LA GRACE DU SEIGNEUR JESUS, l'AMOUR DU PERE ET LA COMMUNION DE L'ESPRIT
En 167 avant notre ère, l'empereur de Syrie décida d'unifier tous ses Etats en leur imposant la même religion, la même culture. La civilisation hellénistique n'était-elle pas prestigieuse, « moderne », avec ses dieux, ses temples, ses philosophes, ses épopées, ses gymnases, ses stades ? Tous les Etats se soumirent sauf un. En Israël, certains apostasièrent mais un mouvement de résistance entama la lutte pour sauvegarder la foi des ancêtres. Le combat fut féroce : une grande statue de Zeus fut installée dans le temple de Jérusalem, on interdit la circoncision et la pratique du shabbat, on brûla les livres de la Torah, on exécuta tous ceux qui refusaient le paganisme. Cependant sous la direction de Juda Macchabée, l'armée juive parvint à vaincre, le temple fut purifié et le culte au seul YHWH restauré.
Un siècle plus tard, la Puissance romaine ne parvint pas davantage à éradiquer le judaïsme et elle dut se résoudre à tolérer sa singularité de sorte que, au milieu des plus grandes nations adorant leurs multiples dieux, Israël continua à être fidèle à sa foi : « C'est moi YHWH ton Dieu qui t'ai fait sortir du pays d'Egypte ; tu n'auras pas d'autres dieux face à moi ; tu ne te feras d'idoles ; tu ne te prosterneras pas devant ces dieux... » (Décalogue : Exode 20, 1-4). Chaque père de famille apprenait à ses enfants à réciter, matin et soir, le SHEMAH, confession centrale de la foi : « Ecoute Israël : YHWH notre Dieu est YHWH unique. Tu aimeras YHWH ton Dieu de tout ton c½ur, de tout ton être, de toute ta force ».
YHWH : IL EST : le mystérieux tétragramme (c.à.d. 4 lettres) ne peut même pas être prononcé (et certainement pas Jéhovah comme assurent « ses témoins »). On disait ADONAÏ : SEIGNEUR.
Or, à cette époque romaine, parut Jésus, Iéshouah, charpentier de Nazareth en Galilée : il était un observant absolument fidèle à la foi de ses pères, circoncis, priant chaque jour la prière essentielle du SHEMAH, pratiquant tous les préceptes, appliqué à l'étude assidue des Ecritures saintes, chantant les psaumes avec son peuple. A la suite des grands prophètes qui l'avaient précédé, il osa critiquer le culte du temple qui ne conduisait pas au respect du droit et à la justice sociale, il dénonça le légalisme des théologiens et la vanité des grands prêtres. Il fut non reconnu, menacé, enfin arrêté et exécuté sur une croix tandis que ses disciples disparaissaient dans la nature.
Or, fait exceptionnel, peu après, ces mêmes disciples réapparurent sur la scène publique proclamant une nouvelle tout à fait inouïe : Jésus mort et enseveli était ressuscité ! Et ils racontèrent : « Jésus observait parfaitement la Loi ; il priait YHWH en l'appelant « Père » donc en se sachant « son Fils » et il nous a appris à prier de la même manière. Opérant des guérisons miraculeuses et tenant des propos qui nous déconcertaient, nous le prenions au début pour un prophète, tel Jean-Baptiste, mais peu à peu son comportement et ses enseignements nous déstabilisaient. Il était plus qu'un guérisseur, plus qu'un prophète. Mais qui donc était-il ? Nous ne trouvions pas de réponse satisfaisante à cette question. Les menaces se précisèrent, il comprit qu'il allait être mis à mort : il se donna comme l'agneau pascal qui nous libère non de la domination romaine mais de la prison du péché. Ressuscité par son Père, il nous a envoyé la « rouah », l'Esprit, le Souffle de Dieu qui nous met en communion avec Dieu et entre nous..... ».
Ces lendemains de la Pâque de Jésus furent bousculés, les disciples n'en finissaient pas de s'interroger sur le sens de ce qu'ils avaient vécu. Qui était ce Jésus ? Il fallut admettre ce qui était inimaginable : oui il n'y avait qu'un Dieu, YHWH, mais Jésus était son Fils et Seigneur comme lui. Les débats se prolongèrent et on parvint à l'autre conclusion : l'Esprit de Dieu était aussi Seigneur !!
Tandis que les disciples de Jean-Baptiste entretenaient le souvenir de leur maître mort martyr, les disciples de Jésus commencèrent à appeler leurs compatriotes à croire en Jésus Seigneur, à entrer dans sa communauté par le rite du baptême « au nom de Jésus ». Puis très vite la formule s'étoffa à la façon rapportée dans la finale de l'Evangile de Matthieu : « Tout pouvoir m'a été donné...Allez : dans toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et de Saint Esprit, leur apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin des temps » (Matth 28, 18)
Saint Paul concluait une lettre par un v½u devenu la salutation solennelle qui ouvre toute célébration eucharistique : « La grâce de Notre Seigneur Jésus, l'amour de Dieu et la communion du Saint Esprit soient avec vous » (2 Cor 13, 13). Et dans ses communautés, déjà on chantait le cantique : « Jésus, de condition divine,...s'est dépouillé, devenant semblable aux hommes...il est devenu obéissant jusqu'à la mort sur une croix. C'est pourquoi Dieu l'a souverainement élevé et lui a donné le NOM qui est au-dessus de tout Nom afin qu'au Nom de Jésus, tout genou fléchisse... » (Phil 2, 6-11).
Cependant les objections fusèrent, les débats se poursuivirent, houleux, acharnés : si YHWH était unique, Jésus n'était-il pas qu'un saint homme « adopté par Dieu » lors du baptême ? L'Esprit n'était-il pas qu'une Force surnaturelle ? En 325, le 1er concile de Nicée énonça le credo :
« Je crois en un seul Dieu le Père....Je crois en un seul Seigneur Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, Dieu né de Dieu...Je crois en l'Esprit-Saint qui est Seigneur et qui donne la vie... ».
Dieu n'est pas une Transcendance lointaine, un Juge impassible : nous pouvons en vérité le nommer « Abba - Père ». Jésus est son Fils qui a donné sa vie pour que nous soyons pardonnés de nos péchés. L'Esprit n'est pas qu'un secours dans les épreuves, un envol dans l'idéal : il est Présence divine qui nous introduit dans la communion avec le Père, le Fils et entre nous.
La Trinité n'est pas une formule abstraite ni un rébus (comment 3 = 1 ?). Si les premiers apôtres ont voulu proclamer d'urgence cette Bonne Nouvelle à toutes les nations, si tant de simples fidèles ont été torturés et ont donné leur vie pour cette foi, si tant de penseurs ont confessé ce credo, c'est bien parce qu'ils étaient convaincus que là était la Vérité qui éclaire enfin le mystère de Dieu et le mystère de l'homme. La foi en un Dieu Père, Fils et Esprit leur donnait l'expérience de la grandeur et de la liberté de l'homme, les entraînait à lutter pour la communion et la paix et à espérer dans la victoire de l'Amour.
Cette foi chrétienne paraît impossible à des multitudes : comment y accéder ? L'évangile de ce jour ouvre une piste aux incrédules : encore faut-il le prolonger jusqu'à sa proposition finale.
COMMENT CHEMINER VERS LA VERITE QUI NOUS ECHAPPE ?
Dieu a tellement aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. Celui qui croit en lui échappe au Jugement ; celui qui ne croit pas est déjà jugé, du fait qu'il n'a pas cru au nom du Fils unique de Dieu.
Et le Jugement, le voici : la lumière est venue dans le monde, et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs ½uvres étaient mauvaises. Celui qui fait le mal déteste la lumière : il ne vient pas à la lumière, de peur que ses ½uvres ne soient dénoncées ; mais celui qui fait la vérité vient à la lumière, pour qu'il soit manifeste que ses ½uvres ont été accomplies en union avec Dieu. » (Jn 3)
Comment l'homme peut-il voir dans la croix plus qu'une exécution d'un martyr mais la révélation bouleversante de l'Amour du Père ? Par ses actes. FAIRE LA VERITE : l'expression est rarissime mais capitale. La lumière de la foi ne se découvre pas tellement par la réflexion et le raisonnement mais par l'authenticité de la vie, par la rectitude des décisions et le courage des engagements.
Ainsi Nicodème, le pharisien sceptique (Jn 3), l'année suivante, aura le courage de se lever au milieu du grand tribunal acharné à arrêter et supprimer Jésus et il osera demander une comparution et un interrogatoire dans les règles du droit. Il s'attirera immédiatement les huées de ses collègues (Jn 7, 50). Parce qu'il aura tenté de « faire la vérité », « il viendra à la Lumière » et, au Golgotha, c'est lui qui ensevelira le corps de Jésus de façon royale (Jn 19, 39).
PAPE FRANCOIS : « Nous pouvons faire toutes les ½uvres sociales, on dira : « Qu'elle est bonne l'Eglise ! ». Mais si nous disons que nous faisons cela parce que ces personnes sont la chair du Christ, alors vient le scandale ! Or sans l'Incarnation du Verbe, le fondement de notre foi vient à manquer...L'Eglise n'est pas une organisation de culture, de religion, ni même sociale : elle n'est rien de cela. Elle est la famille de Jésus...Jésus est le Fils de Dieu qui s'est fait chair : c'est ça le scandale !...On nous dit : « Chrétiens soyez un peu plus normaux, ne soyez pas aussi rigides ». Derrière cette invitation se trouve la demande de ne pas annoncer que Dieu s'est fait homme, parce que l'Incarnation est un scandale ! (Enfin le pape exhorte) à ne pas avoir honte de vivre avec ce scandale de la croix, à ne pas nous laisser prendre par l'esprit du monde qui fera toujours des propositions courtoises, civilisées. ... » (Homélie 1.6.13)
Fête de la Sainte Trinité
- Auteur: Devillers Raphaël
- Temps liturgique: Temps ordinaire
- Année liturgique : A, B, C
- Année: 2013-2014