Pentecôte

Auteur: Philippe Cochinaux
Date de rédaction: 15/05/16
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : C
Année: 2015-2016

Un homme célibataire et fortuné venait de mourir.  Tous ses proches, frères et sœurs, neveux et nièces se retrouvent quelques jours plus tard chez le notaire pour la lecture du testament.  Le notaire ouvre l’enveloppe et il lit à l’assemblée présente ce testament qui commence par ses mots : « Henri, tu peux sortir, il n’y a rien pour toi ».  L’homme se leva et quitta la pièce.  Heureusement, les lectures de testament ne sont pas toujours aussi dramatiques mais il faut bien avouer qu’elles sont souvent douloureuses et que le temps des héritages est un moment de tension dans bien des familles.  Il y a toutefois un héritage qui n’apporte que réconfort et bonheur, c’est l’héritage des filles et fils de Dieu. Comme nous venons de l’entendre dans la lettre de saint Paul aux Romains, nous sommes les héritiers du Royaume de Dieu.  Se pose alors la question de savoir comment nous pouvons hériter d’un tel héritage.  Pour ce faire, il est fondamental de revisiter les dix derniers jours que nous venons de vivre.  Jeudi passé, nous avons célébré l’Ascension et depuis ce jour, nous sommes comme des orphelins.  Le Fils de Dieu s’en est allé d’où il était venu.  A sa manière, il reproduit ce que son propre Père avait fait lorsqu’il s’était rétracté en lui-même pour permettre à la Création d’advenir.  Père et Fils nous ont ainsi fait entrer dans le temps de l’absence, pire nous venons de vivre une forme d’expérience d’athéisme.  Le mot peut sembler fort et pourtant, pourtant pendant dix jours, nous avons vécu ce sentiment de vide.  Dieu n’était pas là, Dieu n’était plus là.  En d’autres termes, il n’y avait plus de Dieu sur cette terre.  Notre monde, quant à lui, a continué de tourner malgré cette absence divine.  Nous avons fait l’expérience que Dieu pouvait ne pas être de ce monde. Son absence nous rappelle ainsi qu’il n’est pas une évidence et que nous ne pouvons partir à sa rencontre que par le biais de la foi.  Cette dernière est un mystère qui nous fait entrer au plus profond de nous-même en relation avec ce Dieu Père et Créateur qui, de toute éternité, avait voulu que son Fils se fasse l’un des nôtres en prenant notre condition humaine tellement il se réjouit de notre humanité.  Cette relation nous l’entretenons chaque fois que nous entrons en relation avec notre Dieu dans ces moments de méditation intérieure, dans ce cœur à cœur divin.  Quand nous avons l’occasion de les vivre, nous ressentons une paix intérieure, un bien-être existentiel.  Mais malheureusement, le bruit de la vie reprend souvent le dessus.  Nous nous laissons envahir par une multitude de préoccupations dont certaines sont parfois bien nécessaires il faut le dire.  D’autres peuvent, avec un peu de recul, apparaître comme étant superfétatoires.  Nous nous sentons alors tellement plein de la vie, qu’il n’y a plus d’espace en nous pour une rencontre divine en vérité.  Il est donc heureux que nous ayons eu ce temps d’athéisme, ce sentiment d’absence et de vide de Dieu afin de laisser en nous tout l’espace pour qu’il puisse à nouveau venir prier en nous.  Oui, Dieu aime venir prier en ces êtres que nous sommes mais pour ce faire, il a besoin d’espace, de beaucoup d’espace pour qu’il puisse l’emplir alors de sa présence.  Tel est un des sens de la Pentecôte : souvent nous le prions mais est-ce que nous lui permettons de venir prier en nous ?  Notre Dieu prie en nous lorsque nous faisons taire en nous le bruit de la vie.  Il vient s’installer au cœur de notre silence et y trouve son propre lieu de vie.  Lorsque Dieu prie en nous, il occupe tout notre espace et il nous inspire.  Son inspiration devient ainsi notre propre respiration.  L’Esprit Saint vient nous éclairer, nous inciter parfois aussi nous réveiller pour que nous expirions cette fois par notre manière d’être les uns avec les autres.  Notre expiration donne alors souffle à nos paroles et à nos gestes tout en prenant leur source en Dieu qui se révèle à nous.  Inspiration, respiration et expiration sont les mouvements suscités par l’Esprit de Dieu en chacune et chacun de nous.  Voilà l’héritage qui nous est promis en ce jour de Pentecôte.  Et si nous répondons positivement à l’invitation divine de la foi, nous devenons à notre tour les héritiers de ce mouvement exigeant de l’Esprit.  A nous de le décider pour laisser Dieu advenir au cœur de notre cœur.  Il attend notre consentement.  Ne tardons pas à le lui donner.  Son héritage nous comblera de vie. Amen

Pentecôte

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 15/05/16
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : C
Année: 2015-2016

Comment peut-on parler de l’Esprit Saint ? C’est vraiment un mystère fort compliqué. C’est beaucoup plus facile d’imaginer Dieu le Père et Dieu le Fils. Jésus-Christ, c’est un homme ; c’est le Fils de Dieu fait homme. Il est notre frère et notre Sauveur. Dieu le Père, c’est le créateur et la source de toute vie. Mais le Saint-Esprit , c’est beaucoup plus difficile de se l’imaginer et de se le représenter. Il est vrai que nous somme un peu handicapés, ici, en Occident. Ce n’est pas dans notre culture de parler de forces spirituelles. Cela risque de paraître de la sorcellerie ou de la magie. Non, nous sommes des êtres raisonnables. Nous ne croyons qu’en des choses concrètes et matérielles. C’est pour cela que nous sommes toujours un peu surpris quand nous apprenons que, dans certaines cultures africaines, on parle de l’esprit de la forêt, de l’esprit de la nature, de l’esprit des morts. On a presque un sentiment de répulsion et de rejet face à ce monde insaisissable et menaçant. C’est un peu la faute du Siècle des Lumières. Au dix-huitième siècle, les savants voulaient chasser la superstition et ne garder que la raison. Et ils avaient raison. Les hommes étaient alors bien trop souvent prisonniers de fausses croyances qui les terrorisaient et qui les empêchaient de se développer. Mais on jeté le bébé avec l’eau du bain. On a balayé tout référence à une vie spirituelle. Le ciel est maintenant vide. Il n’y a plus que la terre et le monde matériel. C’est pour cela que c’est si difficile de parler de l’âme, de parler de Dieu. Il n’y plus que des choses raisonnables que l’on peut expliquer ou démontrer. Et pourtant nous sentons spontanément que nous sommes beaucoup plus qu’un morceau de chair ou qu’un cerveau plus ou moins développé. Il suffit de se rappeler que les choses les plus importantes de notre vie, nous ne les avons pas décidées après un long raisonnement, mais sur un coup de cœur. C’est un élan de vie qui nous a poussés à nous marier ou à entrer au couvent. Notre raison a pu éclairer cette décision, mais au départ c’est un grand élan de force et d’amour. Et c’est peut-être cela qui s’est passé pour les apôtres le jour de la Pentecôte. Ils se sont rendus compte que ce Jésus avec lequel ils avaient passé tant de bons moments, il est vraiment vivant et il est vraiment Dieu et il nous aime tellement qu’il nous a tout donné, même sa propre vie. Alors devant cette découverte, ils n’ont pas pu reseter en place. Il a fallu qu’ils se lèvent et qu’ils sortent pour dire et pour crier à tout le monde que le Fils de Dieu est vraiment ressuscité. C’est toujours bouleversant de voir des hommes et des femmes qui explosent de joie et de bonheur parce qu’ils découvrent Dieu et qu’ils le disent. C’est peut-être cela aussi le Saint-Esprit : cette découverte amoureuse et émerveillée de l’amour de Dieu pour chacun d’entre nous. Alors laissons un petit grain de folie envahir notre vie et reconnaissons avec reconnaissance tout ce que Dieu a fait et fait pour nous.

7ème dimanche de Pâques

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 5/05/16
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : C
Année: 2015-2016

Franchement, est-ce que vous pouvez imaginer que Jésus ressuscité soit monté au ciel et que les apôtres aient vu ainsi le Seigneur disparaître petit à petit sous leurs yeux soit dans un nuage, soit devenir un point de plus en plus petit dans le ciel ? Non, bien sûr. Les Evangiles et les Actes des Apôtres ont voulu nous dire de façon imagée une réalité mystérieuse.              Et tout d’abord, cela veut dire quoi : monter au ciel ? Cela veut dire que Jésus est pleinement dieu, que sa vie terrestre n’était pas une fugue, mais la manifestation de son immense amour pour nous. Le Fils de Dieu est toujours auprès du Père, mais de façon incompréhensible Dieu a pris notre chair et a vécu comme nous.              En fait, la fête de Pâques, de l’Ascension et de la Pentecôte forme trois aspects particuliers d’un même mystère. Le mystère de l’amour de Dieu est tellement grand, tellement incompréhensible que les apôtres et les premiers chrétiens qui l’ont vécu ont voulu en parler de façon compréhensible, ou presque.  C’est comme pour le baptême. La transformation opérée dans notre vie par le baptême est tellement grande que la liturgie du baptême y a apporté trois rites complémentaires : le vêtement blanc, la lumière du cierge et l’onction d’huile sainte. Cela n’ajoute rien. Le simple fait de verser l’eau sur le baptisé en prononçant les paroles sacrées : « je te baptise au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit » suffisent. Mais nous, pour pouvoir envisager un peu la révolution qui s’opère dans notre âme, nous avons besoin que la liturgie ouvre notre intelligence sur quelques dimensions nouvelles que le Saint-Esprit opère en nous.              De la même façon, les apôtres ont rencontré le Christ après sa résurrection. Ils l’ont rencontré non pas comme un esprit ou un fantôme. Jésus ressuscité a mangé avec eux. Thomas a touché ses plaies. Mais cet homme ressuscité n’est pas simplement un homme, un héros, c’est vraiment Dieu. Voilà pourquoi les Evangiles parlent de l’Ascension. D’ailleurs, ils n’en parlent pas de la même façon. Dans l’Evangile de Luc, il est dit que c’est le jour même de la résurrection que Jésus est monté au ciel. Cela veut bien dire que c’est une même et unique réalité : la vie infinie et immortelle de Dieu se manifeste par sa victoire sur la mort. Par contre, dans les Actes des Apôtres, l’Ascension, c’est quarante jours après Pâques, c’est-à-dire après une période d’initiation, de prise de conscience de toutes les implications que comportait cette rencontre avec Jésus ressuscité. Il a fallu quarante jours aux apôtres pour comprendre qui est vraiment Jésus ressuscité, comme il a fallu quarante ans au peuple hébreu pour se libérer des faux dieux de l’Egypte et entrer dans la Terre promise. Et d’ailleurs, pendant longtemps, il y a eu beaucoup de chrétiens qui ont cru que Jésus était un homme formidable, mais pas vraiment Dieu, car, pour ces chrétiens égarés, il est impossible que Dieu nous aime tellement.              Eh oui ! Dieu dépasse notre intelligence, notre imagination. Il n’a pas fait semblant d’être un enfant, un homme et de mourir sur la croix. Il l’a vraiment fait et il est vivant avec nous auprès de son Père qui nous attend.

6ème dimanche de Pâques

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 1/05/16
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : C
Année: 2015-2016

 

Jésus ne manque d’humour noir. Il promet la paix à ses disciples alors que lui-même est menacé de mort. Et regardez dans l’église comment il nous est présenté : en croix. Comment un torturé peut-il nous offrir la paix ? Et comment les disciples peuvent-ils connaître la paix alors qu’ils seront tous rejetés par leurs proches et finalement mis à mort par les païens ? De quelle paix parle-t-on ?

            Quand on parle de paix, on pense tout d‘abord à l’absence de guerre. Et pourtant ce n’est pas assez. On a connu la guerre froide qui est une période sans conflit armé, mais de graves tensions. Et on connaît cela dans certaines familles, dans certaines communautés : il n’y a pas de conflit ouvert, mais il y règne une tension lourde et pénible, des silences étouffants. La paix, c’est beaucoup plus que l’absence de guerre. Mais que dit la Bible ?

            En hébreu, le mot paix se dit shalom. Il y a un curieux passage de l’Ancien Testament où le mot paix est utilisé trois fois. C’est quand le roi David invite son général Uri. Il lui demande comment va la shalom de Joab, le chef de l’armée, comment va la shalom de l’armée et la shalom de la guerre. C’est curieux : David demande comment va la shalom de la guerre. C’est parce que le mot shalom implique une idée de plénitude. La shalom, c’est ce sentiment de bien-être profond, de certitude intérieure qui nous permet d’affronter les difficultés avec sérénité. Cela ne supprime pas les problèmes, cela permet de les dépasser.

            La shalom de Jésus pendant sa vie terrestre, c’est cette certitude qu’il a d’être aimé par son Père et d’être soutenu par lui. Voilà pourquoi il affronte la mort avec calme. Voilà pourquoi il peut donner sa paix à ses apôtres. C’est cette certitude d’être porté par l’amour du Père. Et les apôtres, et chacun d’entre nous, nous pouvons recevoir cette paix. Ce n’est pas une paix que l’on se donne à soi-même. C’est une paix que l’on reçoit de quelqu’un d’autre, comme la confiance en soi. J’ai confiance en moi parce que quelqu’un me fait confiance et, grâce à cela, je peux affronter les difficultés de la vie. Et cette confiance me permet de vivre dans la paix.

            C’est pour cela que le geste de paix que nous échangeons à la fin de la messe est plein de richesse. Ce n’est pas seulement un geste d’amitié ou de sympathie, ni simplement un geste de réconciliation après une dispute. C’est la transmission de l’amour et de la confiance que Dieu me fait et que je transmets à mon voisin. C’est la raison pour laquelle, dans le rite dominicain, le prêtre embrasse tout d’abord le calice avant de souhaiter la paix à l’assemblée. Il veut montrer ainsi qu’il reçoit l’amour du Christ et qu’il le transmet à tout le monde.

            Nous aussi, plongeons dans cette tendresse divine qui nous donnera cette paix qui a porté Jésus durant sa vie terrestre et qui a lancé les apôtres sur les routes du monde.

5ème dimanche de Pâques

Auteur: Didier Croonenberghs
Date de rédaction: 26/04/16
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : C
Année: 2015-2016

L’Evangile de Jean, dans ce court extrait du discours d’adieu que nous venons d’entendre, nous offre deux exemples d’épanalepse… Pour les rares membres de l’assemblée qui ignorent encore la signification de cette figure de style, permettez-moi de vous en rappeler la définition. L’épanalepse consiste, dans un discours, à répéter une expression, un mot ou une réplique, en vue d’en accentuer l’importance, le côté comique parfois ou solennel, plus souvent… « Que diable allait-il faire dans cette galère ? » répète inlassablement Scapin dans la pièce de Molière…  L’évangile de ce jour est tout petit et compte deux courtes phrases, tout à fait représentatives du cœur du message d’adieu de Jésus. Et dans cet extrait, il y a une double épanalepse puisque le mot « glorifier » est repris 5 fois et l’expression « aimez-vous les uns les autres » répétée trois fois, comme pour bien insister sur ce point. Vous le savez, enseigner, comme prêcher, c’est manier l’art de la répétition. Et dans le discours d’adieu de Jésus, c’est comme s’il y avait un côté solennel recherché par la répétition… Comme si, également, glorification et amour devaient être mis en parallèle.  En effet, pour donner corps au mot « amour », Jean insiste dans cet extrait sur la dimension de « glorification ». Mais avouez que « gloire », et « glorification » sont des mots difficilement audibles pour nos oreilles contemporaines. Bibliquement, la gloire de Dieu n’est en rien l’éclat, la brillance, la puissance. La gloire est tout au contraire ce qui dure. Plus exactement, étymologiquement, la gloire en hébreu est ce qui donne du poids… du poids à la vie, à nos actes. Dans le langage biblique, la gloire, c’est le tout de la personne, son poids dans l'existence, son importance, ce qui dure envers et contre tout… Voilà pourquoi il est mis en parallèle avec le mot amour, car c’est bien l’amour qui donne du poids à notre existence. Bien entendu, il y a des formes d’amours légers ou qui nous rendent légers. Mais il y a aussi cet forme d’Amour qui a du poids, cet amour dont témoigne Jésus au court du dernier repas, cet amour qui sait que la vie n’a de valeur qu’à mesure où elle se donne, dans la gratuité, la réciprocité.  C’est cet amour qui glorifie, qui donne du poids à ce que nous sommes ! Cet à cet amour-là que nous reconnaîtrons que nous sommes ses disciples.  La glorification devient ainsi ce rayonnement d’amour qui va au-delà de la mort. Le propre de l’Amour vécu en vérité est d’ailleurs de renverser la valeur du temps : d’ennemi, le temps devient un allié. Finalement, l’amour est comme ce qui en nous vient défier le pouvoir de la mort : « certes, là où je vais, vous ne pouvez me suivre, nous dit Jésus, mais si vous aimez, vous êtes en moi et je suis en vous. » Voilà pourquoi, dans ce texte, glorification et amour sont intimement liés, répétés, martelés par Saint Jean.  La mort, l’absence, le deuil, peuvent devenir les révélateurs de l’amour plus grand, plus profond dans lequel nous sommes enracinés. Un poète a d’ailleurs une très belle expression pour parler de cette absence qui renforce paradoxalement l’Amour. « L'absence est à l'amour ce qu'est au feu le vent : il éteint le petit, il allume le grand. » Le départ qu’annonce Jésus manifeste cet amour plus fort que la mort, qui nous fait entrer dans l’intimité de Dieu, qui nous donne la capacité de reprendre goût à la vie, par-delà l’échec, le deuil ou la séparation.  Pour vivre cette intimité de Dieu, cette confiance dans le temps qui passe, l’évangile nous invite enfin —et je terminerai par là— à découvrir que l'amour vrai n'est pas dans la ‘répétition’ —comme dans une figure de style—mais dans la ‘re-prise’. Comme le dit Xavier Lacroix, en amour, ce n'est pas commencer qui est admirable, mais justement de re-commencer chaque jour. « Re-partir, re-donner sa confiance quand s’installe le doute, re-prendre le combat contre ces petits défauts qui peuvent fatiguer, re-fonder la confiance lorsque nos relations traversent des hivers ». La répétition lasse et peut faire peur ; la reprise donne toujours de la saveur, de la gloire, de la gravité dans nos actes, sans les rendre pesants. Cette capacité à tout reprendre, est précisément ce qui nous permet de lire chaque jour comme un nouveau départ, qui nous emporte dans l’intimité de Dieu. Amen.

4ème dimanche de Pâques

Auteur: Philippe Cochinaux
Date de rédaction: 17/04/16
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : C
Année: 2015-2016


Un jour, une bénédictine de Liège va se faire couper les cheveux.  Au moment de payer, le coiffeur lui annonce qu’il ne fait jamais payer les religieuses.  Elle le remercie et rentre au monastère.  Le lendemain matin, le coiffeur trouve devant sa porte un panier rempli de biscuits cuits dans les caves du monastère.  Quelques jours plus tard, un frère dominicain va se faire couper les cheveux chez le même coiffeur, qui lui dit aussi qu’il ne demande jamais d’argent aux religieux.  Le coiffeur reçoit le lendemain deux caisses de Sanctus Dominicus.  Voilà maintenant qu’un père jésuite se rend chez ce coiffeur.  Ce dernier lui dit comme aux autres qu’il n’accepte pas d’argent de religieux.  Quand, le matin suivant, il ouvre son salon, il découvre toute la communauté jésuite qui est là à attendre son tour pour se faire coiffer.  Cette blague quelque peu remaniée à la sauce liégeoise est proposée dans un livre qui vient de paraître aux éditions Fidélité et qui s’intitule « Moquez-vous des jésuites : humour et spiritualité » et qui a été écrit par Nikolaas Sintobin, lui-même jésuite belge. Si je me suis permis de vous la raconter, c’est parce qu’elle nous rappelle que l’humour ne cherche pas à blesser mais plutôt à pouvoir rire de soi d’abord.  Telle est sa force.  En d’autres termes, l’humour doit toujours veiller à être bienveillant.  Comme nous avons à l’être dans nos propres vies. La bienveillance nous permet d’entrer dans une relation non pas de fusion qui conduirait à de la confusion mais plutôt d’union à l’image de celle qui unit le Père et le Fils, comme Jésus le souligne dans l’évangile que nous venons d’entendre.  L’union que nous sommes à notre tour appelés à vivre entre nous et avec le Père dans le Fils et par l’Esprit se construit sur une bienveillance réciproque puisque celle-ci est une dynamique de vie à partager.  En effet, « bienveiller » est le propre de celui qui se sent responsable d’autrui qu’il soit un proche ou un être aimé. Est-il besoin de rappeler que les postures du bienveilleur et du bienveillé ne sont pas toujours simples. Tous deux se trouvent dans une situation de grande fragilité car aucun des deux ne sait ce qui va se produire.  De part et d’autre, lorsque nous bienveillons, nous attendons, nous laissons le temps au temps.  N’est-ce pas le propre de la bienveillance ?  L’expérience de la vie peut évidemment nous accompagner dans celle-ci mais il peut également nous arriver d’être désarçonnés, déstabilisés.   Dans certaines situations, nous ne nous sentons plus maître de ce qui nous arrive.  Nous sommes dépassés, voire peut-être même écrasés car nous ne pouvons plus mettre des mots sur ce que nous traversons.  Il nous faut alors ensemble prendre le temps du recul pour poser à nouveau un regard de bienveillance en cherchant à donner sens à ce qui au départ pouvait nous paraître tellement insensé. Et ce regard nous sommes conviés à le tourner vers un présent éternel, c’est-à-dire, pour reprendre les mots de Lytta Basset : « ce qui reste pour toujours en nous quand une fois, une seule fois peut-être, nous avons été visités par la Bienveillance ».  La bienveillance se nourrit ainsi de l’espérance qui s’émerveille des avancées de la vie au plus intime de l’être humain.  Elle « accompagne un processus irréversible, au rythme des saisons de chacun » (L. Basset).  Nous assistons ainsi à la mise à la Vie d’une tendresse bienveillante qui prend sa source dans le cœur de celui qui la donne.  Elle réchauffe l’être bienveillé de la lumière de l’âme pure du bienveilleur qui le pousse à mieux se regarder, à se déplacer vers davantage de vérité, à entrevoir une nouvelle espérance de vie au cœur de ses propres blessures.  La tendresse bienveillante se marque par un timbre de voix qui ne condamne pas mais qui cherche toujours à relever le bienveillé.  Elle se laisse découvrir dans un regard empreint d’empathie, voire de compassion qui se pose tendrement sur l’être accompagné.  Elle s’exprime dans la douceur d’une caresse qui fait à nouveau exister.  La tendresse bienveillante est donc d’ordre vital et divin.  C’est pourquoi, en ce temps de Pâques, nous sommes toutes et tous invités à conjuguer à foison ce verbe « bienveiller ».  Car c’est en bienveillant que nous permettons à la tendresse de se vivre.  Cette dernière est le fruit de cette douceur divine qui fait que nous ne serons jamais arrachés tant de la main de l’être aimé que de celle du Père. Amen

3ème dimanche de Pâques

Auteur: Dominique Collin
Date de rédaction: 10/04/16
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année: 2015-2016

2ème dimanche de Pâques

Auteur: Dominique Collin
Date de rédaction: 3/04/16
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année: 2015-2016

Pâques

Auteur: Didier Croonenberghs
Date de rédaction: 26/03/16
Temps liturgique: Triduum pascal, Temps de Pâques
Année: 2015-2016

Vous avez peut-être lu ou entendu que, vendredi dernier, c’était la journée mondiale de la procrastination! Comme s’il n’y avait pas assez de journées mondiales…
La procrastination vient de pro (qui signifie « en avant ») et crastinus (« de demain »). La procrastination est donc cette tendance à ne pas vivre aujourd’hui, mais à tout remettre au lendemain, à plus tard. C’est une forme de manque de confiance en soi, une incapacité à prendre des décisions… une peur d’agir peut-être, qui fait passer l’urgence avant l’essentiel, et qui remet tout à plus tard . En ce sens, tout le monde procrastine à des degrés divers…

En relisant cet évangile, je me suis dit que “l’autre disciple” souffrait de ce syndrôme… Et je dis bien : Syndrôme qui signifie d’ailleurs littéralement “courir avec”… Il y a donc un syndrome qui court avec nous… La course de Pierre et de l’autre disciple est vraiment folle, l’autre disciple arrive au tombeau le premier, mais il n’entre pas…. Comme s’il voulait reporter à plus tard son entrée dans le tombeau !

Accueil de la Résurrection… et procrastination ne font vraiment pas bon ménage. Car la résurrection  —si elle veut avoir une quelconque pertinence—  commence bien aujourd’hui, ici maintenant. La résurrection, c’est l’irruption de l’espérance dans notre quotidien. Alors que si souvent, nous renvoyons sine die la confiance et l’espérance!

Pâques, c’est justement ne pas reporter à plus tard l’espérance. C’est vivre intensément l’instant, envers et contre tout, l’aujourd’hui de notre existence. Vivre Pâques, c’est fondalement redécouvrir, accueillir le temps pour ce qu’il est vraiment, ce chemin que prend l’éternité de Dieu pour nous rejoindre. Le foi en la résurrection ne consiste donc pas à remettre à plus tard une promesse, et se réfugier dans un après ! C’est accueillir l’instant.

« Demain, j’arrêterai » disent les procastinateurs…  

« Aujourd’hui, tout commence » disent les êtres résurrectionnels.

Car oui, « aujourd’hui, tout commence, tout recommence, tout est recréé ». Pour vous comme pour moi. C’est ce que proclame Marie Madeleine, l’apôtre des apôtres, qui annonce l’incroyable, qui proclame l’indicible ; celle qui fait de grand matin, le premier jour de la semaine, ce que certains auraient peut-être reporté à plus tard.

Les disciples sont venus au tombeau, c’est à dire littéralement au lieu du souvenir. C’est le lieu du regret, du passé, de la nostalgie aussi. Et vous aurez peut-être déjà remarqué que, dans les évangiles, il n’y a pas de témoins de l’acte de ressusciter. Jésus ne s’est pas « montré » ressuscitant. Voilà pourquoi, pour vivre la joie de Pâques, il nous faut peut-être comme les deux disciples dans l’Evangile, découvrir là où quelqu’un ne se trouve plus. Découvrir la résurrection dans sa vie, c’est voir et croire qu’un proche —un conjoint, un ami, soi-même— ne se trouve plus dans un lieu de tristesse et mort, mais qu’il est au-delà, plus loin, qu’il s’est relevé.  Vivre le grand passage, c’est entrer dans le tombeau, poser un regard sur les bandelettes, c-à-d. voir ce qui fait que nous sommes déliés. Entrer dans le tombeau, c’est poser un geste de souvenir au-delà de l’émotion, c’est accueillir le présent, pour vivre et aimer avec confiance. Vraiment, la joie de Pâques : c’est remettre de la vie dans nos existences si souvent pleines de passions tristes. Remettre de la vie, lorsqu’une parole console, lorsqu’un mot tendre rassure, lorsqu’un geste de douceur ou un visage apaise. Tous ces moments nous montrent que nos tombeaux, c’est-à-dire nos propres lieux de morts et de stagnation, peuvent être vides.

Comme l’autre disciple, nous remettons bien souvent de simples actes d’amour à plus tard. Procrastiner, en amour, c’est étouffer la tendresse, scléroser son cœur. Mais vivre Pâques au quotidien, c’est découvrir que le don de la vie recommence chaque matin, pour celui qui garde la force fragile de la lumière espérance.

Bien entendu, toutes et tous, nous courrons, mais nous n’entrons pas toujours dans ce qui peut véritablement nous recréer. Nous sommes tous comme l’autre disciple. Nous courrons, mais nous n’entrons pas forcément dans la confiance… L’espérance —et particulièrement en ces jours troublés— semble vraiment remise pour  plus tard. Mais comme dans l’évangile, il y a des personnes, des passeurs, qui nous précédent… comme si la foi d’un autre, devait toujours précéder notre geste.

Pour celui qui écoute cette annonce, il est toujours possible de poser un regard printanier sur sa vie, et d’accueillir maintenant ce que nous reportons souvent à demain. C’est cela le souffle de Pâques, celui qui nous fait entrer dans nos tombeaux, qui fait le vide de nos peurs. Que cette joie de Pâques nous accompagne !

 

 

 

Vigile pascale

Auteur: Philippe Cochinaux
Date de rédaction: 26/03/16
Temps liturgique: Triduum pascal
Année: 2015-2016

Quatre bougies brûlaient lentement. L’ambiance était tellement silencieuse qu’il était possible d’entendre leur conversation. La première dit: « Je suis la Paix » ! Je brille d’une lumière très claire et je me demande pourquoi je brûle encore.  Regardez ces guerres, ces actes de terrorisme où tant d’innocents meurent.  Il semble que les êtres humains ne souhaitent plus la paix.  Personne n’arrive à me tenir allumée.  En disant ces mots, sa flamme se réduisit et s’éteignit. La deuxième prit aussitôt la parole et dit: « Je suis la Foi » ! Je suis devenue superflue, les humains ne souhaitent plus connaître Dieu. Ils ont l’impression que j’ai quitté ce monde depuis bien longtemps et ne me cherchent plus au cœur d’eux-même, là où je vis aujourd’hui.   Je crois que je suis devenue inutile, ma flamme n’a plus de sens. Les gens n’ont plus besoin de moi.  Pire, certains instrumentalisent mon nom pour commettre l’irréparable.  Quand elle eut fini de parler, une brise souffla sur elle et l’éteignit. Triste, la troisième bougie se manifesta à son tour: « Je suis l’Amour » ! Je n’ai pas de force pour rester allumée. Les Humains m’ignorent.  Ils ne voient qu’eux-mêmes, ils s’affairent par peur du temps qui passe et n’en prennent plus pour aimer. Ils ont oublié mon importance ! Et sans plus attendre, elle s’éteignit.  Soudain… un enfant entre dans la pièce, et voit les trois bougies éteintes. Pourquoi êtes-vous éteintes ? demanda-t-il. Votre rôle est de brûler et non de vous éteindre! En disant cela, l’enfant commença à pleurer et s’adressa à la quatrième bougie, un sanglot noué dans la gorge : « et toi aussi tu vas t’eteindre ? ». Alors, la quatrième bougie parla d’une voix forte et claire : N’aie pas peur, tant que j’ai ma flamme nous pourrons allumer les autres bougies, « Je suis l’Espérance ».  C’est moi qui vous permet de tenir lorsque vous êtes submergés par la tristesse, le découragement, l’incompréhension. Et je serai toujours là auprès de vous ». L’enfant médita un instant ces paroles.  Il comprit que la flamme de l’espérance pouvait redonner vie à toutes les autres flammes.  Avec des yeux brillants, il la prit et ralluma les trois autres mèches: celles de la Paix, de la Foi et de l’Amour ! Et toutes ces flammes brillèrent d’un si grand feu qu’elles illuminèrent le cœur de tous ceux et celles qui vivaient d’espérance. 

En cette nuit de Pâques, nous sommes conviés à redécouvrir que la lumière de l’espérance est celle-là même de la résurrection.  Le Christ ressuscité est la lumière qui jaillit aujourd’hui encore pour illuminer la terre entière d’une autre clarté.  Il vient nous donner la lumière de la Vie. Pâques est là pour nous rappeler à chaque instant que la mort n’a plus le dernier mot, que la barbarie humaine ne vaincra jamais.  Mort et barbarie sont soumises à l’éphémère.  Nous les traverserons et à notre tour, nous vaincrons.  Le Christ en est sorti le premier vainqueur et il est heureux que nous puissions célébrer de la sorte cette victoire puisqu’elle est celle de la Vie, de l’espérance au-delà de toute désespérance.  Il n’y a plus lieu de chercher le Vivant parmi les morts. Tel est un des sens de sa résurrection.  Toutefois, personne ne sait vraiment ce que cela signifie de ressusciter.  Ce verbe profondément mystérieux ne se découvre qu’en Dieu.  Que son Esprit nous inspire alors pour que nous puissions entrer dans ce mystère.  Ainsi, notre foi nous fait prendre conscience que la résurrection n’est pas une promesse pour demain ou dans un avenir lointain.  Nous sommes conviés à déjà la vivre dès à présent, ici et maintenant.  Comment se demandent peut-être certains ?  Tout simplement en laissant brûler en nous la flamme de l’espérance.  Une flamme rougeoyante de cette confiance que Dieu a mise en nous.  Notre espérance est le signe visible de cette résurrection qui agit déjà en nous.  Elle marque notre vie et c’est par elle que nous devenons ces êtres résurrectionnels qui, à leur tour, illuminent le monde d’une lumière divine.  Que l’Espérance ne s’éteigne jamais en nos cœurs et qu’en cette nuit de Pâques, chacune et chacun de nous, puissions raviver les flammes de la Paix, de la Foi, et de l’Amour partout où nous sommes ! C’est ce que Dieu attend de nous.  Telle est l’espérance de sa résurrection. Heureuse fête de Pâques.

Amen

Vendredi Saint

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 25/03/16
Temps liturgique: Triduum pascal
Année: 2015-2016

Le Père Prieur nous a parlé hier de communion, de la communion qui unit le Fils de Dieu à chacun d’entre nous, de cette communion d’amour qui l’a poussé à venir nous rejoindre dans notre humanité.  Je voudrais prolonger cette réflexion en méditant un instant sur la communion de souffrances.  C’est Vendredi Saint.  Dimanche, nous parlerons de la communion de vie et de résurrection. 

            Nous sommes seuls face à la douleur.  J’ai entendu souvent parler de cette scène dans une maternité.  Madame est dans la salle de travail.  Depuis des heures, elle souffre.  Son mari, effrayé et maladroit, lui prodigue mille paroles de gentillesse et d’encouragement.  Et soudain, de manière assez brutale, sa femme lui répond qu’il n’y connaît rien et qu’il ferait mieux de se taire.  Et c’este vrai que nous sommes terriblement seuls devant la douleur d’une fracture, d’une carie, d’une longue maladie.  Et pourtant il y a parfois des moments de profonde communion dans la souffrance.  Nous l’avons vécu cette semaine.  Nous avons été blessés par ce qui s’est passé, pas simplement émus, mais profondément blessés.  C’est chacun d’entre nous qui a été atteint par ces attentats.  Cela n’a rien de rationnel.  Nous ne connaissons pas personnellement ces victimes.  Cela n’a rien d’égoïste.  Nous ne réjouissons pas d’avoir échappé à ces attentats.  Nous sommes tous profondément blessés par ce qui s’est passé.  Cela nous rappelle que nous ne sommes pas de simples grains de sable, seuls, isolés, sur la plage, en dessous d’un ciel vaste et froid.  Nous sommes solidaires les uns des autres.  Et c’est ce que l’ Christ a voulu nous rappeler au cours de sa vie sur terre.  Et c’est ce que les pharisiens ont refusé en le mettant à mort.  Ils ont refusé la solidarité universelle des hommes entre eux.  Car Dieu ne s’émeut pas seulement pour le malheur de l’un ou de l’autre.  Il s’émeut pour le malheur de chacun d’entre nous. Nous sommes uniques, nous le savons et nous avons raison.  Et quand nous prions, nous le rappelons à Notre Seigneur : « Seigneur, occupe-toi de moi. » Certes, mais comment peut-on rester repliés sur nous-mêmes, sur notre douleur quand le Christ aujourd’hui nous parle non seulement de solidarité communautaire, mais aussi de communion universelle ? Oui, Vendredi Saint est la célébration de la communion dans la souffrance, dont Jésus a été exclu.  Mais dimanche sera la célébration de la communion de la vie, de la résurrection.

Jeudi Saint

Auteur: Dominique Collin
Date de rédaction: 24/03/16
Temps liturgique: Triduum pascal
Année: 2015-2016