Dimanche des Rameaux

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Agiter des Rameaux pour devenir Rameaux Vivants de l'Eglise

La fête des Rameaux conserve encore une certaine popularité : ce jour-là, bien des non-pratiquants viennent à la messe pour recevoir un brin de buis que l'on accrochera au crucifix à la maison ou que l'on ira planter sur la tombe d'un être cher au cimetière. Mais attention, il n'y a nulle magie dans la foi chrétienne : aucun objet, aucun geste n'achète la grâce ! Il faut nous rappeler que la Joyeuse Entrée de Jésus à Jérusalem lorsque la multitude l'acclamait en agitant des rameaux fut une tragique méprise.

En effet on avait appris à Jérusalem que ce jeune Galiléen était un authentique descendant de la famille royale de David, qu'il emballait les foules par ses discours enflammés et surtout par les guérisons spectaculaires qu'il opérait sur les malades. Aussi la multitude immense des pèlerins montés en ville pour la fête de la Pâque en était persuadée : Jésus allait donner le signal de l'insurrection contre les occupants romains. Sûr ! avec un tel chef, "On va gagner !!! On va gagner !!". Les apôtres eux-mêmes rêvaient des places d'honneur qu'ils allaient occuper dans le Royaume enfin restauré.

L' HUMBLE SIGNE DE L' ANE

Or il y avait un signe très clair qui aurait dû ouvrir les yeux et faire comprendre : Jésus avait emprunté un âne sur lequel il s'était assis pour entrer en ville, accomplissant ainsi une ancienne prophétie qui disait : "Tressaille d'allégresse, fille de Sion ! Pousse des acclamations : voici que ton Roi s'avance vers toi, humble et monté sur une ânesse... Il supprimera le char de guerre...Il brisera l'arc de guerre et il proclamera la paix pour les peuples" ( Zacharie 9).

Donc loin d'appeler à la révolte, Jésus venait en homme DOUX ET HUMBLE afin précisément de mettre fin aux violences. Au lieu de lancer l'assaut contre la citadelle de Pilate, le gouverneur romain, Jésus se mit à appeler à se convertir à la simplicité et à la non violence des Béatitudes. Et son appel visait en premier lieu son peuple et les autorités religieuses du temple.

Les foules, hélas, préfèrent partir en guerre contre l'ennemi que de s'appliquer à changer de comportement. Devant la faiblesse de Jésus qui ne croyait qu'à la parole et au dialogue, l'opinion publique se retourna et ses apôtres eux-mêmes qui avaient pourtant juré de donner leur vie pour lui l'abandonnèrent à son sort. Jésus le DOUX allait s'enfoncer dans un isolement atroce : peu à peu tous s'écartèrent de lui et, à la croix, seul, sans révolte, il s'offrit pour que toute l'humanité soit pardonnée. Mais alors s'accomplit la véritable révolution : Dieu son Père lui rendit la Vie et, le dimanche suivant, à Pâques, ses disciples, stupéfaits, émerveillés, incrédules, purent éclater d'une folle allégresse. Hosanna ! Jésus a vaincu notre ennemi à tous : LA MORT ! Pâques est son triomphe réel, définitif. Pas celui d'un peuple sur l'autre. Mais celui de toute l'humanité.

SUIVRE LE CHRIST PENDANT LA SEMAINE SAINTE

L' Eglise a souvent oublié "le signe de l'âne" : elle a cru parfois qu'il fallait exhiber sa puissance et déployer ses fastes afin d'attirer les foules. Aujourd'hui, elle s'est débarrassée de ces prétentions : parfois moquée par les médias, ne rassemblant que quelques fidèles dans de grandes églises vides, elle est plus simple, plus modeste. Elle ne monte plus sur ses grands chevaux, elle marche plus lentement au rythme de l'âne. A partir d'aujourd'hui, elle va accompagner son maître au long des journées qui ont suivi l'Entrée des Rameaux et surtout elle s'arrêtera aux grands moments. Sommes-nous prêts à revivifier notre foi en ces heures bénies ?

LUNDI : Imitons Marie, la s½ur de Lazare, qui s'assied aux pieds de Jésus et gaspille un parfum de grand prix. " Folle !" murmure le disciple. Mais Jésus prend sa défense. Il nous faut passer ces jours-ci aux pieds du Christ, prendre du temps pour lui seul. Quand le monde lui tourne le dos, y aura-t-il quelques chrétiens pour demeurer avec lui ?

JEUDI SOIR : lors du dernier repas, Jésus se donne à manger à ses disciples. On ne me prend pas la vie : je vous la donne pour que vous viviez. L'eucharistie, c'est la souffrance qui devient amour, la personne unique de Jésus qui devient peuple et qui veut continuer à être présent à tous les temps et tous les lieux.

JEUDI NUIT : les heures atroces de l'agonie dans l'attente du supplice. Et voir ses amis endormis, inconscients ! "Priez donc pour ne pas tomber dans le piège de la tentation !". Et Judas qui vient me donner un baiser !???...Et Pierre qui me renie trois fois !!! Que de lâchetés !

VENDREDI MATIN : il est arrêté, condamné sur des préjugés, giflé, flagellé, moqué, traité comme un pantin, un malfaiteur. Accepterai-je mépris et moqueries au nom de ma fidélité chrétienne ?...

VENDREDI APRES- MIDI : la mort la plus atroce et la plus ignominieuse après des heures d'étouffement et de cris. ............... ........LA CROIX EST POUR NOUS. De la fournaise incandescente de la souffrance jaillit le pardon gratuit.

VENDREDI SOIR : temps d'arrêt, de prière, de contemplation de la Croix, l'arbre de la mort qui va devenir l'Arbre de Vie. "Père, entre tes mains, je remets mon esprit"

SAMEDI : le grand silence. Dieu est mort ! Nous repentir, pleurer nos fautes car nous sommes tous responsables.

SAMEDI SOIR : ...et tout à coup, l'incroyable nouvelle : Oui, c'est vrai, Jésus est ressuscité. Avec son Esprit, nous sommes son Corps.

DIMANCHE DE PÂQUES : la pâque (= le passage") est réalisée. Une humanité nouvelle est recréée. ALLELUIA. Nous sommes les Rameaux vivants du grand Arbre de l'Eglise.

Sommes-nous d'accord de faire cet itinéraire ? Aucun autre chemin ne peut nous sauver. Il ne faut pas agiter un rameau puis tourner le dos au Christ et à son Eucharistie ! Lentement, au pas de l'âne, laissons-nous convertir : chaque Pâque nous christianise.