Epiphanie

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 2009-2010

Les Quatre Signes de Dieu

Je ne sais toujours pas dans quel pays vivaient les mages, quels étaient leurs noms ni leur nombre et encore moins quelle mystérieuse comète a pu les guider jusqu'à Bethléem. Mais je n'ai nul besoin de ces connaissances historiques. J'ai  compris qu'il fallait moins reconstituer un passé mort que de laisser cet événement reconstituer notre existence de sorte qu'il soit non un souvenir mais une Bonne Nouvelle. L'aventure des mages est la nôtre.

 1er SIGNE   :   LE   COSMOS

 Nous sommes la première génération à découvrir les splendeurs du cosmos grâce aux merveilleuses photos envoyées par Hubble et les satellites. Ronde des planètes, amas incalculable d'étoiles, Carrousel  impeccable qui aurait pris naissance il y a plus de 13 milliards d'années et qui, un jour, retombera dans le néant. Fabuleuse histoire, chiffres époustouflants, distances phénoménales. Mais surtout photo de notre planète bleue. Beauté déchirante de notre petite terre fragile voguant dans un coin d'un univers immense. Qui sommes-nous là-dedans ? "Des poussières d'étoiles", dit l'un. Aventure absurde d'un protoplasme inutile, dit l'autre. " Histoire pleine de bruit et de fureur, racontée par un fou,  et qui ne signifie rien" ??

Le cosmos n'est-il qu'une machinerie dans laquelle nous sommes nés par hasard avant de nous dissoudre dans le rien ? Le cosmos est une "magie" qui ne sera jamais éclaircie tout à fait par les sciences et les mathématiques. Les mages scrutaient le ciel pour y décrypter les messages des dieux: les signes du zodiaque permettaient d'éviter le malheur, de prendre les décisions heureuses, de prévoir l'avenir.

Jusqu'au jour où ils sont descendus de leur tour  d'observatoire pour se mettre en route, à la quête de l'homme  Il faut certes poursuivre le labeur scientifique, chercher à comprendre la naissance et le fonctionnement de l'univers mais le cosmos renvoie à notre histoire. Il faut partir, quitter la contemplation du ciel et se poser la question de l'homme. Quel est le sens de notre vie ?

2ème SIGNE  :  LA BIBLE

Toutes les civilisations cherchent à résoudre le mystère de la condition humaine. Religions, sagesses, philosophies, spiritualités présentent des réponses, affirment ou nient l'existence d'une divinité ou d'une multitudes de dieux. D'autres traitent tout cela de mythes, d'illusions. Qui a raison ?...

 

Les mages découvrent un petit peuple en bordure orientale de la Méditerranée. Ni pire ni meilleur qu'un autre.  Mais Israël présente au monde un livre: une révélation du Dieu unique pour le monde.

Non un catéchisme ni un traité théologique mais une histoire. "Au commencement Dieu créa le ciel et la terre...." et l'histoire se déroule: conflits familiaux, conquêtes, guerres, mariages et adultères.....

 

La BIBLE -  LE LIVRE - ne nie pas le mal, la souffrance, les horreurs. Mais son axe est  une promesse: puisque tous les dirigeants, tous les rois, juifs et autres, échouent à établir une terre heureuse, Dieu  créateur a promis qu'un jour il consacrerait un roi tout autre qui éclairera notre énigme, dévoilera le sens, révélera le but, tracera le chemin du droit et de la justice. De siècle en siècle, les Prophètes jettent une lueur sur ce "Messie":

 

"La jeune femme est enceinte et enfante un fils, elle lui donne le nom d'Emmanuel, Dieu-avec-nous" ( Isaïe 7, 14)

"Un fils nous est donné; on proclame son nom: Conseiller, Dieu Fort, Père à jamais, Prince de la Paix...  Il affermira le trône de David sur le droit et la justice" (Is 9, 4-8)

Où naitra-t-il ? " Et toi Bethléem, trop petite pour compter parmi les clans de Juda, de toi sortira celui qui doit gouverner Israël...Il se tiendra debout et fera paître son troupeau...Il sera grand jusqu'aux confins de la terre. Lui-même il sera la Paix" ( Michée 5, 1-4).

 

Les mages se rendent donc d'abord à Jérusalem, la Ville sainte, le lieu du temple sacré, du roi, des scribes spécialistes des Ecritures.  Païens qui déchiffraient le livre du ciel, ils découvrent le Livre de la terre.

 Mais le Messie n'est pas né dans un palais. Et ceux qui devraient le reconnaître demeurent aveugles; ils éditent le Livre, le commentent et l'admirent mais ils ne suivent pas toujours ses indications.

 Il faut poursuivre la recherche, aller plus loin, trouver à tout prix celui vers qui tout le Livre est tendu.

3ème SIGNE   :   L'ENFANT  DE  BETHLEEM

 Quittant les somptueux édifices et les subtiles écoles théologiques,  les voyageurs découvrent un petit village et là, quelque part, la modeste maison d'un artisan. Son épouse présente son enfant: on l'appelle IESHOUAH - JESUS

(en hébreu: Dieu sauve). Ce serait lui ?...Nous étions partis à la recherche du plus grand des Seigneurs, du plus subtil des Sages, du plus puissant des Monarques...et "ce n'est que cela" ? ...Oui, c'est LUI !

Les païens tombent à genoux devant un enfant juif; les savants vénèrent le petit pauvre. Et du coup, sans qu'il soit nécessaire de les exhorter, ils deviennent généreux. La reconnaissance se concrétise en cadeaux:

-       de l'OR : alors qu' ils étudiaient les mouvements des astres pour faire des horoscopes et gagner beaucoup d'argent., ici ils font le contraire: leur cupidité devient partage.

-       de l' ENCENS :  ils en brûlaient devant leurs idoles dans les temples sacrés. Ici dans le nouveau-né de la femme réside le Dieu caché que l'on peut prier sans être écrasé.

-       de la MYRRHE: c'était le parfum de la femme aimée, le signe de l'amour (Cantique des cantiques) mais aussi l'aromate pour embaumer les cadavres. ( à la croix Nicodème apportera myrrhe et aloès -  Jn 19, 39) car Jésus apprendra à tous que l'amour véritable va jusqu'à donner sa vie.

 Toutes les routes des chercheurs de lumière aboutissent à l'humble Signe de Dieu, au fils de Marie, au petit pauvre silencieux, à la maison où l'on partage son Pain de Vie, à l'église qui accueille tous ceux qui errent dans la nuit, aussi bien les bergers que les mages, les simples que les savants. Car la route des chercheurs de Dieu conduit tout simplement au rendez-vous dans une église où ils adorent leur Seigneur devenu pour tous le PAIN DE VIE.

Le signe sera l'EUCHARISTIE.

LE 4ème SIGNE   :   UNE  VIE  RAYONNANTE

 Je n'ai pas parlé de la fameuse étoile qui aurait guidé les mages: elle a disparu à jamais. Leur histoire se termine ainsi: " Ils regagnèrent leur pays par un autre chemin". Leur recherche a abouti: ils ont découvert celui qui est la Lumière du monde. A présent c'est leur foi nouvelle qui les éclaire et peut les guider. Ils retrouveront leur pays et leurs proches. Mais désormais ils ont à adopter une nouvelle conduite, une manière différente de vivre qui tranchera sur celle de l'entourage car la foi dans le Messie pauvre de Bethléem bouleverse l'existence.

Aujourd'hui encore le monde, fasciné par la réussite, l'enrichissement et la célébrité, court vers les idoles, les "stars" du cinéma,  les "étoiles" du spectacle.  Pour les croyants, la course aux honneurs, la frénésie d'achats, les rivalités mesquines, la passion "d'être à la mode" paraissent des jeux infantiles et superstition, haine, racisme, violence, gaspillage des pratiques intolérables qui conduisent le monde au désastre.

Les chrétiens ne cherchent plus dans le ciel des signes surnaturels: sur terre, au c½ur du monde, ils deviennent eux-mêmes des SIGNES du Royaume du Père dont le Prince est  un enfant.

Saint Paul ne convertissait pas les foules mais lorsqu'il avait amené à la foi une vingtaine de Grecs perdus dans la grande cité païenne,  il leur ouvrait les yeux sur leur indispensable mission :  " Agissez en tout sans murmures et réticences afin d'être sans reproche et sans compromission - enfants de Dieu sans tache au milieu d'un monde dévoyé et perverti où vous apparaissez comme des SOURCES DE LUMIERE, vous qui portez la Parole de Vie" ( Philippiens 2, 15)

 "EPIPHANIE" signifie MANIFESTATION et est une grande fête de la MISSION.  Qu'est-ce que nos petites communautés manifestent ? Reprenons l'exemple des mages, sortons de nos routines, suivons les signes de Dieu. Peut-être rayonnerons-nous de sa Présence qui nous habite.