Le voilà, le roi de l’univers, un homme pendu sur une croix, un condamné, rejeté par son peuple, abandonné par tous, même par ses amis. C’est justement contre les dictateurs politiques, contre tous ceux qui condamnent les autres à mort que le pape XI a proclamé le Christ roi de l’univers. C’est parce que Dieu n’est pas du côté de ceux qui tuent, mais du côté de ceux qui sont tués.
Il pourrait le faire, lui, Dieu, tuer beaucoup de monde. C’était cela que les Juifs avaient tout d’abord imaginé : le Seigneur pouvait tuer tous les ennemis d’Israël. C’est comme cela qu’ils avaient chanté les exploits militaires réalisés par Samson contre les Philistins, par le roi David contre ses ennemis. C’était le Seigneur qui prenait l’épée et qui menait la guerre. et pourtant, à la même époque, c’est-à-dire dans l’Ancien Testament, on commençait à voir les choses autrement. Pendant l’Exode, pendant la traversée du désert depuis l’Egypte jusqu’à la Terre promise, le peuple hébreu s’était souvent révolté parce qu’il avait faim, parce qu’il avait soif, parce qu’il voulait une maison, un foyer, la paix et la tranquillité. Ils avaient même fait un veau en or parce que Moïse était resté trop longtemps sur le mont Sinaï. Le Seigneur aurait pu détruire tout ce peuple ingrat, à la nuque raide et toujours en révolte, mais il ne l’a pas fait, justement parce qu’il est un roi, un vrai chef, maître de ses passions et de ses sentiments. Il aurait pu être fâché parce qu’il avait été trahi et humilié, abandonné et rejeté, mais son amour est plus fort que les vents contraires de la vie. Ce n’est pas un gros nuage qui pourrait éteindre le soleil de son amour.
C’est ce que tant d’hommes et de femmes ont bien compris au cours de l’histoire de l’Eglise. Ils ont fait preuve de miséricorde. C’est comme cela qu’on appelle les services rendus dont on parle dans l’évangile d’aujourd’hui: vêtir l’homme nu, nourrir l’affamé, visiter les malades et les prisonniers. C’est ce qu’on appelle les oeuvres de miséricorde. Et ils sont nombreux, tous ceux et toutes celles qui ont réalisé un travail admirable dans ce domaine pendant le moyen âge avec les béguines, et au dix-neuvième siècle avec cette multitude de religieuses. Elles ont tenu des écoles dans les petits villages et des hôpitaux dans les grandes villes. C’étaient toutes de petites reines parce que, dans le silence et la discrétion, elles ont soulagé la misère humaine. Elles ont vécu comme le Christ, roi de l’univers: elles étaient emportées par son amour, capables de dépasser toutes les vilénies et les mesquineries de la vie pour apporter l’amour de Dieu aux plus petits et aux plus démunis.
C’est cela que le Christ fait aujourd’hui encore une fois dans cette église et partout dans le monde. Il dépasse les horreurs de la guerre et il vient nous offrir son Corps et son Sang, son amour infini. Il nous montre ainsi sa véritable puissance, non pas faite pour détruire, mais utilisée pour construire, reconstruire et redonner de la vie à chacun d’entre nous.