3e dimanche de Pâques, année C

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : C
Année: 2000-2001

La semaine dernière je me trouvais pour quelques jours en Italie. Non pas pour un séminaire, un colloque ou une retraite, mais tout simplement pour un petit temps de vacances que j'estimais bien méritées. Durant ce séjour, je me suis arrêté à Padoue où j'ai vécu une expérience religieuse intéressante. N'ayez aucune crainte, je ne vous montrerai ni photos, ni dias, ni vidéo. Ce n'est pas encore l'enfer sur terre. Je vous épargne ce genre de supplice. A Padoue, se trouve le tombeau de Saint Antoine, celui qui est invoqué lorsque nous perdons quelque chose. Les fidèles se pressent autour de son tombeau, le touchent et prient. Je ne permettrais jamais de porter un jugement sur cette piété populaire. A quelques mètres du corps se trouve un reliquaire où les pélerins peuvent apprécier la machoire inférieure, la langue et l'appareil oratoire baignant dans un liquide. Cet endroit de la basilique est d'ailleurs, à ma grande surprise, tout autant visité. Dehors, les échoppes sont nombreuses à proposer toute une série d'articles religieux et les cars s'arrêtent par dizaines à cet endroit. Ce qui est par contre tout à fait étonnant, c'est qu'à plus ou moins 750 mètres de saint Antoine se trouve la basilique sainte Justine. Cet édifice est nettement moins connu et de nombreux guides le passent sous silence. Ni touristes, ni pélerins ne s'y arrêtent. Il est vrai que l'église n'est pas très jolie et pourtant, pourtant c'est là que repose le corps de l'évangéliste Luc. Son tombeau se trouve dans un endroit peu chaleureux avec deux plantes vertes comme unique décoration. Vous imaginez ma surprise face à un tel contraste. Tant de dévotion pour un saint et aucune pour un évangéliste. La foi et notre manière de la vivre me surprendra toujours un peu.

Cette foi, il est évident que chacune et chacun d'entre nous, nous la vivons avec ce que nous sommes, façonnés par nos expériences de vie, nos histoires personnelles, nos états d'âme. Et voilà que ce matin (soir), le Christ nous pose cette question : « m'aimes-tu ? ». Difficile d'aimer quelqu'un que nous n'avons jamais vu pourraient dire certains. Et pourtant nous sommes là aujourd'hui, venu lui rendre une petite visite. Notre façon de l'aimer, de répondre positivement à son invitation est éminemment personnelle. Nous n'aurions pas assez de la mémoire du plus puissant ordinateur pour mémoriser tous les chemins de rencontre avec Dieu qu'il soit Père, Fils ou Esprit. Mais le Christ ne se contente pas d'une réponse positive : « oui, Seigneur, tu sais que je t'aime ». Il attend de nous que nous partions à sa rencontre. Comment ? Tout simplement, comme le récit évangélique le souligne. Dieu se rencontre au c½ur de nos vies, là où nous sommes. Je ne crois pas que Dieu se rencontre uniquement dans nos églises, ou encore dans des lieux précis, propices à la méditation, au silence intérieur. Dieu se laisse découvrir là où nous vivons. Il est présent dans notre vie quotidienne. C'est peut-être un peu pour cela que le sondage réalisé dans nos paroisses nous a fait découvrir que pour certains, l'eucharistie est le seul lieu où je rencontre Dieu. Mais alors, si je rate, un dimanche, cela signifie-t-il que Dieu devra attendre la semaine suivante pour que je prenne un peu de temps avec lui. La question a le mérite d'être posée en tout cas.

Pourtant, Jésus Ressuscité n'attend pas que ses disciples soient à nouveau entre eux, dans un endroit calme pour se révéler à eux. Il offre sa présence alors qu'ils sont en plein travail. Un peu comme s'il nous envoyait un petit clin d'½il pour nous dire, partout où vous êtes, quoique vous fassiez, je suis avec vous. Non pas comme un ½il qui contrôle, vérifie mais comme une présence toute attendrissante dont le regard d'amour se donne à vivre en plénitude chaque fois que nous le souhaitons, chaque fois que nous nous tournons vers lui. Dieu s'offre à nous dans notre quotidien. Vivre sa foi, ne se réduit pas à une pratique. Vivre sa foi, c'est respirer Dieu et prendre un peu de temps hors du temps chaque fois que l'occasion ou l'envie est là. C'est la raison pour laquelle j'aime cette phrase du frère Louis Dingemans : « ma voiture est ma chapelle ». Cette affirmation, je l'ai faite mienne et il m'est déjà souvent arrivé de rater des sorties d'autoroute parce que j'était bien avec Dieu tout en conduisant. En voiture, en promenade, dans la nature ou encore en travaillant, abandonnons-nous et laissons à Dieu de l'espace dans notre quotidien. Nos gestes, nos regards et nos vies changeront de ton puisqu'ils seront inscrits dans l'amplitude du divin. « Et toi, m'aimes-tu ? », demande Dieu. Je ne puis répondre à votre place. A nous de le faire, chacun séparément et de se laisser envahir de sa présence dans tous ces petits moments qui font la richesse de nos vies.

Amen.