Toujours dans l’évangile de Jean en ce temps de Carême, nous assistons aujourd’hui à l’achèvement de la Révélation de Dieu dans notre monde.
Dans les évangiles des dimanches précédents nous avons entendu le récit de la guérison d’un aveugle de naissance, puis de celle d’un poli paralysé et aujourd’hui, pour achever une gradation, le récit de la résurrection d’un mort !
Dans ces récits, l’important n’est pas vraiment la personne. Il n’y a pas de tendresse, de compassion, d’humanité. Pour Jean, ce n’est pas la maladie qui compte dans ce cas. C’est la démonstration de la force de l’acte de guérison qui compte. Même pour son ami Lazare, très malade, Jésus ne s’est pas dépêché de venir à son chevet. Un peu comme s’il attendait sa mort pour démontrer publiquement, qu’au-delà de son pouvoir de guérison, il avait le pouvoir sur la mort elle-même.
Etonnant récit de Jésus qui marche vers sa mort prochaine en rendant la vie à son ami Lazare !
Le langage des hommes écrit vie avec un v minuscule. Celui de jésus, que veut nous faire comprendre Jean, s’écrit avec un V majuscule. Il ne s’agit pas de la même vie. La Vie de Dieu est celle qui donne sens à celle des hommes. Celle qui fait voir autrement le monde dans lequel on est. Celle qui permet de se remettre debout pour marcher avec confiance vers son destin. Et même celle qui fait revivre ce qu’on croit déjà mort.
Sans rentrer dans les nombreuses interprétations théologiques de cet évangile, je voudrais m’attarder sur deux petits points qui ne représentent que quelques mots.
Jésus avait quitté la Judée lorsqu’il apprit la maladie grave de son ami Lazare. Il ne se dépêche pas de revenir à son chevet et, deux jours plus tard, en marchant vers le tombeau, le texte nous dit : « jésus pleura » et un peu plus loin « Jésus frémit intérieurement ». Pas une parole, mais de l’émotion visible, de la fragilité humaine pour un Dieu qui, dans quelques instants, donnera l’ordre à Lazare de sortir du tombeau !
Faut-il de ces moment rares et précieux d’humanité pour que Dieu, par jésus, nous devienne crédible ?
Le second passage qui m’interpelle ce soir est l’histoire des bandelettes. A l’injonction de Jésus, Lazare, entouré de bandelettes comme une momie, se lève dans son tombeau. Il est debout, vivant, mais confié, immobile, à ses deux sœurs et à tous ceux qui étaient présent pour accompagner le deuil. « Déliez-le et laissez-le aller » leur dit Jésus. Jésus confie la résurrection de Lazare à ses proches, il nous confie sa résurrection, sa vie qui continue et qui n’a de sens que si nous la recevons pour en vivre, pour aimer et être aimé.
Alors qui sommes-nous dans cet évangile ?
Lazare est debout, ressuscité, vivant, mais peut-être encore très malade et avec une espérance de vie de toute façon limitée !
Beaucoup d’entre nous ont connu chez des proches ce passage difficile par la maladie dont on espère la guérison mais qui parfois fini par la mort. On croit en une résurrection dont on ne sait rien mais dont on espère un grand bonheur. Et si ce temps de Lazare prisonnier de ses bandelettes n’était pas aussi ce temps du non-dit, du pas encore dit, du dire un « je t’aime » un peu oublié ou d’un pardon pas accompli. Le temps de dire et recevoir avec son cœur ce qu’on n’a pas eu le temps ou la possibilité de dire et recevoir avec les yeux et la bouche.
Le temps des bandelettes serait alors le temps de l’au-delà de l’évangile, le temps qui à la fois délivre et relie. Le temps qui prolonge la mort pour découvrir ce qui ne meurt pas.
C’est bientôt Pâques, après nos hivers, la résurrection nous est confiée. Ce n’est pas trop de se le rappeler tous les ans jusqu’au jour ou autour de nous et dans le monde sera vaincue la mort. En nous confiant la Vie, Jésus nous en rend fameusement responsable.
Amen