8e dimanche ordinaire, année B

Auteur: Materne Pierre-Yves
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2002-2003

Quand je vivais chez mes parents, j'étais obligé d'aller à la messe chaque dimanche. Cela m'ennuyait beaucoup et je passais le temps à compter les pavés de l'église ou bien à rêver. D'ailleurs, je ne voyais pas où le prêtre voulait en venir, manifestement il ne parlait pas la même langue que moi. C'est en partie à cause de cela que j'ai voulu être dominicain, pour dire Dieu dans les mots d'aujourd'hui.

Lorsque mes camarades découvraient que j'allais à la messe, ils trouvaient cela ringard. Le dimanche, il y a des choses plus palpitantes à faire (du sport ou de la musique, par exemple). En plus, ils m'ont fait prendre conscience que j'allais à la messe par habitude et par obligation. Des amis d'école m'ont provoqué à faire un pas de plus : chercher quel pouvait être le sens de cette vieille pratique religieuse. Je peux dire qu'ils ont réussi car aujourd'hui je ne viens pas ici par obligation mais par choix. Ainsi, je donne un sens nouveau à une pratique ancienne.

Jésus nous invite tous à aller dans cette direction. Quand les pharisiens l'attaquent et lui reprochent le fait que ses disciples ne suivent l'obligation du jeûne régulier, Jésus répond en insistant sur la nouveauté de la situation. Il n'est plus question d'habitudes mais de liberté. Les compagnons de Jésus sont libres de vivre leur foi à la manière de celui-ci. Les règles anciennes sont à réévaluer afin d'être ajustées au contexte de la vie. Il y aura du sens à jeûner lorsque les amis du Christ éprouveront leur besoin de conversion, notamment suite au départ de leur Maître, " le jour où l'Epoux leur sera enlevé ".

C'est pourquoi il vaut mieux ne pas mettre du vin nouveau dans de vieilles outres. Les outres sont des grandes gourdes faites en peau d'animal. Une fois remplie, l'outre subit la pression du vin qui fermente. Une vieille outre ne résiste pas à cette pression. Elle éclate. Jésus, qui aimait le vin (ses adversaires le traitaient d'ivrogne), utilise cette comparaison pour dire qu'une réalité nouvelle, un message nouveau exige une nouvelle manière d'être et de faire. On ne peut pas accueillir un nouveau message et rester collés aux vieilles habitudes. Donc, nos pratiques n'ont de sens que si elles sont mises au service d'une nouvelle vision des choses. Elles viennent soutenir notre croissance humaine et spirituelle.

Nous pouvons appliquer cette approche à l'eucharistie. L'essentiel n'est pas la quantité de messes auxquelles on va. L'essentiel est la nouveauté que l'eucharistie crée en nous : un regard nouveau sur le monde, sur la vie ou encore une conscience plus vive de la présence de Dieu, ou encore un sentiment de fraternité...

Je ne sais pas ce qui vous amène ici : l'habitude, la musique, les paroles du prédicateur, la prière...Les motivations sont multiples et variées.

Nous sommes libres de venir ou de ne pas venir. Et vous choisissez de venir. En venant à l'église, chacun s'expose aux remarques de ses voisins : la messe, c'est rétrograde, c'est ennuyeux, c'est une perte de temps. C'est vieux. Autrement dit, elle est un vin qui a vieilli. Or, soit on y voit du vinaigre (ennui, perte de temps), soit on y voit un grand cru (quelque chose qui fait du bien). Et Jésus ne renie pas le vieux vin mais les vieilles outres ! En la personne du Christ, l'eucharistie est aussi un vin nouveau.

Si nous voulons goûter ce vin nouveau, nous sommes invités à nous renouveler, à devenir une outre solide. La messe nous y aide car elle est un moment de ressourcement, de partage et de vérité sur nous-mêmes. Elle donne l'occasion de recharger nos batteries pour la semaine. On n'en sort jamais exactement comme on y est entré. Elle nous transforme pour que, comme une outre nouvelle, nous gardions une nourriture qui nous aide à avancer sur la route, en compagnie de nos frères et s½urs, à la suite de Jésus.

Amen.