4ème dimanche de Pâques

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 23/04/23
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A
Année: 2022-2023

Le bon pasteur

Chers petits moutons : vous imaginez un prêtre commencer son homélie en s’adressant à ses paroissiens à les traitant de petits moutons ! Ce serait un peu vexant et même insultant, parce que le mouton n’est pas connu pour être un animal particulièrement intelligent et deuxièmement c’est un animal grégaire, c’est-à-dire qu’il ne fait rien tout seul. Il est toujours en groupe et il fait tout ce que les autres font. Il n’y a chez lui aucune initiative personnelle, ni surtout pas de réalisations belles, grandes, dont il puisse être fier. Un mouton, cela broute l’herbe et cela suit les ordres du chien.

Alors, quelle drôle d’idée pour Jésus de choisir les moutons comme exemples de vie chrétienne ! Il est vrai qu’il n’en avait pas d’autre autour de lui. Il n’y avait pas de kangourou, ni de vaches bien grasses. La Palestine, c’est une région rocailleuse, où poussent quelques touffes d’herbe ici et là. Une vache ne pourrait pas survivre avec les quelques touffes d’herbes qui meurent de soif sous le soleil ardent du Moyen Orient. Les chèvres et les moutons, eux, peuvent trouver ce qu’il leur faut. Mais il faut pour cela qu’ils marchent, et qu’ils marchent beaucoup. C’est pour cela que, dans ces pays-là, les moutons passent d’un terrain caillouteux à un autre, et ils passent la journée ainsi à cheminer.

Et c’est là que le berger joue un rôle essentiel. Le mouton a le museau tourné vers le sol, vers les brins d’herbe autour de lui. Il ne voit pas qu’en marchant ainsi il s’approche de plus en plus d’un gouffre, d’un précipice. Le berger, lui, est debout et il voit loin. Il connaît aussi la région. Il sait où se trouvent les prairies les plus vertes et où se cachent les ravins où les moutons pourraient tomber. C’est pour cela que le berger de temps en temps prend une pierre et la lance sur le dos d’un mouton qui va trop loin à droite ou à gauche. C’est pour l’avertir. Cela fait mal évidemment. Le mouton sursaute et bêle de douleur, mais il change de direction. Et ainsi il est sauvé.

Nous aussi, nous recevons des pierres dans le dos, des petites et des grosses. Elles sont parfois justifiées, et parfois on ne les comprend pas. C’est peut-être le bon berger qui les a lancées. De toutes façons, nous pouvons méditer le psaume 22 que nous venons de lire avant l’évangile : « le Seigneur est mon berger ; je ne manque de rien. » Et pour bien voir que c’est vrai, je vous invite à lire ce psaume à l’envers : « le Seigneur est un mauvais berger ; avec lui, je manque de tout ; sur des prairies brûlées par le soleil, il me conduit. » Quand on lit ce psaume à l’envers, on est pris de peur. On se rend compte que, sans le Seigneur, la vie serait un cauchemar, tandis que, grâce à lui, on peut affronter toutes les difficultés.

Regardez ce que dit le psaume un peu plus loin : « si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal. » Cela me fait penser à l’image de saint Christophe qui porte dans ses bras un petit enfant et qui, avec lui, traverse, une rivière tumultueuse. L’enfant est en sécurité dans les bras de cet homme fort qui a l’eau jusqu’au genou, mais qui porte le petit garçon et qui le conduit sur l’autre rive où tous deux seront en sécurité.

Cela me paraît une belle image à méditer : le Christ qui, comme le bon berger, nous porte dans ses bras quand nous traversons les zones tumultueuses de notre vie. Ce n’est pas cela qui empêchera l’eau de courir avec violence autour de nous, mais c’est Jésus qui nous permettra de tenir le coup, de sortir indemne de cette passe difficile et d’arriver dans une zone plus calme où, épuisés, nous pourrons nous reposer.
           
En attendant, sur cette route difficile de la vie, Dieu veille sur nous : il nous lance une pierre pour nous écarter du ravin de la mort et il nous apporte la nourriture nécessaire pour cette longue traversée, la communion à son corps et à son sang.

Oui, le Seigneur est mon berger ; je ne manque de rien car il est là auprès de moi.