Dimanche des Rameaux

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : A, B, C
Année: 2006-2007

Non, le bout de buis que nous emportons ce dimanche n'est pas un porte-bonheur, un gris-gris qui nous assurerait les bienfaits de Dieu, une assurance pour le salut de nos défunts. C'est le souvenir des rameaux que les gens coupaient aux arbres et agitaient en criant de joie au passage de Jésus qui faisait, comme un roi, sa Joyeuse Entrée à Jérusalem.

Cette foule avait bien des raisons d'être enthousiaste car l'homme qu'elle acclamait était un descendant du grand roi David ; en outre il s'appelait Iéshouah (qui signifie Sauveur) et il était réputé pour accomplir des guérisons miraculeuses. On en concluait donc qu'il allait enfin provoquer la révolte, bouter dehors les occupants haïs et rendre enfin à Israël son indépendance nationale. Nombreux étaient ceux qui détenaient des armes et étaient prêts à donner leur vie pour la patrie.

L'ESCLANDRE AU TEMPLE

Il fallut vite déchanter : au lieu d'ameuter les troupes zélotes et de foncer vers la citadelle du gouverneur Pilate, Jésus monta vers le Temple, pénétra sur l'esplanade et se mit à en chasser quelques marchands qui y vendaient des animaux pour les sacrifices.

" Enlevez tout cela d'ici, cria-t-il, ne faites pas de la Maison de mon Père une maison de trafic".

En effet, il y avait suffisamment d'autres lieux en ville et aux alentours où se tenaient de tels marchés de bestiaux. Pourquoi en avoir installé un là sur l'esplanade ? Parce que le Grand Prêtre louait des emplacements aux marchands et profitait largement de ce commerce très lucratif. On peut être prélat et tenir à son niveau de vie !

L'esclandre commis par Jésus dépassait donc toute mesure (il est plus dangereux de toucher au compte en banque qu'au dogme !). C'est sans doute à ce moment-là, quand il apprit ce que ce soi-disant prophète galiléen avait osé faire, que le Grand Prêtre décida qu'il fallait l'éliminer au plus tôt. Si possible avant les festivités qui allaient débuter. Et en essayant d'en faire endosser la responsabilité par le Romain.

Et en effet lorsque, quelques jours plus tard, le prisonnier Jésus fut présenté, ligoté, minable, démuni, à la populace, plus personne ne se leva pour l'acclamer ou le défendre. Ni les malades qu'il avait guéris ni même ses apôtres ne prirent sa défense. Les "Hosanna au fils de David" firent place aux hurlements : " A mort ! A mort ! Crucifiez-le".

LE RAMEAU À LA CROIX

Pour montrer que nous ne voulons pas basculer du côté de ceux qui renient le Christ, nous accrocherons notre brin de buis à notre crucifix. Ce geste peu banal manifestera que nous avons compris la scène de l'Entrée des Rameaux. Que nous apprend-elle ? Si Jésus avait pris comme monture un petit âne, c'était pour réaliser une antique prophétie qui disait :

" Tressaille d'allégresse, fille de Sion ! Pousse des acclamations, fille de Jérusalem ! Voici que ton ROI s'avance vers toi ; il est juste et victorieux, humble, monté sur un âne. Il supprimera le char de guerre et il proclamera la paix pour toutes les nations. Sa domination s'étendra partout..." ( Zacharie 9, 9 ...)

Jésus se présentait donc bien comme le fameux Messie attendu mais sa monture était la preuve qu'il ne venait pas faire la guerre, lancer une charge de cavalerie contre ses ennemis, mais qu'au contraire, avec douceur et au pas lent de son âne, il voulait instaurer un royaume de paix universelle. Car le monde ne change pas à la suite d'une révolution violente (où l'on remplace des potentats par d'autres du même acabit) mais par la conversion des c½urs. Nous n'attendons pas de Jésus qu'il nous comble de bienfaits matériels, qu'il nous apporte la réussite terrestre. Au contraire nous comprenons qu'il vient sans cesse purifier son Eglise des attachements immodérés et du penchant à la violence afin qu'elle soit Maison du Père, Maison de notre Père, où chacun est "enfant de Dieu" et peut entrer sans qu'on exige de lui quelque contribution.

Il n'est donc plus nécessaire d'accomplir des sacrifices d'animaux puisque Jésus s'est offert sur la croix comme l' AGNEAU DE LA PAQUE et son sang répandu accorde le pardon de tous les crimes.

Nous vénérons Jésus comme notre Seigneur ; nous proclamons que sa royauté lui a été acquise au Golgotha et que l'instrument de son supplice est devenu effectivement son trône.

LA GRANDE SEMAINE A LA SUITE DU CHRIST

Nous entrons ce jour dans la Grande Semaine, la Semaine Sainte, qui nous rappelle cet itinéraire de Jésus afin d'apprendre quelle doit être notre propre conduite aujourd'hui. Les réunions liturgiques de ces jours revêtent une importance capitale puisque nous ne pouvons prétendre être chrétiens si nous ne suivons pas notre Sauveur sur son chemin d'humiliation pour arriver à la victoire de la Résurrection. Il nous faut donc avoir le courage de nous démarquer de la foule des indifférents et demeurer dans une Eglise qui semble (chez nous) de plus en plus faible mais où, à Bombay, à Saïgon et à Kinshasa, les pauvres se pressent en masse. Accepter la libération non-violente par un Messie pauvre et vulnérable. Renoncer à la rapidité et à l' efficacité immédiate.

C'est en suivant les liturgies de cette semaine que nous serons guidés sur le chemin de la fidélité de Jésus, tel que le chantait magnifiquement un cantique de la première Eglise

"Lui, de condition divine, ne retint pas le rang qui l'égalait à Dieu. Il s'est dépouillé, prenant la condition de serviteur... Il s'est abaissé, devenant obéissant jusqu'à la mort, la mort sur une croix. C'EST POURQUOI Dieu l'a souverainement élevé et il lui a conféré le NOM qui est au-dessus de tout nom afin qu'au Nom de JESUS, tout genou fléchisse et que toute langue confesse que le Seigneur, c'est JESUS CHRIST à la Gloire de DIEU LE PERE" ( St PAUL aux Philippiens 2)