Chers amis, J'ai tapé « Noël » sur Google et j'ai trouvé les problèmes des vacanciers, l'adresse du Père Noël, comment rencontrer des petits lutins, les boules, les guirlandes et les sapins, la hotte des cadeaux.... Alors je pose la question : qu'est-ce que Noël pour nous ? Du saint Nicolas coca-cola ? Une illusion infantile un peu prolongée ? Sur quoi repose notre joie ?
Quelle que soit l'ampleur de la crise économique et politique, Dieu est entré dans le temps, il fait corps avec nous. Jésus, Emmanuel. Dieu sauve, Dieu avec nous !
Le père Noël ? Nous n'y avons jamais cru. Nous sommes lucides et conscients. Le massacre des innocents n'est pas loin, la liturgie nous le rappellera dès demain. L'absence de place à l'hôtel, la pauvreté de l'étable et la solitude des parents, nous sortent des rêveries, nous ouvrent les yeux sur l'ampleur des changements à réaliser et nous obligent à la plus grande maturité. Jésus est né sur la paille et mort sur une croix. Aucune fausse publicité dans l'Evangile : il nous est dit de multiples manières qu'il ne faut rien attendre de « merveilleux » ni de « magique », il ne s'agit pas d'un conte de fées.
Pas nécessaire d'être un « sans abri » ni une personne déplacée, nous le voyons tous : rien ne va plus, il y a un vrai « malaise dans la civilisation », et il nous faut innover, renaître, avancer si nous ne voulons pas mourir sur place, asphyxiés !
Si le Royaume de Dieu prend corps dans le monde, si la Parole, le Verbe, l'expression de Dieu prend chair humaine aujourd'hui dans le monde, où le fait-il donc mes amis ? Si ce n'est parmi nous, au milieu de nous, entre nous, en nous ? Chaque fois que nous voulons bien ne pas faire avorter, ne pas étouffer ce que l'Esprit nous inspire comme chemin de vie et de vérité ? Chaque fois que nous tissons les liens relationnels et institutionnels où s'incarne une vraie dynamique d'amour et de solidarité ?
Si le Christ prend corps aujourd'hui, ce n'est pas autrement que par le nôtre, ce n'est pas ailleurs que dans le nôtre, lorsque nous faisons pression sur les blocages pour les écarter et les franchir (Ga 3, 23-29), lorsque nous affrontons les mécanismes d'ennui et de désespoir, pour accueillir la promesse que Dieu nous dit possible, concevoir le futur et enfanter avec lui l'avenir.
Prendre corps, venir au monde, venir au jour : C'est, dans l'amitié du Dieu chrétien, faire le choix de la vie, celui de l'histoire, de l'alliance, de prendre corps, c'est accepter nous aussi, individuellement mais surtout communautairement, d'entrer dans un devenir lent et patient. A l'image de l'enfant, commencer par quelques pleurs, quelques cris, quelques répétitions laborieuses avant de savoir parler ; commencer par quelques chutes, quelques bosses, quelques genoux écorchés avant de savoir marcher ; se perdre dans quelques impasses et retrouver son chemin, connaître quelques refus avant de célébrer l'amitié.
Prendre corps, venir au monde, venir au jour : c'est comme Jésus, s'exposer au froid, à la fragilité, à la mort, risquer la jalousie et le rejet, le massacre des innocents et l'exil. C'est donc grandir et mûrir, s'informer et réfléchir, analyser et s'organiser.
Prendre corps, venir au monde, venir au jour : c'est s'exprimer, questionner, c'est progresser, avancer, créer, communiquer et partager. Et bien sûr, prendre corps, c'est également devenir un point de fidélité, un point de résistance, un point de mire, une cible exposée... mais c'est connaître l'élan de la vie et entrer dans une extraordinaire communion (Mt 5, 11) : le Dieu vivant est présent avec nous et il nous construit (Ep 4, 15).
En vivant ainsi, nous ne sommes pas des « pères-noëls », mais nous vivons tellement proches de Jésus qu'il nous considère comme sa famille, ceux avec qui il partage le même Esprit, les mêmes gènes spirituels, ceux avec qui il fait corps.
« Qui est ma mère, et qui sont mes frères ? Etendant la main sur ses disciples, Jésus dit : Voici ma mère et mes frères. Car, quiconque fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux, celui-là est mon frère, et ma s½ur, et ma mère ». (Mt 12, 48, Mc 3, 33)