34ème dimanche ordinaire - Christ-Roi

Auteur: Jean-Bertrand Madragule
Date de rédaction: 20/11/22
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2021-2022

Chers frères et sœurs,

Thomas d’Aquin (1225-1274) a dit un jour : « On peut diviser les Dominicains en trois groupes, à savoir les Sages, les Savants et les Pieux. » Les Dominicains pieux sont considérés comme des saints et ils prient pour nous. Les Savants sont des professeurs d’Université qui nous enseignent. Les Sages sont le Prieur du couvent, le Prieur-Provincial d’une Province et le Maître de l’Ordre. Ils ne gouvernent pas sur nous, mais pour nous. Ils exercent leur responsabilité au service des frères. Il y a donc trois dons et tâches différents que Dieu accorde aux frères dominicains.

Aujourd’hui, nous nous intéressons tout particulièrement au gouvernement. Il ne s’agit toutefois pas de l’administration dans l’Ordre des dominicains, mais plutôt du Royaume de Dieu. En effet, l’Église nous invite à célébrer le Christ Roi de l’Univers, tout en nous rappelant les derniers instants de la vie de Jésus sur la Croix.

Comment comprendre cette Royauté de Jésus qui s’affiche sur la Croix ? En quoi consiste cette Royauté ?

Jésus se méfie du vocabulaire royal. Quand on a voulu le faire Roi (Jn 6, 15), après la multiplication de pains, il s’est enfui, seul, dans la montagne. Mais il n’y a qu’une seule situation dans sa vie où Jésus accepte ce titre dérisoire (cf. (Mt 27, Mc 15, Lc 23 et Jn 18). Et c’est le moment où il se tient devant Pilate, les mains ligotées. Et Pilate lui demande alors : « Es-tu le roi des Juifs ? ». C’est la seule fois où Jésus dit : « Oui, je suis Roi », mais en prenant soin de préciser : « Mon Royaume n’est pas de ce monde (cf. Jn 18, 36).

Un tel Roi, dénudé et couvert de blessures, ne nous fait pas penser à un Roi. Le peuple qui, autrefois voulait le faire Roi, observe passivement. Au début de l’Évangile d’aujourd’hui, il a été dit que les chefs du peuple se sont moqués de Jésus et disaient : « Il a sauvé d’autres, qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu » ! (Lc 23, 35) Pour ces autorités, il est désormais clair que ce Jésus n’est pas le Messie choisi par Dieu.

Les soldats romains se moquent aussi de lui : « Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même » ! (Lc 23, 37) Sans oublier l’un des malfaiteurs. « Si tu es le Christ, sauve-toi toi-même et nous aussi » (Lc 23, 39), dit-il à Jésus.

Dans l’Évangile de Luc, un acteur fait exception. Un des deux condamnés, qu’on appelle « le bon larron », reconnaît en effet sa culpabilité : « Après ce que nous avons fait, nous avons ce que nous méritons » (Lc 23, 41), et il reconnaît également l’innocence de Jésus : « Celui-ci n’a rien fait de mal » (Lc 23,41). Toute personne qui craint Dieu devient capable de reconnaître et d’admettre sa propre culpabilité au lieu de la projeter sur les autres.

L’erreur du « mauvais larron » consiste à ne voir la faute que chez les autres. Alors que le jugement dernier est encore à venir pour tous ici sur la terre, la sentence est déjà prononcée pour lui. Plus précisément, il rend lui-même le jugement final. En fait, cela se produit toujours lorsque les gens jugent les autres et disent : « Celui-ci est bon et celui-là est mauvais ».

Au dernier moment de sa vie, « le bon larron » se repent et porte un regard juste sur lui-même et sur Jésus. Mais il va encore plus loin : pour lui, le Crucifié est vraiment le Sauveur, le salut ne vient pas de la mort, mais de sa mort sur la Croix. Il croit en Jésus. C’est ainsi qu’il a obtenu sa place dans l’Évangile et au Paradis. « Le bon larron » repentant est le modèle de tous ceux et celles qui croient en Jésus. Un seul acte de confiance peut effacer toute une vie de péché, comme ce fut le cas pour le publicain, collecteur d’impôts (Lc 18, 14) et la pécheresse repentie qui a montré beaucoup d’amour en essuyant les pieds de Jésus avec ses cheveux (Lc 7, 47).

« Le bon larron » dit avec confiance : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume » (Lc 23, 42). Et la réponse de Jésus fut claire et pleine de promesses : « Aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le paradis » (Lc 23, 43).

Que pouvons-nous retenir de cet Évangile ? Trois points :

Premièrement : Sur la Croix, Jésus est humainement impuissant. Et pourtant, sa gloire se révèle aux yeux de la foi. Cet homme à la couronne d’épines est du début à la fin le Sauveur, le Roi pour ceux et celles qui ont échoué. Jésus est le seul qui puisse encore donner un sens à ma vie ratée.

Deuxièmement : C’est précisément parce que « le bon larron » se repent ainsi de ses crimes et se tourne vers Jésus avec espoir qu’il est pardonné. Autrement dit, en contemplant le Crucifié, nous pouvons voir que, malgré l’absence de perspective et d’issue, il existe malgré tout un espoir d’être sauvé. Dans notre société, combien de personnes échouent aujourd’hui chez nous ? : on y trouve des individus dont la vie a totalement échoué, des mariages qui ont échoué, des familles, des amitiés qui se sont brisées, des voisinages qui s’évitent. Le règne de Jésus consiste à donner l’espoir aux cœurs contrits.

Et enfin troisièmement : Sur la Croix, Jésus montre encore une fois quel est le seul but de son Royaume : Servir les hommes et les femmes. Nous réalisons que le pouvoir signifie quelque chose de complètement différent de ce que nous, les humains, pensons. Le pouvoir n’est pas synonyme de démonstration de force, mais de dévouement jusqu’au bout. Le pouvoir est un service, une charité vécue.

Dans la prière, confions-nous donc chaque jour à Jésus-Christ qui est le Roi de l’Univers ; qu’il soit aussi le Roi dans nos cœurs ! La prière est une œuvre de Foi, d’Espérance et d’Amour. Les trois vertus ne sont pas seulement des mots. Nous sommes invités à les concrétiser dans la vie quotidienne.

Que l’intercession de la Vierge Marie, de saint Joseph et de tous les anges et saints du ciel nous accompagne dans notre vie terrestre, afin que nous puissions un jour entrer dans le Royaume de l’Amour de Dieu au ciel ! Amen.