3e dimanche ordinaire, année B

Auteur: Sélis Claude
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2011-2012

Parmi les lectures de ce dimanche, ce sont les paroles de Paul qui sont les plus difficiles à entendre. Et pourtant, elles contiennent une disposition d'esprit fondamentale du christianisme : « le temps est limité ; le temps se fait court ». Sans doute, à l'époque où Paul écrivait cette lettre (vers 57), Paul pensait-il que le Christ glorieux allait revenir avant la fin de sa génération pour inaugurer, physiquement, le Royaume de Dieu. D'où ce sentiment d'urgence, de temps limité. Plus tard, la chrétienté a mieux compris que le Royaume de Dieu avait été inauguré mais que, comme pour la Création, l'homme se voyait confier sa réalisation concrète dans l'histoire et sur toute la surface de la terre. Mais cela ne devait rien changer au sentiment d'urgence. Même si la fin du monde n'est pas pour demain, le chrétien est appelé à vivre chaque jour comme si le lendemain pouvait être le dernier jour. Et ce, non pas pour le plaisir de vivre dans une situation d'angoisse qui serait morbide et paralysante mais pour vivre dans une situation de responsabilité : de tout le bien que nous avons à faire, nous devons faire le maximum aujourd'hui. Entre toutes les choses que nous avons à faire, nous devons, devant cette échéance que nous nous donnons chaque jour, faire le tri entre l'essentiel et l'accessoire pour nous consacrer principalement à l'essentiel, avec ce que cela comporte d'inversion des valeurs par rapport aux valeurs de « ce monde qui passe ». Si tous les chrétiens agissaient avec ces réflexes-là, il est certain que le Royaume de Dieu se concrétiserait de manière bien plus manifeste et bien plus rapide.
Cette Bonne Nouvelle de salut et de conversion qu'elle implique doit être adressée à tous. C'est une affaire beaucoup trop grave pour le salut de l'humanité que pour être réservée à quelques personnes. Le judaïsme lui-même l'avait bien compris, quand il met en scène le prophète Jonas. Celui-ci voulait bien prêcher le salut, mais uniquement à Israël. Dieu l'envoie à Ninive (à 1.000 km à l'Est, chez des païens invétérés et ennemis ancestraux de surcroît). Jonas essaie de se dérober à sa mission en s'embarquant pour Tarsis (à 1.000 km à l'Ouest). Dieu le ramène à Ninive. Jonas exécute sa mission mais sans y croire et, à sa grande surprise, sa parole est entendue, parce que ce peuple attendait le salut et cherchait une voie pour s'engager dans une démarche de conversion. Jonas, au lieu de se réjouir du succès de sa mission, en conçut une grande colère...car il voulait, lui, réserver le salut à son peuple. Nous devons nous poser la question à nous-mêmes : sommes-nous des Jonas ? nous réservant la Bonne Nouvelle pour nous-mêmes, pour notre communauté ? Peut-être y a-t-il près de chez nous (ou loin de chez nous, ne fut ce que psychologiquement ou socialement) des gens qui attendent une parole, un geste de salut ? Ce n'est pas à nous à en préjuger. Nous devons être des disciples du Christ là où nous sommes. Et c'est urgent.
Le Christ lui-même se fait prophète, porte-parole de son Père, et appelle des disciples. Car la tâche est énorme, dans le temps et sur toute la surface de la terre. Nous sommes, nous aussi, appelés à remplir cette mission selon nos charismes et en fonction de nos contextes historiques, géographiques et culturels. Ce qui est vrai des personnes l'est aussi des communautés. Qu'il y ait eu des Eglises diverses (ceci pour faire le lien avec la Semaine de l'Unité), ayant chacune leurs particularités, aurait pu être estimé bien compréhensible et, au fond, très naturel. Le grand péché de la chrétienté est d'en avoir fait un jeu de discorde où, bien souvent, des considérations humaines, de « ce monde qui passe », l'ont emporté sur l'urgence du Salut et du Salut pour tous.