La liturgie de ce jour nous invite à méditer les béatitudes. C’est à la fois très beau et un peu difficile à comprendre.
C’est difficile à comprendre parce que Jésus proclame bienheureux tous ceux qui mettent en pratique ces différentes béatitudes. La sainteté ne consiste donc pas tout d’abord en une liste de péchés qu’il faut éviter. Et c’est là toute la différence entre l’Ancien et le Nouveau Testament. Dans l’Ancien Testament, la loi fondamentale, ce sont les dix commandements, qui sont presque tous négatifs : tu ne tueras pas, tu ne commettras pas d’adultère, tu ne mentiras pas. Mais la sainteté, c’est beaucoup plus que cela. C’est comme dans un couple : l’amour conjugal ne consiste pas à ne pas commettre d’infidélité. L’amour consiste à faire plaisir à l’autre, à pouvoir l’écouter avec intérêt, à pouvoir lui rendre de petits services inattendus.
C’est ce que Dieu a fait avec nous tout au long de l’histoire de l’humanité. Après avoir créé l’homme, il ne l’a pas abandonné. Il a tissé des vêtements pour Adam et Eve après la première faute. Il a même protégé Caïn après son meurtre. Il a tiré le peuple hébreu de l’esclavage en Egypte. Il nous a envoyé son Fils pour nous sauver. Et il veille à chaque instant sur chacun d’entre nous. C’est pour nous un modèle. Il faudrait pouvoir faire comme lui : trouver une manière nouvelle d’exprimer notre amour.
Et les béatitudes peuvent constituer cette nouvelle règle de la vie. Tout d’abord, parce que c’est Jésus qui nous les a données et que cela constitue pour nous la loi nouvelle, celle de l’Evangile. Mais les béatitudes ne sont pas faciles à comprendre, ni à mettre en pratique. Qu’est-ce que cela veut dire être doux, être miséricordieux ? Il y a pourtant une piste intéressante : plusieurs de ces béatitudes expriment un bouleversement, comme heureux ceux qui pleurent, ils seront consolés. On peut mettre cela en lien avec cette autre béatitude: heureux les artisans de paix. Et c’est là sans doute une bonne et vraie piste pour appliquer ce nouveau programme de vie: renverser les forces du mal, retourner les situations de détresse, briser les murs de la solitude, apporter un peu de joie et de lumière aux malades et aux plus démunis. C’est ce que le Christ a apporté sur terre et c’est ce qu’il nous apporte aujourd’hui encore dans la sainte Eucharistie: la victoire de la vie sur la mort, de l’amour sur la haine, du pardon sur la vengeance.
La sainteté n’est donc pas une vie faite de contraintes et d’interdictions. Elle est bien au contraire faire d’inventions pour faire briller de joie les yeux qui sont remplis de larmes.