5e dimanche de Carême, année C

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : C
Année: 2006-2007

En ce carême, l'Eglise célèbre le 40ème anniversaire de la parution de l'encyclique du pape PAUL VI "?POPULORUM PROGRESSIO". Consacré au problème du développement des peuples, ce document eut un énorme retentissement au point d'être qualifié par le cardinal Poupard "d'un des plus grands textes de l'histoire de l'humanité".

"Aujourd'hui, écrivait Paul VI, le fait majeur dont chacun doit prendre conscience est que la question sociale est devenu mondiale".

De même qu'au 19ème siècle, la classe ouvrière fut longtemps écrasée par un "capitalisme sauvage"(Jean-Paul II), ainsi aujourd'hui des peuples, des multitudes innombrables souffrent d'un système mondial qui les enferme dans l'ignorance, la misère, la maladie tandis qu'une minorité du monde s'enrichit de plus en plus. Le pape rappelait l'enseignement de l'Eglise redit par le concile Vatican II : La propriété privée est légitime mais reste hypothéquée par le droit des pauvres car les biens de la création ont une destination universelle. Paul VI citait St Jean : " Si quelqu'un jouit des richesses du monde, voit son frère dans la nécessité et lui ferme ses entrailles, comment l'amour de Dieu demeurerait-il en lui ?"

Il rappelait les appels martelés par les Pères de l'Eglise - par exemple :

" Ce n'est pas de ton bien que tu fais largesse aux pauvres, tu lui rends ce qui lui appartient. Car ce qui est donné en commun pour l'usage de tout le monde, voilà ce que tu t'arroges. La terre est donnée à tout le monde et pas seulement aux riches " ( Saint AMBROISE)

En 1987, pour le 20ème anniversaire de "POPULORUM PROGRESSIO", JEAN-PAUL II publiait "SOUCI DE LA RÉALITÉ SOCIALE" où il répétait l'urgence pour les chrétiens de connaître les principes de base de leur foi et surtout de les mettre en pratique. Il le redira avec force, en 1991, dans une autre encyclique "LA 100ème ANNÉE" (centenaire de RERUM NOVARUM)

Puis, en 2001, Jean-Paul II s'écriait :

" Est-il possible que dans notre temps il y ait encore des personnes qui meurent de faim, qui restent condamnées à l'analphabétisme, qui manquent des soins médicaux les plus élémentaires, qui n'aient pas de maison où s'abriter ?...Les chrétiens qui regardent ce tableau doivent apprendre à faire un acte de foi dans le Christ et à déchiffrer l'appel qu'il lance à partir de ce monde de la pauvreté...Ce versant éthique et social constitue une dimension absolument nécessaire du témoignage chrétien : on doit repousser toute tentation d'une spiritualité intimiste et individualiste" ("ENTRÉE DANS LE NOUVEAU MILLÉNAIRE " § 50-51).

Enfin, en 2005, dans sa première Encyclique "DIEU EST AMOUR", BENOIT XVI écrit :

" Le devoir immédiat d'agir pour un ordre juste dans la société est le propre des fidèles laïcs...Amour de Dieu et amour du prochain sont inséparables, c'est un unique commandement" (§ 18)

L'EGLISE AU SERVICE DES PLUS DEMUNIS

Comme il en fut, hélas, au 19ème siècle, tous ces appels sont demeurés lettre morte chez beaucoup qui ne veulent pas entendre...Toutefois ils ont provoqué un grand engagement de beaucoup de chrétiens au c½ur des pays dits "en voie de développement". Trop de baptisés, si souvent portés à dénoncer les défauts de leur Eglise, ignorent le gigantesque travail qu'elle accomplit pour sauver les plus démunis de la planète, où qu'ils vivent et quelle que soit leur religion.

Le réseau des "CARITAS" ( Organismes catholiques implantés dans presque tous les pays du monde) effectue un incessant labeur de développement : au Congo, dans le Sahel, en Inde, à Haïti, religieuses et laïcs aident la population à creuser des puits, à bâtir écoles et dispensaires, à lutter contre les épidémies, à se prendre en charge. On connaît mère Térésa et S½ur Emmanuel mais des multitudes d'autres (notamment "nos" Filles de la Croix) se dévouent inlassablement dans l'ombre.

Ce travail (ignoré souvent par les médias) n'est évidemment possible que grâce au soutien financier indispensable des Eglises plus riches.

Combien de chrétiens n'ont pas encore compris leur devoir, cachant leur égoïsme derrière de fausses objections...et d'autre part s'étonnant du délabrement de nos communautés occidentales ! Mais comment pourrions-nous attirer, convertir, avoir des vocations lorsque nous continuons à mener grand train de vie...alors que nous savons le scandale intolérable : 900 millions d'êtres humains n'ont pas accès à l'eau potable !?...

Toutes nos difficultés actuelles n'ont qu'une cause : l'injustice acceptée !

UN PERE AVAIT DEUX FILS . . .

La très célèbre parabole de ce jour n'a pas besoin d'être racontée : qui ne connaît l'histoire du fils prodigue ? Ce jeune, comme les nôtres aujourd'hui, avait envie d'avoir plus, de profiter des plaisirs, de jouir de la vie. La Maison du Père ( l'Eglise)- avec ses dogmes incompréhensibles, ses rites ringards, ses vieux prêtres et ses pratiquants maussades- était une prison insupportable qu'il fallait quitter au plus tôt. Ainsi par millions, depuis 68, les jeunes se sont jetés dans la consommation effrénée : tant de gens célèbres les assuraient que c'est là qu'ils trouveraient leur épanouissement et leur bonheur.

Mais "dans le pays lointain" (loin de Dieu et sans foi), on finit par mourir d'ennui et de désespoir. Le prodigue n'a trouvé ni une épouse aimante ni un patron qui l'embauche et lui donne un salaire digne. Le monde merveilleux de la consommation offre des bagnoles de luxe (qui parfois deviennent des cercueils) et, au lieu de l'insipide Hostie, présente des drogues blanches qui tuent. Là on étrangle l'amour et on édifie une économie inhumaine qui méprise l'homme.

N'est-il pas l'heure de rentrer ? Le gaspilleur branché va-t-il enfin comprendre que ce monde de paillettes tourne à la jungle ? Osera-t-il faire marche arrière et revenir vers ce Dieu auquel il a tourné le dos, vers cette Eglise dont il ne connaissait qu'une caricature ? Peut-être faut-il avoir été au bout des jouissances pour que l'éc½urement vous pousse enfin à prendre le chemin de la vérité .

On connaît la suite : le prodigue qui s'attendait à recevoir une raclée voit tout à coup son père s'élancer et se jeter à son cou, lui offrir le pardon de ses fautes et organiser une grande fête pour célébrer l'événement. Au grand scandale du fils aîné qui détestait son frère et ne voulait plus le revoir.

Le projet de Dieu-Père est de réconcilier ses fils, d'accueillir sous son toit Européens et Africains, Américains et Asiatiques. De faire la fête de l'Eucharistie où l'on partage sans égoïsme et sans racisme.

Dimanche de la 1ère COLLECTE DU CAREME DE PARTAGE : allons-nous encore nous cacher derrière de bons prétextes ou saurons-nous, enfin, donner cette part à laquelle nos frères ont droit ?