Personne ne connaît la date de naissance de Jésus. C'est seulement au 4ème siècle qu'on la fixa au 25 décembre qui était un jour de grandes festivités. En effet après la descente dans le froid et les ténèbres de l'hiver, les nuits allaient commencer à diminuer et les jours à s'allonger : aussi on se réjouissait et on s'offrait des cadeaux pour fêter la victoire du soleil. L'Eglise s'efforça d'apprendre au peuple que la véritable Lumière du monde, c'était Jésus ; c'est Lui qui nous fait sortir des ténèbres du mal et qui apporte au monde le salut de Dieu.
Or que voyons-nous ? Dans notre Occident si longtemps marqué par le christianisme, les traces de l'Evangile disparaissent et Noël est redevenu une fête païenne. Le pauvre bébé de Bethléem a fait place au père Noël ; les vitrines ne montrent plus des crèches mais des monceaux de marchandises. "Faisons comme si Dieu n'existait pas."
Certes le monde a fait des progrès gigantesques, il nous a apporté des bienfaits considérables, une part de l'humanité jouit d'un niveau de vie stupéfiant. Mais comment nier que ce monde reste à sauver ? La misère tue des milliers d'enfants tous les jours ; des guerres éclatent partout ; les drogues, les alcools, le sida font des ravages. Et dans notre Occident si riche, on ne compte pas les sans-logis, les affamés, les femmes battues, les ouvriers renvoyés au chômage. Et on s'effraie d'apprendre que le suicide reste la première cause de mort des jeunes de 20 ans. Et voici que nous sommes en train de détruire la planète : le climat se réchauffe, des espèces disparaissent, le désert s'étend, l'eau manque.
MARIE UNE FEMME QUI REFLECHIT
En cette nuit, notre mémoire remonte l'histoire et s'arrête sur une toute jeune femme qui, quelque part en Judée, contemple son nouveau-né endormi sur la paille d'une crèche." Que suis-je en train de vivre ?". L'évangéliste en effet note comme très importante cette attitude de Marie :
" Quant à Marie, elle retenait tous ces événements et les méditait en son c½ur".
Petite paysanne de Nazareth, soudain, Dieu l'avait interpellée, lui avait donné la plus extraordinaire des vocations : être mère du Messie. Un Messie qui serait Fils de Dieu, Roi d'un royaume éternel. Puis elle avait visité sa cousine et ensemble, prises par une folle allégresse, elles avaient chanté : " Dieu est magnifique, il fait pour nous des merveilles, il choisit les pauvres, et renverse les orgueilleux..." Et voilà que 9 mois plus tard, elle se retrouvait loin de chez elle, acculée à la plus extrême pauvreté, n'ayant d'autre berceau pour son bébé qu'une crèche avec un peu de paille. Et quelques petits gamins pouilleux étaient survenus dans la nuit, s'émerveillant de ce spectacle... Rien n'avait changé. Le monde continuait à tourner, l'Empire romain se croyait immortel, les commerçants faisaient des affaires, les cérémonies se déroulaient au temple, les malades gémissaient sur leur couche. Que voulait donc Dieu ?... Marie cherche à percer le mystère. Mais elle a fait l'essentiel : elle y a consenti.
LE CHRETIEN CHERCHE LE SENS DE L'HISTOIRE
Près de sa crèche, aujourd'hui, le chrétien imite Marie : il réfléchit sur l'histoire qu'il est en train de vivre et dont il est un acteur. Il ne se lamente pas sur les malheurs du temps, il ne se perd ni dans les regrets stériles du passé ni dans les rêves utopiques d'un futur paradisiaque. Il est dans l'aujourd'hui de Dieu.
Et il réfléchit. Qui donc est Dieu qui ne déchaîne pas sa colère contre la méchanceté des hommes, qui n'impose pas sa Transcendance, qui ne bouleverse pas l'ordre apparent du monde, qui ne résout pas nos problèmes par un coup de baguette magique ? Qui donc est Dieu pour se faire si faible, si petit, si pauvre ? Un Dieu qui se fait homme pour que nous puissions le regarder, l'accueillir, l'aimer. " Dieu a tant aimé le monde..." ( Jn 3)
Et qui donc est l'homme pour être, à ce point, aimé de Dieu ? Noël est la grande fête qui proclame que "tout homme est une histoire sacrée", que chacun doit être respecté dans son existence, sa vie, son identité. Noël, c'est la paix pour les hommes que Dieu aime
Et qu'est donc l'Eglise ? Elle aussi retient tous les événements et les médite pour tâcher de les interpréter et d'y répondre. Au moment même où elle venait de faire un Concile pour se présenter au monde moderne avec un visage rajeuni, de grandes voix ont retenti qui contestaient son autorité, son carcan moral et l'obscurantisme de ses dogmes. Et des idoles se sont dressées qui tonitruaient d'autres refrains, bien plus rythmés que ses cantiques doucereux.. Et les mains des jeunes, au lieu de s'ouvrir pour recevoir l'Hostie, se sont tendues, avides de drogues et d'alcools. Et des foules de baptisés, hypnotisés par une idéologie qui les persuadait que le bonheur, c'est d'acquérir, d'acheter, d'avoir tout, tout de suite, se sont détournés d'une Eglise qu'ils jugeaient définitivement dépassée.
Et pourtant 40 ans après 68, l'Eglise est là, chahutée par l'histoire mais confiante comme Marie. Ici elle peine mais dans les steppes de Mongolie, comme au c½ur de Pékin, des missionnaires baptisent. Dans la savane du Cameroun ou les contreforts de l'Himalaya, des Filles de la croix, nos voisines, ouvrent des écoles et des dispensaires. Et les pauvres se pressent dans les chapelles
L'Eglise fait mémoire des événements en même temps qu'elle fait mémoire de son Seigneur qui aujourd'hui vient à elle sous forme du Pain à rompre et partager. Ne reposait-il pas, dès sa naissance, dans une "mangeoire" ? N'est-il pas né dans un village qui s'appelle Beth-lehem, qui signifie "maison-du-pain" ? L'Eglise demeure la maison du Père où les frères et s½urs partagent le Pain de Vie pour être habités par le Christ.
Car, comme répétaient les Pères des 1ers siècles : "Dieu s'est fait homme pour que l'homme devienne Dieu"
"N'ayez pas peur : je vous annonce une Bonne Nouvelle pour tous les peuples : aujourd'hui vous est né un Sauveur. Il s'appelle JESUS".