4e dimanche de Pâques, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Au temps de la modernité - et même de la postmodernité, comme disent ceux qui parlent bien - est-il encore acceptable de chanter dans nos églises "Le Seigneur est mon berger" ? Dans un monde scientifique, au c½ur d'une civilisation urbaine, le langage biblique sur le pasteur et les brebis n'est-il pas complètement ringard ? Alors que nous nous voulons adultes, autonomes, responsables, est-il tolérable de nous entendre appeler "brebis, moutons" ?

Mais est-il si sûr que nous sommes devenus adultes, que nous ne sommes plus des "moutons de panurge" ? Voyez comment un slogan publicitaire peut susciter un incroyable engouement parmi la foule, comment les jeunes, tout en clamant leur indépendance, sont avides de porter les mêmes "marques" ! Avec quelle facilité on nous convainc qu'"il faut" avoir assisté à tel spectacle, avoir vu telle émission ou porter tel vêtement à la mode. Que se dresse une idole : les adorateurs s'agglutinent, fascinés. Qu'un tribun éructe des discours enflammés, que roulent les tambours, que claquent les refrains nationalistes : les peuples foncent au massacre.

Jésus commence par mettre en garde ses disciples contre ces manipulateurs, ces leaders : ce sont, dit-il, "des voleurs et des brigands". Derrière leurs belles apparences et leurs déclarations fracassantes se cachent leurs ambitions, leur désir d'enrichissement et de gloriole. Sans vergogne, ils recourent à la violence, ils lancent leurs adeptes à la tuerie.

COMMENT JESUS EST BERGER DES HOMMES

Tout à l'opposé de ces méthodes diaboliques, Jésus expose son propre comportement.

"CELUI QUI ENTRE PAR LA PORTE DE LA BERGERIE,

IL EST LE PASTEUR DES BREBIS. LE PORTIER LUI OUVRE,

ET LES BREBIS ÉCOUTENT SA VOIX"

Jésus ne vient pas vers nous par des voies détournées, des chemins de ruse et de mensonge. Il se présente à l'humanité par la porte de l'humanité, sans recourir à des procédés magiques, à des bizarreries ésotériques. Chez lui tout est clair, simple, évident.

" LES BREBIS ECOUTENT SA VOIX"

Jésus parle - c'est-à-dire il recourt au seul moyen qui respecte notre liberté. Il fait entendre son Evangile, à tous il adresse la Bonne Nouvelle. Il ne crie ni ne menace. Avec patience, il explique sans imposer de conditions préalables, il répète sans rejeter personne. Il ne s'étonne pas de ne pas faire l'unanimité mas il ne consent aucun rabais sur ses exigences dans le dessein de s'attirer davantage de disciples. Notre première et fondamentale attitude est donc d'écouter, de distinguer cette Voix unique de toutes les autres. Ah si les chrétiens n'avaient pas laissé recouvrir l'Evangile par les hurlements des dictateurs !?...

" IL LES APPELLE CHACUNE PAR SON NOM"

Il faut ne rien comprendre à l'Eglise pour la juger comme une caserne où tout le monde marche au même pas et obéit au moindre coup de sifflet des Autorités. L'Evangile est unique mais la Voix du Christ se module selon chaque personne. Elle ne crée pas des clones mais au contraire elle éveille chacun à sa propre vocation.

Il suffit de voir l'admirable et infinie diversité des vies de Saint(e)s : saint Paul voyage sans arrêt et sainte Thérèse de Lisieux s'enferme dans un couvent ; Damien part chez les lépreux du Pacifique et le curé d'Ars demeure avec les paysans de son village. Parents, ouvriers, chefs d'entreprise, éducateurs, commerçants, employés, ministres, écrivains, enfants... : chaque chrétien peut écouter le même Christ et le suivre sur sa propre voie, à son propre rythme, en utilisant ses talents personnels.

L'Evangile rend l'homme à lui-même, l'épanouit dans sa propre ligne.

" IL LES FAIT SORTIR "

Car la foi est une aventure, un exode, un mouvement perpétuel de libération. Le passé n'est plus un boulet que l'on tire, le péché cesse d'être une prison, la culpabilité détend ses griffes mortifères. Mais du coup, le disciple ne peut plus se fier à ses pratiques, se reposer sur ses lauriers, s'engluer dans une tranquillité routinière. La foi est renaissance, perte des préjugés, fin de la dictature de l'argent. Précisément elle n'a rien de "moutonnier" puisqu'il faut, avec l'Esprit, inventer sa vie.

" IL MARCHE A LEUR TETE "

A l'opposé des chefs qui ordonnent à leurs subordonnés de prendre tous les risques tandis qu'eux-mêmes restent planqués à l'arrière, Jésus a toujours marché devant ses disciples. Et lorsque les ennemis sont survenus, c'est lui qui s'est laissé arrêter tandis qu'il laissait s'enfuir ses compagnons. Seul il ira à la croix. Sans eux mais pour eux.

Si tu as peur, ne regarde pas en arrière pour voir si Jésus te suit : car il t'a toujours précédé.

DIMANCHE DES VOCATIONS DE PASTEURS

En ce dimanche, l'Eglise s'émerveille d'avoir la grâce de suivre un tel Berger ; elle prie pour le futur successeur de Pierre et pour obtenir de jeunes pasteurs qui accepteront la charge de se voir confier leurs frères dans la foi afin de les conduire vers la Demeure du Ciel.

Qu'ils imitent Celui à qui seul appartiennent les brebis, qu'ils emploient ses méthodes : faire retentir la Voix de l'Evangile, aider chacun à accomplir sa vocation personnelle, donner l'audace de quitter les ornières de la médiocrité et du découragement, s'exposer les premiers et aller de l'avant.

Alors se réalise le projet de ce Seigneur qui a pu affirmer :

" LE VOLEUR NE VIENT QUE POUR VOLER, EGORGER ET DETRUIRE.

MOI JE SUIS VENU POUR QUE LES HOMMES AIENT LA VIE,

POUR QU ' ILS L'AIENT EN ABONDANCE "