Epiphanie

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 1998-1999

Je ne sais pas si vous vous êtes déjà posés la question suivante : « qu'est-ce que Jésus a bien pu faire de ses cadeaux reçus des mages d'Orient ? ». Je n'ai pas pu trouver jusqu'à ce jour de réponse chez les auteurs sérieux. Nous savons qu'ils ont une représentation symbolique, l'or pour la royauté du Christ, l'encens pour le sacerdoce et la myrrhe comme signe précurseur de sa mort. Au-delà de ses symboles, seuls les humoristes ont tenté de répondre à ma question existentielle sur les cadeaux. D'après eux, comme Jésus est né dans une étable et qu'il y avait du bétail pour le réchauffer, l'encens a été utilisé directement pour donner un peu de fraîcheur à l'établissement. Comme Marie ne savait pas à quoi pouvait servir la myrrhe, elle l'aurait jetée, prétendent-ils. En ce qui concerne l'or, une légende raconte que les parents l'avaient gardé pour payer les études de Jésus dans un Collège Jésuite de Jérusalem. Arrivé à l'âge de 12 ans l'enfant refusa d'aller dans une telle école, il avait déjà la sagesse de l'Enfant Dieu. Marie donna alors l'argent en même temps que le rosaire à Saint Dominique qui fonda cet ordre merveilleux. C'est une légende, une très belle légende, à raconter aujourd'hui, puisque l'Epiphanie est également la fête de la communauté dominicaine de Froidmont. Ce ne sont pas seulement les cadeaux qui sont importants dans le récit que nous venons d'entendre mais plutôt le fait qu'ils aient été donnés. Les rois mages se sont dépouillés d'une partie de ce qu'ils possédaient pour pouvoir admirer l'Enfant Dieu dans sa crèche. Depuis ce jour, tout au long des siècles, les auteurs spirituels n'ont fait que nous rappeler que Dieu, Père, Fils ou Esprit, se rencontre dans le dépouillement, notre dépouillement intérieur c'est-à-dire dans un désencombrement de ce qui nous fait vivre habituellement pour que la vérité de la relation puisse se vivre. Depuis notre naissance, nous sommes en chemin sur la route de la vie. Toutes et tous nous sommes en quête d'une « crèche » intérieure. Les « crèches » sont multiples. Dans la nôtre se repose l'Enfant Dieu qui se manifeste à nous pour la première fois de la sorte. Cette crèche n'est pas mieux, ni moins bien que les autres qui ont existé et existent encore. Elle est la nôtre, c'est en elle que nous trouvons sens à notre vie. C'est l'Enfant Dieu manifesté qui nous montre un chemin possible de retour à l'essentiel. Si je crois qu'il y a plusieurs crèches depuis la création de l'humanité, je dois également reconnaître que les chemins pour y arriver sont innombrables. Il y a autant de chemins qu'il n'y a d'êtres humains. A chacune et chacun de découvrir le sien. Pour certains, ils sont tortueux, pour d'autres rocailleux, pour d'autres encore, ils sont des sentiers de vie où il fait bon marcher. Chacun a le sien et chacun y mettra le temps qu'il faut pour y arriver. Nous vivons dans l'espérance que nous n'arriverons jamais trop tard à la crèche intérieur. Nos chemins pour y arriver sont façonnés par nos destinées, parsemés de nos blessures intérieures, enrichis de nos bonheurs. Ils sont ce que nous sommes et ce que nous devenons. Et comme les mages, nous partons à la conquête de notre étoile. Il y a suffisamment d'étoiles dans le ciel pour que chacun puisse s'en approprier une et la suivre. Par notre présence en ce lieu, nous nous rappelons les uns aux autres que nous sommes des chercheurs de Dieu, des êtres en route et en quête de sens. Mais cette fameuse crèche intérieure est-elle véritablement l'essentiel de nos existences ? Guide-t-elle nos conduites et nos choix de vie ? En ce jour, Dieu se manifeste à nous. Le prenons-nous véritablement au sérieux ou bien est-ce une belle histoire parmi d'autres ? Quelques questions en cette fête de l'Epiphanie ? A chacune et chacun d'y répondre mais pour ce faire nous devons nous mettre et nous remettre en route pour redécouvrir en nous l'Enfant Dieu qui sommeille. Il est fragile. Il est mystère et nous remet face à notre propre mystère. L'Enfant Dieu manifesté se donne à nous et nous convie à nous dépouiller de ce qui nous encombre pour le rencontrer. Dieu résonne au plus profond de nos silences intérieurs. Entendre son souffle est une expérience qu'il nous est offerte à vivre. Si c'est vrai, il est alors temps de marcher à nouveau sur nos chemins. Amen.