Heureux anniversaire, sainte et misérable Eglise du Christ !
En effet, si l'on en croit St Luc, c'est en ce matin de Pentecôte, à Jérusalem, que tu es née, en l'an 30 de notre ère, sans doute.
Il y aurait 1975 ans !
Pour l'heure, tu n'as pas bonne presse en notre Occident que tu as aidé à surgir. Les médias se moquent de tes fastes moyenâgeux, contestent ton enseignement rétrograde, critiquent tes papes qui ne sont jamais ce qu'ils devraient être. Ebranlés par ces vagues de dérision - parfois plus efficaces que des attaques violentes -, des multitudes de baptisés, notamment les jeunes générations, renoncent à t'appartenir et abandonnent le culte.
La crise est-elle si grave, fatale ? Pour y remédier, des changements de vocabulaire, d'organisation ou de discipline seraient sans doute importants, urgents à mettre en ½uvre. Mais ils ne sauraient suffire.
Pour te rendre une nouvelle jeunesse, il ne faut rien moins qu'une nouvelle Pentecôte.
Eglise, regarde-toi telle que tu apparus pour la première fois sur la scène du monde. Transformée par le pardon de ton Seigneur et « soufflée » par l'Esprit de Dieu, tu allais, en peu de temps, connaître une expansion exceptionnelle. Demande-toi le secret de ce temps.
UNE COMMUNAUTE EN PRIERE
Au point de départ, il y a un petit groupe d'hommes et de femmes réunis dans une maison de Jérusalem. Ils sont tous en état de choc sous le coup des événements qu'ils viennent de traverser .
Disciples de Jésus, pendant des mois, ils l'ont suivi, tout fiers, vers la capitale, sous les vivats des foules. Tout à coup la tragédie : le maître est arrêté, condamné, exécuté sur une croix, enseveli. C'est l'échec total, l'effondrement.
Mais voilà qu'il revient vers eux : il est ressuscité. N'est-ce pas une hallucination ? Il les convainc : oui il est bien le Messie, non un chef militaire et nationaliste, mais le Seigneur, vainqueur de la mort !
Alors il leur annonce la mission qu'ils auront à accomplir : proclamer cette Bonne Nouvelle à tous les peuples.
Mais d'abord qu'ils se mettent en prière. L'Esprit de Dieu va venir et les rendra capables de réaliser cette ½uvre, la plus importante de l'histoire du monde : apporter le salut par la foi.
Et Jésus disparaît, non sans avoir promis son retour pour un futur indéterminé.
Dans le cénacle, les esprits bouillonnent : on tente d'élucider le sens de cette aventure, on relit les Ecritures, on discute. Et surtout on prie.
Finies les belles déclarations que l'on osait naguère (« Jésus, je donnerai ma vie pour toi »). On est devenu conscient de ses limites, de son infinie lâcheté, on ne compte plus sur ses ressources. On attend une force divine, seule capable de convertir le monde.
UNE COMMUNAUTE IVRE DE JOIE
Et la promesse de Jésus se réalise : soudain une poussée irrésistible les chasse de leur local, les fait dégringoler les escaliers, les projette sur la rue. Et les passants de se trouver devant des farfelus en train de danser, chanter des hymnes à Dieu, comme emportés par une joie folle.
St Luc, amusé, se plaît à souligner les réactions de ces spectateurs :
« Ils étaient dans la stupéfaction...déconcertés, émerveillés, perplexes...Certains supposaient : Ces gens sont pleins de vin doux ? »...
Or la Pentecôte étant une fête de pèlerinage, des juifs de la diaspora, installés dans les pays voisins, étaient montés dans la capitale et ils étaient tout ébahis
« parce que chacun d'eux les entendait parler sa propre langue ».
Signe prophétique dont on comprend la portée symbolique : d'emblée l'Eglise commence une mission qui doit atteindre le monde entier. Elle n'impose pas une langue sacrée : elle rejoint chacun dans sa langue.
Ainsi va se guérir la plaie ouverte dans l'humanité et qu'esquissait le mythe de Babel. Contrairement aux rêves des dictateurs, la paix du monde ne peut se réaliser en imposant une langue, une culture, une idéologie : l'impérialisme dissout, disperse, exacerbe les antagonismes. Seul l'Esprit rassemble les hommes dans la diversité de leurs caractères, dans la complémentarité de leurs richesses nationales.
Et le centre, le c½ur du monde, ne sera jamais ni une Tour, ni une Ville sainte mais uniquement la Croix de Jésus.
DANS L'ATTENTE DE L ' ESPRIT
O Eglise sainte et misérable : es-tu capable de te dépouiller de beaucoup de tes certitudes, et surtout de ta tristesse pour retrouver la joie des premiers jours ?
Saint Pierre et ses amis ne se présentaient pas pour prendre la direction du monde, ils ne prononçaient pas de condamnation contre lui, ils n'effrayaient pas par des perspectives apocalyptiques, ils n'appelaient pas à fuir la société, à se distinguer par des vêtements différents, à multiplier édifices et constructions.
Pauvres de tout mais riches de la miséricorde que Jésus avait jetée sur leurs péchés et emportés par la force du Souffle de Dieu, ils ne faisaient pas encore de projet. Avant de faire, ils étaient.
Heureux de croire, heureux de se donner l'accolade, heureux d'espérer, heureux de s'aimer.
Et Marie, la mère de Jésus, la toute-sainte, embrassait Marie-Madeleine, la pécheresse, ainsi que Pierre, le fanfaron très aimé.
Et saint Luc racontera dans son petit livre l'expansion incroyablement rapide de cette communauté. Sous la méfiance générale et les critiques, en quelques dizaines d'années, des communautés semblables naîtront à Antioche, Alexandrie, Ephèse, Corinthe, Rome...
Il nous revient de poursuivre l'½uvre.
Seul l'Esprit...si nous prions...et si nous acceptons son Souffle ... !!!