Pauvre Joseph ! Il ne sait plus où se mettre. Il tourne en rond comme un malheureux. Pourtant il pourrait être heureux et soulagé. Tout s’est bien passé : l’enfant est vivant, Marie est fatiguée, mais en bonne santé. De ce côté, le pire a été évité, mais le reste, tout le reste a été de travers. Quelle idée d’organiser un recensement en plein hiver. Il a fallu traverser la Galilée, la Samarie et la Judée avec une femme prête à accoucher. Rien ne s’est passé comme prévu, ni au moins comme cela aurait dû se passer.
C’est comme cela depuis le début de l’histoire de l’humanité. Quand Dieu créa l’homme, il pensait avoir un compagnon avec qui parler et discuter. C’est pour cela que le soir, après les fortes chaleurs de la journée, il était descendu au jardin de l’Eden, pour rencontrer le premier homme. Mais Adam avait pris le fruit défendu et il s’était caché comme un gamin qui aurait puisé dans le pot de confiture sans autorisation. Cela avait été la même chose après la sortie d’Egypte. Le Seigneur avait offert à Moïse une nouvelle manière de vivre ensemble et voilà que tout le peuple s’était mis à adorer un veau d’or. Rien ne se passe jamais comme prévu, ni comme on voudrait.
Et c’est peut-être là le problème : rien ne se passe comme on voudrait. Cela ne se passe jamais comme on voudrait parce que la vie est beaucoup plus grande, beaucoup plus belle qu’on ne pourrait imaginer. On voudrait goûter tout de suite aux petites joies de la vie alors que nous sommes appelés à nous ouvrir au bonheur de l’amour éternel. Nous sommes parfois comme des petits enfants qui voudraient pouvoir se gaver de bonbons au risque de grossir au lieu de grandir. Car, pour Joseph, ce n’est pas fini. L’enfant est à peine né qu’il faudra partir. Le roi Hérode veut le tuer. Ce sera la fuite en Egypte. Mais ce petit trésor qu’est l’Enfant Jésus est bien plus précieux que tout ce que Joseph avait eu quand il était encore célibataire. Quand on a rencontré l’amour, et surtout l’amour de Dieu, on est prêt à tout quitter pour mieux en profter et mieux le partager.
Mais on est toujours maladroit, comme Joseph quand il tenait Jésus dans ses bras. On ne sait jamais très bien ce qu’on doit faire, mais il faut prendre des décisions tout de suite. Marie a froid. Joseph enlève son manteau et met sur les épaules de Marie qui l’enveloppe autour de Jésus qui baille. Il faut partir. Joseph installe Marie et Jésus sur l’âne, et il marche à pied à leurs côtés sur la route de l’exil. Mais cela n’a pas d’importance parce que Joseph se sent tout entier porté, transporté par l’amour de Dieu et de la Sainte Famille. Il ne verra peut-être jamais Jésus accomplir des miracles, mais il lui aura permis de grandir et de manifester ce qu’il est vraiment, le Fils de Dieu.
Nous sommes tous comme saint Joseph, heureux et maladroits. Nous avons tous reçu le plus beau et le plus merveilleux des cadeaux, l’amour de Dieu. Et nous devons le faire grandir pour lui permettre de rayonner tout autour de nous. Mais Joseph n’était pas seul. Il avait Marie auprès de lui et nous, nous avons l’Eglise autour de nous et en nous. Grâce à l’eucharistie, nous avons la chance de recevoir le corps du Christ en nous. Alors, n’ayons pas peur ! Demain sera peut-être difficile, mais avons le Christ tout près de nous. C’est lui qui nous réchauffe alors que nous déposons notre manteau sur les épaules de notre voisin qui a froid. C’est lui qui nous conduit alors que nous marchons sur les routes de l’exil. C’est lui nous qui invite à sa table pour sa très douce et bonne eucharistie. Goûtons ce bonheur d’avoir Dieu toujours auprès de nous et partageons ce bonheur tous les jours de notre vie.