Sixième dimanche de Pâques

Auteur: Michel Van Aerde
Date de rédaction: 11/05/15
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2014-2015

« Voici ce que je vous commande : c’est de vous aimer les uns les autres. » L’amour, dans l’évangile, ne se présente pas comme un sentiment. Je répète car, à force de l’entendre, nous ne l’entendons plus : l’amour n’est pas un sentiment. C’est un commandement. « Voici ce que je vous commande : c’est de vous aimer les uns les autres. » Jésus nous commande ce qui, dans le langage courant, « ne se commande pas ». Si nous pensons que l’amour est de l’ordre du ressenti, nous ne pouvons pas comprendre ce que Jésus nous dit.

Les sentiments, c’est important. Mais la volonté, c’est important aussi. Et pour aimer,  il ne suffit pas toujours d’avoir du sentiment, il faut souvent le vouloir, et le vouloir intelligemment. Dans le monde culturel où nous vivons, il me semble qu’il y a là un point de clivage, une particularité qui mérite que l’on en prenne conscience. Quand les chrétiens parlent de l’amour, ils n’entendent peut-être pas la même chose que ce que l’on entend dans les émissions de variétés à la télévision. Vous connaissez ces phrases irresponsables : « je t’aimais, c’était bien, je ne t’aime plus, c’est ainsi… il faut être sincère, il faut accepter ce qui est ». Non ! Dire « je t’aime », pour nous, c’est une décision. On peut aller jusqu’à aimer son ennemi. Et ceci est d’une extrême lucidité car l’expérience nous l’apprend, le plus proche, ou la plus proche, peut parfois être perçu comme l’ennemi.
On le voit, la confusion est totale, entre ce que le mot amour signifie pour certains et ce que le mot amour peut signifier pour nous. Et je pense qu’il en est de même pour le mot « Dieu ». Jésus a été exécuté au nom de Dieu. Il nous avertit : « certains vous tueront en pensant rendre un culte à Dieu ». Le mot Dieu, comme le mot amour, sont des mots qui ont beaucoup souffert, et c’est normal puisque « Dieu est amour ». Il s’agit du même et unique mystère. Devant le mot Dieu comme devant le mot amour, nous pouvons nous poser bien des questions. Et finalement, nous pouvons reconnaître notre ignorance : nous ne savons pas ce dont il s’agit. Nous avons grand besoin d’une révélation.
« Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. »
Comme je vous ai aimés… Tout est là. Il ne s’agit pas d’un enseignement théorique, il ne s’agit pas non plus de travaux pratiques. Jésus n’est pas un enseignant. Il est un initiateur. Il nous introduit dans une connaissance pratique, qui part de son exemple concret et d’une expérience partagée.
Il nous a choisis. Cela suppose une décision, un engagement. Cet engagement est d’abord le sien : « ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis ». Saint Paul dira qu’il a fait le premier pas. Il a pris l’initiative, il nous a aimés alors que nous n’étions pas aimables du tout. En réciprocité, il nous est demandé d’aimer, comme il nous le commande, c’est à dire d’aimer comme il nous a aimés.
En entrant dans cette dynamique, dans ce mystère et dans cette expérience nouvelle, nous serons ses amis. Non pas des serviteurs, car s’il nous a choisis, il nous a choisis comme amis. Il nous considère comme ses amis. Il souhaite que nous soyons ses amis, dans une réciprocité qu’il peut souhaiter, mais qu’il ne peut pas imposer.
Il peut nous montrer la voie : « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis ». Il le dit et il le fait. Il peut nous encourager « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. ». Il peut nous rassurer : tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous le donnera. »

Aimer, c’est donc tout un art, et cela s’apprend. On peut le faire avec effort, puis avec goût et finalement y trouver la joie. Le sentiment n’est pas nécessairement présent au tout début. Il y a des moments où il faut s’accrocher, où il faut le vouloir, où il faut tenir dans l’adversité. Et puis cela vient plus simplement, comme allant de soi, comme une seconde nature, comme une passion et même comme une résurrection.

Aimer c’est tout un art, et cela n’est pas facultatif. Nous sommes faits pour aimer. « Celui qui aime connaît Dieu » : « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. ».