Noël

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 2009-2010

Savez-vous que saint Pierre, saint Jean, saint Paul et les premières générations chrétiennes n'ont jamais fêté Noël ? Leur unique fête était la Pâque hebdomadaire: le lendemain du shabbat, ils célébraient Jésus "ressuscité le 1er jour de la semaine". En ce "JOUR DU SEIGNEUR" - en latin "domenica dies"...qui a donné le français DIMANCHE - , ils se réunissaient dans la joie et partageaient dans l'allégresse le REPAS DU SEIGNEUR. Ainsi de semaine en semaine, l'Eglise se constituait, croissait, se consolidait par le mystère pascal.

La naissance de Jésus dans le Pain faisait re-naître l'Eglise dans l'histoire.

Au milieu du 2ème siècle, les Eglises décidèrent de célébrer l'anniversaire annuel de la Résurrection à la première lune du printemps. On y joignit ensuite les 7 semaines jusque la Pentecôte, don de l'Esprit. "La cinquantaine" devint LE GRAND DIMANCHE. L'année avait trouvé son sommet, son centre, son axe.

Et c'est seulement au 4ème siècle que l'on commença à fêter la naissance de Jésus le 25 décembre. Non parce que l'on avait retrouvé la date exacte (oubliée depuis longtemps) mais parce que, en ces jours, éclataient les grandes festivités populaires à la gloire du soleil ("sol invictus"). Voyant les jours s'allonger, la foule extasiée agitait des couronnes de gui, dansait près du sapin toujours vert; on allumait des feux, on s'offrait des cadeaux, on trinquait à tire-larigot. Bonheur: le monde allait sortir du froid et de la nuit pour retrouver la Lumière, la chaleur, la Vie !

La fête de l'avènement du Christ, le 25 décembre, fut un essai de christianiser cette grande festivité païenne. Car s'il était heureux d'entrevoir le printemps et de recommencer un nouveau cycle annuel, les questions fondamentales de l'homme demeuraient: le temps n'est-il qu'un éternel retour des saisons ? comment l'homme doit-il vivre ? où mène l'histoire ? comment vaincre le mal ? ...et la mort ?..

La manifestation de Jésus apportait la réponse aux grandes interrogations de la condition humaine. C'était lui le véritable "soleil de justice". Car les pires ténèbres qui nous emprisonnent, ce sont nos fautes, nos aspirations qui sont restées insatisfaites, ces souffrances que nous avons infligées, cette culpabilité qui nous étreint, ces affections qui ont été piétinées, ces murs qui nous séparent les uns des autres. Nuit épaisse du péché, des actes manqués, des plaies ouvertes, des animosités, des conflits, des guerres.

Et voilà que, modeste et fragile à Bethléem, la présence du Sauveur, en dépit des persécutions, se répandait dans l'univers entier et y apportait la grande Lumière de la Vérité.

Dieu notre Sauveur a manifesté sa Bonté et sa tendresse pour les hommes: il nous a sauvés.

Il l'a fait dans sa miséricorde et non pas à cause d'actes méritoires que nous aurions accomplis par nous-mêmes

( Lettre à Tite, 3 - 2ème lecture de la messe de l'aurore)

Noël n'est pas une réponse théorique à nos problèmes, un discours lénifiant, une envolée théologique. Noël est un ACTE, un acte de Dieu. Dieu n'est pas un mythe, une puissance lointaine, un juge incorruptible, un Tout-Puissant vengeur pas plus qu'il n'est un saint Nicolas bonasse et distributeur de cadeaux. Le nouveau-né de Bethléem est la preuve que Dieu s'approche de nous, qu'il nous aime le premier, qu'il a projet de nous libérer de notre nuit horrible, de nous pardonner nos chutes, de nous guider vers la Lumière Infinie de son Amour infini

Venir comme un nouveau-né endormi sur la paille est le signe qu'il croit en nous: il espère nous changer non plus en nous dictant des lois mais en nous apprenant à aimer.

Car rien n'est plus fragile, plus exposé qu'un nouveau-né d'homme: laissé à lui-même il meurt.

L'enfant de Dieu nous dit: regarde-moi, veille sur moi. Ne me demande pas des cadeaux: je suis le cadeau.

Ne me laisse pas seul, parle-moi, accueille-moi dans ta vie, aide-moi à grandir dans ton c½ur.

D'abord petite flamme silencieuse, ta foi deviendra clarté au milieu de tes brouillards, elle sera feu qui te réchauffera le c½ur.

-- Fort bien, mais comment retrouver cet événement qui s'éloigne de plus en plus dans le passé ?

Saint Luc, quand il écrit son évangile dans les années 80, nous met sur la piste.

Où est né Jésus ? A Bethléem, un nom qui signifie "maison-du-pain".

Comment est-il ? "Emmailloté" (3 fois répété) comme plus tard, il sera un corps inerte, "enveloppé dans un linceul"( 23, 53) . Signe de sa déréliction, de la mort par laquelle il devra passer.

Mais à quel endroit est-il déposé ? Dans une crèche, c.à.d. une mangeoire.


LA COMMUNAUTE AUTOUR DE JESUS

On comprend pourquoi les premiers apôtres n'ont pas eu souci de garder mémoire d'une date. En se rendant à l'assemblée chrétienne, le 1er jour de la semaine, ils célébraient le Repas du Seigneur: chaque croyant tendait la main pour recevoir le morceau de Pain et sa paume ouverte devenait comme une crèche.

Plus besoin de pèlerinage vers une terre sainte lointaine: à Corinthe, à Rome, au c½ur de la société païenne, de son idolâtrie et de son tintamarre, l'assemblée chrétienne devenait "la Maison-du-Pain".

Oh, comme aujourd'hui, comme toujours, l'Eglise n'était pas brillante, elle n'avait rien d'une académie de gens parfaits. Mais comment était le premier groupe autour de Jésus ? Les bergers n'étaient pas les blondinets bouclés de nos cartes postales mais des adolescents pas très propres, parfois chapardeurs, méprisés par les pharisiens parce qu'ils n'étaient jamais en règle avec les lois. C'était des pauvres, mais pendant la nuit, ils veillaient, pour quelques sous, sur les troupeaux. Ils s'étaient déplacés, avaient reconnu le signe de Dieu à travers la pauvreté.

Il n'est pas besoin d'un ticket d'entrée ( propreté, bonnes manières, vertus) pour se présenter devant le Sauveur: il suffit de venir tel que l'on est, éveillé dans la nuit du monde, refusant l'opium d'une société de gaspillage.

ET MARIE ?...

Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son c½ur.

A l'Annonciation, il lui avait été révélé que son enfant serait roi d'un royaume éternel et elle se retrouvait loin de chez elle, dans la nuit d'une étable, avec un berceau de paille !!! Quel contraste incompréhensible ! Le Messie qui survient à l'écart, dans le silence et la nuit, ignoré par la majorité.

Dieu vient chez nous de manière déconcertante: sa réalisation ne correspond pas à nos imaginations. Mais Marie sait en qui elle a mis sa confiance: elle s'est donnée pour toujours . Elle retient ces événements qu'il lui est donné de vivre et elle sait que la lumière se fera, que tout cela a un sens caché que Dieu lui découvrira un jour.

Notre société fête un Noël sans Jésus !! Et nous, comment allons-nous faire ?

* En imitant les Anges qui proclament la Bonne Nouvelle:

Aujourd'hui nous est apparu le Sauveur, grande joie pour tous

* En nous joignant à leur ch½ur: et en chantant

"Gloire à Dieu au plus haut des cieux et Paix sur terre aux hommes qu'il aime".

* En suivant les pauvres bergers qui se sont mis en route et ont été remplis d'allégresse:

" Allons jusqu'à Bethléem pour voir..."... et il s'en retournèrent en rendant gloire à Dieu ".

· En imitant Marie qui gardait mémoire de tout et méditait en son c½ur.

Au bout de la nuit, il n'y a pas de nuit mais l'aurore.

Au bout de l'hiver, il n'y a pas l'hiver mais le printemps.

Au bout de la mort, il n'y a pas la mort mais la Vie.

Au bout du désespoir, il n'y a pas le désespoir mais l'espérance.

Au bout de l'humanité, Il n'y a pas l'homme, mais l'HOMME-DIEU.

( Joseph Folliet )