Fête de la Pentecôte

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Pentecôte : l'humanité déifiée

Dans notre société actuelle, le mot Pentecôte ne signifie plus rien : une fête, oui, avec un jour de congé supplémentaire. Même chez les chrétiens, peu sans doute ont conscience qu'il s'agit de l'aboutissement de l'histoire biblique, du sommet de l'histoire du monde !

20 siècles en effet ont passé depuis l'événement primordial, la 1ère Pentecôte. Des milliers, des millions d'années se succèderont peut-être encore tandis que les sciences et les techniques modifieront considérablement notre cadre de vie. Mais le statut du croyant n'aura pas changé d'un pouce. Nous ne pouvons pas aller plus loin que Saint Pierre, Marie-Madeleine et les quelques autres qui, cette année-là, à Jérusalem, ont reçu l'Esprit de Dieu.

Les derniers temps sont arrivés, la condition humaine ne peut, sur terre, rêver d'un statut supérieur : par l'Esprit de Jésus, l'homme est devenu participant de la nature divine, l'homme est déifié. Il lui reste à basculer dans le Royaume du ciel, à l'abri définitif du mal, mais l'essentiel est acquis.

PREMIERE ETAPE DU SALUT DE L'HOMME : LA LOI ECRITE

En une première étape, Dieu avait révélé sa Loi au peuple d'Israël, Loi grandiose, code insurpassable de la conduite humaine. Les droits de l'homme, la devise "Liberté, Egalité, Fraternité", les constitutions modernes ( "Tous les hommes naissent libres et égaux", " La personne humaine est d'une dignité inaliénable",etc....) en sont issus.

Hélas, en dépit des prières, des sacrifices au temple, des objurgations des prophètes, Israël faisait l'expérience perpétuellement renouvelée de son incapacité à mettre la Loi de Dieu en pratique. Même les rois, même les prêtres, devaient avouer leurs manquements, leur faiblesse congénitale. Ils bafouaient l'Alliance divine.

La catastrophe survint : en 587 avant le Christ, Nabuchodonosor et les Babyloniens s'emparèrent de Jérusalem, détruisirent la ville, incendièrent le temple et déportèrent la population. Le projet de Dieu semblait réduit à néant.

LA PROMESSE DE LA NOUVELLE ALLIANCE

Mais des visions nouvelles sont données aux yeux qui ont beaucoup pleuré. Le désastre, la ruine de l'orgueil humain ( qui croit toujours que l'on est capable d'instaurer le royaume du bonheur par ses seules ressources, par la seule connaissance des lois, par une spiritualité plus affinée, ...) conduisit certains à annoncer des prophéties inouïes, une promesse de Dieu tout à fait inédite :

"Des jours viennent où je conclurai une NOUVELLE ALLIANCE : je déposerai mes directives au fond d'eux-mêmes, les inscrivant dans leur être. Je deviendrai Dieu pour eux, ils deviendront un peuple pour moi. Ils me connaîtront tous, petits et grands. Je pardonne leur crime"... (Jérémie 31, 31)

Et : " Ce n'est pas à cause vous que je vais agir ; je montrerai la sainteté de mon grand Nom qui a été profané...Je vous prendrai de tous les pays.... Je ferai sur vous une aspersion d'eau pure et vous serez purs. Je vous purifierai de toutes vos impuretés. JE VOUS DONNERAI UN C¼UR NOUVEAU ET JE METTRAI EN VOUS UN ESPRIT NOUVEAU. J'enlèverai de votre corps un c½ur de pierre et je vous donnerai un coeur de chair ; je mettrai en vous mon propre Esprit. Je vous ferai marcher selon mes lois... " ( Ezéchiel 36, 23...) Donc comprenons bien : pas question de supprimer la Loi ( l'anarchie mène à la ruine), ni d'en donner une autre, différente, ni de l'édulcorer en gommant ses exigences trop dures. La Loi reste la Loi définitive, insurpassable. Mais Dieu promet de donner un jour une Loi qui aura en elle la puissance de son application, une Loi qui ne sera pas seulement un texte mais une Force qui donnera capacité de l'observer. Là résidera la NOUVEAUTE . La Loi nouvelle, c'est l'Esprit-Saint !

Mais quand donc Dieu allait-il réaliser sa Promesse ? Dans les siècles suivants, la situation politique d'Israël ne s'améliorait pas : on vivait sous la coupe des grands Empires. Pouvait-on encore espérer ?...

LE DON DE L'ESPRIT : LA NOUVELLE ALLIANCE REALISEE

On imagine l'effarement, l'incrédulité de la foule lorsque les anciens disciples de Jésus réapparurent sur la scène publique et crièrent : " La Promesse est réalisée : Jésus a donné sa vie pour notre pardon et Dieu nous a offert l'Esprit ! LA NOUVELLE ALLIANCE est réalisée !"

Or on pouvait en effet constater le changement total de ces hommes et de ces femmes. Ils avaient lâché leur maître lors de son arrestation ; le premier d'entre eux racontait qu'il avait renié Jésus arrêté dans la cour du Grand Prêtre ; tous reconnaissaient leur aveuglement, leur faiblesse, leur ignominie. Maintenant ils n'avaient pas inventé une méthode pour se guérir ; ils ne montaient pas une légende car ils savaient tout de suite que ce qu'ils vivaient et disaient allait les entraîner à la persécution et parfois à la mort. Mais ils ne pouvaient se taire.

ILS AVAIENT UN C¼UR NOUVEAU ...UN ESPRIT NOUVEAU

Voilà l'oeuvre de l'Esprit ! Les enseignements de Jésus n'avaient pas suffi puisque, à Gethsémani, les disciples s'étaient éparpillés. Mais, ensuite, en recevant Jésus Ressuscité, Vivant, en acceptant son Pardon qu'il signifiait par ses plaies, par l'Esprit reçu au cénacle, ils avaient été transfigurés.

L'Esprit n'améliore pas l'homme, il ne change pas son caractère : il le recrée. Il est pardon, il est Vie, il est re-naissance, il est la Bonne Nouvelle. Car l'Evangile, ce n'est pas un livre, ce n'est pas un texte, ce n'est pas une loi - fût-ce celle, sublime, des Béatitudes ! "Si nous n'avons que le texte de l'Evangile, nous sommes condamnés" dit St Augustin repris par St Thomas d'Aquin .

Aujourd'hui, en 2008, après 50 jours de temps pascal et de prière, allons-nous nous laisser prendre ? Cesserons-nous d'être des chrétiens "essoufflés"et résignés pour "être soufflés" en avant ? Trop souvent nous fermons nos volets, nous renâclons, nous mettons les freins, nous craignons une aventure qui provoquera des dépouillements. Allons-nous oser ?...car il y faut du courage ! " Esprit-Saint, n'entrez pas !!!...je crains les courants d'air" disait P. Claudel.

Car l'Esprit ne nous télécommande pas, il ne force pas notre liberté. A chacun de l'accueillir, d'ouvrir ses bras, son c½ur, sa vie.

Il ne se confond pas avec l'allégresse ressentie dans la fusion avec un groupe ( même s'il chante des Alléluias !). L'Eglise n'a vraiment l'Esprit que si elle accepte de marcher à la croix à la suite de son Seigneur.

Alors l'Eglise n'est plus une organisation mais une communion. La foi n'est plus une habitude mais un élan. L'Eucharistie n'est plus une routine mais le foyer où est communiqué le FEU de l'Esprit. La Loi devient Grâce. La piété devient Joie. La paroisse devient famille où l'on partage. La mission n'est plus propagande mais nécessité, contagion du bonheur de croire. Levons nos voiles ! Que souffle le grand Vent de Dieu ! En avant vers de nouveaux rivages ! La Bonne Nouvelle est libération des carcans, même ceux des lois !!!