Fête de la Pentecôte

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2004-2005

Jn 20, 19-23

C'était un dimanche matin, le 12 juillet 1942 pour être précis. Elle n'était pas bien née pour une certaine idéologie de cette époque puisqu'elle était juive. Hetty Hillesum s'interrogeait sur le monde dans lequel elle vivait et elle adressa cette prière : « je vais t'aider, mon Dieu, à ne pas t'éteindre en moi, mais je ne puis rien garantir d'avance. Une chose cependant m'apparaît de plus en plus claire : ce n'est pas toi qui peux nous aider, mais nous qui pouvons t'aider - et ce faisant nous nous aidons nous-mêmes. C'est tout ce qu'il nous est possible de sauver en cette époque et c'est aussi la seule chose qui compte : un peu de toi en nous, mon Dieu. Il m'apparaît de plus en plus clairement à chaque pulsation de mon c½ur que tu ne peux pas nous aider, mais que c'est à nous de t'aider et de défendre jusqu'au bout la demeure qui t'abrite en nous ».

Y a-t-il un extrait plus éclairant que celui-ci pour comprendre la fête de la Pentecôte, la fête du don de l'Esprit Saint ? Toutes et tous, nous sommes le temple vivant de Dieu sur cette terre, puisqu'Il a choisi de venir demeurer en nous. Ne le cherchons ni dans les nuages, ni au plus profond de l'océan ou encore au sommet de la plus haute montagne. Depuis l'événement de la Pentecôte, c'est uniquement en nous que nous le trouverons et par conséquent, également, dans le c½ur de l'autre. Dieu n'a donc pas quitté notre monde, il a choisi de l'inhabiter au plus intime de sa Création, c'est-à-dire en nous. L'Esprit Saint, souffle divin, nous inspire à tout moment. Par Lui, Dieu est là, bien présent, accroché à nos vies. Cette troisième personne de la Trinité est difficilement définissable. Il est la Transcendance même au c½ur de notre monde. Il est ce don du Père par le Fils aux disciples. Et par notre baptême, nous embrassons également cet état puisque nous avons reçu l'Esprit Saint.

Mais comme tout don, sommes-nous capables de le recevoir, de l'accueillir en nous et mieux encore d'en vivre ? Pouvons-nous accepter d'avoir l'être de Dieu au plus intime de notre être, là où aucun autre être humain ne peut venir se promener ? Un peu comme si, par delà un sentiment de solitude existentielle, vivait en nous cette présence divine qui nous inspire et nous pousse à découvrir dès à présent les joies de la vie divine. En d'autres termes, l'Esprit de Dieu est à l'½uvre en ce monde par nous mais seulement si nous le faisons vivre. Il y va de ma responsabilité de croyant. Dieu a besoin de ses créatures pour que non seulement la terre tourne plus juste mais aussi pour que nous puissions pleinement participer à l'achèvement de la Création.

Dès lors, contrairement à ce que certaines pourraient penser, l'Esprit Saint n'est pas une entrave à notre liberté humaine. Il est ce souffle qui nous pousse à nous dépasser, à quitter, à l'instar des apôtres qui s'étaient enfermés, toutes nos peurs qui parfois nous tenaillent et nous paralysent. L'Esprit de Dieu nous ouvre vers l'étendue de nouveaux horizons, vers cette plénitude à laquelle toutes et tous nous sommes appelés. Loin de limiter notre liberté, il la déploie en toutes ses dimensions pour que nous vivions pleinement cette abondance de vie telle qu'elle nous a été promise dans le Christ. Seuls, nous serions désemparés, dépassés, déprimés face à l'immensité de la tâche. De plus, tout comme le Christ dans l'évangile que nous venons d'entendre, l'Esprit Saint ne force pas nos serrures intérieures. Il n s'impose pas. Il s'invite en nous. Il est là, simplement, pour nous apporter d'abord la paix. Une paix profonde. Un sentiment de bien être car nous prenons conscience qu'avec Lui, nos vies s'ouvrent sur un avenir que nous n'aurions jamais pu imaginer par nous-mêmes.

En cette fête de Pentecôte, Dieu nous fait signe, une fois encore. Venez en vous, nous dit-il, vous êtes chez moi et ensemble nous traverserons la vie. Elle vaut tellement la peine d'être vécue. Inspiré par l'Esprit, je respire autrement mon existence. Le souffle de Dieu balaye en moi mes inquiétudes pour que je puisse retrouver le sens de mon humanité profonde : le partage de la vie divine. Mais comment être certain de l'inhabitation de Dieu en nous ? La réponse est claire. Les disciples furent remplis de joie, nous relate l'évangéliste. La joie est donc signe de cette présence divine en nous. Il nous reste alors à savoir si nous sommes bien toutes et tous empreint de cette joie qui fait de nous des êtres qui rayonnons de notre foi, des êtres qui rayonnons d'une vie pleine de vie. Si la Pentecôte est la fête de la vie pleine de vie, il ne me reste qu'à nous souhaiter en ce jour : une bienheureuse fête. Amen