31ème dimanche du temps ordinaire (année C)

Auteur: Didier Croonenberghs
Date de rédaction: 3/11/19
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2018-2019

[ Textes liturgiques ]

« Zachée était de petite taille » nous dit l’évangéliste.  C’est donc un petit monsieur… verticalement contrarié.
Et comme si cela ne suffisait pas à souligner sa bassesse, nous découvrons qu’il est aussi socialement limité, mal vu de la foule, lui le collecteur d’impôts, collaborant avec l’envahisseur romain…
Et comme si cela ne suffisait pas à souligner sa petitesse,  notre petit Zachée s’abaisse à monter sur un arbre comme un petit enfant, 
nous montrant ainsi un comportement quelque peu limité…
Et comme si cela ne suffisait pas à souligner sa petitesse, 
Luc précise que Zachée monte sur un sycomore, un arbre léger, un arbre mal vu dans la culture juive de l’époque ! 
Et comme si tout cela ne suffisait pas,  Luc campe cette histoire à Jéricho, la ville la plus basse du monde, à près de 300 mètres en dessous du niveau de la mer. 
Zachée, notre petit monsieur qui s’enrichît sur le dos des gens 
est vraiment au point le plus bas !
 Avec l’histoire de Zachée, nous apercevons l’en-bas, nous imaginons le fond de ce que l’humain peut toucher, traverser, ou vivre. La dépression, la trahison, l'inavouable, la vie broyée, la déchéance, la folie, l'exclusion, la maladie : voilà l’en-bas. 
Zachée sur le sycomore de Jéricho, c’est l’image de notre petitesse,
Lorsque nous nous élevons seul au détriment des autres.
c’est l’image de notre faiblesse, 
de notre incapacité à viser haut, à prendre de la vraie hauteur.
Mais Zachée, c’est aussi le désir de voir, 
Oui, Zachée, le mal vu, veut voir… 
Dans sa pauvre vie, il y a au fond de lui sa seule vraie richesse : 
ce désir que personne ne peut lui prendre.



Quel que soit notre chemin, nous sommes comme Zachée, avec un désir de voir, même si la foule, le regard des autres, nous empêche parfois d’être nous-même ou de discerner l’essentiel.
Nous sommes comme Zachée, dans une société qui nous pousse souvent à nous élever tout seul, par nous-mêmes, à être au-dessus du lot, comme des grands…
Pour nous élever, nous n’avons bien souvent que des petits sycomores autour de nous, fragiles et flexibles. Ils nous promettent une certaine ascension sociale, un bien être personnel, du paraître, de l’avoir. Mais finalement, cela se plie lorsque nous montons dessus… La vie est ainsi faite. Il faut parfois épuiser certaines ressources, faire grandir certains rêves en nous, et découvrir leurs limites…

L’histoire de Zachée nous rappelle que c’est justement là, dans tous ces rêves de fausses grandeurs, dans tous nos petits désirs un peu narcissiques qu’il faut entendre cet extraordinaire appel libérant de l’évangile aujourd’hui: 
Descends vite de ton arbre ! De cet arbre là…

Descends ! Ne t’humilie pas, mais descends vite !
Tu vas découvrir une autre grandeur.
Descends ! Ne te renie pas, mais descends vite !
Tu vas découvrir quelqu’un qui s’est abaissé pour te relever.
Tu vas découvrir que Dieu réside dans ce que tu es, 
et non ce que tu rêves d’être.
Descends de l’arbre de ton pouvoir… de ta sécurité… de ta réussite…
 de la visibilité et de la reconnaissance
Cesse de te construire par toi-même, 
Tu n’y arriveras jamais seul. Tôt ou tard, ton sycomore pliera.
Et laisse Dieu résider chez toi. Accueille celui qui vient te rejoindre sans jugement dans l’en-bas de ta vie, quelle qu’elle soit.
Car le fils de l’homme est venu sauver ce qui était perdu ! 
Voilà la promesse inouïe de l’évangile.
Le fils de l’homme est venu sauver ce qui était perdu !
Ce qui semble en nous perdu, absolument impossible à réaliser à vue humaine,
peut vraiment surgir, si nous laissons notre vie être regardée avec les yeux de Dieu, si nous posons sur elle un regard différent.

Qu’est ce qui en nous semble perdu? 
Un projet? Une conviction? Une relation? 
C’est dans ces lieux-là que la parole de l’Evangile vient s’inscrire !
Non pas pour nous rendre ce qui est perdu !
Mais pour justement sauver ce qui en nous se perd ! Notre joie, notre courage.

Finalement, être perdu… c’est être incapable de perdre,
incapable d’accepter finalement ses limites ! 
Incapable de descendre de son arbre !

Frères et soeurs,
Et si nous faisions réellement le pari que, lorsque notre vie semble un peu basse et plate, le Tout autre peut nous visiter?
Pour cela, comme Zachée, descendons de notre arbre : 
transformons notre désir de voir, et laissons nous regarder par Dieu
Ne cherchons plus à nous élever extérieurement, 
mais à accueillir en nous, Celui qui s’abaisse et nous met debout.
Alors, en descendant de notre sycomore, nous serons comme Zachée, 
le mal vu, qui voit enfin par un autre qui il est réellement, et qu’il est aimé de Dieu. 

Et vous, quel est votre sycomore?