8e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2013-2014

OSER VIVRE LA CONFIANCE

La 4ème partie du Sermon sur la Montagne (6, 19 à 7, 12) aligne les mises en garde contre les 5 principaux obstacles qui empêchent de vivre selon l'Evangile et de pratiquer les Béatitudes. La Liturgie de ce dimanche nous en présente les deux premières (les 3 suivantes, non lues en liturgie, viseront la condamnation d'autrui ; le prosélytisme agressif ; le manque de prière).

1. ATTENTION A L'ARGENT


Aucun homme ne peut servir deux maîtres : ou bien il détestera l'un et aimera l'autre, ou bien il s'attachera à l'un et méprisera l'autre. Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l'Argent.
Terrifiante puissance de cet argent, instrument indispensable pour les échanges et le commerce, mais qui insidieusement tend toujours à prendre la première place au point de devenir le maître, le seul et vrai rival de Dieu. Jésus ne dit pas «l'argent » mais « Mammon », un mot apparenté à « amen », qui signifie la confiance, la remise de soi. Chassant les appréhensions, permettant facilités de vie, confort, luxe et voyages, l'argent peut devenir le dieu que l'on sert. Car on rêve de ce qu'on n'a pas encore, on envie ceux qui jouissent de biens qui nous manquent si bien qu'on souffre de n'avoir jamais assez. Par mauvaise conscience, on donne une pièce à un mendiant, on verse (un peu) à une Organisation caritative ; on appelle « charité » ce qui n'est même pas un début de « justice ». Mais  en fin de compte, c'est bien l'Argent, Mammon, qui dicte les décisions importantes. Et qui va jusqu'à entraîner à la fraude et au vol : y a-t-il un jour où n'éclate un nouveau scandale de corruption...même dans les milieux les plus nantis ?...
Société de consommation qui exacerbe les envies en présentant des objets toujours nouveaux, toujours plus sophistiqués. Quelle fascination ! Puissance des publicitaires qui martèlent des slogans, créent de nouveaux besoins, attisent la convoitise, la jalousie et la rivalité. Mais on voit que cette adoration du « fric » nous mène à la mort : la destruction de la planète, le réchauffement climatique, la famine qui tue des milliers d'enfants chaque jour  ne sont pas des fatalités à subir. Contre le gaspillage, la gabegie, la fièvre acheteuse, la frénésie du profit, les placements à haut rendement, l'évasion fiscale, les chrétiens se doivent de réagir et de manifester que l'on peut être heureux en adoptant un train de vie plus modeste, en optant pour plus de sobriété, en luttant pour la justice (et non l'aumône).
La mise à sa place de Mammon est une mission prioritaire : tous les évangiles le soulignent ! Servir l'argent, c'est se détourner du vrai culte de Dieu. La Vie ou la Mort, il faut choisir. La 1ère béatitude affiche l'entrée dans l'Evangile : « Heureux les pauvres en esprit... ».

2. ATTENTION AUX SOUCIS MATERIELS

« C'est pourquoi je vous dis : Ne vous faites pas tant de soucis pour votre vie, au sujet de la nourriture, ni pour votre corps, au sujet des vêtements. La vie ne vaut-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que les vêtements ?
Regardez les oiseaux du ciel : ils ne font ni semailles ni moisson, ils ne font pas de réserves dans des greniers, et votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas beaucoup plus qu'eux ? D'ailleurs, qui d'entre vous, à force de souci, peut prolonger tant soit peu son existence ?
Et au sujet des vêtements, pourquoi se faire tant de soucis ? Observez comment poussent les lis des champs : ils ne travaillent pas, ils ne filent pas. Or je vous dis que Salomon lui-même, dans toute sa gloire, n'était pas habillé comme l'un d'eux. Si Dieu habille ainsi l'herbe des champs, qui est là aujourd'hui, et qui demain sera jetée au feu, ne fera-t-il pas bien davantage pour vous, hommes de peu de foi ?
Ne vous faites donc pas tant de soucis ; ne dites pas : 'Qu'allons-nous manger ?' ou bien : 'Qu'allons-nous boire ?' ou encore : 'Avec quoi nous habiller ?'.Tout cela, les païens le recherchent. Mais votre Père céleste sait que vous en avez besoin.
Cherchez d'abord son Royaume et sa justice, et tout cela vous sera donné par-dessus le marché.
Ne vous faites pas tant de soucis pour demain : demain se souciera de lui-même ; à chaque jour suffit sa peine ».
Evidemment il y a des soucis normaux auxquels nul ne peut échapper : la santé, la vie de famille, l'avenir des enfants, la justice sociale, la vie de son pays, la marche de son entreprise...............
Quand Jésus lance trois fois le même impératif « Ne vous faites pas tant de soucis», il vise trois domaines - la nourriture, l'habillement et l'avenir - et il avertit non de ne pas s'en soucier du tout mais de ne pas en être obsédé. L'accent est sur « tant de ... ».
A nouveau ces mises en garde prennent une grande actualité quand, excités par les médias et l'opinion publique, nous devenons obnubilés par « la bouffe » et « la mode ». « Il faut aller manger chez A... J'ai acheté cette robe chez Y...Comment ! tu n'es pas allé à ... ?? »
Que d'enfantillages ! Jésus nous questionne : « Votre bonheur dépend-il donc de tout cela ? ».
Ce qui est grave spirituellement, c'est que ces soucis nous enferment dans le plan matériel (indispensable mais non excessif) et révèlent un manque de confiance en Dieu. Nous accaparons afin de nous rassurer à tout prix. Nous doutons de la Providence !
Jésus exhorte ses disciples à vivre comme son Père l'avait demandé aux Hébreux traversant le désert : la manne était donnée au jour le jour, sans faire de provisions. Et il nous fait prier : « Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour... »
Pour ne plus être « des hommes de peu de foi », Jésus ne nous demande pas de prendre de bonnes résolutions (qui s'écroulent souvent comme des châteaux de cartes) mais de rectifier et d'attiser « notre souci »,  à diriger notre passion vers l'essentiel :  Ayez souci du Règne de Dieu d'abord,
Remettez toujours Dieu à la première place. Demandez-vous : que faire pour que Dieu - et non l'argent ou une autre idole - règne sur les conduites ? Quelle décision prendre pour qu'une brèche soit faite dans les montagnes du matérialisme et que luise un reflet d'un Dieu qui est Père ?
Le chrétien devient alors « autre » que les autres : le début du Sermon sur la montagne ne disait-il pas : « Vous êtes le sel de la terre » ?
La foi ne se réduit donc pas à une profession de dogmes, à des croyances et à des rites : elle est confiance. Le carême qui commence ce mercredi nous apprendra à jeûner de nos appétits.

8e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Date de rédaction: 2/03/14
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2013-2014

« Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l'Argent ».  Voilà le genre de phrase prononcée par le Christ qui m'inciterait à interrompre cette homélie à peine commencée pour vous proposer tout de go la collecte.  Ne pouvant servir Dieu et l'argent en même temps, il ne vous reste plus qu'à vous débarrasser, dans nos paniers bien évidemment, de tous vos avoirs pour vous tourner à jamais vers Dieu.  Toutefois, agir de la sorte serait proposer une vision quelque peu simpliste voire fondamentaliste du texte et serait ainsi indigne vis-à-vis de la communauté que nous sommes. Cette phrase n'est donc pas à prendre à la lettre mais elle a malgré tout une vérité à méditer.  Nous ne pouvons pas servir Dieu et l'argent à la fois pour la bonne raison qu'ils ne peuvent se placer au même niveau.  Dieu est une fin, l'argent n'est qu'un moyen.  Effectivement, nous avons besoin d'argent pour vivre mais également pour nous détendre, pour prendre un bon temps.  Il est souvent le nerf de la guerre pour reprendre cette expression populaire.  Nous n'avons donc pas à le rejeter et à être mal à l'aise pour en parler. Cela semble être une difficulté bien catholique d'oser parler de l'argent. Ce dernier doit être toujours mis à sa juste place, c'est-à-dire qu'il est seulement un moyen inventé par les êtres humains pour régir notre économie.  Il ne peut pas être une finalité en lui-même.  Là serait alors notre erreur.  En effet, tout ce que nous aurons amasser sur cette terre, nous ne l'emporterons pas avec nous.  Et une des raisons principales pour lesquelles l'argent doit rester un moyen, c'est parce que nous ne pouvons pas lui faire confiance.  Rappelons-nous de la grande crise de 1929 et celle que nous sommes entrain de traverser depuis 2008.  Voilà ce terrible paradoxe, nous avons besoin d'argent et nous ne pouvons pas pour autant lui faire confiance.   Il nous échappe. 
Il en va heureusement tout autrement pour Dieu.  Tout d'abord, pour tout croyant, Dieu est la finalité de sa vie.  Il s'est fait l'un de nous pour que nous partagions sa vie divine.  Un jour, toutes et tous, nous serons en Lui.  Telle est notre foi, telle est notre espérance.  Dieu n'est donc nullement un moyen que nous nous donnons pour mieux vivre notre pèlerinage terrestre.  Il est la fin de toute chose.  Nous avons été créés à son image.  Celle-ci est en nous.  Et nous avons reçu comme vocation d'acquérir la ressemblance divine, c'est-à-dire d'accomplir notre destinée par les choix d'amour que nous posons, par les paroles de douceur que nous offrons, par les gestes de tendresse que nous partageons.  L'empathie, la compassion et la miséricorde sont les moyens que nous nous donnons pour nous réaliser dans la dimension divine de nos vies.  Et pour ce faire, dans l'évangile que nous venons d'entendre, Dieu nous invite à prendre un énorme risque, celui de la confiance.  Risquer la confiance, voilà notre destinée.  Lorsque nous étions bébés, nous faisions confiance.  Nous ne pouvions pas faire autrement tellement nous dépendions des autres pour nos besoins les plus élémentaires.  Puis au fil de la vie, suite à des petites voire parfois grandes trahisons, nous avons appris à nous méfier, à prendre le temps de d'abord découvrir l'autre.  Arrivés ainsi à l'âge adulte, nous n'avons peut-être plus toujours naturellement confiance.  Il nous faut alors prendre ce risque de faire confiance car toute confiance elle se donne.  Cette dernière est un don.  La confiance non seulement se donne mais elle s'entretient.   Comme elle n'est plus due, nous sommes conviés à l'entretenir dans la vérité de nos relations puisqu'elle en est le fondement.  Il suffit d'oser la confiance, de prendre le risque de croire à la richesse d'une rencontre, de plonger dans la beauté d'une relation toute pétrie d'un partage en vérité.  Il en va ainsi entre nous et il en va de même avec Dieu.  Il nous invite à faire confiance non seulement en Lui mais également en la Vie qu'il a créée et qu'il nous a donnée.  Face au mystère de la Vie, la peur peut parfois nous prendre au ventre jusqu'à nous paralyser.  Nous recherchons la sécurité, la tranquillité voire la facilité.  Or la vie se vit et pour se vivre, nous devons oser risquer.  Risquer de croire, risquer d'aimer, risquer de vivre.  Et pour ce faire, cela ne peut se faire qu'en faisant confiance.  Dieu nous a donné la sienne en nous confiant sa création.  A notre tour de lui donner la nôtre pour avancer dans la Vie en étant des hommes et des femmes heureux d'être debout tout prenant le risque de la vie car nous Lui faisons à jamais confiance.  La confiance n'est-elle pas d'ailleurs un des noms de notre foi ?
Amen

7e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2013-2014

NE PAS SOLDER : AUGMENTER LE PRIX DE L'EVANGILE

Nous  écoutons aujourd'hui la suite de la 2ème partie du Sermon sur la Montagne dans laquelle Jésus explique comment son enseignement s'articule sur la Loi : l'Evangile, dit-il, ne se substitue pas au Décalogue mais en radicalise les exigences. Il en donne 5 applications : voici les deux dernières qui complètent les trois de dimanche passé. Cet idéal est-il  trop haut, impraticable ?

PAS DE VENGEANCE : ACCEPTER

« Vous avez appris qu'il a été dit : '¼il pour ½il, dent pour dent'.
Eh bien moi, je vous dis de ne pas riposter au méchant.
La loi du talion n'était pas, comme on le croit parfois, un appel à la vengeance mais au contraire une manière de l'endiguer : la peine doit être proportionnée au dommage (comme le disent encore nos tribunaux) donc on ne peut multiplier ni grossir les représailles. Jésus, lui, va beaucoup plus loin : ne « même pas riposter » ! Et il en donne 5 exemples pratiques
Mais si quelqu'un te gifle sur la joue droite, tends-lui encore l'autre.
Et si quelqu'un veut te faire un procès et prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau.
Et si quelqu'un te réquisitionne pour faire mille pas, fais-en deux mille avec lui.
Donne à qui te demande ;
Ne te détourne pas de celui qui veut t'emprunter.
Jésus appelle à ce qu'on nomme aujourd'hui la « non-violence », la méthode prônée par Gandhi, Martin Luther King et d'autres. Ce qui apparaît comme mollesse, lâcheté, capitulation est au contraire force et humanisme. C'est ainsi que saint Paul sera horrifié d'apprendre que des chrétiens osent se traduire en justice : « C'est déjà une déchéance d'avoir des procès entre vous ! Pourquoi ne préférez-vous pas subir une injustice ?... » (1 Cor 6, 1-8). Un jeune qui écoutait ce texte lança : «  Mais si j'agis de la sorte, on me prendra pour une poire !? ».La douceur évangélique peut bien être l'objet de sarcasmes : elle est la plus forte pour arrêter la spirale de la violence.
Si déjà nous sommes abasourdis par de telles exigences, qu'allons-nous dire en entendant la dernière qui est, dit-on, la plus terrible, la plus « irréaliste », la plus « utopique » de l'Evangile.

L'AMOUR DES ENNEMIS

Vous avez appris qu'il a été dit : 'Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi'.
Eh bien moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent,
afin d'être vraiment les fils de votre Père qui est dans les cieux ; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous ? Les publicains eux-mêmes n'en font-ils pas autant ? Et si vous ne saluez que vos frères, que faites-vous d'extraordinaire ? Les païens eux-mêmes n'en font-ils pas autant ?
La Bible ne demande jamais de « haïr son ennemi » mais l'hébreu, pour exprimer un comparatif, utilise des termes contraires : il prescrit de réserver son amour à ses compatriotes prochains (frères) tout en rejetant l'adversaire. Jésus à nouveau écartèle cette coutume « normale ». Il sait que, comme lui, ses disciples seront détestés, haïs et persécutés : comme lui, qu'ils s'interdisent toute colère, toute haine. Aimer ne sera évidemment pas un élan affectif mais s'exprimera d'abord par la prière sincère. Du haut de la croix, Jésus n'a-t-il pas dit : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu'ils font » ?
Ce comportement évangélique ne correspond pas aux normes habituelles de la vie en société où l'on est habitué à la concorde avec les plus proches et à l'indifférence sinon à l'animosité à l'égard des autres. Mais justement Jésus appelle ses disciples à de « l'extra-ordinaire » : ils doivent aller plus loin que les règles ordinaires ne le demandent.
En ne limitant pas leur amour à leurs proches, en s'ouvrant aux étrangers, en cherchant de bons rapports avec tous (même sans réciproque), les disciples acceptent de ne pas enfermer leurs relations dans les cercles restreints de la famille, du pays, de la classe sociale, de la culture, de la religion. Ils luttent contre une société compartimentée, contre le racisme, l'intransigeance, l'enfermement dans son petit monde, contre tout ce qui entraîne dédain, mépris, chauvinisme, lutte des classes et finalement affrontements et combats. En agissant de la sorte, ils pratiquent l'ouverture universelle du Dieu créateur qui offre à tous  un climat identique. Ils se manifestent donc comme « des fils de Dieu », des fils qui agissent comme leur Père. L'amour des ennemis est un peu comme la preuve de l'existence de Dieu, la manifestation étonnante de son amour offert à tous.
Cela nous conduit à la finale - stupéfiante ! - de toute cette partie du Sermon sur la montagne.

CONCLUSION

Vous donc, soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait.
L'Ancien Testament disait : « Soyez saints car je suis saint, moi, le Seigneur, votre Dieu » (Deut 19, 2). En hébreu « saint » signifie « séparé » : Israël, peuple du seul vrai Dieu au milieu des nations idolâtres, doit se distinguer par d'autres m½urs qu'elles.
Jésus, lui, parle de « perfection » !!!! Une invitation à l'effort (« Essayez de devenir comme... »)nous paraîtrait déjà surhumaine, mais il s'agit bien d'un impératif : « Soyez ! ». Peut-on ordonner cela aux pauvres hommes que nous sommes ? L'amour des ennemis puis cette exigence de perfection ne résonnent-ils pas comme des commandements impraticables et qui ne peuvent que culpabiliser et pousser au désespoir ceux qui les entendent ? Il est déjà si difficile de vivre des relations paisibles avec ses proches !
Le rabbin André Néher (1914-1988) écrivait cette phrase devenue célèbre (et peut-être inspirée de Jean-Jacques Rousseau) : «  La perfection de l'homme, c'est d'être perfectible ; sa destinée se situe dans l'effort ». Issu de la poussière mais créé « à l'image de Dieu », l'être humain n'est pas achevé dans son être, il est travaillé par un désir qui l'entraîne toujours « plus outre ». Il ne peut jamais dire qu'il est arrivé, qu'il est parvenu à sa plénitude : il est en permanence ouvert à une transcendance, ouvert à l'Infini...qui est Dieu. La perfection de l'homme n'est donc pas la satisfaction de n'avoir plus de défaut, d'être impeccable. Son achèvement est de ne jamais être « défini », de pouvoir encore et toujours être « perfectionné ». Il est un sujet unique, « perfectible »,  et non un objet fixé en soi.

* * * * *
Cet enseignement reçu en ces deux dimanches se conclut donc comme il avait débuté.
Jésus ne supprime pas la Loi, les règles morales qu'il suffirait d'observer pour être en règle. Il a appelé ses disciples à aller beaucoup plus loin : Votre justice doit dépasser celle des Pharisiens (5, 20)................Et il termine : Vous devez faire de l'extraordinaire (5, 47).
Il est nécessaire que, dans une société qui applique le droit, la justice, la civilité, il y  ait  des disciples de Jésus qui cherchent à outrepasser les règles ordinaires pour vivre en enfants de Dieu, attirés par son Amour infini. Les hommes et les femmes des Béatitudes acceptent de vivre un amour toujours plus grand. Leur fragilité et leur grandeur est d'être « des agneaux de Dieu » : en ne soldant pas les Paroles de Jésus, ils permettent au monde de s'ouvrir au Père.

Fête dominicaine

Auteur: Braun Stéphane
Temps liturgique: Sanctoral
Année liturgique : A, B, C
Année: 2013-2014


6e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2013-2014

Il y a, quand même, de quoi être décontenancés lorsque nous affirmons souhaiter devenir les disciples du Christ.  Au début de sa prédication sur la montagne, le Fils de Dieu commence avec ses merveilleuses béatitudes et il fait de nous des bienheureux.  Ensuite, il nous rappelle que nous sommes le sel de la terre et la lumière du monde.  Et voilà qu'aujourd'hui, après nous avoir encensés, il nous dit que tout cela a un prix.  Etre disciple de Jésus n'est donc pas une sinécure.  Il a des exigences qui peuvent parfois nous paraître bien difficiles à réaliser tellement elles nous semblent à mille lieues de notre réalité.
Et si, l'extrait d'évangile que nous venons d'entendre était plutôt une invitation faite à chacune et chacun d'entre nous, de ne pas nous enfermer, comme ces scribes et pharisiens, dans la lettre de la loi mais plutôt de redécouvrir l'esprit de celle-ci.  Le Christ ne rejette pas un iota de cette loi mais il nous convie à prendre de la hauteur, à ne pas nous satisfaire d'un simple règlement à suivre.  La loi est toujours au service de l'être humain.  Elle est faite pour régir les rapports entre nous car nous n'arrivons pas toujours à vivre à la hauteur des exigences de Dieu.  Nous pourrions avoir le sentiment d'être de bons chrétiens car nous suivons scrupuleusement les lois.  Toutefois, s'il n'y a pas d'amour dans les actes que nous posons même si ceux-ci respectent la règle, nous sommes face à un sérieux problème de vie.  Aujourd'hui encore, il peut nous arriver de nous contenter de l'un ou l'autre précepte au sens strict.  Prenons l'exemple suivant : la fidélité.  Pour beaucoup de nos contemporains, la fidélité est comprise en un sens restreint, c'est-à-dire qu'elle se concentre en sa dimension corporelle.  Me revient en mémoire cette histoire où un enfant demande, à son papa, au cours d'un dîner familial, s'il a toujours été fidèle à son épouse.  Le père réfléchit quelques instants et il répond ceci : « fils, j'ai toujours essayé d'être fidèle à ta maman mais par deux fois, je ne l'ai pas été ».  L'épouse s'étonne d'une telle déclaration et s'inquiète des propos tenus : « comment oses-tu dire que tu m'as été infidèle et en plus, devant nos enfants ? »  « Si, rétorque le mari, j'insiste.  Depuis que nous nous connaissons, je t'ai été infidèle deux fois : la première, c'est lorsque tu m'as dit que tu souhaitais reprendre le travail car les enfants étaient assez grands et que je t'ai dit que je voulais que tu restes à la maison.  Je t'ai été infidèle car je n'ai pas été capable de respecter ton projet de vie.  Et la deuxième fois, c'est lors de ce fameux dîner où des gens ont eu des propos désagréables à ton égard et que je ne t'ai pas défendue.  Là, aussi, j'ai été infidèle à toi, à notre projet de couple ».  L'infidélité ne peut donc se réduire à un simple acte.  La fidélité est une éthique de vie.  Et c'est en ce sens que le Fils de Dieu nous demande de prendre de la hauteur.  Ne nous contentons pas de simplement suivre les prescrits de la loi tout en croyant qu'en agissant de la sorte, nous sommes des êtres justes et justifiés.  Non, vivons ces prescrits mais inscrivons-les dans quelque chose de plus grand, de plus beau, qui est le projet de Dieu pour son humanité.  Tel est le sens de l'accomplissement de la loi.  « Je ne suis pas venu abolir la loi mais l'accomplir », nous dit Jésus.  Et il l'accomplit d'une manière toute spécifique : en l'inscrivant dans le c½ur.  L'accomplissement de toute loi, l'accomplissement de toute règle prend sa source et se réalise dans le c½ur de tout un chacun.  A première vue, certaines lois peuvent nous paraître dures, impossibles à réaliser.  Prenons de la hauteur pour retrouver le projet divin et inscrivons cette loi dans l'amour.  Inscrire une loi dans l'amour, c'est tout simplement prendre conscience que parfois nous ne serons pas à même de vivre à la hauteur de telle ou telle exigence.  Ne nous morfondons pas, ne culpabilisons pas.  Puisque la loi est inscrite dans l'amour, nous sommes invités à toujours poser un regard de douceur, de tendresse, de compassion, de miséricorde vis-à-vis de celles et ceux qui n'arrivent pas à suivre certains prescrits de la loi.  Ne jugeons pas. Ne condamnons pas. Inscrite dans l'amour, toute loi ne peut se lire et se vivre qu'à la lumière de la miséricorde.  Que cette dernière soit au c½ur de nos vies pour que nous puissions toujours accompagner et soutenir celles et ceux qui vivent l'échec de la loi.  La miséricorde n'est-elle pas le parfum de l'amour ?
Amen

6e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Van Aerde Michel
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2013-2014

Comment nous situer face à la Loi ? Nous vivons à Bruxelles et, partout en Europe, Bruxelles est synonyme de règlements, de tracasseries, de contrôles et de limitations. Comment nous situer face à la Loi ? Le débat est d'actualité en différents pays, en particulier pour l'euthanasie et l'avortement. Le légal est-il toujours moral ?
Faut-il toujours respecter la Loi ? Avec quelle souplesse, quelle marge, quelle liberté ? Comment l'humaniser ?
Comment nous situer face à la Loi, aux modèles, aux normes, aux codes, aux règlements ? Suffit-il d'obéir comme un robot bien programmé ?
Est-il même possible, devant la multitude des articles, toujours en évolution, d'être certain de tout bien observer ? Est-il possible d'échapper à l'angoisse et de se dire une bonne fois « je suis en règle, je ne commets aucune infraction » ? La loi est-elle synonyme de sécurité ? Suis-je sûr que les autres vont l'observer ? Suis-je sûr moi-même de ne jamais la transgresser ? Et que vais-je y risquer ?

Vous le savez, l'Evangile n'est pas une loi. Même si l'on parle de la loi nouvelle, il s'agit justement dans cette loi nouvelle, de vivre sous l'inspiration de l'Esprit. « La lettre tue, l'Esprit vivifie » dit saint Paul. On ne peut être plus clair ! La Loi, selon lui, est un pédagogue. Elle apprend à respecter les limites, celles des autres. Face à mes caprices et mes lubies elle représente une altérité qui m'oblige, une transcendance qui me structure et me met en relation. Mais elle ne peut sauver. L'Union Européenne ne sera pas sauvée par des tonnes de règlements. Il faut qu'il y ait de la vie, de l'enthousiasme, l'élan de l'Esprit. Nous ne sommes pas des machines mais des êtres vivants. Nous ne pouvons pas tout programmer, contrôler, même si l'informatique peut nous y aider.

L'Evangile n'est pas une Loi. L'Eglise n'est pas régulée par des règlements. Même s'il y a un droit canonique, cela n'est en rien comparable avec la « charia ». La loi est là mais elle est relativisée.
Jésus le montre dans sa vie. Sa mère est enceinte avant son mariage avec Joseph. Jésus mange et boit à la table de publicains, de pécheurs publics. Il se laisse toucher par Marie Madeleine qui lui lave les pieds, les essuie avec ses cheveux... il parle et il boit avec la Samaritaine. Il touche les lépreux. Il guérit le jour du Sabbat. Il ne paie pas l'impôt, ou seulement quand on lui pose la question.

Et pourtant Jésus, aujourd'hui, nous dit qu'il ne vient pas abolir la loi mais l'accomplir. En effet, il la relativise par excès. Il n'en fait pas moins, il en fait plus. Si jusque là Moïse a permis aux hommes de répudier leur femme, lui, il affirme qu'il ne faut pas séparer ce que Dieu a uni. Si, dans les dix commandements de Moïse, il est question de ne pas tuer, pour lui, il ne faut pas même insulter. Si, dans la loi, on peut donner au Temple sans se soucier de la vie de ses vieux parents, Jésus, lui, affirme qu'il faut se responsabiliser pour eux et se solidariser. Si, dans la loi, il ne faut pas travailler le jour du Sabbat, Jésus, lui, dit qu'il faut accomplir la création et guérir l'homme car c'est là que se trouve la gloire de Dieu.

En fait l'Esprit ne s'oppose pas à la Loi. Il permet d'en comprendre les intentions, d'en respecter les finalités, de faire de nous des hommes et des femmes libres, non pas libres au sens de la feuille morte emportée au gré du vent, mais des êtres libres, déterminés, orientés vers le bien et vers la vie, vers l'amour et la solidarité.

Jésus nous dit de n'insulter personne, mais il va traiter les pharisiens d'hypocrites et de sépulcres blanchis. Il dit qu'il ne faut pas se mettre en colère mais il chasse les vendeurs du temple.  Comprenne qui pourra.

Si dans la loi juive il y a un peu plus de 600 commandements, dans la loi de nos pays et dans les règlements communautaires, combien y a-t-il de commandements ? Personne ne le sait, cela dépasse ce que l'on peut compter, d'autant plus que tout change tout le temps. La loi est perfectible, elle doit s'adapter. Elle vise quelque chose qui est au-delà d'elle-même. Il y a des lois non écrites disait Antigone à ses accusateurs. Dans l'exercice de nos responsabilités, nous ne pouvons pas nous contenter d'appliquer les règlements. Nous ne pouvons pas nous contenter de dire aux victimes, aux pauvres, aux malheureux : « Monsieur, Madame, je ne peux rien pour vous. Votre cas n'est pas envisagé, vous n'entrez pas dans le cadre prévu ». Nous devons inventer un comportement responsable et libre. Et pour cela, nous avons besoin de l'aide de l'Esprit Saint. Il nous communique l'amour et la créativité de Dieu !

Seigneur nous te prions. Face aux lois, aux normes, aux règlements, donne nous d'être libres, vivant de ton Esprit, de respecter nos frères et s½urs, de les aimer comme tu les aimes, de savoir inventer les attitudes adaptées aux situations complexes qui sont les leurs. Donne-nous de savoir nous situer par rapport à la Loi, aux traditions, aux règlements, comme tu as su le faire, sans avoir peur de prendre parti pour les exclus, les oubliés, les rejetés, sans avoir peur des contagions d'image, des phénomènes de boucs émissaires.
Donne-nous de construire des institutions humanisées, où le droit est au service de la justice et de la vérité. Donne nous ta force de vie, de générosité, toi qui est l'amour, vivant pour les siècles des siècles.

6e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2013-2014

L'EVANGILE EST PLUS QU'UN CODE DE LOIS

Jésus a solennellement ouvert son enseignement par le portique des 8 béatitudes : voici les chemins du véritable  bonheur que je propose à tous. Or Dieu avait donné son programme de vie depuis bien longtemps avec la Loi, le Décalogue. Quel est donc le rapport entre ces deux enseignements ? Nous voyons des incroyants pratiquer une haute morale : que demande en outre la foi chrétienne ?
La 2ème partie du Sermon sur la montagne répond (5, 17 à 48). Le texte est long et la liturgie propose un découpage : voici un autre un peu différent.

PRINCIPE DE BASE : NON SUPPRIMER LA LOI MAIS L'ACCOMPLIR.

« Ne pensez pas que je suis venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu abolir, mais accomplir. Amen, je vous le dis : Avant que le ciel et la terre disparaissent, pas une lettre, pas un seul petit trait ne disparaîtra de la Loi jusqu'à ce que tout se réalise. (..............)
Je vous le dis en effet : Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n'entrerez pas dans le Royaume des cieux.
L'Evangile ne supprime ni n'édulcore ni ne remplace la Loi (qui est éternelle) mais il la « radicalise » c.à.d. il en pousse les exigences jusqu'à la racine. Jésus va expliquer ce qu'est cet « accomplissement » par 5 exemples et nous en voyons 3 aujourd'hui. Pour entrer maintenant dans le Royaume de Dieu tel que Jésus l'inaugure, il est indispensable de dépasser la conception des pharisiens qui s'estimaient « justes », en règle, parce qu'ils avaient bien pratiqué les moindres préceptes.
Dans le Royaume de l'amour, il est impossible de se mettre « en règle ». La Loi est un texte : Jésus est une personne. L'évangile n'est pas qu'un code à suivre : il est une relation entre personnes.

1er EXEMPLE :   IL Y A DES PAROLES QUI TUENT

Vous avez appris qu'il a été dit aux anciens : 'Tu ne commettras pas de meurtre, et si quelqu'un commet un meurtre, il en répondra au tribunal'.
Eh bien moi, je vous dis : Tout homme qui se met en colère contre son frère en répondra au tribunal. Si quelqu'un insulte son frère, il en répondra au grand conseil. Si quelqu'un maudit son frère, il sera passible de la géhenne de feu.
Donc, lorsque tu vas présenter ton offrande sur l'autel, si, là, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse ton offrande là, devant l'autel, va d'abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande. ( ...................)
Il est bien insuffisant de dire : « Je n'ai pas tué » : l'atteinte à la vie d'autrui commence déjà lorsque la colère éclate, lorsque l'injure crache, lorsque la médisance et la calomnie cherchent à écraser l'autre. Dès que s'allume le foyer d'animosité, il faut illico chercher à l'éteindre. C'est pour n'avoir pas su se contrôler dès le début que certains en viennent au meurtre.
L'insulte méchante est d'une telle gravité qu'il serait vain de se rendre au culte, d'offrir un sacrifice au Seigneur : le mur que l'on a élevé entre soi et le frère se dresse de la même manière devant Dieu. Il arrive que l'on aille prier avec un c½ur qui saigne du coup reçu d'autrui ; mais si l'on a offensé l'autre, on ne peut prier et célébrer la liturgie que si l'on a au préalable cherché à se réconcilier avec lui. Immense exigence d'humilité des deux côtés : d'une part faire la démarche, de l'autre accepter la demande de pardon. C'est parfois la seconde qui est la plus difficile.

2ème EXEMPLE : LA FIDELITE CONJUGALE

Vous avez appris qu'il a été dit : 'Tu ne commettras pas d'adultère'.
Eh bien moi, je vous dis : Tout homme qui regarde une femme et la désire a déjà commis l'adultère avec elle dans son c½ur. Si ton ½il droit entraîne ta chute, arrache-le et jette-le loin de toi : car c'est ton intérêt de perdre un de tes membres, et que ton corps tout entier ne soit pas jeté dans la géhenne. Et si ta main droite entraîne ta chute, coupe-la et jette-la loin de toi : car c'est ton intérêt de perdre un de tes membres, et que ton corps tout entier ne s'en aille pas dans la géhenne.
Le décalogue interdisait l'adultère (Exode 20, 14). A nouveau Jésus précise que la malice de l'acte défendu s'enracine dans le c½ur : l'adultère commence bien avant le lit. Si le  désir n'est pas combattu dès sa première flamme, la tentation sera trop puissante. L'enjeu est très grave puisqu'il vaudrait mieux t'amputer, enseigne Jésus : c'est pourquoi il faut « trancher dans le vif » dès le début.

Il a été dit encore : Si quelqu'un renvoie sa femme, qu'il lui donne un acte de répudiation.
Eh bien moi, je vous dis : Tout homme qui renvoie sa femme, sauf en cas d'union illégitime, la pousse à l'adultère ; et si quelqu'un épouse une femme renvoyée, il est adultère.
Ce célèbre passage (qui semble une addition postérieure car il dérange la construction du texte) dénonce d'abord la conception de la société patriarcale où l'homme est seul à pouvoir imposer le divorce. Ensuite l'interprétation en est difficile : que signifie « union illégitime » ? Chrétiens orthodoxes et chrétiens réformés l'appliquent autrement que les catholiques. Le douloureux problème des divorcés remariés continue à susciter des débats houleux, ainsi ces derniers temps en Allemagne.
En octobre, Mgr Zollitsch (président de la conférence des évêques allemands) a publié des Orientations pastorales où il propose la possibilité qu'une personne divorcée-remariée, après un processus de discussion avec un prêtre, puisse prendre la décision en conscience de recevoir tous les sacrements.  Peu après, Mgr G. Müller, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, dans une lettre, lui a demandé de retirer et réviser ce document car « sur deux points il ne coïncide pas avec la doctrine de l'Eglise ». Le Magistère de l'Eglise enseigne en effet que « les divorcés-remariés font eux-mêmes obstacle à leur admission à l'Eucharistie dans la mesure où leur état de vie est contraire à ce lien d'amour entre le Christ et l'Eglise ». Là-dessus Mgr R. Marx, archevêque de Münich, a pris ses distances : «  Le préfet de la Congrégation de la foi ne peut pas mettre un terme à la discussion ».
Mgr Zollitsch se justifie : « De plus en plus de gens échouent dans leur mariage et s'engagent dans une nouvelle union...Comment accompagner ces personnes qui font pleinement partie de l'Eglise (Benoît XVI) ?...Si la question se fait sentir avec une telle acuité au sein du peuple de Dieu, nous devons voir comment actualiser notre réponse...Nous devons nous demander s'il n'existe pas de nouvelles solutions » (journal La Croix 2 déc.).
Quant au pape François, il dit : « L'exclusion de la communion pour les divorcés qui vivent une seconde union n'est pas une sanction ». Et il annonce que le thème du mariage sera débattu au consistoire en ce février, puis au Synode extraordinaire en octobre 2014, puis encore au Synode ordinaire en 2015.

3ème EXEMPLE : NE PAS FAIRE DE SERMENTS

Vous avez encore appris qu'il a été dit aux anciens : Tu ne feras pas de faux serments, mais tu t'acquitteras de tes serments envers le Seigneur.
Eh bien moi, je vous dis de ne faire aucun serment, ni par le ciel, car c'est le trône de Dieu, ni par la terre, car elle est son marchepied, ni par Jérusalem, car elle est la Cité du grand Roi. Et tu ne jureras pas non plus sur ta tête, parce que tu ne peux pas rendre un seul de tes cheveux blanc ou noir. Quand vous dites 'oui', que ce soit un 'oui', quand vous dites 'non', que ce soit un 'non'. Tout ce qui est en plus vient du Mauvais.
La Loi interdisait de faire des serments mensongers et elle obligeait à réaliser ce que l'on avait juré  de faire ; en outre la casuistique pharisienne avait introduit un ordre de gravité plus ou moins grande selon les réalités que l'on prenait à témoin. Jésus balaie tout ce fatras et énonce la règle définitive : Ne faites jamais de serments, soyez vrais en parole. Que chacun puisse avoir une confiance totale dans l'autre. (N.B. : Il est évident que devant le tribunal il faut obéir à la Loi).
**********
Certes cet enseignement résonne avec une exigence terrible qui interdit de s'estimer en règle, qui oblige à l'humilité et à la confiance dans la miséricorde de Dieu, bien plus grande que nos fautes.
Mais surtout comment ne pas être stupéfié par ce charpentier de Nazareth, ce fidèle issu du petit peuple et qui, sans aucun titre, a eu l'audace folle de prononcer de telles paroles : « ON VOUS A DIT...MOI JE VOUS DIS ». Qui donc est-il pour oser se positionner de la sorte ?
Tout l'évangile tentera de donner la seule réponse possible : Jésus ne profane pas la Loi et il est plus qu'un prophète. Il est le Fils.

6e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Henne Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2013-2014

Décidément, le Christ n'est jamais satisfait.   Il lui en faut toujours plus.  Dans cet Evangile, il passe en revue les principales règles obligatoires pour toute vie paisible en société, parce que, regardez bien !, les problèmes liés au meurtre et à l'adultère, au divorce et au faux serment, cela ne concerne pas seulement les catholiques, ni même les chrétiens.  Cela concerne toutes les sociétés, qu'elles soient tribales ou citadines, toutes les religions, qu'elles soient polythéistes ou monothéistes.  Cela concerne même les francs-maçons.  Eh oui ! Le meurtre et l'adultère, le divorce et le faux serment, cela concerne tout le monde.  Et alors ! Qu'y a-t-il de propre et de particulier au christianisme ?
La première règle, c'est de ne pas se contenter de ce qu'on doit faire.  C'est la première chose qu'on apprend en famille et en communauté : il n'est pas interdit de rendre service.  Il n'est pas interdit d'en faire un peu plus que ce que le contrat minimum exige.  La question qui se pose aussitôt, c'est de savoir pourquoi c'est  toujours qui dois en faire le plus.  Pourquoi les autres ne pourraient-ils pas faire de même ? Tout le monde pourrait se poser la même question.  Votre conjoint, mon confrère, Dieu pourraient se dire : pourquoi est-ce moi qui toujours dois en faire plus ? Dieu pourrait se dire : OK ! Je vous ai donné la vie et tout pour réussir, mais vous préférez vous disputer et vous entretuer.  Très bien ! Allez-y ! Moi, je reste chez moi, dans mon ciel éclatant.  Mais Dieu a arraché son peuple de l'esclavage en Egypte, Dieu a mis en garde par ses prophètes les rois et les gouvernants qui accablaient le peuple.  Dieu a envoyé son propre Fils pour nous arracher au désespoir de la mort.
Oui, mais, me direz-vous, à quoi cela sert-il de se décarcasser, de se dépenser tellement et de recevoir aussi peu ? Oui, vous avez raison.  C'est une bonne question.  Et je trouve la meilleure question dans la première lecture : « le Seigneur a mis devant toi l'eau et le feu, c'est la vie et la mort qui sont proposées aux hommes, l'une et l'autre leur est donnée selon leur choix ».  Eh oui ! On peut vivre et mourir comme un bon fonctionnaire de l'amour, comme un bon fonctionnaire de la foi, comme ces scribes qui, à la cour du roi Hérode, savaient où le Messie devait naître, mais n'avaient pas envie de bouger, pas envie de se déranger. 
Oui, il y a tant de choses à faire pour transformer le monde en royaume de Dieu : il faut d'abord se réconcilier avec son frère, il faut ensuite accueillir l'autre comme un don de Dieu, il faut enfin laisser de la place à Dieu.  Oui, la vie chrétienne, c'est beaucoup plus que quelques règles de politesse.  C'est surtout Dieu qui doit pouvoir surgir dans notre vie et laisser éclater son amour infini pour chacun d'entre nous.

5e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Croonenberghs Didier
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2013-2014

Certains articles dans la presse ne vous auront sans doute pas échappé cette semaine. Ils traitaient de notre trop grosse consommation de sel. « Le Belge consomme trop de sel » titrait un grand quotidien en ligne, si bien qu'une association de consommateurs plaide aujourd'hui pour une harmonisation de la politique nutritionnelle au niveau européen sur le sel. Vous imaginez ! Il paraît qu'en moyenne, nous consommons chaque jour le triple de ce dont nous avons réellement besoin... Il convient donc d'être mesurés avec le sel ! Mais pas seulement avec cet aliment... avec le soleil et lumière également ! Dans quelques mois, au c½ur de l'été, la presse nous invitera probablement à faire attention au soleil. Et les titres seront : les belges utilisent trop peu de crème solaire, ne font pas assez attention au soleil...

« Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde » nous dit l'évangile. Faut-il faire le régime de ce que nous sommes et de ce qui nous fait vivre?

Dans notre culture du contrôle, qui se méfie volontiers de tout, le sel et la lumière ne sont pas regardés de la même manière que du temps Jésus. En effet, dans l'antiquité, le sel et la lumière étaient deux réalités considérées comme tout à fait essentielles. D'après un vieux proverbe latin, « il n'y a rien de plus utile à la santé que le sel et le soleil ». Aussi les médecins de l'époque prescrivaient-ils constamment l'usage du sel ! Les choses, vous le savez, ont bien changé !

Alors, quelle pertinence donner à ce symbole proposé par l'évangile ? Permettez-moi aujourd'hui de m'attarder sur ce symbole du sel, que nous avons à être chaque jour davantage !

Etre du sel, c'est vivre le paradoxe de la vie, c'est conjuguer en même temps deux dimensions apparemment contradictoires. Car le sel est, d'une part, ce qui permet de garder et conserver les aliments, et d'autre part, ce qui attaque et purifie.

Le sel est d'abord ce qui conserve. Etre salin, vivre de l'évangile, c'est avoir tout d'abord une capacité de garde et de veille. Il  y a au fond de chacun et chacune d'entre nous un trésor à conserver. Etre du sel, c'est parvenir à garder ce qui nous nourrit : des paroles et des gestes qui nous ont façonnés. Des valeurs aussi, qui nous ont fait grandir. Etre sel de la terre, c'est bien discerner l'essentiel, ce qui dure, au-delà du sucré et du mielleux. Etre sel de la terre, c'est, avec très peu de choses --avec des gestes tout simples et tout ordinaires-- donner du goût à la vie, offrir de la saveur à nos existences. Il faut quelques grains de sel pour changer un plat, ou le rater, mais je ne veux pas dénoncer publiquement mes frères cuisiniers !?Etre salin selon l'évangile, ce n'est pas conserver de l'ancien dans du neuf, c'est avoir cette capacité de toujours garder et regarder l'essentiel. ??Vous le savez, nos histoires se construisent sur des rencontres. Heureuses ou douloureuses, nous ne pourrions avancer, si nous n'avions pas cette capacité à chérir et conserver au fond de nous ce qui nous a fait grandir : toutes ces rencontres qui nous ont façonnés, sans nier ces moments plus difficiles que nous avons traversés. Etre du sel, c'est conserver, reprendre à soi son histoire plutôt que de la rejeter ou de lutter contre ce qui ne peut plus être changé. Etre du sel, c'est avoir cette capacité de se souvenir, de faire mémoire. 

Mais d'un autre côté, et dans le même mouvement, pour être sel de la terre, nous avons le devoir d'attaquer, d'éliminer ce qui nous empêche d'avancer. Le sel est en effet ce qui peut purifier, ronger, attaquer. Etre du sel, c'est parfois s'inscrire en faux contre ce qui fausse l'humain. Il est tentant  parfois, de se laisser absorber, de se dissoudre : « Tout le monde le fait, alors pourquoi pas moi ? ». Il ne s'agit pas d'être caustique ou destructeur, mais il s'agit de développer en nous cette capacité à dire « Non ».
Voilà donc le paradoxe du sel. Capacité à dire oui à la vie et à dire non à ce qui fausse l'humain. Conservateur et purifiant, tout l'art est dans l'équilibre de ces deux dimensions. Si certains se posent en étant des agents conservateur figés, d'autres se posent en s'opposant, en mordant, en attaquant. Il y a les uns qui veulent une société pour l'homme tel qu'il est et qu'il faut conserver, d'autres pour l'homme qu'il devrait être.
L'évangile est plus subtil que cette alternative. Il nous invite à créer un monde, c'est à dire le royaume, pour l'homme tel qu'il peut être et devenir. Voilà la soif que procure le sel de l'évangile, la soif d'aimer et d'exister.

On dit qu'il faut trois grammes de sel maximum par jour. Alors je nous invite à faire le régime évangélique : à mettre chaque jour trois grains de sel dans nos vies :
- un petit grain d'évangile pour vous conserver dans nos c½urs celles et ceux que nous aimons, même si nous ne les voyons peut-être plus.
- mettons aussi notre petit grain de sel, pour oser nous inscrire en faux contre ce qui autour de nous fausse l'humain...   ?- et enfin, un dernier grain de sel évangélique, pour vous donner ?le goût de vivre, la soif d'aimer...

Voici le programme de l'évangile que nous sommes invités à vivre ! ?Bon régime... mais attention aux excès... pour éviter l'hypertension spirituelle... Amen !

5e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2013-2014

UN EVANGILE QUI NE MANQUE PAS DE SEL

Dimanche passé, la fête de la Présentation a prévalu sur la liturgie du 4èmedimanche qui commençait la lecture du Sermon sur la montagne (lecture qui se poursuit sur 6 dimanches) si bien que nous n'avons pas entendu le magnifique évangile des Béatitudes qui ouvre le long et solennel enseignement de Jésus, nouveau Moïse donnant la Loi nouvelle. Il est donc indispensable de le rappeler brièvement puisque  l'évangile d'aujourd'hui sera son application.
Heureux les pauvres de c½ur : le Royaume des cieux est à eux !
Heureux les doux : ils obtiendront la terre promise !
Heureux ceux qui pleurent : ils seront consolés !
Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice : ils seront rassasiés !
Heureux les miséricordieux : ils obtiendront miséricorde !
Heureux les c½urs purs : ils verront Dieu !
Heureux les artisans de paix : ils seront appelés fils de Dieu !
Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice : le Royaume des cieux est à eux !
Voilà, dit Jésus, le programme de bonheur que je propose à tout homme, à l'opposé de ce qui est recommandé d'ordinaire (bonheur dans l'enrichissement, la vanité, l'impureté, l'indifférence aux démunis, la tranquillité égoïste, etc.). Ce bonheur n'est pas une utopie irréaliste, un idéal pour ascètes dans le désert : il peut être poursuivi par des gens de toutes conditions, de tous âges, à travers tous les temps, au c½ur de la vie quotidienne et des tentations.
Eh bien, poursuit Jésus, si vous cherchez le Royaume de cette manière, vous remplirez une mission indispensable, une tâche essentielle. Et il l'explique tout de suite par deux petites paraboles qui constituent la conclusion pratique des Béatitudes - évangile de ce jour.

1. DONNER DU SENS ET LE GOÛT DE VIVRE

Comme les disciples s'étaient rassemblés autour de Jésus sur la montagne, (après avoir lancé les 8 béatitudes), il leur disait : « Vous êtes le sel de la terre. Si le sel se dénature, comment redeviendra-t-il du sel ? Il n'est plus bon à rien : on le jette dehors et les gens le piétinent.
Non pas « vos prédications », « vos cathédrales », « vos livres » mais VOUS, les personnes.
Non pas « vous serez peut-être un jour... » mais VOUS ETES... ici ... sur le champ.
Non pas « Il faut faire ceci, cela... » mais « constatez ce qui se passe quand vous vivez mon bonheur »
Non pas « dans vos chapelles, vos couvents, dans un milieu chrétien» mais « DE LA TERRE » - c.à.d. toujours et partout, dans tous les peuples, à toutes les époques. Les Béatitudes sont le message universel (« catholique ») par excellence.

Pourquoi le sel ? Parce qu'il sert à donner du goût et à conserver.
Les personnes qui mettent en pratique les Béatitudes deviennent, sans même le rechercher, animatrices, elles donnent du prix, de la saveur à la vie. Connaître Gandhi et saint François d'Assise, Martin Luther King et Nelson Mandela, permet de croire en l'homme, de découvrir qu'il vaut la peine de vivre. Qu'un homme se montre heureux de ne pas courir après la fortune et les honneurs, heureux de pardonner à son ennemi, heureux d'être moqué et persécuté parce qu'il a la foi : voilà le témoignage rendu à la vérité de l'Evangile, la preuve que l'humanité n'est pas condamnée à la loi de la jungle.

Les béatitudes renversent les idoles actuelles : l'adoration du veau d'or, la course effrénée au profit, le chacun pour soi, l'indifférence aux malheureux. Elles guérissent du désespoir, de l'ennui, du fatalisme, de l'indifférence.
Dans notre société qui semble un paradis où tous les désirs sont satisfaits, des jeunes, par centaines de milliers (dont même des super-diplômés) errent sans travail, beaucoup se perdent dans l'alcool et les drogues ; les personnes âgées sont laissées pour compte. Tandis que des milliardaires gonflent sans arrêt leur avoir, et que des patrons reçoivent des traitements obscènes, les organisations humanitaires ne parviennent plus à nourrir tous les démunis. Ce monde a-t-il un sens ?
Mais des hommes et des femmes refusent cette injustice, se dressent pour réagir et luttent, souvent dans l'ombre, pour un monde plus fraternel. Opter pour une vie simple, visiter les malades hospitalisés, remettre un jeune debout, réconcilier des ennemis, lutter pour la justice, ... : les béatitudes ne demandent qu'à s'incarner, elles attendent nos yeux pour voir les besoins, nos oreilles pour entendre les cris, nos bras pour passer à l'action. Alors la vie a du sens. Il vaut la peine de renoncer à l'égoïsme, de sortir de sa bulle confortable.
ATTENTION !: Il y a un très grand danger pour ce sel : il ne vient pas du milieu dans lequel il tombe, de la somme d'ignominie et de débauche du monde, des dimensions colossales des obstacles à vaincre. Le danger est en lui : qu'il perde son tranchant, sa force, son altérité, sa différence d'avec le reste. S'il devient talc ou poudre de riz, il peut bien maquiller les faux dévots en leur donnant une apparence chrétienne mais il ne sert à rien, il n'exerce aucune influence, il laisse tout en l'état.

2.   ECLAIRER POUR FAIRE VOIR DIEU

« Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée. Et l'on n'allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau ; on la met sur le lampadaire, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. De même, que votre lumière brille devant les hommes : alors en voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux ».
L'image du sel évoquait l'enfouissement, le travail intérieur, l'½uvre secrète  en pleine pâte de la réalité: celle de la lumière insiste sur la manifestation extérieure.
En effet le message évangélique n'est pas une gnose que des initiés se transmettraient en secret : il est révélation publique, manifestation lumineuse. L'Eglise, la communauté de Jésus se montre à toutes les nations, elle ne peut rester enfouie dans les cavernes de la peur, cloîtrée dans les sacristies : elle est « ville », communauté visible. « Ce que je vous dis en secret, proclamez-le sur les toits ». 
« Les hommes doivent voir ce que vous faites de bien » : la foi est acte.
Non pour que le monde vous applaudisse, vous embrasse, vous décore... mais pour qu'il arrive à rendre gloire au Père. En effet les béatitudes vécues ne manifestent pas les qualités exceptionnelles des pratiquants. Comme la lampe brille par le courant électrique sur lequel elle est branchée, ainsi les hommes des béatitudes manifestent l'action de l'Esprit qui les inspire. Peu leur chaut de devenir célèbres, d'être applaudis par les foules, décorés par les puissants : ils savent que la gloire qu'on leur attribuerait serait volée à celle qui seule importe, celle de leur Père. Ils ne veulent pas être des vedettes au centre des foules en délire, ni avoir leur noms sur les affiches. Ce qui est leur seule passion : faire découvrir l'auteur de leur vie, amener les hommes à réfléchir : «  Pourquoi ces gens agissent-ils de cette manière ? Dieu existerait-il ?... ».
La foi authentique n'est pas une piété aux yeux fermés, la messe n'est pas une routine ennuyeuse, l'Eglise n'est pas un enclos pour brebis frileuses, la morale n'est pas gratouillis de conscience, l'espérance n'est pas le mirage d'un avenir hypothétique.
L'Evangile lance en plein c½ur de la société, là où se joue le destin du monde, là où les tsunamis des puissants écrasent les petits, là où les tempêtes veulent chasser l'espérance.

Présentation du Seigneur

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Fêtes du Seigneur et Solemnités durant l'année
Année liturgique : A, B, C
Année: 2013-2014

LE GRAND ÂGE OUVRE LES YEUX DU COEUR

La fête de la PRESENTATION DU SEIGNEUR AU TEMPLE paraît tellement importante qu'elle supplante la liturgie  du 4ème dimanche ordinaire.

LE RACHAT DES PREMIERS-NES

Quand arriva le jour fixé par la loi de Moïse pour la purification, les parents de Jésus le portèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, selon ce qui est écrit dans la Loi : « Tout premier-né de sexe masculin sera consacré au Seigneur ». Ils venaient aussi présenter en offrande le sacrifice prescrit par la loi du Seigneur : un couple de tourterelles ou deux petites colombes.
Les parents de Jésus observent fidèlement les 3 rites prescrits par la Loi. Le nouveau-né a été circoncis le 8ème jour (2, 21). Le 40ème jour, la mère se présente au temple pour le rite de purification rituelle (Lév. 12, 1) (non parce qu'il y a eu péché mais écoulement de sang) : pauvre, elle ne peut offrir l'agneau prescrit mais seulement deux colombes (Lév 12, 8).
Il est nécessaire également de « racheter » l'enfant car « tout premier-né de sexe masculin est consacré au Seigneur » (Ex 13,2). Subtilement Luc  parle plutôt de « présentation » - pratique facultative de dévotion. La suite de l'histoire montrera que Jésus est de soi consacré, on ne le rachète pas à son Père ; au contraire c'est lui qui s'offrira pour le rachat, la libération de son peuple.
Le prêtre de service a accompli sa tâche sans  rien remarquer ; le sacerdoce juif ne reconnaît pas le Fils qui entre, pour la première fois, dans la Maison de son Père. De même, plus tard,  Jésus ne sera pas reconnu par les grands prêtres.
Ce sont deux simples laïcs, âgés, qui, les premiers, vont percer le secret de cet enfant.

LE PROPHETE PLUS LUCIDE QUE LE PRETRE

Or, il y avait à Jérusalem un homme appelé Syméon. C'était un homme juste et religieux, qui attendait la Consolation d'Israël, et l'Esprit Saint était sur lui. L'Esprit lui avait révélé qu'il ne verrait pas la mort avant d'avoir vu le Messie du Seigneur. Poussé par l'Esprit, Syméon vint au Temple. Les parents y entraient avec l'enfant Jésus pour accomplir les rites de la Loi qui le concernaient. Syméon prit l'enfant dans ses bras, et il bénit Dieu en disant :
« Maintenant, ô Maître, tu peux laisser ton serviteur s'en aller dans la paix, selon ta parole.
Car mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé à la face de tous les peuples :
lumière pour éclairer les nations païennes, et gloire d'Israël ton peuple. »
Sur la vaste esplanade du temple remplie de monde, le jeune couple rencontre tout à coup un vieil homme qui chemine lentement, perdu dans ses prières. Il s'arrête et demande à porter le bébé : « Oh qu'il est beau ! Il ressemble à son père ( ??? en effet !)...Comment s'appelle-t-il ? ». Marie répond : « IESHOUAH » - ce qui est un prénom mais signifie aussi SALUT !
Du coup Syméon laisse éclater sa joie : oui, ce petit pauvre inconnu, c'est le Messie attendu depuis des siècles, c'est celui qui réalise les promesses. J'ai tant prié pour qu'il vienne nous apporter le « salut » ! Maintenant je peux mourir en paix : cet enfant est notre avenir.
Emporté par l'Esprit, Syméon fait aux parents une révélation qu'ils ignoraient encore : Jésus sera la Gloire d'Israël mais en même temps il sera « « Lumière pour tous les peuples ». Car l'élection d'Israël n'est pas un privilège qui entraîne le rejet des autres peuples : toute vocation est une grâce-pour-les-autres. Le Messie est juif mais il est le Libérateur de toute l'humanité.

Le père et la mère de l'enfant s'étonnaient de ce qu'on disait de lui.
A l'Annonciation, Marie était « bouleversée : elle ne comprenait pas le sens de la salutation » (1, 29), elle posait des questions avant de murmurer son oui ; à la Visitation, la salutation de sa cousine l'avait surprise ; à Noël, elle avait vu survenir dans la nuit quelques jeunes bergers mystérieusement prévenus et, étonnée, « elle retenait les événements et les gardait dans son c½ur » (2, 19). Et voici maintenant un vieil inconnu, rencontré par hasard, qui lui donne une nouvelle révélation avant d'évoquer le drame futur. Marie, comme nous, marche sur le chemin de la foi : tout n'est pas dit, n'est pas su au premier abord. La révélation est reçue progressivement, parfois au hasard des rencontres, au fur et à mesure que le croyant accepte l'événement qui le bouscule, « l'étonne » et le fait réfléchir.
Dieu ne parle pas seulement dans les églises !

ORACLE A MARIE

Syméon les bénit, puis il dit à Marie sa mère : « Vois, ton fils qui est là provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de division. - Et toi-même, ton c½ur sera transpercé par une épée. - Ainsi seront dévoilées les pensées secrètes d'un grand nombre. »
Prophétie qui transperce le c½ur de Marie. Cet enfant que Dieu lui a donné, le descendant de David qui aura son trône pour toujours (1, 32) et qui sera la Gloire d'Israël, ne sera pas admis par tous. Car ce roi n'exercera aucune coercition: il proposera le message de l'amour, appellera à une conversion coûteuse et beaucoup resteront sceptiques. Certains même - et parmi les plus haut placés - seront exacerbés, furieux devant les prédications et les agissements de ce pauvre Galiléen et leur haine provoquera sa mort ignominieuse. Quelle tristesse pour Marie, quel désarroi, quelle souffrance ! Au Golgotha, ce n'est pas que son fils qui sera percé d'un coup de lance : elle aussi sera « transpercée ». Mais le dessein de salut s'accomplira et Jésus deviendra, de cette façon, « Gloire d'Israël et Lumière du monde ».
Jésus fera vite l'expérience de cet échec devant certains, il dira qu'il est venu apporter la division au sein même des familles (12, 51) et il préviendra ses apôtres qu'ils auront à vivre le même déchirement.

LA FEMME PROPHETESSE

Il y avait là une femme qui était prophète, Anne, fille de Phanuel, de la tribu d'Aser. Demeurée veuve après sept ans de mariage, elle avait atteint l'âge de quatre-vingt-quatre ans. Elle ne s'éloignait pas du Temple, servant Dieu jour et nuit dans le jeûne et la prière.
S'approchant d'eux à ce moment, elle proclamait les louanges de Dieu et parlait de l'enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem.
Luc se plaît toujours à souligner la présence et le rôle des femmes, égales des hommes, capables comme eux de recevoir l'Esprit et de remplir la fonction de prophète. Anne est un modèle : le grand âge et la faiblesse sont l'occasion de s'adonner davantage à la prière et non de se perdre dans les commérages et les distractions futiles. La vieillesse ne rend pas inutile, ne met pas sur la touche : elle offre la vocation de « priant », elle permet une recherche de Dieu que les soucis du monde et les travaux ne rendaient pas possibles à ce point. Anne, comme Syméon, loue Dieu et en outre, elle se met à parler de Jésus à l'entourage : première messagère faisant honte à nos silences gênés.

LA JEUNESSE CACHEE DE JESUS

Lorsqu'ils eurent accompli tout ce que prescrivait la loi du Seigneur, ils retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth. L'enfant grandissait et se fortifiait, tout rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur lui.
Luc a bâti son « évangile de l'enfance » sur le parallélisme de la vie des deux enfants, Jean et Jésus.
Il termine en notant que Jean grandissait; pour Jésus il ajoute qu'il  est « tout rempli de sagesse et la grâce de Dieu était sur lui » ; et tandis que Jean part dans les déserts (1, 80), Jésus demeure dans son village, dans la société. Le bourgeon est décrit : il s'agit d'attendre sa floraison. C'est le temps de la patience avant l'entrée en action.