Quatrième Dimanche de Pâques (année C)

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 12/05/19
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : C
Année: 2018-2019

Inadmissible,  c’est tout a fait inadmissible qu’on puisse comparer le peuple de Dieu à un troupeau de moutons.  Quelle insulte ! Nous sommes tous des adultes, et pas des animaux bêlant, soumis à l’autorité d’un chef, fût-il un bon pasteur.  C’est avec raison que l’on peut réagir face à une conception infantilisante et humiliante du peuple chrétien et c’est avec raison que les libres penseurs peuvent se révolter contre une certaine conception de l’Eglise hiérarchique et dominatrice.

  Et cette révolte est d’autant plus justifiée qu’au siècle dernier, pendant la Deuxième Guerre mondiale, on a vu des peuples réduits à l’esclavage obéir aveuglement à leur guide et à leur pasteur.

            Et pourtant, l’homme ne peut pas rester sans engagement.  Ce qui distingue l’adulte de l’adolescent, c’est son engagement.  L’enfant est tout entier dépendant de ses parents, l’adolescent coupe le cordon ombilical et affirme sa liberté de pensée et d’agir.  Mais ce n’est qu’une étape en attendant le choix décisif de la vie.  Un jour ou l’autre, il faut choisir son chemin et se donner tout entier à lui.  C’est un peu cela qui fait la grandeur d’une personne humaine : cette capacité de se donner tout entier à quelque chose ou à quelqu’un et de réussir à rester fidèle à cet engagement. 

            Et nous, chrétiens, nous affirmons que nous nous donnons tout entiers au Christ comme lui s’est tout entier donné à nous.  C’est cette passion amoureuse qui nous construit et nous édifie.  Et cela n’a rien d’avilissant ou d’humiliant.  Au contraire, c’est une formidable exigence d’inventivité et de créativité.  Abraham fut le premier à se donner tout entier à Dieu.  Il a quitté les rives de son enfance aux bords de l’Euphrate.  Il est parti dans le pays de l’âge adulte, en Palestine, et c’est là qu’il a dû trouver sans cesse de nouvelles solutions aux défis qu’on lui lançait.  David est un autre bel exemple de cet engagement pour le Seigneur.  Il n’est pas resté inactif et pleurnichant.  Il s’est levé, il a rassemblé les tribus dispersées, il en a fait un royaume fort, autonome et indépendant.  Mais c’est à l’heure du succès qu’il s’est laissé grisé par ses réussites.  Une fois installé à Jérusalem il a pris la femme d’un autre et a fait tuer le mari trompé.  Mais il a reconnu sa faute.  Il a reconnu que, même s’il était roi, il n’était pas maître de sa vie et de la vie des autres.  Il y avait quelqu’un de plus grand que lui, qu’il fallait suivre, qu’il fallait respecter.

            Et c’est là le grand défi qui nous est lancé : reconnaître que le respect de Dieu entraîne le respect de l’autre et de soi-même, et cela permet toutes les audaces.  Il est curieux de noter que les grands vainqueurs de la liberté à la fin de la Deuxième Guerre mondiale était de bons maris : le Général de Gaulle, Winston Churchill, le président Roosevelt.  C’est comme si cette complicité vécue dans le couple avait été pour eux un soutien et un réconfort dans les pires difficultés.

            Oui, ces grands hommes avaient sans doute l’honnêteté de reconnaître que sans leur conjoint la vie n’aurait pas de sens, n’aurait pas le même sens.  De la même façon, nous sommes aujourd’hui invités à reconnaître que sans Dieu la vie n’aurait pas de sens et que grâce à lui la vie prend tout son sens.