Fête de St Dominique
2 Tm 4,1-8 ; Mt 5,13-19.
Dominique notre Père, comme Jésus, ne nous a laissé ni traités de théologie, ni commentaires bibliques, ni aucun de ses sermons. Il ne se laisse rejoindre aujourd'hui que dans des témoignages sur sa manière de vivre l'Évangile.
Il est en effet devenu grand au sein de l'Église, non parce qu'il a proclamé l'Évangile avec éloquence mais parce qu'il s'est laissé habiter par l'Esprit Saint qui a pu agir dans toute sa vie pour faire de lui une prédication vivante. Comme le dit si bien Bernanos à propos de lui, « l'½uvre du saint est sa vie même et il est tout entier dans sa vie ».
Selon la déposition du frère Jean d'Espagne au procès de canonisation de Bologne, saint Dominique « portait toujours sur lui l'évangile de saint Matthieu et les épîtres de saint Paul ». Dominique connaissait donc bien le premier évangile et il nous aide à comprendre pourquoi Matthieu place l'enseignement du commandement de l'amour en second, après sa mise en pratique : « Celui qui mettra en pratique et enseignera la loi d'amour sera déclaré grand dans le Royaume des cieux. »
L'auteur de la deuxième lettre à Timothée s'adresse à un responsable de l'Église des premiers temps. Il lui demande littéralement de « faire une ½uvre d'évangéliste » (????? ??????? ????????????). Expression qui définit très bien l'idéal entrevu par Dominique et qui reste le nôtre : devenir tout entier un homme d'Évangile, quelqu'un qui met en pratique l'Évangile dans son existence afin de pouvoir l'annoncer. Quelqu'un qui « fait ½uvre », qui « met en pratique », la loi d'amour et dont toute la vie révèle la voie de salut ouverte par le Dieu des miséricordes.
Le cistercien Pierre des Vaux-de-Cernay exprimait cela avec les mots du 13e siècle : « Pratiquer et prêcher, selon l'exemple du bon Maître, imiter en tout la forme de vie des apôtres. » Pratiquer et prêcher, facere et docere, cette formule traditionnelle conserve bien le primat de la praxis sur le discours, primat que nous avons noté dans la formulation même de Matthieu.
Chers frères, s½urs et amis, nous sommes tous appelés à vivre cet idéal évangélique de Dominique, chacun à notre manière. Aujourd'hui, plus que jamais, l'annonce de l'Évangile par le discours ne suffit plus. Ce qui compte avant tout c'est de témoigner de la vérité de l'Évangile par notre manière d'en vivre très concrètement dans nos communautés, nos familles et nos lieux de vie.
Illusoire serait en effet une recherche de Dieu qui exclurait le souci du prochain, du frère, de l'ami, de l'étranger... L'intuition de notre Père saint Dominique est dans ceci : le croyant est un terrain où la graine de la Parole produit du fruit, où la Bonne Nouvelle de la Résurrection prend chair, prend visage, prend vie. Dominique ne fut pas le prédicateur d'un salut, mais le disciple d'un Sauveur !
En cette fête de saint Dominique, quelque peu assombrie par le décès tout récent de notre frère Jean-Marie, je vous invite à prier au cours de cette eucharistie pour lui et je voudrais nous inviter à être, partout où nous vivons, des infatigables évangélisateurs par toute votre vie et tout ce que nous sommes. Devenons ensemble de vrais disciples de Jésus, à la suite de Dominique. Religieux ou laïcs dominicains, amis de l'Ordre de Saint Dominique, que la mise en pratique du commandement de l'amour soit notre manière tout simplement dominicaine d'annoncer la bonne nouvelle du Christ. Bonne fête à tous.
Frère François-Dominique CHARLES o.p.