Aujourd'hui, Il n'est pas aisé de prêcher sur la famille, et encore moins sur la sainte famille. L'usage qu'on fait parfois de cette fête, la signification qu'on veut lui conférer : « donner en exemple la famille de Bethléem et de Nazareth, comme modèle de toute famille chrétienne. » C'est un peu dérisoire ! De plus, la famille est tellement éclatée que sa configuration actuelle est de plus en plus éloignée de ce qu'elle fut du temps de jésus ! Aujourd'hui, il y a plusieurs modèles de famille(valables les uns aussi bien que les autres).
Et pourtant, cette fête garde un sens. Nous célébrons la fête de l'enracinement de Jésus dans un couple , dans un village, dans un peuple. La fête de la sainte famille est avant tout, célébration du mystère de l'incarnation, dont elle met en lumière la réalité très concrète. En effet, porté dans le sein d'une femme où il a été formé comme les autres enfants, le Fils de Dieu est né comme eux. Pendant les années de ce qu'on appelle « la vie cachée », Jésus a grandi au même rythme que tous les enfants et dans des conditions semblables aux leurs, dans une famille que rien, apparemment, ne distinguait des autres.
Il a reçu de ses parents et de son entourage une éducation comparable, en tous points et dans tous les domaines, à celle des jeunes garçons de Nazareth. C'est d'eux qu'il a appris, en commençant par balbutier, les mots de la langue dans laquelle il devait annoncer plus tard la bonne nouvelle et révéler les secrets du Père...On le voit, une telle réalité rejoint certaines de nos expériences de famille.
En effet, l'évangile de ce jour, en soulevant les difficultés rencontrés par les parents au niveau des enfants nous rejoint dans l'actualité de la vie en société aujourd'hui. Il montre Marie et Joseph au prise, comme tant des parents, avec cette souffrance d'avoir un enfant « fugueur ». Depuis trois jours, il n'a pas donné signe de vie ! Ce garçon de douze ans, Jésus, a bel et bien « fugué ». Pour une bonne cause peut-être, mais sans prévenir. Tout parent sait que l'enfant qui grandit croit souvent pouvoir être lui-même en s'arrachant à l'emprise parentale.
Au bout d'une recherche angoissée de trois jours, Marie et Joseph retrouve l'enfant Jésus au Temple. Le pré-adolescent a donc décidé de volé de ses propres ailes en choisissant un chemin que parents n'avait pas prévu. Ce désaccord, qui peut se transformer en conflit aigu, bien des parents le connaissent et s'efforcent de le gérer de leur mieux. Voici donc Marie et Joseph face à Jésus, « assis au milieu des docteur de la loi » la stupeur des parents et le douloureux reproche de la mère sont parfaitement compréhensibles. C'est la réponse de Jésus qui surprend : « comment se fait-il que vous m'ayez cherché ? ne saviez-vous pas que je dois être chez mon père ? » Pour le moment, même ses parents ne peuvent pas comprendre . Il faut croire que, jusqu'à sa douzième année, Marie et Joseph n'avaient pas percé le mystère divin de cet enfant. La révélation du mystère de Jésus se fera par étape. La vie ordinaire va reprendre : « il leur était soumis » et grandissait devant Dieu et devant les hommes.
Si Dieu est Père de Jésus, alors, la parole de Dieu nous rappelle le « rôle d'intendant » non seulement de Joseph et Marie, mais aussi de tous parents (exercé )au profit de leur enfant. Ils ne doivent pas oublier qu'ils sont au service d'un mystère beaucoup plus profond : « le mystère de la relation de leur enfant avec son origine, Dieu, son Père. » C'est le message que nous donne , me semble-t-il, la famille de Jésus : à la fois l'extraordinaire responsabilité humaine, et l'absolu dépassement des liens de sang. Nécessité de ces liens charnels qui nous font, et nécessité non moins grande de les relativiser, de les dépasser pour que surgisse la liberté fondamentale de chaque être devant Dieu.
« Par-dessus tout cela, qu'il y ait l'amour » au sein de la famille. Car sans amour, il n'y a ni tendresse, ni bonté, ni douceur, ni support mutuel. Sans amour, la famille n'est que coquille vide, incapable d'être source de vie.