Noël

Auteur: Moore Gareth
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 2003-2004

Pour certains, cette fête de Noël est un moment sentimental et douillet, une fête où on construit des crèches, où on raconte des histoires d'enfants, des histoires peuplées de bébés, d'anges et de bergers, un moment où on donne et reçoit des cadeaux, et où on mange et boit un peu trop. Mais ceux qui viennent à l'église ce soir reconnaissent que c'est beaucoup plus profond que cela. Nous fêtons cette nuit la naissance de Dieu parmi nous, la gloire de Dieu sur la terre. Pour nous, Jésus est Dieu, né de Dieu et lumière née de la lumière. En Jésus, celui qui est éternel et qui n'a ni commencement ni fin, celui qui a créé toutes choses, est né au milieu de sa création - dans un petit village palestinien, et il est né d'une de ses créatures - de la vierge Marie. L'Eglise contemple ce miracle depuis des siècles. Mais pourquoi le contempler maintenant, à minuit le 25 décembre ?

Ce n'est pas par hasard que nous sommes ici en plein hiver et au milieu de la nuit pour célébrer cet événement. En fait, nous ne savons pas à quelle saison Jésus est né, ni à quelle heure. Nous pourrions donc fêter sa naissance en juillet et au milieu du jour. Et pourquoi pas ? Il serait beaucoup plus agréable d'aller à l'église en été. Mais l'Eglise a très tôt choisi ce moment-ci, en hiver et dans la nuit, pour célébrer la naissance de Dieu, et pour une raison évidente. L'hiver est la saison la plus froide, la plus stérile, c'est la saison du gel et de la faim. En hiver, on est le plus loin possible du soleil qui donne la lumière et la chaleur, qui fait pousser les plantes qui nous nourrissent. On est le plus loin possible de la source de la vie. Et au milieu de la nuit il nous manque même le soleil faible d'hiver. Nous sommes entourés d'une obscurité et d'un froid profonds. Malheureux ceux qui doivent être dehors maintenant. Ce n'est pas un moment fait pour les hommes. Toute la nature semble contre nous, c'est le moment le plus dur, le moins humain de l'année. C'est un moment qui symbolise la faiblesse, les besoins et la souffrance humains, un moment noir comme le désespoir.

C'est justement à ce moment symbolique que nous fêtons la naissance de Jésus, parce que c'est à ce moment-ci que nous avons le plus besoin d'une lumière qui nous fasse vivre, qui nous donne de l'espérance, qui nous rende humains. Le fait que nous fêtons la naissaince de Jésus à ce moment nous dit que cette lumière, qui répond à nos besoins les plus profonds, c'est Jésus. Même au milieu de l'obscurité la plus profonde il y a une lumière, une espérance, plus profonde encore, et nous la trouvons en Jésus. Et c'est pourquoi Jésus est né, pourquoi il est là. Si Dieu, en Jésus, est venu partager notre condition humaine, ce n'était pas pour le plaisir. Il est né au milieu de cette nuit obscure et froide, et il subira la souffrance que symbolise cette nuit. Il est venu pour être notre lumière, notre soleil, quitte à vivre lui-même nos ténèbres. C'est surtout pour ceux qui se trouvent dans les ténèbres, ceux qui sont dehors, ceux qui souffrent, qu'il est là. Comme le dit le prophète Isaïe dans la première lecture, c'est pour ceux qui marchent dans les ténèbres que cette grande lumière s'est levée, pour ceux qui habitent le pays de l'ombre qu'elle a resplendi. C'est finalement ceux qui sont dans les ténèbres qui ont besoin de lumière.

L'Evangile nous parle de bergers. A l'époque, les bergers n'étaient pas très respectés. Ils étaient pauvres, méprisés par les bonnes gens, et se trouvaient aux marges de la société. Les bergers dont parle l'évangile passent cette nuit dans les champs. Ils sont, comme les marginalisés d'aujourd'hui, entourés d'obscurité et de froid. C'est à ces bergers que la bonne nouvelle de la venue de la lumière est annoncée, à eux que les anges lumineux chantent « Gloire à Dieu et paix aux hommes ». C'est pour ces bergers et pour ceux qui leur ressemblent que la lumière est née parmi nous. Et c'est aussi pourquoi cette nuit obscure et froide est pour nous un moment de lumière ; et nous sommes là, pas pour nier que la nuit, l'obscurité et le froid soient là, mais pour accepter la lumière que Dieu nous y offre.