinement elle-même. Elle n'a pas de honte à avoir, elle n'a pas à se cacher, elle n'a pas à se soucier de dévoiler quelque chose plus tard. Dieu le Fils sait et il s'empresse de le faire savoir à son interlocutrice. Grâce à ces quelques mots, il permet à cette femme d'être elle-même en toute vérité. Cette façon de faire de Jésus rejoint cette phrase trouvée dans la première lettre de Jean où il est dit que « Dieu est plus grand que ton c½ur et il connaît toute chose ». Par cette situation, le Christ veut nous montrer une fois encore qu'il nous accueille tel que nous sommes. Il nous fait prendre conscience qu'une véritable relation n'est possible que dans la lumière de la vérité. Nos parcours de vie ont peut-être été semés d'embûches, de zones d'errance voire parfois de transgression. C'est possible. Et pourtant tous ces éléments disent quelque chose de la richesse de qui nous sommes aujourd'hui. Nous en sommes pétris et il nous est impossible d'agir comme nous le faisons avec notre ordinateur. C'est vrai lorsque je veux me débarrasser d'un document, il suffit que je le dépose dans une poubelle virtuelle que je m'empresse de vider. Lorsque celle-ci a été correctement vidée, il m'est impossible de revenir en arrière. Le document a été tout simplement effacé. Il n'en va pas de même dans nos vies. Les événements heureux et plus difficiles ne s'effacent jamais mais s'inscrivent en nous pour l'éternité puisqu'ils nous ont façonné au fil des années écoulées. Et Dieu nous prend là, à ce moment très précis, à la margelle de nos vies. Notre c½ur est un peu comme un puits. Nous aimons venir nous y ressourcer. L'amour est cette eau vive qui le remplit. Souvent, celles et ceux que nous aimons et qui nous aiment viennent le remplir de leurs sentiments, de leur tendresse, de leurs mots empreints d'empathie et d'attention. Ce puits est là en nous. Il suffit d'y retourner lorsque le besoin se fait sentir. Rien ne peut nous l'enlever ni la vieillesse, ni la maladie, ni les erreurs commises. Il est ce lieu où naît une source jaillissante. Et Dieu nous y rejoint. C'est comme s'il aimait venir s'asseoir au bord de notre propre puits et s'y reposer pour le simple plaisir d'être avec nous. Il ne craint pas quelques gouttes d'eau plus troubles. Il les connaît et peut-être même mieux que nous. Il est là à nos côtés et il attend que nous donnions un peu de nous-mêmes. La foi est alors une chance inouïe de pouvoir nous dire qu'il nous est possible de nous laisser aller, d'être authentiquement qui nous sommes parce que nous nous savons aimés de Dieu. Non seulement, il nous aime mais il vient en nous pour s'abreuver. Il a besoin de chacune et chacun de nous pour qu'il puisse continuer son ½uvre d'humanité. Donnons-lui un peu de nous et en contrepartie acceptons de recevoir ce qu'il nous donne. Par Lui, avec Lui et en Lui, nous n'aurons plus jamais soif. Dieu vient aujourd'hui encore s'abreuver à l'amour de ses créatures. Puissions-nous à notre tour venir boire en nous à cette source jaillissante pour la vie éternelle. Nous serons à jamais désaltérés et remplis d'espérance. Dieu se donne à nous de cette manière ô combien merveilleuse. Il est au plus profond de notre puits. Empressons-nous de l'y rejoindre.
Amen.