Dimanche de Pâques

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2004-2005

Dites, et si le tombeau n'avait pas été vide. Vous imaginez ! Si Pierre et Jean en arrivant à cet endroit précis avaient vu Jésus en train de ranger sa chambre tombale aidé de Marie-Madeleine et des autres femmes, posant les bandelettes d'un côté, le linceul rangé à part. Si l'évangile de ce jour, nous avait dit qu'ils étaient là tous ensemble chantant, riant, exultant d'une joie que nous ne pourrions décrire. Il me semble en tout cas évident que si le tombeau avait été rempli de la présence vivante du Christ, Pierre et Jean seraient vraisemblablement fous de joie. Quant à nous, nous ne serions pas là aujourd'hui.

En effet, vous vous imaginez, si Jésus avait choisi de ressusciter et de vivre sa vie éternelle ici sur terre avec nous de manière permanente. Il serait devenu un immortel parmi les vivants. Nous aurions pu constamment le contacter pour qu'il nous aide à chaque instant à prendre les bonnes décisions. Il aurait été à nos côtés pour nous apprendre à toujours marcher dans la bonne direction. Par sa présence, plus jamais nous ne nous serions trompés. Avec lui, plus jamais nous n'aurions trébuché. Le Christ aurait été en permanence avec nous puisqu'il aurait décidé de demeurer parmi nous. Il serait alors devenu une évidence pour tout être humain. Sa réalité historique traversant les siècles n'aurait plus pu être mise en doute.

Toutefois, s'il en était vraiment ainsi, Dieu nous contraindrait de reconnaître son existence. Il serait devenu une évidence à nos yeux et à nos c½urs. Nous n'aurions plus été libres de croire ou de ne pas croire. Or, dès l'instant de la création de l'humanité, Dieu a donné mandat à l'être humain pour qu'il poursuive l'½uvre commencée, en recevant la liberté. Je ne peux donc adhérer à l'idée de Dieu qu'en toute liberté, c'est-à-dire dans la foi. Et cette liberté doit être totale. Dieu ne peut plus être une évidence. Il est essentiel que le doute puisse me traverser pour mieux partir ou repartir à sa rencontre. La liberté des enfants de Dieu est telle que nous ne pouvons Le découvrir que par la foi et non par la connaissance.

Face au mystère de la Résurrections, toutes et tous nous sommes appelés à imiter l'attitude de Jean dans le récit que nous venons d'entendre : il vit et il crut. Voir puis croire et non pas savoir puis croire. Pourquoi ? Tout simplement parce que si je sais, je ne crois plus, je sais tout simplement, j'ai quitté le champ de la croyance pour entrer dans celui de la connaissance. Il ne s'agit plus de la foi. Non, Dieu nous convie à voir, c'est-à-dire à contempler un mystère qui nous dépasse complètement. Ayant vu, je peux alors avoir le désir de croire ce qui va au-delà de toute compréhension, au-delà de tout savoir. Et ce que nous voyons et croyons en ce jour de Pâques, c'est un tombeau vide. Vide à jamais car le Fils de Dieu est ressuscité et par là, nous a fait entrer chacune et chacun dans une dimension nouvelle de notre être. Le Père nous a fait don de sa création, le Fils quant à lui nous fait entrer dans le temps de la Résurrection. D'êtres mortels que nous étions, nous sommes devenus des êtres résurrectionnels. Qu'est-ce à dire peuvent se demander certains ?

Et si c'était tout simplement l'entrée de l'humanité dans l'ère de l'éternité. Par sa mort et sa résurrection, le Christ a vaincu la mort. Dans la foi, celle-ci n'est plus qu'un simple instant que nous traversons. Il s'agit de cette infime seconde qui nous fait passer de la vie terrestre à la vie céleste. Nous sommes citoyens du monde et dans le Fils, nous devenons citoyens des Cieux. Telle est notre destinée. Dieu nous fait don de son éternité. La mort n'a plus le dernier mot. C'est tout simplement cela que nous sommes appelés à voir et à croire face à ce tombeau. Heureusement pour nous alors que ce dernier était vide, bien vide. Il annonce la promesse d'une éternité dont chacune et chacun de nous pourront faire l'expérience si nous acceptons de la recevoir en toute liberté. Il y a quelques semaines, à l'occasion de la fête de Noël, nous célébrions l'incarnation de Dieu : Dieu s'était fait homme pour que tout homme, toute femme partage un jour la vie divine. Avec l'événement de Pâques, Dieu fait de nous des êtres résurrectionnels, c'est-à-dire des êtres appelés à la plénitude de la vie. Par la résurrection du Fils, nous sommes devenus les vivants, les grands vivants de la Vie car habite en nous une espérance au-delà de toute compréhension, car vit en nous un mystère : celui de l'appel à la Vie éternelle. Amen.