7e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

Jésus prie pour nous


En ce temps entre Ascension et Pentecôte - que l'on peut appeler "la neuvaine au Saint-Esprit"-, il est bon de relire et méditer le récit de l'ultime soirée de Jésus avec ses disciples (Jean, chap. 13 à 17). Commencée par le geste sublime du lavement des pieds, elle s'est poursuivie par un long discours d'adieu de Jésus et elle s'achève par son admirable prière pour les siens (chapitre 17). L'Evangile de ce dimanche rapporte la section centrale de cette prière. Donc d'emblée leçon essentielle : l'enseignant chrétien doit d'abord se mettre au service de ses frères, ensuite il peut s'appliquer à les instruire mais sans jamais omettre, enfin, de prier à leur intention. Après avoir parlé de Dieu aux hommes, l'apôtre parle d'eux à Dieu.

UN PERE -- UNITE DES ENFANTS

A l'heure où Jésus passait de ce monde à son Père, les yeux levés au ciel, il priait ainsi : " Père Saint, garde mes disciples dans ton Nom que tu m'as donné - afin qu'ils soient UN comme nous....

PERE SAINT : l'invocation (unique dans la Bible) donne le leitmotiv du passage. "Saint" n'est pas une qualité de Dieu mais dit son être propre : au-delà de toute représentation, tout vocabulaire, toute image, Dieu est l'ineffable. Pourtant Jésus l'appelle PERE ( abba en araméen) et il a livré ce secret aux siens. Le Tout Autre est devenu aussi le plus proche : la foi au Christ autorise la relation la plus intime avec celui qui échappe à nos prises. Désormais les disciples vivent "dans le Nom" c.à.d. "en Dieu" - et il s'agit d'une réalité non d'une métaphore. Encore faut-il que la foi première tienne dans la durée et devienne fidélité : Jésus prie son Père de nous conserver dans ce bonheur d'être ses enfants.

La conséquence en sera que nous serons UN, nous communierons. Seule la foi vécue à ce niveau peut nous faire sortir de la jungle et nous unir.

Quand j'étais avec eux, moi, je les gardais dans ton Nom que tu m'as donné, j'ai veillé et aucun d'eux n'a péri sauf le fils de perdition de sorte que l'Ecriture a été accomplie.

En effet le récit évangélique montre qu'aucun disciple à la suite de Jésus n'a subi de dommage, de mauvais traitement. Et lorsque, dans la nuit, les gardes surviendront dans le jardin, Jésus se présentera seul en leur ordonnant de laisser partir ses amis (18, 8-9). Il avait déclaré qu'il était le Bon Pasteur et que personne n'avait pouvoir de lui arracher ses brebis (10, 21-22).

Cependant la foi n'est jamais un embrigadement forcé : si le Bon Berger ne cessera jamais de tenir à chacune de ses brebis, celles-ci peuvent le quitter, se détourner de lui !

Ainsi "du fils de perdition"- expression sémitique pour désigner l'homme qui va à sa perte. Il s'agit sans doute de Judas dont curieusement Jésus ne cite jamais le nom. Pourtant il a perçu sa traîtrise : " Je vous ai choisis, les Douze, et cependant l'un de vous est un diable" (6, 70). Après le lavement des pieds, il a annoncé que l'un du groupe n'était pas pur (11, 11) ; il a cité le psaume 41 ( " Celui qui mangeait avec moi a levé son talon contre moi" -- 13, 18) ; il l'a montré au disciple bien-aimé en lui offrant la bouchée ( 13, 26).

Redoutable liberté humaine : on peut suivre le Christ longtemps, être lavé par lui (baptême), recevoir son Pain de Vie (bouchée) et un jour lui tourner le dos et même vouloir sa mort ! Jean a laissé entendre le motif : " Chargé de la bourse, il dérobait ce qu'on y mettait" ( 12, 6). La cupidité tue la foi !

Ne voit-on pas aujourd'hui comment, exacerbée par les médias et la publicité, l'idolâtrie de l'argent a écarté des multitudes du Christ et comment une société qui perd celui-ci est "société de perdition" (crise, climat, destruction des ressources, épidémie de suicides...) ?...

LA FOI EST JOIE PLENIERE MAIS ATTAQUEE

Maintenant je viens à toi et je parle ainsi en ce monde pour qu'ils aient en eux ma joie en plénitude.

Les paroles de Jésus, toutes ces révélations qu'il leur fait en ces heures ultimes sont d'une telle vérité, elles recèlent un tel poids de lumière qu'elles ne peuvent que ravir ceux qui les accueillent. La Foi est lumière, Vérité - donc Joie plénière. Un chrétien morose, ronchon, grommeleur est quelqu'un qui a peut-être de la religion mais pas la vraie foi, celle qui est écoute jubilante de la Parole qui est Esprit et Vie "(6, 63)

Moi, je leur ai donné ta parole et le monde les a pris en haine parce qu'ils ne sont pas du monde comme moi je ne suis pas du monde. Je ne demande pas que tu les retires du monde mais que tu les gardes du Mauvais. Ils ne sont pas du monde comme moi je ne suis pas du monde.

Paradoxe : la Parole de Dieu remplit les croyants de joie mais, du coup, ils deviennent l'objet d'une hostilité pugnace et incessante.

Evidemment il ne s'agit pas ici du monde que "Dieu aime tellement qu'il lui a envoyé son Fils non pour le condamner mais pour le sauver"( 3, 16), mais de l'humanité braquée dans son refus, enfermée dans sa suffisance. "Le Verbe est venu dans le monde et le monde ne l'a pas connu" (1, 10).

Parce qu'il vivait et disait la Vérité, Jésus a été critiqué, moqué, haï, exécuté. Dès lors ses disciples n'ont pas d'autre destin à attendre : Jésus vient de les prévenir longuement : "S'ils m'ont persécuté, ils vous persécuteront vous aussi" (15, 18 - 16, 4)

Mais ils ne doivent pas fuir, leur tâche réside en plein monde ; il faut allumer la lueur de la foi au c½ur des ténèbres, vivre la communion dans une société écartelée, oser la joie sous les attaques les plus perfides. Qu'ils prient le NOTRE PERE : " ...mais délivre-nous du Malin".

Le Père a gardé Damien parmi les lépreux et Maximilien Kolbe dans l'enfer d'Auschwitz.

Consacre-les par la vérité : ta Parole est vérité. De même que tu m'as envoyé dans le monde, moi, je les envoie dans le monde et je me consacre pour eux afin qu'ils soient eux aussi consacrés par la vérité.

L'homme ne peut se faire saint : seul Dieu peut lui communiquer sa sainteté et il le fait par sa Parole qui s'est faite chair, Jésus, et qui va "se consacrer" en se donnant sur la croix "POUR EUX", pour les siens.

Ses bourreaux vont fait taire Jésus mais ils lui perceront le c½ur d'où coule la Vie de l'Esprit qui sanctifie les croyants. La Vérité de ses paroles est devenue la Vérité de son amour manifesté sur la croix par ses bras ouverts pour accueillir tous les pécheurs repentants. Par lui ils sont "saints".

A présent, nous, disciples, purifiés par le sang de l'Agneau et animés par son Esprit, nous ne sommes plus du monde. Nous y sommes envoyés, nous l'aimons comme Dieu : c'est pourquoi nous contestons son mensonge. Notre maison, notre entreprise, notre pays sont lieux de mission.

Nous savons qu'il nous en coûtera cher car nous n'avons le droit ni de déserter ni d'édulcorer le message : notre mission est capitale, essentielle, vitale.

C'est pourquoi, si nous ne l'avons encore commencé, nous plongeons d'urgence dans la prière du cénacle. D'un seul c½ur, en union avec toute l'Eglise, avec Pierre et Marie, nous supplions afin de recevoir l'Esprit, seule force capable d'exorciser nos peurs et de nous faire proclamer le message de libération.

R. Devillers , dominicain Tél. et Fax : 04 / 223 51 73 - Courriel : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

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