Noël

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

En plein c½ur de l'hiver, alors que les ténèbres s'épaississent et que le froid tenaille, il se passe quelque chose de très remarquable.

NOËL : REVE D' UNE HUMANITE FRATERNELLE

Alors que nous vivons dans une société riche mais impitoyable, une société marchande où tout s'achète et se vend, où l'on apprend aux jeunes que la vie ne leur fera pas de cadeau, qu'il faudra se battre, que la compétitivité sera parfois féroce... - voilà que tout d'un coup, pour quelques jours, nous basculons dans une nouvelle attitude. Nous courons encore éperdument entre les rayons des magasins mais cette fois nous demandons des emballages cadeaux, avec papier étoilé et beaux n½uds de rubans : nous achetons pour offrir à d'autres !!!

Nous passons d'une économie marchande à une économie du don.

Et vous le remarquez, les mines d'habitude renfrognées deviennent souriantes ; le quant-à-soi devient convivialité ; au lieu de s'enfermer dans son nid douillet, on s'embrasse en échangeant les paquets et on partage gaiement un repas bien arrosé. Et nous sommes heureux...comme si nous faisions l'expérience que nous retrouvons enfin, en ce moment, notre véritable mode de vie !!!

Magie de Noël ! ...Oui mais hélas qui a ses limites. Ces rencontres ont un prix, elles demandent beaucoup d'argent ; elles ne sont partagées très souvent qu'entre parents et amis choisis ; on sait bien que le don que l'on fait sera suivi d'un retour et qu'il y aura échange de bons procédés ; et puis cela ne durera que quelques jours.

Après Noël et Nouvel - An, la vie ordinaire reprendra avec ses luttes acharnées dans l'affrontement des égoïsmes et la peur du lendemain. Les cabanes du Village de Noël seront démontées, les papiers cadeaux rempliront les poubelles avec les pauvres sapins tout déplumés. Et le sans-logis sera toujours là, assis au coin de la rue, tendant son gobelet aux côtés de son chien au regard triste.

NOEL CHRETIEN

Les fêtes terrestres sont belles, nécessaires mais elles ne comblent pas le c½ur. Pourquoi ? Parce qu'elles ne durent qu'un temps et surtout parce qu'elles n'entraînent pas tout le monde dans la joie ! Il y a toujours des laissés-pour-compte, des exclus, des gens abandonnés à leur solitude ou enfermés dans leur maladie. Les rengaines ne consolent pas celui qui souffre ; les guirlandes de lumière et les chansonnettes ne réconfortent pas la détresse du désespéré. On ne peut donner un sens à son existence en achetant toute l'année et en faisant quelques cadeaux pendant une semaine !

C'est pour le paganisme que Noël est une "magie", une exultation éphémère. Mais il s'agit là d'une dérive, d'une caricature de la fête. Le père Noël avec sa barbe blanche, sa hotte et son air hilare est une image mensongère et dérisoire du "Bon Dieu" !

Noël est cadeau, oui, mais un cadeau d'une grandeur incommensurable. Un cadeau qui n'est pas une chose mais QUELQU'UN. Dieu nous DONNE SON FILS JESUS.

C'est pourquoi saint Jean s'émerveillait d'écrire :

" Dieu a tant aimé le monde qu'Il a donné son Fils. Non pas pour juger le monde mais pour que le monde soit sauvé par Lui".

Dieu prend l'initiative, il n'est pas un marchand, il ne fait pas signer de contrat, il ne pose pas de préalable, il ne mesure pas ses dons à nos mérites, il n'attend pas que nous soyons en règle, il n'exige pas que nous soyons devenus parfaits.

Noël est le temps de la grâce de Dieu, la révélation de l'amour gratuit, de l'amour total. Il nous offre non une chose bien emballée dans un papier de luxe mais un enfant nu. Aucun risque que ce don soit repris : Jésus est donné aux hommes pour toujours . Et ils pourront en faire ce qu'ils veulent. A sa naissance, c'est à peine si on lui laissera une place. Et plus tard, on le trouvera tellement insupportable qu'on le mettra à mort.

De la crèche de Bethléem au Golgotha de Jérusalem, Jésus fera l'expérience que les hommes n'attendent de lui que des cadeaux ( la santé, le pain gratuit, les avantages ) ...mais qu'ils refusent de lui obéir lorsqu' il enseigne comment vivre en justice.. Alors, il ira jusqu'au bout du don c'est-à-dire au "par-don", au don par excellence, au don suprême. Sa croix révélera en plénitude le message caché de Bethléem. Car l'enfant pauvre ne deviendra la victime crucifiée qu'après avoir décidé d'être le PAIN des hommes.

La veille de sa mort, avant que ses ennemis ne le "prennent", il "se donnera" à ses disciples :

Ce pain que je romps et que je vous offre, mangez-le : c'est moi ; il vous comblera de mon amour, il vous gardera dans ma présence ; quand mon corps sera mort au tombeau, vous serez mon vrai corps vivant. Vous serez unis dans mon amour.

Nous comprenons pourquoi Jésus est né dans un village qui s'appelle Bethléem - un mot qui veut dire, en hébreu, "MAISON DU PAIN" - et pourquoi son premier berceau a été une crèche, c'est-à-dire une mangeoire où l'on déposait la paille.

Sa venue dans le monde préfigurait son destin : habiter non dans un village, non dans une maison, mais dans les c½urs de tous les hommes, de toutes les femmes du monde, POUR LES UNIR non dans un plaisir factice MAIS POUR UNE JOIE ETERNELLE et cela jusqu'à la fin des temps.

Chaque dimanche, vous êtes tous invités à vous rendre, ici ou ailleurs, dans une église. Nul besoin de vous mettre en toilette ni d'apporter des cadeaux. Ne vous attendez pas à recevoir tout ce dont vous avez envie ni à y rencontrer tous ceux que vous avez choisis.

Mais vous écouterez retentir la Bonne Nouvelle qui n'est jamais périmée ; vous chanterez l'allégresse du peuple sauvé ; vous tendrez votre main, ouverte comme une crèche, et vous vous laisserez habiter par Celui qui n'est né une fois à Bethléem que pour naître sans fin dans votre c½ur.

Cette fête de l'Eglise n'est pas un moment "magique" mais une heure de grâce.

Saint Pierre et Saint Paul

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Philippe Ier : voilà le nom que je choisirais si j'étais élu pape au prochain conclave. En effet, Philippe étant mon prénom de baptême et puisque je ne l'ai pas changé en devenant religieux, je ne vois pas pourquoi je le ferais le jour où je serai élu pape. Je me vois déjà au balcon de Saint-Pierre en train de saluer la foule puis de dire quelques mots dans plusieurs langues avant de bénir mes brebis fidèles assemblées sur la place. Si j'était élu pape, cela aurait au moins un avantage : celui que vous puissiez dire à vos petits-enfants : « Philippe Ier, oui, oui, je le connais. Lorsque j'allais à la messe à Saint-Luc, il célébrait parfois ». J'arrête là car les possibles futurs Guibert II ou Claude Ier risquent de me faire une crise de jalousie, même si je suis convaincu qu'ils sont mieux placés que moi pour remplir une telle tâche.

Moi, pape mais vous imaginez ! J'ai déjà l'habit blanc, c'est vrai. Ô certains d'entre vous se diront peut-être que je n'en suis pas digne, que je ne suis pas assez spirituel ou assez saint pour accéder à de telles fonctions. Et bien qu'ils se détrompent. Je suis bien un candidat idéal pour devenir le prochain pontife romain. Surtout lorsque je vois que Jésus a confié sa propre église à l'apôtre Pierre. C'est sans doute l'apôtre que je préfère : il doute et s'enfonce dans les eaux juste après que Jésus ait calmé la tempête, il proclame sa foi dans l'extrait d'évangile que nous venons d'entendre, il ne comprend pas toujours qui est le Fils de Dieu est c'est la raison pour laquelle Jésus lui dira « arrière Satan » et enfin, il reniera le Christ. Par ces différentes attitudes, Pierre me semble tellement proche de nos réalités personnelles et pourtant c'est avec lui et par lui, que Jésus construit les fondations de son Eglise. Le Père n'attend donc pas d'avoir un être parfait pour conduire le peuple de Dieu. Il semble préférer un être profondément humain avec ses questions, ses doutes, ses déceptions, ses blessures. Pierre ne semble pas être quelqu'un d'extraordinaire. Il brille plutôt par sa propre humanité à l'image de la nôtre vraisemblablement. C'est à partir de ce que nous sommes devenus que Dieu nous attend pour poursuivre l'½uvre de sa Création. En effet, beaucoup d'entre nous avons traversé et traverserons peut-être les différentes phases par lesquelles Pierre est passé. De temps à autre, le doute peut nous envahir, nous nous enfonçons dans les eaux de nos interrogations tellement ce mystère semble impossible. Il suffira parfois d'une rencontre, d'un événement pour que la dimension de la foi se mette à chanter à nouveau autrement dans nos vies qui deviennent ainsi plus vivantes encore. De plus, face à certains drames de l'existence tels que la maladie, la souffrance ou la perte d'un être cher, nous pouvons nous aussi soit nous détourner du regard de Dieu et penser que tout cela n'est qu'une pure construction de l'esprit ou soit, nous l'imaginer de telle sorte qu'il pourrait changer le cours des événements. Enfin, il y a les périodes où nous en arrivons nous aussi à le renier lorsque nous laissons l'autre calomnier notre foi sans que nous réagissions pour autant. Si Pierre est bien celui qui est décrit de la sorte dans les évangiles, alors sans doute possédons-nous toutes et tous les capacités nécessaires pour devenir son successeur et participer ainsi à la construction de l'Eglise. C'est à Pierre ou mieux encore à chacune et chacun d'entre nous que le Christ s'adresse au plus intime de notre intime pour nous demander au creux de notre c½ur « et vous, qui dites-vous que je suis ? ». Il n'y a pas de réponse toute faite qui conviendrait à tout un chacun. Dieu se laisse plutôt découvrir lorsque nous marchons à sa suite, c'est-à-dire lorsque nous acceptons de nous laisser toucher par lui dans toutes les dimensions de sa divinité. Il nous permet d'avancer à notre propre rythme sur le chemin de notre foi. En d'autres termes, Dieu n'aime pas que nous l'enfermions dans une définition. Notre réponse dépendra dès lors de la manière dont nous le ressentons et cette perception pourra évoluer au cours de nos histoires respectives. Dieu est Dieu, le Dieu des vivants. « Et pour vous qui suis-je ? » Une réponse possible, un cri de foi : « tu es ». Oui, Seigneur tu es pleinement toi dans le mystère de la foi. Aucun concept ne nous permet de t'enfermer dans nos images réductrices. Tu es tout simplement celui que tu dois être, comme tu nous demandes d'être qui nous avons à devenir. Oui, Seigneur, « Tu es », puisse ton Esprit nous aider à oser nous reconnaître comme un « je suis », c'est-à-dire un être humain qui se décline dans toutes les composantes de son être, un être humain qui veut marcher à la suite du Fils car il a compris que c'est en Lui qu'il pourra donner sens à sa destinée, un être humain enraciné en ce Dieu de la Vie qui fait de chacune et chacun de nous, quelle que soit notre situation, de véritables vivants.

Amen

Saint Pierre et Saint Paul

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

L'Eglise a décidé d'honorer la mémoire anniversaire du grand Apôtre par une ANNEE SAINT PAUL qui débute ce samedi 28 juin 2008 : en effet, selon certains historiens, Paul serait né à Tarse (au sud-est de la Turquie actuelle) en l'année 7 ou 8 de notre ère - il y a donc 2000 ans.

Comme de coutume, en ces cas, le Vatican va organiser de grands pèlerinages ; de somptueuses festivités se dérouleront tout au long de l'année en la basilique s. Paul à Rome (lieu présumé de son martyre) et nous serons invités à prendre part à de belles croisières en Méditerranée orientale "sur les traces de S. Paul".

 !!!??? Soyons sérieux ! Est-ce cela que Paul nous demanderait aujourd'hui ? A quoi bon aller admirer les ruines de monuments que Paul aurait pu voir entiers ? ou chercher des traces aléatoires de ses passages ici ou là ? Je suis persuadé que l'apôtre nous demanderait bien plutôt de relire ses lettres, de les méditer pour chercher à l'imiter, lui, l'apôtre dans son amour fou du Christ et dans son élan impétueux afin de le faire connaître au monde entier.

LA FOI : RENCONTRE DU CHRIST VIVANT

Pourtant lorsque, pharisien acharné à observer les moindres préceptes de la Loi, le jeune Saül avait appris que les disciples de ce Jésus exécuté au Golgotha affirmaient qu'il était ressuscité et que cette croyance était en train de se répandre comme une peste jusqu' en Syrie, sa rage était telle qu'il obtint mandat pour aller arrêter ces Juifs assez stupides pour croire pareille baliverne. Mais que se passa-t-il sur la route de Damas ?...

En tout cas, lorsque le chrétien Ananias, tout tremblant, ouvrit la porte de sa maison, il découvrit non un policier implacable mais un pauvre homme qui tomba à ses pieds en sanglotant : " Pardonnez-moi !... Je l'ai vu ! Oui, je l'ai vu ! Ayez pitié de moi ! ". Et de raconter ce qui était survenu en chemin - événement prodigieux que Saint Luc rapporte à trois reprises dans ses "Actes des Apôtres" tellement il y voit un fait d'une importance capitale. Saül venait d'être foudroyé par une rencontre. Non, Jésus n'était pas mort comme il en était persuadé : il était vivant ! Plus encore : le condamné bafoué était dans la Lumière glorieuse de Dieu ! Plus encore : il était présent dans ces hommes et femmes qui croyaient en lui ! Ne lui avait-il pas dit : " Je suis Jésus que tu persécutes !!"...et non "Pourquoi en veux-tu à mes disciples ?". Et ce Seigneur non seulement n'avait pas déchargé sur Saül sa colère mais tout au contraire il l'avait embauché afin qu'il soit dorénavant son envoyé, son apôtre près des païens.

Paul nous réapprend que la foi chrétienne est rencontre de Quelqu'un, du CHRIST VIVANT. Et qu'un croyant honnête doit, lui aussi, se laisser convertir.

LE PLUS GRAND MISSIONNAIRE

On connaît la suite : les difficultés du converti pour se faire accepter par la jeune communauté et puis ses voyages missionnaires que Luc détaille avec admiration : Antioche de Syrie, Iconium, puis Philippes et Thessalonique en Macédoine, puis Athènes et Corinthe, puis Ephèse en Asie Mineure et enfin Jérusalem où il est arrêté et Rome où il est prisonnier dans l'attente de la condamnation à mort. Partout le même témoignage : " Je n'ai rien voulu savoir parmi vous sinon Jésus Christ et Jésus Christ crucifié" ( 1 Cor 2, 2) ..." Il s'agit de le connaître, lui, et la puissance de la résurrection et la communion à ses souffrances, de devenir semblable à lui dans sa mort afin de parvenir, si possible, à la résurrection d'entre les morts" ( Phil 3, 10)

Partout les attaques des adversaires, les pièges, les coups, les fouets, les prisons...Partout les exhortations identiques aux frères : " Comblez ma joie en vivant en plein accord. Ayez un même amour, un même c½ur ; recherchez l'unité ; ne faites rien par rivalité, par gloriole mais, avec humilité, considérez les autres comme supérieurs à vous..." ( Phil 2, 2) "Tous, vous êtes par la foi fils de Dieu en Jésus Christ...Il n'y a plus ni Juif ni Grec ; il n'y a plus ni esclave ni homme libre ; il n'y a plus l'homme et la femme. Car tous, vous n'êtes qu'UN en Jésus Christ..." ( Gal 3, 26)

Paul n'a eu qu'un amour : le Christ. Il n'a eu qu'une passion : celle de le faire connaître et aimer. Pour témoigner de son Seigneur, pour qu'un seul c½ur s'ouvre à cette lumière, il était prêt à parcourir le monde, à affronter tous les périls, à souffrir tous les supplices et finalement à donner sa vie.

LE TESTAMENT DE PAUL ( 2 Tim. 4, 6-18 = 2ème lecture de ce jour )

Qu'il est émouvant ce testament où le vieil apôtre sentant sa mort prochaine dit adieu à son jeune disciple Timothée. Après tant de labeurs, comme son Seigneur, il souffre de la lâcheté de certains mais il s'abandonne dans la confiance : son Seigneur l'a soutenu, il a accompli sa tâche.

"Bien-aimé, me voici déjà offert en sacrifice ; le moment de mon départ est venu. Je me suis bien battu : j'ai tenu jusqu'au bout de la course ; je suis resté fidèle. Je n'ai plus qu'à recevoir la récompense du vainqueur : le Seigneur me la remettra, comme à tous ceux-là qui auront attendu avec amour sa manifestation dans la gloire. Tout le monde m'a abandonné ; le Seigneur m'a assisté. Il m'a rempli de force pour que je puisse jusqu'au bout annoncer l'Evangile et le faire entendre à toutes les nations païennes...Le Seigneur me sauvera et me fera entrer au ciel, dans son royaume. A lui la gloire pour les siècles des siècles. Amen"

"L'Année Saint Paul" peut être pour l'Eglise une magnifique opportunité. D'abord pour écouter les messages que Paul envoyait à nos premiers frères et qu'il continue à nous adresser aujourd'hui. Puisse-t-il nous provoquer à une nouvelle rencontre du Christ vivant. Allumer en nous un amour brûlant pour le Christ et son Eglise. Dynamiser un désir incoercible de le faire connaître à tous ceux qui l'ignorent. Réchauffer nos communautés afin qu'elles soient vraiment unies en communiant au Corps du Christ. Nous faire tendre vers l'avenir, sans appréhension, dans une confiance totale. Etre, comme Paul, les témoins vivants de l'Evangile du Christ Seigneur.

Sainte Famille, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A
Année: 2007-2008

Puisque nous sommes des êtres en devenir, c'est-à-dire des femmes et des hommes qui avancent toujours vers un futur que ce soit ici ou dans un ailleurs, nous pouvons aisément affirmer que, dans nos vies, il y a toujours un avant, un pendant et un après. L'avant se conjugue au passé et marque la manière dont nous sommes amenés à vivre notre présent et notre futur. Il est à la fois beau des richesses d'amour reçu et en même temps marqué par nos zones plus sombres. L'avant fait partie intégrante de nos êtres. Il y a ensuite le « pendant », c'est-à-dire l'instant même où nous vivons. Il est notre présent et s'enracine bien évidemment dans notre « avant » tout en nous permettant de vivre l'aujourd'hui de nos vies. Son paradoxe est qu'il est très vite dépassé dans le temps puisque chaque seconde passée s'écrit déjà au passé composé alors que c'était il y a juste un moment. Avant et présent façonnent de la sorte notre « après », tout ce qui fera la réalité de nos existences demain. Dès l'instant de notre conception, nous sommes entrés dans cette dynamique.

« Avant, pendant et après » participent à la vie en devenir de tout être humain et pourtant, parfois il peut arriver que nous essayions de stopper cette réalité au risque de ne plus vivre pleinement sa vie. En effet, je peux m'enfermer dans mon « avant », être un nostalgique du passé en essayant d'y retourner constamment car tout me semblait mieux à l'époque. Or, dans nos vies, nous ne pouvons jamais revenir en arrière. Ce qui a été vécu est gravé pour toujours dans la mémoire de notre c½ur et de notre âme. De la même manière, ne vivre que le présent peut nous conduire à trébucher car nous n'inscrivons plus nos vies dans ce passé qui nous a construit. Quant à désirer n'exister que dans l'après, ne prenons-nous pas le risque de tout simplement passer à côté de nos vies car nous serions comme dans un rêve qui ne pourrait jamais se réaliser puisqu'il ne s'enracine pas dans le tout de ce que nous sommes devenus. Toutefois, comme le souligne la page d'évangile entendue, tout « après » est essentiel pour tout être humain. C'est après le départ des Mages ou encore après la mort d'Hérode que Joseph prend à chaque fois l'enfant et sa mère pour les conduire vers un ailleurs. Cette réalité à laquelle l'époux de Marie a été confronté est une invitation offerte à chacune et chacun d'entre nous, là où nous en sommes dans nos histoires personnelles à nous poser cette question : « et après ? ». Que nous soyons en bonne santé et confrontés à la réalité douloureuse de la maladie ou de la perte d'un être cher, nous nous trouvons face à cette fameuse question à laquelle il n'est pas toujours aisé de répondre : « et après ? ». Pour ce faire, prenons le temps de refaire ce voyage intérieur et de chercher en nous notre terre d'Egypte, terre d'exil intime qui nous permettra de nous retrouver d'abord avec nous-même puis avec Dieu. Ce retour en soi est une convocation à voir ce qui est essentiel, existentiel pour nous, à pouvoir nous redire qui nous souhaitons être et que mettre en place pour le devenir, à chercher à comprendre ce que nous souhaitons faire de notre vie même si les échéances sont de plus en plus courtes au fur et à mesure que nous avançons en âge ou dans la maladie. Retourner dans notre terre d'exil, n'est pas de chercher à donner sens à l'insensé mais plutôt à oser se laisser pénétrer par un mystère qui nous dépasse et à voir de quelle manière celui-ci va nous permettre d'écrire notre vie autrement en tenant compte des réalités auxquelles nous avons été ou sommes toujours confrontés. En chacun de nous, il y a cette terre d'Egypte propice à nous remettre debout sur le chemin de la vie. Ce temps d'exil intérieur nous permettra à l'instar de Joseph d'entendre la manière dont Dieu s'adresse à nous aujourd'hui encore. D'une certaine manière nous pourrions jalouser Joseph dont l'Ange l'avertit chaque fois en songe. Cela peut nous sembler injuste qu'il ait une telle facilité d'entrer en communication pour connaître la suite des événements. Et pourtant, l'Esprit de Dieu continue à s'adresser à chacune et chacun de nous. Depuis l'événement de la Pentecôte, nous sommes devenus les anges les uns des autres mais sommes-nous capables de nous entendre afin de pouvoir écouter ce que Dieu nous veut nous offrir comme chemin de vie. En ce temps de Noël, prenons la route de notre terre d'exil intérieur pour mieux nous retrouver et nous permettre ainsi de découvrir la manière dont le Christ s'adresse à chacune et chacun de nous. Vivons avec cette confiance et cette espérance que l'Ange du Seigneur est très bavard. Puissions-nous alors prendre le temps non seulement de l'entendre mais surtout de l'écouter.

Amen

Sainte Famille, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A
Année: 2007-2008

Le dimanche après Noël, la liturgie tourne un bref regard vers ce long temps que Jésus a vécu avec ses parents avant de commencer sa mission. Ces plus de 30 "années obscures", comme on les appelle parce que les Evangélistes n'en disent presque rien, sont pourtant loin d'être une durée insignifiante. Si le Fils de Dieu a parcouru tout le trajet qui transforme un nouveau-né en homme adulte, il y a là un fait sur lequel il nous faut réfléchir puisque nous-mêmes, en général, nous vivons une période identique en famille. Sans tomber dans l'imagerie pieuse qui voit Marie, Joseph et Jésus munis d' auréoles et figés dans un air béat, on peut dégager le rôle de la Parole de Dieu dans l'éducation.

LA FOI DANS UN ENVIRONNEMENT PAÏEN

Jésus naît et grandit dans un pays occupé depuis plus de 60 ans par l'armée ennemie. Le rayonnement de Rome est immense, la civilisation gréco-romaine se répand de la Gaule à la Syrie : gymnases, théâtres, stades, villes modernes, temples des dieux, réseaux de routes, commerce international. La Pax romana entraîne une prospérité sans précédent. En Israël, comme partout, beaucoup veulent "être modernes" et adoptent les m½urs courantes. Mais dans leur petit village de Nazareth, perdu dans les collines de Galilée, Joseph et Marie élèvent leur garçon dans la foi d'Israël. Contre le culte des idoles, ils lui apprennent qu'il n'y a qu' UN Dieu, infiniment bon et tendre et ils lui racontent l'histoire de ses ancêtres : Abraham, Moïse, David... :que de merveilles Dieu a accomplies ! Tout petit, Joseph lui enseigne la prière fondamentale : chaque matin et chaque soir, tu te tourneras en direction de Jérusalem, et la main sur les yeux, tu murmureras lentement :

"ECOUTE, ISRAËL, LE SEIGNEUR DIEU EST UN SEUL SEIGNEUR. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme, de toutes tes forces...". Cette proclamation a modelé l'âme du garçon pour la vie.

Avant même tout apprentissage, Jésus voit ses parents prier : au début et à la fin du jour, avant et après chaque repas, ensemble ils rendent grâce à Dieu, le bénissent, se remettent à Lui avec confiance.

LE 7ème JOUR : LE SHABBAT

Et quelle joie en chaque fin de semaine ! Maman a mis en ordre toute la maison, papa laissé là ses outils et rangé son établi ; chacun fait sa toilette, revêt un beau vêtement. Marie allume les deux bougies et la famille entre, avec tout Israël, dans le temps béni du SHABBAT. Plus de travail, plus de stress, mais 24 heures pour refaire son âme, chanter la Gloire de Dieu dans les psaumes séculaires, converser paisiblement, rendre visite à un voisin, consoler un malade. Et surtout se retrouver à la synagogue, avec toute la communauté du village, pour écouter les Ecritures et les commentaires du rabbin, chanter, clamer à pleine voix des AMEN pleins de confiance, des ALLLELUIA pétillant d'allégresse. Un peu de ciel descend sur terre lorsque l'humanité se laisse envahir par la douceur et la Bonté de Dieu.

LE DROIT ET LA JUSTICE

Les lois révélées dans les Saintes Ecritures, transmises par les générations et perpétuellement répétées et expliquées à la synagogue, ont fourni l'épine dorsale de l'éducation de Jésus.

Il a appris l'éminente grandeur de chaque être humain créé "à l'image de Dieu" : ses éducateurs l'ont mis en garde contre tout racisme et toute discrimination. On ne doit mépriser personne, il convient de reconnaître la diversité des êtres humains, aimer son prochain et l'étranger comme soi-même, témoigner de la sollicitude envers les plus faibles, les pauvres, les handicapés.

Jésus a appris à être un homme de parole et de vérité. Chez ses parents, nul mensonge, nulle dissimulation. Ils lui ont enseigné à bien s'exprimer, à écouter l'autre, à ne pas s'emporter pour imposer son opinion, à ne pas vouloir avoir toujours raison, à exorciser la violence par le dialogue, à comprendre et assumer la part de vérité de l'autre. Mais également à ne pas cacher ses convictions, à ne pas trahir la vérité, à refuser tout compromis boiteux.

Jésus a appris le partage, la solidarité avec les plus démunis. La Torah lui rappelait sans cesse les obligations sacrées de la justice, la nécessité de veiller à ce que chacun puisse manger et entretenir sa famille.

Il a appris le devoir du pardon : si l'autre a un parole blessante, un geste déplacé, il ne faut pas se bloquer dans la rancune, ruminer une vengeance, cracher une injure mais sans cesse pardonner et ½uvrer à la réconciliation.

On lui a transmis la valeur du travail qui n'est pas une corvée "qu'il faut bien accomplir pour gagner sa vie" mais la continuation même de la création divine. Réparer une charrue, bâtir une charpente, ne pas tricher sur les prix, faire preuve de patience envers le pauvre qui ne peut payer (quitte à se priver de certaines choses à la maison), Joseph a appris toute cette déontologie à son garçon. La profession n'est pas une course à l'enrichissement, une façon de se faire valoir mais un service.

NOS FAMILLES

La famille traverse aujourd'hui une crise grave : épidémie de divorces, beaucoup d'enfants nés hors mariage, élevés par un seul parent, chute de la démographie, violences conjugales...Sans compter le très grave problème de transmission de la foi : l'héritage que nous avons accepté des générations précédentes ne passe presque plus dans les générations nouvelles. Or la famille est la cellule fondamentale de la société, le lieu stable où l'homme s'humanise, où il doit s'épanouir dans sa spécificité qui en fait une PERSONNE UNIQUE. Aucun laboratoire, aucune académie, aucun atelier d'artiste ne réalise cette extraordinaire entreprise : tout faire, pendant quelques milliers de jours et de nuits, pour qu'un petit devienne UN HOMME. Les points signalés ci-dessus nous font réfléchir.

Nous baignons dans le paganisme : Comment nous, les adultes, vivons-nous notre foi ? Car la foi se propose par une vie ouvertement croyante et non par des leçons et des remarques. Comment vivons-nous le dimanche ? Est-il le jour de Dieu ? Comment nous opposons-nous aux idoles régnantes : culte des voitures, de l'argent, des vedettes, des divertissements à tout prix, de la compétition acharnée ?.... Quelles valeurs cherchons-nous en priorité à transmettre ?.... De quoi passer bien du temps dans le partage des idées et la prière.


Sainte Famille, année A

Auteur: Lens Patrick
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A
Année: 2007-2008

Les enfants deviennent grands. Jésus, à peine né, est déjà à la fuite avec ses parents en Égypte. Bonne fête de la Ste Famille ! En regardant le journal télévisé, cette histoire est si réaliste. Combien de familles ne doivent pas s'enfuir d'une situation sans issue, ou d'une situation politique dangereuse. Et on voit St Joseph, toujours en contact direct avec le ciel. Il ne fait pas d'autre chose que d'écouter ce que l'ange dit, se lever, partir et rester là où il doit être. Puis la même histoire se répète : entendre ce que Dieu dit, se lever, retourner. L'évangile ne parle pas du temps que la Ste Famille a dû passer en Égypte. L'évangile reste muet sur les sentiments de St Joseph ou de la Vierge Marie.

La vie de St Joseph semble avoir été une vie sans couleur. Écouter la parole de Dieu et l'exécuter sans commentaire. On a peu envie de devenir comme St Joseph. Mais on oublie facilement que nous aussi, nous nous laissons conduire par beaucoup de choses : la mode, un certain style de vie, nos contacts, surtout les images que nous avons de la vie, et à ne pas oublier : nous nous laissons beaucoup conduire par le temps. Si nous regardons la vie de famille aujourd'hui, il y a de plus en plus de familles qui ne se retrouvent plus à table, même le dimanche, à cause des horaires. Un des maîtres les plus puissants de notre vie, c'est le temps et notre agenda. St Joseph, du moins, il se laissait conduire par Dieu.

Quelle vie voulons-nous ? Nos avons tous nos rêves et nos désirs, mais il faut également constater que la réalité est bien autre chose. L'homme d'aujourd'hui essaie toujours de régler les choses selon ses désirs et ses rêves, mais à un certain moment il doit accepter qu'il y ait une limite. Les possibilités ne sont pas infinies.

Qu'est-ce que St Joseph fait ? Il écoute Dieu. Il a un c½ur qui est resté ouvert ; il a gardé la capacité d'écouter et de voir les choses à la lumière de Dieu. Et dans sa vision contemplative de la vie, il est très réaliste. Il écoute Dieu et il passe à l'action.

La Ste Famille s'est laissé former par la vie dans la lumière de leur foi et leur confiance en Dieu. L'évangile d'aujourd'hui est une invitation à assumer sa vie comme eux, à ne pas se laisser vivre, même pas par des événements incontournables.

C'est une question d'attitude et de décisions à prendre. Question d'attitude et de décisions : accepter la vie telle qu'elle est et voir en elle le seul cadeau qui nous a été fait. Cela change déjà notre regard sur la vie : au lieu d'être un obstacle, elle devient une chance. Les obstacles de la vie se changent en possibilités. Les malheurs sont encore là, mais on refuse de s'y accrocher. La vie change si on essaie de la regarder autrement. Les rêves ne sont que des rêves. La réalité est bien plus intéressante si on l'assume.

11e dimanche ordinaire, année C

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2006-2007

Les évangélistes ont tracé un portrait tellement noir des Pharisiens que ce mot a pris un sens très péjoratif, synonyme d'hypocrite, de tartuffe, de pieux menteur. Cela ne fut pas un des moindres facteurs de l'hostilité développée dans les nations chrétiennes à l'endroit du peuple juif.

Or le mouvement pharisien partait d'une excellente volonté. En terre d'Israël piétinée par les armées païennes et où la ferveur religieuse de beaucoup se relâchait, les Pharisiens se voulaient de vrais fidèles, décidés à appliquer la Loi de Dieu dans toute sa minutie et avec la plus extrême rigueur. Pour eux, ce n'était pas l'usage de la violence, préconisée par le mouvement zélote, qui apporterait la libération du pays mais au contraire l'obéissance la plus exacte possible à toutes les obligations de la Loi, donc à la volonté de Dieu. Néanmoins le judaïsme lui-même reconnaît qu'à côté d'hommes remarquables, le mouvement connut des dérives. Acharnés à pratiquer les plus menus détails des observances, certains pharisiens en oubliaient l'essentiel ; les actes pieux et ascétiques se substituaient à l'amour et au partage ; la mentalité juridique durcissait les c½urs ; on se targuait d'être de meilleurs croyants que les autres, et on méprisait les pécheurs.

On voulait faire son salut !

Bref on se mettait "à part" (pharisien voudrait dire "séparé").

Qui ne voit que ce "pharisaïsme" est une attitude qui peut se retrouver dans toutes les religions et même au sein des traditions laïques. Quelle satisfaction de prendre des engagements supplémentaires dans un "Mouvement" (chrétien ou non), de s'estimer "en règle", de se voir admiré pour ses pratiques, et de dédaigner ceux qui ne parviennent pas à votre hauteur ! ...Oui, "la religion" peut écarter de Dieu !!

Selon St Luc, Jésus, à trois reprises, a accepté une invitation dans une maison pharisienne. Normal : Jésus vient pour tout le monde. Mais, à chaque fois, il ne se gênait pas pour démasquer leur hypocrisie. Ne faut-il pas alerter celui qui se croit en bonne santé alors qu'il est atteint d'une grave maladie ? Avec virulence, Jésus secouait ses hôtes pour leur ouvrir les yeux avant qu'il ne soit trop tard.

Un certain jour donc, Jésus est invité chez un Pharisien nommé Simon. Soudain, une femme se glisse subrepticement dans l'assemblée et s'agenouille derrière le divan où Jésus est allongé (on avait alors adopté les m½urs grecques des repas solennels).

Elle apportait un vase précieux plein de parfum. Tout en pleurs, elle se tenait derrière lui, à ses pieds, et ses larmes mouillaient les pieds de Jésus. Elle les essuyait avec ses cheveux, les couvrait de baisers et y versait le parfum.

Choqué, Simon se disait :

" Si ce Jésus était un prophète, un vrai envoyé de Dieu, il saurait qui est cette femme qui le touche et ce qu'elle est : une pécheresse".

La femme reste anonyme (est-ce Marie-Madeleine ?) et elle est connue comme pécheresse (prostituée ?). En tout cas, son impureté notoire doit contaminer celui qu'elle touche. Aux yeux du pharisien, quelle honte pour Jésus d'accepter ce contact ignoble ! Jésus a remarqué la moue de mépris sur le visage de Simon et il l'interpelle en lui racontant une parabole :

Un créancier avait deux débiteurs ; le premier lui devait 500 pièces d'argent, l'autre 50. Comme ni l'un ni l'autre ne pouvait rembourser, il remit à tous deux leur dette. Lequel des deux l'aimera davantage ?

"C'est celui à qui il a remis davantage, il me semble". - répond Simon. Juste ! Alors Jésus compare les différences de traitement dont il a été l'objet de la part de cette femme et de la part de son hôte :

A mon entrée, tu ne m'as pas lavé les pieds ; elle les a mouillés de ses larmes. Tu ne m'as pas embrassé ; elle a embrassé mes pieds. Tu ne m'as pas parfumé la tête ; elle m'a versé du parfum sur les pieds.

Et Jésus de conclure par une phrase à la traduction discutée et qu'il vaudrait mieux modifier (comme la T.O.B.) :

"Si je te déclare que ses péchés si nombreux ont été pardonnés, c'est parce qu'elle a montré beaucoup d'amour".

Le texte suggère donc que, dans une circonstance non racontée, cette femme a rencontré Jésus, elle lui a avoué son état de péché et Jésus lui a offert gracieusement le pardon. D'où son effervescence, son allégresse qu'elle ne peut contenir, sa gratitude qu'elle exprime par ses gestes un peu fous accomplis ici devant tout le monde. Sa vénération, sa façon d'honorer Jésus montre de quelle immense miséricorde elle a bénéficié. Enfermée dans sa faute, réputée "impure" par l'entourage pharisien, condamnée sans appel, elle venait d'être libérée par le pardon. Comment ne pas faire mille folies lorsqu'on reçoit pareille libération, lorsqu'on se voit restituée dans sa pureté ?..

"Mais celui à qui on pardonne peu montre peu d'amour" dit Jésus à Simon. Toi, tu es un honnête homme, tu n'as pas connu de grosses défaillances, tu te crois irréprochable, tu n'aurais même pas l'idée d'implorer pitié - en tout cas pas à moi, Jésus. Tu m'as reçu par curiosité, de façon très froide, polie mais sans plus. Tu désirais sans doute avoir avec moi une conversation intéressante sur des questions de théologie, de morale, de liturgie...mais sans jamais te remettre en question. Elle, parce qu'elle était tombée très bas, désirait être sauvée et elle a cru dans la parole de pardon que je lui adressais.

Et Jésus de dire à la femme : " Ta foi t'a sauvée. Va en paix ".

Evidemment ce mot provoque l'effarement, le scandale :

Les invités se dirent : " Qui est cet homme qui va jusqu'à pardonner les péchés ?"

St Luc est probablement un païen converti et il a exulté de présenter Jésus comme le Don de la Miséricorde : ne nous habituons pas aux histoires de Zachée, du bon larron, de Pierre en larmes, à la parabole dite du fils prodigue accueilli par un père qui pleure de joie !

La religion de Jésus n'est pas celle des pharisiens. Non qu'il supprime la Loi et relativise le péché. Le péché est très grave, il tue l'homme. Mais à celui qui, comme la femme, ose avouer sa faiblesse et reconnaître ses chutes, Jésus offre le pardon de Dieu. A une condition : CROIRE. Croire qu'il peut offrir cette miséricorde. Ce qui était tout à fait inouï, exceptionnel, puisque personne, ni prêtre ni rabbin, ne pouvait le faire ! Seul Dieu peut remettre le péché ! ..." Qui est cet homme... ?" Alors éclate une joie toute nouvelle, qui chasse la honte et le découragement à la suite des fautes commises. Devant cette grâce, on ne peut qu'exploser de joie, exprimer sa gratitude, manifester sa reconnaissance.

Nos assemblées réunissent des bons pratiquants honnêtes, appliqués à faire leurs devoirs, persuadés qu'ils sont "des gens bien" et se tenant quitte en chantant distraitement "Seigneur prends pitié". Restons-nous des pauvres, conscients de ne jamais pouvoir édifier leur statue, et suspendus à l'Infinie Miséricorde ?

Quant aux pécheurs, qu'ils ne s'octroient pas, sans plus, le droit de venir à l'assemblée, qu'ils demandent pardon (comme la femme) et croient en la Parole de Paix.

Alors ensemble, nous manifesterons le bonheur extraordinaire d'être, tous, pardonnés par le Christ. L'Eucharistie sera le chant d'action de grâce unanime des pécheurs sauvés par la seule Croix du Christ..

13e dimanche ordinaire, année C

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2006-2007
 Pas de problème, je le fais tout de suite », disait-il à son épouse. Cette simple phrase avait le don de l'énerver au plus au point car elle savait que ce n'était pas vrai. Il terminerait d'abord ce à quoi il était occupé et puis seulement ferait ce qui lui avait été demandé. Heureusement, pour elle, un jour à l'occasion d'une fête dans sa belle-famille, quel ne fut pas son étonnement d'entendre sa belle-mère lui dire « je le fais tout de suite » tout en continuant la tâche à laquelle elle était attelée. La jeune épouse découvrit alors que son mari ne lui mentait pas mais que la signification des mots « tout de suite » variait d'une culture familiale à l'autre. En effet, dans sa propre famille, lorsque quelqu'un disait « tout de suite », il arrêtait à l'instant même ce qu'il faisait et accomplissait la tâche demandée tandis que dans sa belle-famille cela signifiait, je le ferai juste après ce que je suis entrain de faire. Comme quoi, une expression aussi simple que celle-ci peut prêter à confusion en fonction de la culture dans laquelle nous avons grandi et peut en conséquence poser quelques problèmes de communication. Laquelle des deux interprétations est la plus correcte ? Je n'en sais trop rien pour ce qui est de la langue française mais il semble clair que pour le Christ, ce soit celle de la belle-famille. En effet, selon les dires de Jésus, nous n'avons plus le temps de faire encore quelque chose d'autre même si parfois nous pourrions avoir tendance à réagir de la sorte avant de passer à une autre activité.

Ces propos peuvent nous paraître durs à une première lecture quelque peu abrupte. Il est impossible de ne pas regarder en arrière puisque d'une certaine manière notre présent, tout tourné vers l'avenir, se vit et se construit à partir de notre propre passé. Je ne peux être qui je suis si je n'ai pas intégré dans ma propre histoire tous les événements qui m'ont constitué au fil des années. Notre histoire personnelle nous façonne. Elle permet de nous aider à mieux comprendre les êtres que nous sommes devenus. Si nous avions vécu d'autres situations, si nous avions rencontré d'autres personnes, si nous avions traversé d'autres moments douloureux, si et encore si, nous aurions sans doute une personnalité quelque peu différente. Notre passé est donc essentiel à être intégré dans notre présent. Si nous ne le faisons pas, nous n'aurions alors jamais d'avenir. Le passé existe bel et bien et ne peut donc être nié. Mais il est vrai que parfois dans la vie, pour poursuivre notre route humaine, nous avons aussi besoin de nous en libérer comme le souligne saint Paul dans sa lecture. Nous en libérer pour découvrir un mieux être, un autre demain. En effet, notre avenir peut parfois être paralysé par notre passé qui nous retient vers l'arrière, qui nous empêche d'avancer. Un peu comme si nous y étions non seulement attachés mais aussi rattachés. La nostalgie et le remord peuvent nous encombrer sur le chemin de notre propre devenir. Même si nous avons vécu des moments merveilleux et exceptionnels, la nostalgie peut complètement nous enfermer dans un passé à jamais révolu et qui ne peut plus se revivre. Tout tourné vers l'arrière de ma vie, je suis incapable d'entrer dans un présent tellement j'ai le sentiment que la beauté de mon existence se décline à jamais au passé composé. N'est-il pas préférable de se souvenir de ces moments heureux afin de nous aider à mieux vivre les événements joyeux ou plus difficiles auxquels nous sommes aujourd'hui confrontés ? Vient ensuite le remord. Nous risquons cette fois de nous enfermer dans une spirale mortifère, confrontés à une re-mort, c'est-à-dire une nouvelle mort. Notre passé nécrose notre présent. Nous nous en voulons à ce point que nous avons l'impression qu'il n'y a aucune issue possible. Nous vivons avec cette utopie de pouvoir réécrire notre histoire mais cette fois avec une encre plus claire. Le remord tue la vie et nous empêche également de poursuivre notre route. Or le Christ, conscient de l'importance de notre passé, par l'expression d'images très fortes, nous convie à ne pas nous y enfermer à chercher à vivre une nouvelle forme de fidélité qui sera cette fois tournée vers l'avenir. Dans la foi, nous sommes invités à être fidèles à notre avenir ? Qu'est-ce à dire se demandent peut-être certains ? La fidélité à son avenir, c'est de chercher à garder la confiance en ce Dieu qui nous accompagne et nous ouvre la voie du Royaume. La fidélité à son avenir, même lorsque ce dernier paraît bouché, c'est de continuer à oser croire à l'espérance. Puissions-nous alors, chacune et chacun, avec notre histoire et nos blessures, devenir des êtres fidèles à leur avenir.

Amen.

13e dimanche ordinaire, année C

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2006-2007

Le contraste est total. Au moment même où s'ouvre le temps des grandes vacances, où des multitudes se ruent sur les autoroutes ou dans les aéroports pour partir au loin, avides de détente, de repos, de soleil, l'Evangile du jour, lui, nous montre Jésus qui décide de se rendre à Jérusalem où, il le sait, ses ennemis le mettront à mort.

Les uns partent vers le plaisir qui, idolâtré, risque de s'enliser dans l'égoïsme ; Jésus prend le chemin de la croix qui le conduira à la vraie Gloire.

Voilà déjà tout un temps que Jésus pressent sa fin tragique : pharisiens et scribes lui ont manifesté leur hostilité et par deux fois déjà, il a annoncé sa future Passion à ses disciples (Luc 9, 22 ; 9, 44). Le temps de la mission paisible à travers les villages de Galilée et dans les petites villes des bords du lac est achevé : l'heure est venue de monter à Jérusalem ( Jérusalem étant sur une montagne et étant le "sommet" central d'Israël, on dit toujours qu'on y "monte").

C'est le GRAND TOURNANT de la vie de Jésus. St Luc marque l'importance de la décision en prenant tout à coup un ton solennel : voici le verset en traduction littérale :

Et il arriva que soient accomplis les jours de son enlèvement et il durcit sa face pour aller vers Jérusalem.

Ainsi on peut dire qu'ici commence "son enlèvement" : le mot fait allusion à l'histoire du prophète Elie qui a terminé son temps de mission en étant "enlevé" vers le ciel. De Capharnaüm à Jérusalem puis hissé en croix, puis ressuscité, Jésus va être "enlevé" dans la Gloire de son Père.

Mais cette Ascension ne pourra s'effectuer que par son "élèvement" sur la croix du Golgotha : il ne l'ignore pas et doit donc bander toutes ses énergies, serrer les dents, "durcir sa face" pour ne pas faillir. Cette dernière expression fait référence au mystérieux Serviteur de Dieu dont le 2ème Isaïe avait tracé jadis le destin dramatique :

Le Seigneur Dieu m'a ouvert l'oreille et je ne me suis pas cabré...

J'ai livré mon dos à ceux qui me frappaient,

je n'ai pas caché mon visage face aux outrages et aux crachats.

C'est que le Seigneur Dieu me vient en aide ; dès lors je ne cède pas,

j'ai rendu mon visage dur comme un silex,

j'ai su que je n'éprouverais pas de honte...

Oui, le Seigneur Dieu me vient en aide..." ( Isaïe 50, 4-10)

Jésus s'identifie donc à ce "serviteur" intègre de Dieu. A l'écoute de la volonté de son Père, il a pris une décision irrévocable. Quoi qu'il arrive, celui-ci est et sera toujours avec lui. Attention ! Jésus ne décide pas de souffrir mais de poursuivre sa mission au c½ur de Jérusalem, auprès des plus hautes autorités religieuses. Celles-ci le refuseront, le rejetteront comme blasphémateur. Ce que Jésus veut, c'est obéir à son Père : la mort sera le prix de sa fidélité.

On attendait que le Messie donne enfin le signal de l'insurrection contre les occupants romains et bien des jeunes étaient prêts à mourir en martyrs pour l'indépendance nationale. Ou bien on espérait que le Messie exalterait les pieux observants de la Loi et déclencherait la Colère de Dieu contre tous les malfaiteurs, les brigands, les impies qui déshonoraient Israël.

Or voici que Jésus s'élance vers Jérusalem, ville du Temple, du culte officiel, des Grands Prêtres et des Scribes théologiens : c'est contre eux qu'il va se dresser, lancer ses critiques les plus acerbes.

Donc pour lui, la tâche essentielle (la plus dangereuse) n'est ni politique ni morale : elle est de contester la fausse religion, le culte hypocrite.

Tâche sans fin contre une hydre qui repousse toujours.

LE REFUS DE CERTAINS

Décision prise, Jésus envoie des messagers en avant, chargés de préparer sa venue : un certain village samaritain les refuse.

Devant ce refus, les disciples Jacques et Jean intervinrent : "Seigneur, veux-tu que nous ordonnions que le feu tombe du ciel pour les détruire ?" --- Mais Jésus se retourna et les interpella vivement.

Et ils partirent pour un autre village.

Furieux devant ce manque d'accueil, les deux Zébédée ont le réflexe d'Elie, le prophète de feu qui n'hésitait pas à faire descendre la foudre sur ses ennemis ( 2 Rois 1, 10). Mais Jésus tance vertement ces deux fanatiques. Il faut toujours laisser aux gens le temps de la conversion : il n'est pas évident d'accepter tout de suite la marche à la croix. Mais un jour, l'Evangile se répandra également en Samarie (Ac des Ap 8, 5...)

TROIS RECITS DE VOCATION

Luc a placé ces trois appels au lendemain même de la décision capitale de Jésus de risquer sa vie : ceux qui désirent être ses disciples, qui veulent marcher à la suite de Jésus, doivent être éclairés sur les ruptures qu'ils auront à opérer.

En cours de route, un homme dit à Jésus : "Je te suivrai partout où tu iras" Jésus lui déclara : " Les renards ont des terriers, les oiseaux du ciel des nids ; mais le Fils de l'homme n'a pas d'endroit où reposer la tête".

Jésus prévient le candidat : la route messianique n'est pas celle des honneurs, il ne faut pas s'attendre aux vivats de la foule, à des accueils princiers. Au contraire, on sera refusé, rejeté, on mènera une vie pauvre, dangereuse, sans abri. Remarquez que St Luc ne montre jamais Jésus habitant une maison à lui : ou il est invité ou il est en marche.

Il dit à un autre : " Suis-moi". L'homme répondit : " Permets-moi d'aller d'abord enterrer mon père". Mais Jésus répliqua : " Laisse les morts enterrer leurs morts ; toi, va annoncer le Règne de Dieu".

Cette réplique de Jésus est sans doute une de celles qui a le plus scandalisé l'entourage : ainsi on ne devrait même plus participer aux ultimes adieux à son père ? Et le 5ème commandement alors !? Oui, si sacré soit-il, ce devoir ne peut retarder l'urgence d'annoncer la Bonne Nouvelle. L'Eglise n'est pas une entreprise de pompes funèbres : sa mission capitale, c'est de rendre la vie, tout de suite, à ceux qui se croient vivants et qui sont des morts.

Un autre lui dit encore : " Je te suivrai, Seigneur, mais laisse-moi d'abord faire mes adieux aux gens de ma maison".

Jésus lui répondit : " Celui qui met la main à la charrue et regarde en arrière n'est pas fait pour le royaume de Dieu".

Encore une nouvelle allusion à Elie qui appelait Elisée ( 1ère lecture) : mais une fois encore Jésus se montre plus radical que le prophète. S'engager à la suite de Jésus, c'est comme entreprendre de labourer le monde afin de lui faire produire de nouveaux fruits et permettre au Royaume de Dieu d'advenir. Nul retour à l'ancien monde n'est permis. Jésus lui-même dès le départ a coupé les liens avec les siens et expliqué ce qu'était sa nouvelle famille : " Ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la Parole de Dieu et qui la mettent en pratique" ( Luc 8, 21)

Est-ce là un évangile que nous allons emporter dans nos bagages ?......

Sur la plage, il nous aiderait à méditer sur notre engagement chrétien

13e dimanche ordinaire, année C

Auteur: Van Aerde Michel
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2006-2007

C'est le jour le plus long que nous fêtons la naissance de Jean Baptiste, alors que c'est la nuit la plus longue que nous fêtons Noël. Les éclairages dans les rues d'un côté, de l'autre les feux de la saint Jean. Deux naissances symétriques, deux cousins proches et différents. Deux annonciations.

La première : l'archange est dans le Temple, à Jérusalem et il apparaît au prêtre quand il offre l'encens, devant le Saint des Saints. Deuxième annonciation : à Nazareth, une toute petite ville de province. Dans la première, Gabriel annonce un fils à Zacharie qui ne le croit pas, cela n'est pas prévu et c'est trop tard, ils sont trop vieux. Dans la seconde, c'est trop tôt mais Marie répond « Je suis la servante du Seigneur ». Le vieux prêtre devient muet. Il ne pourra pas bénir le peuple à la sortie du culte pour lui communiquer la grâce de Dieu. On voit que la liturgie, même fastueuse, peut être répétitive et stérile comme l'était ce vieux couple. Mais Dieu se rend présent et l'enfant qui naîtra s'appellera « Jean », c'est-à-dire « le Seigneur fait grâce ». Deuxième annonciation : il ne s'agit pas du Temple mais de la maison, tout simplement. Marie n'est pas encore mariée. Son mari n'est pas un prêtre, il est laïc dirait-on aujourd'hui, un simple menuisier.

Qui donc est ce Jean ? Il baptise dans l'eau, un baptême de repentance, de préparation. Il baptisera Jésus dans le Jourdain mais celui-ci baptisera dans le feu, celui de l'Esprit Saint. La grandeur de Jean Baptiste, c'est son humilité, sa capacité à s'abaisser pour que l'autre grandisse . Il ne se prend pas pour le Messie, il n'est que le précurseur, la voix qui annonce le Verbe, la lampe qui précède le grand jour de Dieu .

Là où il nous est proche, c'est quand il doute, quand il se sent abandonné, au fond de sa prison. « Es-tu celui qui doit venir ? » fait-il demander à Jésus par ses disciples . Jean Baptiste meurt décapité. Alors Jésus s'en va dans le désert, pour y prier. Le martyre de Jean Baptiste est pour lui un signe de la violence de sa propre mort.

De tout cela, nous pouvons retenir que Jésus n'est pas seul. Il est précédé par un grand homme « le plus grand des enfants des hommes » dira Jésus de Jean Baptiste . Il lui reprend le geste du baptême pour signifier le grand passage par la mort et la résurrection. Ses premiers disciples ont d'abord suivi Jean. La progression spirituelle de l'humanité correspond à une découverte progressive du vrai visage de Dieu et la révélation est une suite d'étapes, d'héritages et de ruptures, de modèles et d'inventions. Jésus ne part pas de rien. Il a une famille humaine. Il a aussi une famille spirituelle et le « cousinage » avec Jean me semble se jouer surtout là. Comme dans toutes les familles, il y a dans la sienne quelques originaux.

Jean Baptiste est un homme très particulier, tout à fait hors normes et à la limite de l'a-social. Je l'imagine longiligne et marchant en ondulant, comme « un roseau agité par le vent » . La Bible nous le croque en quelques mots très imagés, comme une sorte d'écologiste biodégradable. Il n'est pas un ange pourtant, ni un fakir. On nous dit qu'il mange, comme un ours, du miel sauvage. C'est certainement très bon mais le problème est probablement sa rareté dans le désert et le fait que les abeilles n'aiment pas qu'on le leur prenne. Elles devaient le piquer. Mais Jean est habillé. Notre Adam primitif a sa pudeur. S'il est à poil, ces poils ne sont pas les siens mais des poils de chameaux . Toutes les tentes sont faites de poils de chèvre et de chameau, là n'est pas le problème mais le confort car le contact n'a rien de doux. Autre plat favori : les sauterelles. Je ne sais pas si vous avez essayé ? J'ai goûté aussi aux fourmis grillées, cela ne vaut pas la langouste. N'essayez pas d'en monter un commerce d'importation !

Jean Baptiste est donc une espèce d'escogriffe velu, totalement décalé et déconditionné qui vit une liberté totale, à la manière des bêtes sauvages, avec le seul souci de Dieu. Pas étonnant qu'il soit devenu le modèle des moines et des ermites et qu'en tout lieu un peu isolé, on ait aimé construire une chapelle sous son patronat.

Mais Jean Baptiste n'est pas muet. Il parle et il parle fort. Son message est précis et toujours actuel. En un mot : il faut changer. Il faut se convertir, cela ne peut plus durer. Nous allons tout droit à la mort mais Dieu veut nous sauver, il nous invite à un autre type de vie. Il ne faut pas tarder : « La hache est à la racine de l'arbre » . La paille va être séparée du grain. Si votre vie est stérile, elle sera brûlée par le feu . Pour faire taire le prophète, la compagne d'Hérode ne trouve pas d'autre solution que lui faire couper le cou .

Jean Baptiste a passé sa vie à préparer les chemins du Messie. Son c½ur était consumé par l'imminence de Dieu, ses yeux même brûlés de soleil, lui ont permis de reconnaître et de désigner le Messie attendu : « Il y a parmi vous quelqu'un que vous ne connaissez pas ! »

Cette phrase admirable nous appelle aujourd'hui encore à ouvrir l'½il, à nous libérer des messages publicitaires pour découvrir l'essentiel au plus près de nous : Attention ! Il est là ! Dès maintenant. « Parmi vous, au milieu de vous, quelque part dans votre c½ur, il y a quelqu'un, que vous ne connaissez pas ».

14e dimanche ordinaire, année C

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2006-2007

Il y a parfois des petits gestes qui semblent souvent anodins et qui, pourtant, vont nous marquer tout au long de notre vie. Me revient en mémoire un de ceux-ci. Lorsque j'étais enfant et que je rentrais dans la maison familiale avec ma grand-mère, celle-ci trempait toujours ses doigts dans un petit bénitier situé à côté de la porte d'entrée puis elle se tournait vers moi ou un de ses autres petits-enfants et nous invitait à nous signer. C'était sa manière à elle de dire « Paix à ma maison ». Il était important que nous nous rappelions que nous étions non seulement dans sa maison mais aussi dans une demeure où Dieu était présent. Ce simple signe de croix était le souhait exprimé par elle pour que l'évangile puisse se vivre au quotidien au sein de la famille. Et il est vrai que la famille est et reste une institution complexe. Nous ne l'avons pas choisie et nous sommes priés de cohabiter ensemble. Elle est un lieu essentiel d'apprentissage de la vie. C'est en effet au c½ur de nos familles que nous avons appris à vivre en communauté, à découvrir que chacun avait droit à sa place. Au c½ur de ces premières relations, au sein de chacune de nos fratries, se vivent les jeux et les disputes mais également la découverte d'un ensemble de règles et de valeurs qui participent au bien-être de toute la maisonnée. Parfois aussi nous avons, durant notre enfance, été confrontés à certains principes dont nous ne saisissions pas tous les contours. Ces principes pouvaient avoir alors le don de nous énerver. Surtout lorsque ces derniers ne s'enracinaient plus dans la vérité des situations. Ne devrions-nous alors pas reconnaître que si les valeurs conduisent à la vie, les principes peuvent la tuer ou en tout cas, conduire à une certaine forme de violence exprimée à l'égard de certaines personnes ou situations. Avec les principes, l'amour n'est souvent plus au c½ur de la rencontre or il n'y a jamais rien à gagner à faire la guerre. Le terrain de la violence est toujours un lieu où toutes les parties en présence sont perdantes quelque part. C'est pourquoi, le Christ nous invite à dire d'abord « Paix à cette maison ». Mais de quoi peut-il bien s'agir ? La paix de Dieu est-elle tellement différence de celle des êtres humains ? En quoi serait-elle plus spécifique qu'une autre ? Après une dispute ou un conflit, lorsque je décide de ne pas me laisser enfermer dans une spirale de violence, je suis la source de la paix que je cherche à vivre lorsque celle-ci est le choix de ma propre volonté. La paix du Christ, comme celle que nous nous donnons à chacune de nos célébrations eucharistiques, est d'une tout autre teneur. Nous n'en sommes pas l'origine. Cette paix nous a d'abord été donnée. Elle trouve son fondement en Dieu. Cette paix ne nous appartient pas. Elle vient de plus loin que nous et nous, nous en sommes son porteur, son messager. Un peu comme si la paix de Dieu passe toujours par un être humain vers un autre être humain. Le premier n'est que le médiateur de ce qui le dépasse et le transcende. Il reçoit un cadeau à ce point merveilleux, qu'il ne peut le garder pour lui tout seul. La paix de Dieu a comme vocation à se partager, à s'offrir. Elle est comme l'amour, c'est-à-dire qu'elle se multiplie en se donnant. Je me risquerais même jusqu'à dire que la paix de Dieu est contagieuse. Elle peut se répandre comme une épidémie de bonheur qui touche toute personne qui la reçoit car cette paix est profondément respectueuse des différences qui nous constituent. En offrant la paix de Dieu à l'autre, je le reconnais non seulement comme autre mais aussi comme étant quelqu'un qui a droit à avoir à sa juste place dans la vie. En d'autres termes, cela pourrait vouloir dire : tu es qui tu deviens et je m'en réjouis pour toi. Je suis avec toi, à tes côtés dans tes combats intérieurs ou dans tes traversées plus douloureuses. Je ne nie pas ta réalité. Non seulement je l'accepte mais je l'accompagne, c'est-à-dire je suis avec toi tout en sachant je ne serai jamais toi. Tu es à ta place, je suis à la mienne. Nous sommes autres l'un pour l'autre. Il n'y a pas de fusion entre nous juste un espace nécessaire pour que la tendresse puisse s'exprimer et se vivre. Pour que la paix de Dieu puisse se donner, il suffit parfois d'un regard, d'une caresse, d'un simple mot. Toutes ces petites merveilles qui peuvent se donner que l'on soit malade ou en bonne santé. Par exemple, un « je t'aime » prend le temps de sept lettres et pourtant ces trois mots peuvent faire chavirer l'océan de nos sentiments. La paix du Christ conduit à une paix intérieure, profonde, une paix qui conduit à trouver ou retrouver en nous une certaine sérénité malgré la réalité parfois dure à laquelle nous pouvons être confrontés. Que la contagion de cette paix nous anime pour que nous en soyons les porteurs et ce, quelque soit notre réalité personnelle. C'est cette paix-là qui nous permettra alors de reconnaître que le « règne de Dieu est tout proche de nous ».

Amen

14e dimanche ordinaire, année C

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2006-2007

Il serait lamentable qu'un chrétien s'abrutisse tout l'été à copier les païens dans leur frénésie de loisirs ineptes et de courses épuisantes. Ce temps de repos doit être utilisé, aussi, pour faire le point sur l'état de notre Eglise. Il y a de quoi faire ! Trop souvent nous ressassons des plaintes stériles (pénurie des prêtres, absence des jeunes, laxisme des m½urs...) ou bien nous préservons notre tranquillité présente en rêvant d'un renouveau qui surviendrait, un jour..., par miracle.

L'évangile de ce dimanche nous remet devant notre tâche essentielle : notre mission. En effet, si, comme Marc et Matthieu, Luc a raconté l'envoi des 12 apôtres, il a ajouté en outre l'envoi des 72 disciples ( 72, c'est le nombre biblique des nations - Genèse 10). Donc cela signifie

-  que la mission doit être l'½uvre de tous les disciples, tous les chrétiens,

-  et qu'elle doit être universelle, toucher tous les peuples.

AU POINT DE DEPART : LA PRIERE

Jésus leur dit : " La moisson est abondante mais les ouvriers sont peu nombreux ! ! ! !

Priez donc le maître de la moisson d'envoyer des ouvriers à sa moisson"

Avant de s'élancer à toutes jambes dans le terrain d'apostolat, le disciple doit d'abord plier les genoux, prier, ouvrir les yeux sur l'immensité de la tâche à remplir...et s'effrayer de la disproportion des effectifs. Si peu de chrétiens s'engagent, si peu comprennent l'obligation de leur baptême ! Pourtant c'est l'heure de moissonner ! Beaucoup de gens sont mûrs, prêts à entrer dans le Royaume...si on leur en parle, si on les appelle !

Mais Dieu seul a l'initiative de l'envoi. Le salut du monde est une ½uvre divine ; chaque fois que des hommes ont cru comment, par eux seuls, sauver l'humanité, on est allé à la catastrophe.

SEUL CHRIST EST SAUVEUR.

Donc il faut se jeter dans la PRIERE : c'est elle qui nous convaincra de notre petitesse, nous remplira le c½ur de compassion, nous fera partager l'angoisse devant tant de vies perdues, tant de gâchis. Saint Dominique pleurait des nuits entières devant le tabernacle sur tant d'hommes qui se perdaient faute d'Evangile !

La prière nous persuadera que nous ne sommes que des envoyés.

Mais est-il plus haute gloire que d'être "un envoyé de Dieu" ?...

LA PUISSANCE DE DIEU DANS LA FAIBLESSE

Je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups.

Jésus se comprend comme celui qui peut immédiatement transmettre l'ordre de Dieu, "maître de la moisson". Il ne nous envoie pas comme des dirigeants, des maîtres, des savants mais comme des êtres fragiles, vulnérables, exposés aux attaques. Vous expérimenterez l'opposition, l'hostilité, la haine. Même vos proches seront irrités, exaspérés. Des loups, des hommes voraces, cherchant à accumuler sans frein, à jouir sans mesure, feront tout pour vous détruire. Surtout ne les imitez pas, ne soyez jamais une Eglise puissante, ne recourez pas à la force, n'ayez d'autre armure que la foi. "C'est quand je suis faible que je suis fort...La puissance de Dieu se déploie dans la faiblesse" (Saint Paul)

N'emportez ni argent, ni sac, ni sandales

et ne vous attardez pas en salutations sur la route.

Ne pas s'encombrer, ne pas se surcharger de provisions, au contraire se dépouiller, adopter une vie frugale. Comment convertir les idolâtres de la société de consommation s'ils remarquent (comme hélas, trop souvent !) que les chrétiens sont autant préoccupés qu'eux du "tout confort" ? Seule une Eglise pauvre peut remplir sa mission.

Et ça urge ! Pas de temps à perdre, pas de papotages, de discussions oiseuses : des gens meurent parce que personne ne leur a proposé le salut ! Depuis le Christ, le monde est aux "URGENCES". Toute perte de temps a des résultats mortels : des vies sont en danger, des jeunes sont près du suicide ou de la drogue, des dirigeants cupides vont traiter le personnel comme des kleenex, des gouvernements vont préparer une nouvelle guerre, des sectes rôdent...Comment rester oisifs ?...

CE QU'EST L'¼UVRE MISSIONNAIRE

Dans toute ville où vous entrerez et où vous serez accueillis, mangez ce qu'on vous offrira. Là guérissez les malades et dites aux habitants : " Le Règne de Dieu est tout proche de vous".

La mission chrétienne n'est pas fuite dans la solitude, fondation d'un monde parallèle : elle s'enfonce au c½ur des cités, elle rejoint les hommes au sein de leurs demeures. Les disciples, parce qu'ils sont démunis, pauvres, dépendent de l'accueil qu'on leur offre. Ils apportent le trésor du salut, mais ils ont besoin eux-mêmes d'être reçus. Il y a échange. Les gens découvrent le salut en devenant hospitaliers, en accueillant chez eux ces hommes pauvres, toujours pressés, heureux.

Que font ces missionnaires ? Deux choses :

1) GUERIR LES MALADES. Car le message évangélique n'est pas piété évanescente, envol dans les belles idées théologiques : il concerne l'homme entier, corps et âme. Dans son histoire, l'Eglise, dans le même élan d'amour, a toujours bâti églises et dispensaires, chapelles et hôpitaux. Toute paroisse doit s'interroger : avons-nous une équipe de "visiteurs de malades" ? sommes-nous préoccupés par la santé de nos frères ? Ce qui bouleverse à Lourdes, n'est-ce pas de voir que les malades et handicapés sont les premiers servis ? Pourquoi n'en va-t-il pas de même dans nos assemblées ?.....

2) Mais l'½uvre principale est LA PREDICATION :

"DITES AUX HABITANTS :LE REGNE DE DIEU EST TOUT PROCHE DE VOUS"

Car la mission n'est pas amélioration humaine des conditions de vie, progrès de la science et de la médecine. Jésus n'est pas Henri Dunant, l'Eglise n'est pas Médecins sans frontières. Si trop de chrétiens se calfeutrent dans une Eglise désincarnée (sauver les âmes permet de ne pas toucher à son propre niveau de vie), trop d'autres la réduisent à une oeuvre sociale. Or l'Eglise n'est ni une entreprise du salut des âmes par des rites, des cantiques et de la piété - ni une organisation humanitaire et philanthropique.

Il faut DIRE le message, car l'homme, seul, ne peut le découvrir. Il faut que certains - pour l'expérimenter eux-mêmes dans leur vie - partagent la découverte qu'ils ont faite : Dieu s'approche, Dieu bienveillant, miséricordieux, doux et humble de c½ur, vient en Jésus et ses disciples, il pénètre dans nos maisons. La solitude, la famine, le racisme, la haine ne sont pas des fatalités et on ne peut se limiter à rêver au bonheur dans l'au-delà.

C'est ICI et MAINTENANT qu'un nouveau type d'existence est possible, créé par Dieu. La Bonne Nouvelle retentit : basculons nos idoles et laissons Dieu régner.