Fête de la Sainte Trinité

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A, B, C
Année: 2005-2006

 

Mt, 28, 16-20

A l'Eucharistie, nous sommes accueillis par l'antique salutation (déjà utilisée par saint Paul) : " La grâce de notre Seigneur Jésus, l'amour de Dieu le Père, la communion du Saint-Esprit soient toujours avec vous" ( 2 Cor 12, 13) ; toutes nos prières y sont adressées au PERE par Jésus-Christ ton FILS.....dans l'unité du SAINT-ESPRIT... ; et à la fin, nous sommes renvoyés dans le monde avec la bénédiction :"Que Dieu tout-puissant vous bénisse : le Père, le Fils et le Saint-Esprit"

Ainsi tout le fruit du mystère pascal que nous venons de célébrer depuis le Jeudi-Saint jusqu'à la Pentecôte culmine dans cette révélation de l'identité de DIEU. Mieux encore : dans la communion à ce Mystère divin de la TRI-UNITE.

La finale de l'Evangile de Matthieu, lue ce jour, nous redit que cette Révélation n'est la joie de certains que pour devenir le bonheur de tous.

LA RENCONTRE DU RESSUSCITÉ

Au temps de Pâques, les 11 disciples s'en allèrent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre.

Quand ils le virent, ils se prosternèrent mais certains eurent des doutes.

Le tombeau où le corps de Jésus a été déposé n'est pas un lieu de pèlerinage où viendraient pleurer les amis d'un prophète assassiné. Le désarroi devant la disparition de Jésus devient un appel : Jésus est ressuscité, il faut aller en Galilée, retourner au point de départ, là où l'aventure avait débuté, où ces hommes avaient été appelés et s'étaient mis à suivre Jésus, dans cette Galilée où se côtoient Israël et les Nations païennes. C'est chez soi que l'on recommence sa quête.

La scène des retrouvailles est toute simple, sans éclat ni fulgurance spectaculaire. Pas de merveilleux, d'extase, de tonnerre. Mais C'EST LUI VIVANT !!! Muets, les hommes tombent à genoux, dans l'attitude d'adoration. Et pourtant le doute tenaille certains. Car l'amour vrai ne peut contraindre. La foi n'est pas une science qui oblige à la certitude : elle reste toujours acte libre et les questions qu'elle éveille sont là pour inciter à la recherche, à la rencontre plus profonde, au contact plus intime. Jésus ne reproche pas à ses amis de l'avoir trahi : on ne revient pas en arrière. Seul importe l'avenir, l'½uvre à accomplir : trois phrases suffiront à dire l'essentiel.

UNE RÉVÉLATION

Jésus s'approcha d'eux et leur adressa ces paroles :

" Tout pouvoir m'a été donné au ciel et sur la terre".

Jésus étonnait en s'attribuant le titre mystérieux de "Fils de l'homme" : à présent il affirme qu'il est bien effectivement ce personnage évoqué dans la vision majestueuse du prophète Daniel. Celui-ci avait vu comme une symbolisation du déroulement de l'histoire : après la succession des empires monstrueux, sonnera le temps de la fin :

" Avec les nuées du ciel venait comme un Fils d'Homme. Il arriva jusqu'à l'Ancien (image du Dieu éternel)...Et il lui fut donné souveraineté, gloire et royauté. Les gens de tous les peuples le servent. Sa Souveraineté est une souveraineté éternelle qui ne passera pas ( Daniel 7, 13).

En retraite au désert où il méditait sur sa mission reçue au baptême, Jésus avait été tenté : le diable l'avait emmené (symboliquement) sur une haute montagne et lui avait proposé de lui donner la gloire de tous les royaumes de la terre "si tu te prosternes devant moi et m'adores" - c'est-à-dire si tu utilises mes procédés : mensonge, ruse, corruption, haine, armes... Jésus avait catégoriquement rejeté cette proposition et décidé d'accomplir sa mission dans la pauvreté, par la parole (qui laisse à l'autre la liberté), la fragilité et finalement la souffrance et la mort. Parce qu'il a été fidèle à son Père, maintenant celui-ci lui a donné la Souveraineté éternelle. C'est lui le juge de tous les peuples.

LA MISSION

"Donc allez ! ... De toutes les nations faites des disciples :

les baptisant au nom du PERE et du FILS et du SAINT ESPRIT

et leur apprenant à garder tous les commandements que je vous ai donnés"

La convocation près du Ressuscité devient provocation à rencontrer tous les hommes car Jésus est bien "le sauveur du Monde" et l'événement pascal le pivot de l'histoire universelle. Il n'y aura pas d'étape suivante. Jamais la science, l'art, la philosophie, la morale, le génie ne pourront réaliser ce que Jésus a fait. Aussi pour le bonheur des hommes, pour la réussite de l'histoire, il faut que ses disciples le DISENT, le racontent. Ils n'imposeront rien : ils proposeront. Ils ne convertiront pas tout le monde mais, parmi tous les peuples, dans toutes les classes sociales, ils "feront des disciples" comme eux-mêmes l'ont été. A l'écoute de l'Evangile, des personnes seront touchées, elles commenceront à "suivre Jésus", elles renonceront à leurs croyances et leurs préjugés pour s'attacher à lui.

-- Afin de marquer leur accueil, on les baptisera, on les plongera (c'est le sens du verbe "baptiser") dans la Vie du PERE, du FILS et de l'ESPRIT - formule qui sans doute est celle de la liturgie baptismale en usage dans les communautés de Matthieu. Daniel n'avait-il pas fait entendre que "LE FILS DE L'HOMME" était aussi "LA COMMUNAUTE DES SAINTS DU TRES HAUT" ? ( Dan 7, 18)

-- Ensuite on poursuivra un long et incessant travail de formation. La foi n'est pas inscription sur un registre, héritage familial, religion acquise une fois pour toutes. Le baptisé ne se croira pas chrétien à la communion solennelle ni même par l'observance de rites. La foi exige un don total, la perte des sécurités, l'apprentissage des m½urs évangéliques. Il faut du temps pour pratiquer les ordres de Jésus (il ne dit pas "conseils") : renoncer à soi-même, porter sa croix, pardonner 70 fois 7 fois, vivre les béatitudes des pauvres et des souffrants, partager ses biens.... La vie évangélique ne comporte rien de facultatif. Etre disciple est un honneur et aussi une tâche jamais finie.

LA PROMESSE SOLENNELLE

" Et moi, je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde"

La prophétie d'Isaïe, répétée lors de l'annonce à Joseph, est réalisée : " La vierge enfantera un fils auquel on donnera le nom d'EMMANUEL - ce qui se traduit DIEU AVEC NOUS" (Isaïe 7, 14 = Matth 1, 23). La nouvelle présence de Jésus aux siens ne sera plus dépendante de l'espace, perdue et retrouvée au gré des circonstances, mais incessante et inamissible. Jésus a averti les siens : " Vous serez haïs de tous à cause de moi" : dans les tempêtes des épreuves, les disciples garderont un courage indéfectible, sûrs d'être soutenus par Celui qui est Seigneur du monde...mais qui ne l'est devenu qu'en passant par la croix.