Certaines personnes se posent encore la question de savoir quel est la maillon manquant entre le singe et l'être humain. La réponse de l'éthologiste autrichien Konrad Lorenz me plait beaucoup. Il affirme que le chaînon manquant, c'est vous, c'est moi. En effet, nous ne sommes pas encore des êtres pleinement réalisés, accomplis, voire humanisés. Nous n'avons pas encore atteint notre statut d'humain. Nous sommes toujours sur cette voie d'humanisation, de divinisation. Je crois que nous pouvons même affirmer que cette réponse vaut également pour la question suivante : mais où est Dieu en notre monde ? Dieu, il est en vous, en moi. Tout maillon manquant que nous soyons, cela n'empêche absolument pas Dieu de venir inhabiter en chacune et chacun de nous. Le Christ ne dit-il pas dans l'extrait d'évangile de ce jour : " si quelqu'un m'aime, il restera fidèle à ma parole ; mon Père l'aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui ".
Dieu le Père et Dieu le Fils vivent en nous. Comment en être certain ? N'est-ce pas une belle promesse mais qui ne peut se vérifier ? Je ne le pense pas. Dieu inhabite en ses créatures, si nous sommes fidèles à sa parole. Une parole qui s'est offerte à nous dans le commandement de l'amour. Père et Fils demeurent auprès de nous par l'Esprit qui nous a été donné. Il est notre défenseur. Depuis le retour du Fils auprès du Père, nous sommes entrés dans ce fameux temps de l'Esprit Saint. Un Esprit qui se fait connaître à nous en nous inspirant. Et c'est cette inspiration précise qui nous permet d'agir d'une certaine manière en notre monde. Il y va donc de la responsabilité de chaque être humain de permettre à Dieu d'agir dans le monde puisque ce dernier a besoin impérativement de ses créatures. C'est par elles qu'il agit. Nous sommes les mains de Dieu, les acteurs de Dieu sur cette terre. Son Esprit nous inspire. Certains diront que nos actes sont purement humains. Et c'est peut-être vrai. C'est la manière dont nous lisons notre vie qui nous permet de l'écrire avec l'encre divine.
Inspirés par l'esprit, nous sommes théographes de nos existences . Et cela se vite en toute liberté. En effet, Dieu nous laisse libres de choisir de répondre à ses diverses inspirations. Ces dernières ne sont pas des coups d'éclat, des bonnes actions quotidiennes bien charitables. La solidarité avec ses frères et s½urs en humanité n'est pas l'apanage de quelques professionnels médiatisés de la charité. Non. Etre inspirés par l'Esprit et donner une signification divine à nos actes humains, est une manière de vivre, une philosophie de vie à la suite du Christ.
Poser dans la vie de tous les jours, des petits gestes de tendresse, des actes banals d'amour, des attentions gratuites avec tous ceux et celles qui nous entourent et partagent nos différents lieux d'existence. Il n'est pas nécessaire qu'il y ait du mal, de la souffrance pour que le bien puisse exister. Le bien peut se vivre quotidiennement, il en va, et je me permets de le souligner une fois encore, de notre responsabilité. Et ce qui est surprenant c'est que l'inspiration de l'Esprit ne se découvre que dans ma propre réponse, c'est-à-dire dans tous les actes que je pose. Par l'Esprit, j'entre dans un nouvel état d'esprit : je choisis de m'humaniser, de me diviniser. Non, n'ayez pas de crainte, je n'ai pas la prétention d'être Dieu. Par contre, en posant librement tous ces gestes quotidiens à la suite de cette parole d'amour donnée, j'espère partager un jour la vie divine. Tel est l'objectif à atteindre. Il n'y aura plus de maillon manquant puisque ce jour-là l'être humain se sera pleinement humanisé. Tel est le défi auquel Dieu nous invite. Avec ce que nous sommes, avec tout ce que nous avons reçu et développé au cours de nos existences, nous sommes conviés à éveiller en nous tous nos potentiels d'amour. Nous en sommes capables. Il suffit d'humaniser notre humanité et par là la diviniser. L'inspiration divine conduit toujours à la solidarité, aux simples gestes qui apportent le plus d'amour. De la sorte, nous deviendrons humains à la mode de Dieu. Ou encore, pour reprendre les mots du poète Aragon : nous serons devenus des êtres humains " amoureux de vivre à en mourir ". S'il en est vraiment ainsi, n'est-elle pas belle la vie que Dieu nous propose ?
Amen.