Ascension

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Un homme et sa femme étaient en vacances à Jérusalem. Au cours de ce séjour, l'épouse décède inopinément : une crise cardiaque foudroyante. L'entrepreneur des pompes funèbres dit alors au mari : « vous pouvez transférer votre épouse dans votre pays mais cela vous reviendra à cinq mille dollars. Par contre, si vous acceptez de l'enterrer ici à Jérusalem, en Terre Sainte, cela se fera pour la modique somme de cent cinquante dollars ». L'homme réfléchit quelques instants puis il fit savoir qu'il préférait transférer son épouse chez lui. L'entrepreneur s'étonna d'une telle décision et en fit part à l'époux : « pourquoi dépensez-vous cinq mille dollars alors que ce serait merveilleux de pouvoir l'enterrer ici en Terre Sainte. Vous faites une économie de quatre mille huit cent cinquante dollars ». L'homme répondit : « il y a longtemps un homme est mort ici et a été enterré dans cette ville. Et trois jours plus tard, il est ressuscité. Désolé, mais je ne veux pas prendre un tel risque ». Ah, si cet homme avait eu un peu plus de culture religieuse, il n'aurait pas eu peur car il aurait su que ce même homme est monté au Ciel et a disparu aux yeux des disciples qui le suivaient depuis plusieurs années.

Dieu le Fils, dans l'événement de l'Ascension, a choisi de se retirer, de s'effacer de notre monde pour nous laisser un nouvel espace à occuper. En effet, s'il était resté parmi nous, nous aurions sans doute perdu notre liberté car nous nous serions souvent tournés vers lui pour qu'il nous dise ce qu'il y a lieu de faire dans telle ou telle situation. Au contraire, le Christ s'efface après nous avoir donné tout ce dont nous avons besoin pour réussir notre entreprise de co-création. Il nous laisse les mains libres et nous convie à occuper dorénavant autrement l'espace qu'il nous offre par le biais de son absence. Il ne s'agit pas d'une absence désertique mais plutôt d'une absence pleine de la présence de l'Esprit Saint tel que Celui-ci nous sera donné dans l'événement de la Pentecôte. Tout comme le Père lors du septième jour de la Création, le Fils décide d'agir de la même manière. Il s'est retiré en chacune et chacun de nous pour que nous conduisions plus librement encore nos vies. Et aujourd'hui encore, il peut nous sembler à notre tour bien difficile de nous effacer. Combien de parents, au fil de la maturation de leurs enfants, ne se retirent-ils pas sur la pointe des pieds pour permettre à leur progéniture de poursuivre leur propre route comme ils l'entendent ? Combien de personnes, initiatrices de projets, acceptent-elles vraiment de s'effacer pour le bien de ce qui a été mis en place ? Etre capable de s'effacer face à ce que nous avons mis en place ou encore fait grandir, demande une certaine dose d'humilité. Cela est d'autant plus vrai lorsque nous avons été partie prenante de projets. Nous nous sommes investis et puis, vient un moment où pour le bien de ce qui a été mis en place, il nous faut passer à autre chose et permettre à ce que d'autres poursuivent ce qui a été engendré par nous. Il peut y avoir comme une forme de déchirure. Notre ego en prend un sacré coup. Nous découvrons à nouveau que nous ne sommes pas indispensables et que d'autres peuvent continuer, voire améliorer, ce que nous avions commencé. Par-delà l'humilité requise, il s'agit également de faire confiance à nos successeurs. Ils auront d'autres idées. Ils transformeront peut-être l'objectif initial. Ils tiendront sans doute compte d'éléments nouveaux. Ils s'adapteront. Et nous, de notre côté, nous devons apprendre à lâcher prise, à accepter de ne plus pouvoir tout diriger. Cela nous demandera peut-être parfois de la patience : être capable d'accepter de passer à autre chose dans sa propre vie. Il s'agit d'un effort de la volonté lorsque nous vivons cela de manière libre. Il est vrai que l'expérience de la maladie, de la vieillesse, de la perte d'un être cher, nous conduit également à vivre cette expérience de l'effacement, du retrait. Il ne s'agit en rien d'une négation de sa personne et de son histoire mais plutôt d'une nouvelle manière d'écrire sa vie. Par ces réalités nouvelles, un espace insoupçonné peut se laisser découvrir. Le retrait, l'effacement nous permettent de prendre à nouveau un certain recul par rapport à ce que nous sommes devenus. Il est une occasion de pouvoir remettre certaines pendules à l'heure, de revenir à ce qui fait l'essence de nos existences, de reprendre le temps pour l'offrir à Dieu. Le Christ s'est retiré à nos yeux pour mieux venir inhabiter en nous. Il s'est effacé de ce monde terrestre pour entrer pleinement dans le Royaume de l'Amour là où toutes et tous nous serons un jour rassemblés. Réjouissons-nous alors qu'il nous ait donné un tel espace de Vie pour transcrire en nos c½urs à chacune et chacun la merveille du don de Dieu : la foi, l'espérance et l'Amour.

Amen

Ascension

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Dans notre société sécularisée qui perd mémoire du christianisme, la fête de l'Ascension ne signifie plus grand chose pour la majorité. Comme les autres fêtes, elle n'est plus que l'occasion d'un congé : "le pont de l'Ascension", 4 jours pour se détendre et s'offrir un petit voyage supplémentaire. Et d'ailleurs comment croire aujourd'hui que Jésus se soit élevé dans les airs ? Légende de nos ancêtres trop crédules ! Les seuls qui montent au ciel, ce sont les cosmonautes dans leurs navettes et lorsqu'ils redescendent, aucun d'eux n'a prétendu voir des traces de Dieu en tournant là-haut. Inutile donc de rêver du ciel : il est désespérément vide. Profitons de la vie ici-bas : l'humanité est vouée à la terre et non au ciel.

SIGNIFICATION DE LA FETE

Nos aïeux dans la foi n'étaient pas des naïfs : ils savaient distinguer les représentations spatiales et les convictions profondes, les images et la confession de foi. Ils connaissaient la fonction indispensable des symboles. Que signifie l'Ascension de Jésus ?

L'Ascension proclame que Jésus n'est pas ré-animé, bénéficiaire d'un sursis, comme Lazare condamné à mourir à nouveau : il est ressuscité, il jouit d'une tout autre condition, il n'est plus soumis à nos lourdeurs. Il est SEIGNEUR, il porte le même titre que Dieu son Père.

Dans ce cas, le Royaume dont il annonçait la venue est bien inauguré sur terre et il en est le Maître tout-puissant. Crucifié et enseveli aux yeux des impies, Jésus est le Vivant et, quelles que soient les persécutions menées par ses ennemis, ce Royaume s'étendra jusqu'aux extrémités de la terre et connaîtra sa plénitude à la fin des temps.

L'Ascension est donc la fête de notre espérance puisque là où la Tête de l'Eglise est entrée, le Corps, à son tour, en dépit de ses turpitudes, peut à bon droit tendre dans la confiance. Une Porte est ouverte que nulle science ne pourra jamais ni percer ni clore.

C'est donc aujourd'hui qu'il faudrait annoncer cette possible ouverture céleste aux multitudes comblées de biens matériels et dépourvues de but, bourrées de moyens d'existence et vides de raisons de vivre. Annoncer que le mur de la mort est franchissable à ceux qui ont tout raté, tout perdu et qui se tordent dans la détresse.

On l'a dit, notre société moderne est fascinée par "le sacre du présent" : il n'est que de voir cette rage de "prendre des instantanés", de vouloir fixer l'instant présent. On veut gérer, améliorer, fignoler, embellir, perfectionner le cadre de vie ! Mais dans ce "cadre", on meurt. L'Occident ne veut plus d'enfants et il désespère sa jeunesse à qui on ne donne d'autre projet que de jouir de tout tout de suite. Ce qui manque le plus, n'est-ce pas l'avenir ?...

ON ATTEND DES TEMOINS DE L'ESPERANCE

La mission actuelle la plus urgente des chrétiens est sans doute de témoigner de l'espérance.

Comme Sr Marie-Emmanuel dans les cabanes des chiffonniers du Caire, comme mère Térésa parmi les lépreux de Calcutta, comme tant de bénévoles au chevet des cancéreux, des malades d'Alzheimer ou dévoués aux soins palliatifs. Redire que l'achèvement de l'homme n'est plus la mort mais l'amour. Moins vouloir expliquer les subtilités de la théologie que d'indiquer le but de la foi. Moins asséner le credo que de marcher, marcher encore. Moins maudire les malheurs du temps que d'allumer une flamme pour éclairer le chemin. Moins marteler des préceptes moraux que d'annoncer avec joie les premières lueurs de l'aurore à l'horizon.

L'ASCENSION : LE DEPART COMPENSÉ PAR LA MISSION

St Matthieu, dans l'évangile de ce jour, nous dit l'essentiel de la fête : le discours d'adieu de Jésus ressuscité à ses disciples.

1. Tout pouvoir m'a été donné au ciel et sur la terre.

A l'orée de sa mission, Jésus avait refusé de prendre le pouvoir en suivant les méthodes diaboliques de terreur et de mensonge. Parce qu'il a accepté la totale impuissance sur la croix, il a reçu de son Père le pouvoir de l'amour universel.

2. Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit et apprenez-leur à garder tous les commandements que je vous ai donnés".

L'Ascension de Jésus ne fige pas l'Eglise dans une contemplation oiseuse. Au contraire elle l'envoie à la rencontre des hommes de tous les peuples, de toutes les conditions. Par la révélation de Dieu Père, Fils et Esprit, l'Eglise peut éduquer les hommes sur le chemin de l'Evangile. Les commandements ne sont pas un carcan qui bride les libertés : au contraire ils nous libèrent des entraves pour nous permettre de courir vers le but assuré.

3 Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde.

Ainsi qu'il avait été dit à Joseph au début du Livre, Jésus a d'abord été "Sauveur" : en se donnant par amour à la croix, il nous a pardonné nos fautes. Désormais il est EMMANUEL, DIEU-AVEC-NOUS, d'une Présence réelle, inaliénable, qu'aucun espace ne peut distendre, aucun temps ne peut éloigner. L'ALLIANCE est réalisée !

LA NEUVAINE DE PRIERE

"Le pont de l'Ascension" ? Est-ce encore pour se ruer sur les routes et y trouver la mort ? A quoi bon aller quelque part si la vie ne va nulle part ? Le PONT à ne pas rater, c'est la Croix du Christ. La force de le franchir, c'est l'Esprit-Saint. Le temps pour le demander, c'est la GRANDE NEUVAINE DE PRIERE, de ce jeudi à la Pentecôte.

Comme les 1ers apôtres, avec Marie, nous prions afin que vienne l'Esprit qui nous fera passer à la vraie vie et nous enverra en mission.

Assomption de la Vierge Marie 

Auteur: Van Aerde Michel
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

En cette fête de l'Assomption de Marie, j'aime le lyrisme de l'Apocalypse : « Le Temple qui est dans le ciel s'ouvrit, et l'arche d'Alliance apparut. Un signe grandiose apparut dans le ciel : une Femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles. »

Vision cosmique, que l'on retrouve dans l'apparition de Guadalupe au Mexique : Une femme, drapée dans un manteau de soleil, debout sur un croissant de lune très fin, avec une couronne de douze étoiles, comme sur le drapeau européen...

Chaque génération vit avec son imaginaire et ses questions. Autres celles des indiens d'Amérique du Sud, autres celles des premiers chrétiens, autres celles de nos contemporains européens. Au temps de l'Apocalypse c'est la persécution, le Mal a un visage précis, celui du pouvoir, nombreux sont les martyrs. Il faut avoir la foi qui franchit la mort. Le dragon a sept têtes comme la ville de Rome a sept collines.

Aujourd'hui nous vivons en paix, plus ou moins rassasiés. La mort, nous la vivons tout à fait différemment. La médecine a fait de tels progrès que jamais jusqu'ici l'espérance de vie n'a été aussi élevée. Mais le problème s'est inversé : on vit trop longtemps. Des gens de septante ans ont la préoccupation certes de leurs petits enfants (peu nombreux) mais surtout de leurs très vieux parents. Les résidences spécialisées coûtent cher et il n'est pas heureux de voir ceux que l'on aime, plus ou moins enfermés, sans possibilité de bouger, alités le plus souvent, toujours à la merci d'un petit problème de tuyauterie, affrontés à la solitude et à l'ennui. « La vieillesse est un naufrage » disait le grand Charles. On ne meurt plus d'un coup mais progressivement, de mort lente, et la séparation se fait petit à petit.

La vieillesse n'est plus, comme en Afrique, un signe de sagesse, elle devient honteuse. On célèbre le sport, la jeunesse, la beauté, alors les vieux s'enferment entre eux. Certains, aux Etats-Unis, interdisent l'accès de leurs résidences aux enfants. Dans notre quartier même, certains se sont plaints parce que le bruit des enfants dans le jardin, à la sortie de la messe, était trop puissant.

La vieillesse serait-elle un péché, serait-elle une maladie ? Non, elle est une réalité humaine naturelle qu'il nous faut accepter, comme toute limite liée à notre condition humaine, comme le fait d'être femme, ou homme et non pas les deux, comme le fait de vivre en ce siècle et non pas en un autre, et ici plutôt que dans un autre pays.

La vieillesse n'est pas un péché, mourir non plus, même de mort lente et dans son lit, tout naturellement. Marie, la mère de Jésus n'a pas été martyrisée. Elle a connu d'autres souffrances, voir torturer son fils de trente ans lui a valu le titre de « vierge des douleurs ». Marie, comme tout le monde aujourd'hui, ou presque, Marie a vieilli. Elle est morte finalement. Mais l'histoire n'a pas retenu pour elle de tombeau. Ni à Jérusalem ni à Ephèse où, avec saint Jean, elle aurait fini sa vie. La question est donc pour elle la question de « l'après mort ». Qu'est-elle devenue, où est son corps ? Et la foi des chrétiens depuis toujours, sans bien comprendre comment, mais de manière poétique comme s'expriment toutes les intuitions qui ne peuvent être démontrées, celle de l'amour en particulier, la foi des chrétiens a tout de suite perçu que Marie était associée à la Résurrection de son fils, sans attendre la résurrection finale de la récapitulation de l'histoire avec toute l'humanité. Marie anticipe en son corps la victoire de l'amour sur la haine et sur la mort.

Le mot « résurrection » n'est cependant pas prononcé, par égard pour nos frères orthodoxes qui parlent de « dormition » et non pas de « mort ». Le mot « assomption » est donc utilisé, qui se rapproche de l' « ascension ». Marie est « auprès de Dieu » et si l'on imagine celui-ci « en haut », elle est « montée » auprès de Lui. Marie nous précède, on peut dire qu'elle est au-devant de nous. Avec son Fils, elle représente l'humanité en son devenir. Elle représente l'humanité saisie par la résurrection de Jésus, elle qui a représenté l'humanité dans son accueil de l'Esprit, et donné corps au Verbe de Dieu. C'est par elle qu'il est entré dans notre histoire, c'est par lui qu'elle sort de notre histoire et prend corps de gloire.

Marie est l'arche d'alliance à laquelle fait allusion l'Apocalypse, elle est le Temple de la présence de Dieu. Les litanies, en leur symphonie disent mieux que le langage abstrait de la théologie, à chacun son instrument.

Savez-vous de quelle année date le dogme de l'Assomption ? Une année importante, facile à retenir pour moi puisque c'est l'année même de ma naissance. Ce dogme est le plus jeune de tous les dogmes ! La moitié du siècle passé ! 1950 ans, voilà le temps qu'il a fallu à l'Eglise pour dire ce qu'elle croyait, depuis toujours et en tout lieu, mais encore confusément.

Comment s'est déroulée l'assomption ? Qu'est-ce que cela signifie vraiment ? L'Eglise y croit mais ne sait pas tout ce qu'elle croit. A nous de réfléchir, de méditer. Je regarde souvent le vitrail de notre église, en particulier le matin quand le soleil vient en réveiller les couleurs. J'aime les détails, les bleus, les mouvements, mais je vous avoue que la scène ainsi présentée ne m'inspire pas. Les apôtres sont là. Il y a comme un tombeau, mais le corps de Marie est en haut, emporté dans le ciel où siège une Trinité par trop explicite. Peu importe, je préfère l'Apocalypse ou la peinture de Guadalupe, à chacun sa sensibilité.

Un signe grandiose apparut dans le ciel : une Femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles. »

Cette femme, c'est l'humanité accomplie, revêtue de la lumière de Dieu. Toute la création la contemple et lui sert de parure : le soleil, la lune et les étoiles soulignent sa beauté. C'est l'Eglise, transfigurée, c'est Marie, en tout premier lieu, la petite fille d'Israël, celle qui a cru à la promesse, celle qui a conçu le Fils de Dieu, celle qui l'a partout accompagné, celle qui est toujours à ses côtés, au pied de la croix et maintenant dans l'accomplissement de sa résurrection.

Baptême du Seigneur, année A

Auteur: Van Aerde Michel
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A
Année: 2007-2008

Auriez-vous baptisé Jésus ? Toute la question est là ! Il n'a pas besoin du baptême d'eau de Jean. C'est nous qui avons besoin du baptême d'Esprit. Accepter d'inverser les rôles, c'est déjà tout fausser. Ce qui est mal parti finira mal. Cherchons à en mesurer les conséquences, pour Jésus et pour nous qui suivons son chemin.

Jésus ne se moque-t-il pas de nous ? Nous attendons un Messie, un leader, un chef et voici qu'il incline sa tête pour se laisser baptiser. Nous attendons un initiateur et il se laisse initier. Nous attendons le règne de Dieu et non pas son abdication. Jean Baptiste aurait dû dire non et préciser le cahier des charges. « Ne descends pas dans l'eau, ne te salis pas dans cette boue, ne te mêle pas à la foule, prends-en la tête, emmène-les ailleurs. » Nous n'avons pas besoin d'un pauvre de plus, un pécheur de plus, une victime de plus. Autrement dit : « Descends de la croix et nous croirons en toi ! »

Si, dès le début, nous ne comprenons pas la logique de Jésus, si nous ne voulons pas passer par là où il est passé, nous ne pouvons pas être ses disciples. Nous faisons obstacle. « Arrière Satan ! » dit-il un jour à Pierre. Dostoïevsky y revient dans la légende du grand inquisiteur : « Nous avons corrigé ton ½uvre ! » corrigé ou perverti ? La tentation est toujours là !

On a dit que le christianisme est « la religion de la sortie de la religion ». Cela finit par être vrai. Le plus étonnant est qu'il ait fallu si longtemps. Les résistances cléricales et religieuses, qui ne sont pas concentrées exclusivement parmi les ecclésiastiques, loin de là, ont réussi à freiner le mouvement. Tant que l'Eglise était puissante, le Christ était redouté. Mais au bout de vingt siècles, les choses ont décanté et la liberté de Jésus à l'égard des procédures et des hiérarchies devient de plus en plus évidente. La religion, dans le christianisme, est-elle comme le sucre qui enrobe les médicaments ? Le principe actif diffuse lentement et la mondialisation nous montre mieux l'originalité discrète des valeurs chrétiennes. Nous considérons comme acquits les droits de l'homme, la liberté d'expression, la démocratie mais cela va-t-il de soi en d'autres univers culturels ? La culture européenne a été profondément influencée par l'Evangile. Comment évoluera-t-elle maintenant ? Pourra-t-on éteindre le feu que Jésus est venu allumer ? La question est posée.

Certains aimeraient en rester au sucre. L'Evangile proclamé en latin, les chants et le décorum, l'encens et les ors, masquent l'âpreté de la Parole. Mais quand l'Evangile est traduit et vécu simplement, alors les masques tombent. Ce n'est plus de l'esthétique mais un choix crucial qui nous est proposé. Lequel ? Nous le voyons chez Jésus de Nazareth dans sa curieuse manie de renverser les priorités. Je vous invite à les analyser.

Jésus a une manière bien à lui de tout mettre sens dessus dessous, le ciel sur la terre et la terre au ciel. L'Evangile nous dit aujourd'hui que les cieux s'ouvrent. La présence de Dieu se manifeste où l'on ne s'y attend pas.

Jésus veut se faire baptiser par Jean comme tout le monde plutôt que prendre ce que nous pensons être sa place pour baptiser lui-même. Cette submersion est une subversion, elle n'est pas une soumission. Elle est une plongée dans la condition humaine commune et ordinaire y compris au plan spirituel. Jésus se met au rang des pécheurs. Il s'assied à leur table pour partager leur repas. Les pharisiens sont scandalisés mais c'est ainsi que Matthieu est appelé, Zachée et bien d'autres avec eux. Il y a une place pour tout le monde ! Les saints se recrutent parmi les pécheurs. Prostituées et publicains sont premiers dans le Royaume des Cieux. Le Fils de l'Homme est venu pour les malades et non pas pour les bien-portants. La logique de Jésus n'est pas celle de la quantité : un vaut plus que cent. Sa priorité, ce sont les faibles et ceux qui n'ont pas d'avenir « il est venu pour ceux qui sont perdus ». Le règlement est fait pour l'homme et non pas l'homme pour le règlement. Lui qui est Juif, il demande à boire à une Samaritaine, de l'eau de sa cruche, impure selon sa Loi, mais c'est pour faire jaillir en elle l'eau vive, à la source de son c½ur.

Tout est vraiment renversé. Un pécheur qui se convertit provoque plus de joie qu'une multitude de pratiquants. Les premiers sont derniers et les derniers, premiers. Qui veut être grand doit se faire petit. Quand les disciples se demandent lequel d'entre eux détient l'autorité, il leur montre un enfant. Il est le maître et lave les pieds. Il vient pour que les aveugles voient et que ceux qui prétendent voir soient aveuglés. Le ciel nous tombe sur la tête ! Tout est mis sens dessus dessous !

Baptême du Seigneur, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A
Année: 2007-2008

Toutes les enquêtes sur la vie de l'Eglise en Europe occidentale confirment la baisse des chiffres de la pratique religieuse. De plus en plus de parents ne demandent plus le baptême de leur nouveau-né : " Il choisira lui-même quand il sera grand" disent-ils. Faut-il s'alarmer de cette évolution ? Non, car si dans notre société sécularisée, la croyance religieuse ne va plus de soi et ne se transmet plus de façon héréditaire et sociologique, par contre de plus en plus d'adultes initient une recherche personnelle de Dieu et entament une longue période de catéchuménat afin de pouvoir entrer dans l'Eglise par le baptême. La fête du baptême du Christ nous incite à réfléchir à ce fondement essentiel de notre vie chrétienne.

LE BAPTEME DE JEAN

Depuis des siècles, Israël souffrait de l'occupation par des nations païennes et Dieu se taisait. Or tout à coup surgit un jeune prophète, JEAN, qui s'installe à un endroit clef du territoire : sur la rive orientale du fleuve Jourdain, à la frontière. Il presse les gens de se convertir d'urgence car Dieu, clame-t-il, va venir instaurer son Règne. Certains confessent leurs péchés et se font baptiser dans le fleuve. Mais Jean, conscient de son impuissance, promet l'arrivée d'un autre, plus grand que lui, qui baptisera dans l'Esprit Saint et le feu ! Un jour, parmi les candidats, un homme de même apparence que les autres, se présente.

Jésus, arrivant de Galilée, paraît sur les bords du Jourdain et il vient à Jean pour se faire baptiser par lui. Jean voulait l'en empêcher et disait : " C'est moi qui ai besoin de me faire baptiser par toi, et c'est toi qui viens à moi !???". Mais Jésus lui répondit : " Pour le moment, laisse-moi faire : c'est de cette façon que nous devons accomplir parfaitement ce qui est juste". Alors Jean le laisse faire.

Quel paradoxe : celui devant qui Jean était prêt à s'agenouiller accepte humblement de se faire baptiser par lui ! C'est le contraire qui devrait se produire ! Mais il le faut, c'est "juste" : c'est-à-dire c'est ainsi précisément que doit s'accomplir le projet de Dieu. Jésus est partie intégrante de l'humanité, il est membre d'un peuple pécheur, il vit à fond cette solidarité et, comme les autres, il accepte de se dévêtir, de descendre dans l'eau en signe de purification.

LE BAPTEME DE JESUS

Mais immédiatement c'est le choc : Dieu l'interpelle

Dès que Jésus fut baptisé, il sortit de l'eau : voici que les cieux s'ouvrirent et il vit l'Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. Et des cieux une voix disait : " Celui-ci est mon Fils bien-aimé : en lui j'ai mis tout mon amour".

L'antiquité imaginait le ciel comme une voûte solide au-dessus de laquelle se trouvait la sphère de Dieu, inaccessible car, depuis toujours, à cause de nos péchés, le ciel était fermé et personne ne pouvait accéder à l'intimité divine. Avec Jésus, la porte s'ouvre : la communication avec Dieu redevient possible.

St Marc précisait que Jésus faisait une expérience privée (Dieu lui disait : "TU es mon fils..."), St Matthieu, lui, modifie : " Celui-ci est..." sans doute pour que chaque chrétien baptisé prenne conscience qu'il ne lit pas le récit d'un fait passé mais qu'il participe d'une certaine manière à cette même révélation de son être et de sa mission.

1) L' Esprit, la Puissance de Dieu descend sur lui, l'investit tout entier dans un mouvement analogue à celui d'une colombe.

Dans le récit de la création, on disait que le Souffle de Dieu "planait" sur le chaos pour y susciter la vie. Le baptême est donc perçu comme une re-création. Dieu ne change pas l'être humain ni ne l'améliore : il le RE-FAIT. Le baptême est une NOUVELLE NAISSANCE.

La colombe rappelle aussi celle qui, un brin d'olivier au bec, était venue annoncer à Noé la fin du cataclysme du déluge. Ainsi l'eau du baptême noie tout le mal en nous et nous apporte la Bonne Nouvelle de l'Alliance : dans "l'arche de l'Eglise", nous sommes sauvés.

2) Et le Père dit à Jésus (puis à chacun de nous) trois paroles d'une importance capitale :

"Celui-ci est mon Fils..." : par ces mots du psaume 2 , Dieu confère à Jésus son investiture royale. Descendant de David, il devient effectivement ROI du monde.

"...Fils bien-aimé" : dans la bible, cette qualification est donnée à Isaac lorsque son père Abraham, croyant plaire à Dieu, l'emmène pour un sacrifice que Dieu évidemment refuse. Jésus est donc le nouvel Isaac qui sera envoyé au supplice non certes par son Père mais par les hommes qui le haïssent. Il est "chéri" de Dieu parce qu'il fait de sa mort un don d'amour aux hommes. Le baptisé doit donc s'attendre à être contesté, méjugé, persécuté.

"En lui j'ai mis mon amour" : c'est ce que disait Dieu jadis en promettant la venue de quelqu'un qui allait le servir avec le maximum de perfection : ce "Serviteur de Dieu" serait rempli d'Esprit, humble, non-violent, apportant la paix au monde entier mais agneau broyé par la souffrance, il se ferait sacrifice pour le pardon de l'humanité (cf Isaïe 42, 1 ; 49, 1.6 ; 53, 7.10...)

La désignation de Jésus est donc prégnante d'une extrême signification : infiniment supérieur à Jean-Baptiste et à tous les prophètes, il est LE FILS, celui qui sert Dieu avec une fidélité absolue ; Il sera condamné à mort, il souffrira horriblement mais il apportera ainsi le pardon, le salut, la Vie non seulement à Israël mais à tous les peuples - ce que Jean-Baptiste était bien incapable de donner.

LE BAPTEME DU CHRETIEN

Depuis ses débuts, l'Eglise a demandé aux hommes de passer par le baptême. A la Pentecôte, St Pierre proclame la Bonne Nouvelle et il exhorte : " Convertissez-vous ; que chacun de vous reçoive le baptême au NOM DE JESUS CHRIST pour le pardon de ses péchés et vous recevrez le don du Saint Esprit" ( Actes des Apôtres 2, 37). Le baptême n'est pas une bénédiction de bébé : il est l'appel de Dieu qui nous comble de son Esprit, nous re-crée en ses enfants bien-aimés, nous pousse à donner notre vie pour nos frères afin que le Règne de Dieu s'étende à toutes les nations de la terre. Nouvelle naissance, vocation royale, intégration dans le Corps du Christ, sacrifice d'amour pour la paix, constitution du peuple de Dieu : jamais nous ne pourrons épuiser les richesses de ce sacrement. Ce n'est pas la morale qui nous sauve mais la foi au Christ manifestée et conclue dans notre baptême.


Commémoration de tous les fidèles défunts

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Commémoration des défunts : le 2 novembre 2008

Il était une fois, une pauvre petite fille qui marchait pieds nus dans la rue un jour où il faisait effroyablement froid. Dans son vieux tablier, elle portait des allumettes. Mais, par cet affreux temps, personne ne s'arrêtait pour considérer l'air suppliant de la petite qui faisait pitié. La journée finissait, et elle n'avait pas encore vendu un seul paquet d'allumettes. Tremblante de froid et de faim, elle se traînait de rue en rue. Harassée, elle s'assied et se blottit dans une encoignure entre deux maisons, tirant à elle ses petits pieds ; mais elle grelotte et frissonne. Elle n'ose rentrer chez elle car elle n'y rapporterait pas la plus petite monnaie, et son père la battrait. Si je prenais une allumette, se dit-elle, une seule pour réchauffer mes doigts ? C'est ce qu'elle fit. Il lui sembla tout à coup qu'elle se trouvait devant un grand poêle en fonte. La petite allait étendre ses pieds pour les réchauffer, lorsque la petite flamme s'éteignit brusquement : le poêle disparut, et l'enfant restait là, tenant en main un petit morceau de bois à moitié brûlé. Elle frotta une seconde allumette : elle vit une table couverte d'une belle nappe blanche, sur laquelle s'étalait une magnifique oie rôtie, entourée de compote de pommes et puis plus rien : la flamme s'était également éteinte. L'enfant prend une troisième allumette, et elle se voit transportée près d'un splendide arbre de Noël. Sur ses branches, brillaient mille bougies de couleurs et l'allumette s'éteint une fois encore. L'arbre semble alors monter vers le ciel et ses bougies deviennent des étoiles : il y en a une qui se détache et qui redescend vers la terre. « Voilà quelqu'un qui va mourir » se dit la petite. Sa vieille grand-mère, décédée il y a peu, lui avait dit que lorsqu'on voit une étoile qui file, d'un autre côté une âme monte vers le paradis. Elle frotta encore une allumette : une grande clarté se répandit et, devant l'enfant, se tenait la vieille grand-mère. Grand-mère, s'écria-t-elle, emmène-moi. Et l'enfant alluma une nouvelle allumette, et puis une autre, et enfin tout le paquet, pour voir sa bonne grand-mère le plus longtemps possible. Le lendemain matin, des passants trouvèrent dans l'encoignure le corps de la petite ; elle semblait sourire alors qu'elle était morte de froid et tenait dans sa petite main les restes brûlés d'un paquet d'allumettes. En fait, durant cette nuit-là, lorsque la dernière allumette s'est éteinte, la grand-mère prit la petite dans ses bras et elle la porta bien haut, en un lieu où il n'y avait plus ni de froid, ni de faim, ni de chagrin : c'était devant le trône de Dieu. Lorsque nous aussi nous sommes confrontés à l'expérience de la mort d'un être aimé, nous sommes un peu comme ces passants du conte d'Andersen. Nous restons sur cette terre. Nous ne savons rien de ce qu'il est advenu de la personne qui nous a quittée. Il nous reste alors l'espérance qu'elle est partie elle aussi se tenir devant le trône de Dieu. Notre foi en Jésus Christ ressuscité nous permet ainsi de croire que la mort n'est qu'une instant, que nous la traversons. Nous passons de la vie à la vie éternelle, c'est-à-dire la vie en présence de Dieu. Par sa mort et sa résurrection, le Fils de Dieu a fait de chacune et chacun de nous des êtres résurrectionnels, des êtres appelés à partager dans la foi cette nouvelle dimension de notre existence où la mort est à jamais vaincue et où la Vie aura toujours le dernier mot. Toutefois, nous dit le Christ ce matin, nous ne pouvons nous contenter de cette espérance. Nous sommes invités à rester en tenue de service. La vie terrestre n'est pas une simple salle d'attente en vue d'une entrée dans la vie éternelle. Non la vie terrestre est déjà le temps du Royaume des Cieux. Nous sommes le Ciel de la Terre. Nous sommes les mains de Dieu sur notre terre. Etre en tenue de service, c'est accepter de vivre sa vie pétri de l'évangile. Le Père nous appelle à une vie tournée non seulement vers Lui mais également vers celles et ceux de qui nous nous faisons proches. Il nous demande une vie de service, c'est-à-dire une vie offerte à la tendresse et à l'amour d'amitié partout où nous passons. La mort devient ainsi une invitation permanente à vivre pleinement sa vie. Oui, toutes et tous, nous sommes mortels mais également résurrectionnels, appelés à la vie divine. Cette dernière commence dès maintenant. Soyons ces serviteurs, soutenus par le souffle de l'Esprit-Saint, et efforçons-nous d'être de véritables semeurs d'espérance partout où nous sommes, confiants en ce Dieu qui nous accueillera toutes et tous dans la plénitude de son amour comme il l'a déjà fait avec tous ceux et celles que nous avons aimés et qui vivent dès à présent par-delà la vie éternelle. Que cette espérance nourrisse notre prière ainsi que le souvenir de toutes ces personnes que nous avons aimées et qui font la richesse de ce que nous sommes devenus aujourd'hui. Oui, nos morts sont devenus les grands vivants de notre c½ur puisqu'ils vivent éternellement en Dieu.

Amen

Dimanche de Pâques

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Comme à l'habitude, elles se retrouvaient chaque semaine soit chez l'une, soit chez l'autre et elles discutaient de tout et de rien. Elles étaient amies de longue date. Ce jour-là, la première demanda à l'autre si elle avait enfin décidé et pris ses dispositions. Oui, répondit la seconde, finalement j'ai pris contact avec qui de droit et je leur ai fait savoir que je voulais non seulement être incinérée mais également que mes cendres soient répandues sur le parking du supermarché. Sur le parking du supermarché, s'étonna la première. « Oui, oui, tu as bien entendu, sur le parking du supermarché, comme cela, je suis sûre que mes enfants viendront me rendre visite chaque semaine ». Cette histoire m'a été inspirée suite à une remarque de quelqu'un, qui s'étonnant que le mot « tombeau » apparaissait si souvent dans le récit de l'évangile entendu, sept fois, s'enquit d'aller voir la version originale du texte. En grec, le mot « tombeau » a la même racine que celui de « mémoire ». Il y a bien un lien entre ces deux termes. Le tombeau est par excellence le lieu du mémorial, c'est-à-dire un endroit précis rappelant les personnes qui ne sont plus là. Depuis la nuit des temps, les êtres humains ont créé de tels lieux afin de mieux se souvenir du temps passé. Ils y viennent et reviennent pour se rappeler non seulement des personnes mais également des événements que ces derniers ont traversés. Des risques existent toutefois : celui de ne rencontrer autrement la personne disparue que dans un tel endroit ou encore celui de s'enfermer dans la nostalgie du moment dépassé à jamais. Dieu le Père n'a sans doute pas souhaité cela pour son humanité. Il ne veut pas que nous regardions en arrière comme si le passage de son Fils n'était qu'un événement historique qui pourrait s'enfermer dans un lieu précis à absolument aller visiter. Non, aujourd'hui, nous nous trouvons encore et toujours face à un tombeau ouvert. La pierre a été enlevée et le monde a basculé. Rien ne sera plus jamais comme avant. Le tombeau est ouvert sur un avenir et sur un ailleurs. Par l'événement de la Résurrection, deux dynamiques s'ouvrent à chacune et chacun de nous. Le tombeau du Christ est d'abord ouvert sur un avenir. Il est vrai que parfois nous nous sentons prisonniers de nos histoires blessées, d'enfermements douloureux, de traversées de souffrance et d'incompréhension face au mystère de la maladie et de son injustice. Jésus vient nous libérer de ces différentes entraves pour que nous puissions apprendre à marcher autrement sur le chemin de la vie. Il attend que nous soyons des hommes et des femmes debout dans ce lieu merveilleux qui est notre c½ur. Sa Résurrection nous ouvre à l'avenir. Ne nous enfermons pas dans une désespérance quoiqu'il puisse nous arriver, Dieu le Fils continue de marcher à nos côtés par le biais de celles et ceux qui se font proches de nous. Il nous délivre de notre passé pour nous faire entrer dans la dimension d'un lendemain à conquérir par les armes de l'amour et de la tendresse. Mais son tombeau est également ouvert sur un ailleurs. Il n'y a pas de mot qui puisse décrire avec précision l'événement de la Résurrection. Nous sommes face à un mystère et nous y entrons en le vivant. Ce mystère éclate dans un profond silence qui ne peut se comprendre qu'en Dieu et notre foi nous convie à l'appréhender à partir de nos propres expériences respectives. Ce tombeau ouvert sur un ailleurs est signe de la mort de la mort. Par la Résurrection du Christ, la mort est morte. Oh, nous en ferons toutes et tous l'expérience mais dans la foi elle n'a plus le dernier mot, elle sera juste un instant où nous passerons de la vie à la vie éternelle. Par cet événement, nous entrons dans une nouvelle dimension de l'histoire de l'humanité. Nous étions des êtres créationnels dans le Père, nous devenons des êtres résurrectionnels dans le Fils. Dès à présent nous participons à notre propre résurrection. Oui, heureux sommes-nous de nous trouver face à un tombeau ouvert : ouvert sur notre avenir et ouvert sur un ailleurs. Chacune et chacun, nous sommes le mémorial vivant de Dieu. Plus rien ne peut nous arrêter. Nos enfermements ont été à jamais libérés. Dieu nous ouvre la voie de la vie. La résurrection n'est pas pour demain. Elle commence dès aujourd'hui, ici sur notre terre. Vivons alors en êtres résurrectionnels, c'est-à-dire en homme et en femme tournés vers l'avenir avec cette conviction intime que par le Fils et dans l'Esprit nous sommes devenus des êtres d'éternité.

Amen

Dimanche de Pâques

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

"JESUS EST LE MESSIE ... LE CRUCIFIE A ETE RESSUSCITE" !!!

Ce cri pascal qui a jailli pour la première fois à Jérusalem a changé l'histoire du monde. Cette même annonce est clamée aujourd'hui dans toutes les assemblées chrétiennes de la planète afin de rendre l'espérance aux hommes de tous pays. Nouvelle inouïe, incroyable aux oreilles des uns, scandale pour d'autres et qui, cependant, a été accueillie comme véridique et transmise dans le monde entier. On ne compte plus les hommes et les femmes qui ont accepté de donner leur vie pour en témoigner. Nous sommes bien ici au c½ur de la foi chrétienne : c'est ce Jésus-là qu'il nous faut proclamer et pas un autre. Or d'autres présentations de Jésus Christ se sont répandues, qui font croire - à tort - que l'on serait chrétien.

LE JESUS DE NOËL

L'image de la jeune et jolie maman ravie avec son bébé dans les bras est un archétype universel qui touche et émeut l'humanité qui y reconnaît sa perpétuelle origine. Mais on voit assez combien cette image reste païenne. Le sentimentalisme a déraillé dans le folklore et l'enfant pauvre de la crèche a fait place au père Noël qui appelle au gaspillage et aux beuveries. Non, l' Eglise n'est pas celle du "petit Jésus".

LE JESUS DES MIRACLES

La crédulité des foules est immense : elles se précipitent toujours au lieu d'une soi-disant apparition mystérieuse, là où l'on annonce une guérison miraculeuse. Et à la veille d'un examen difficile, l'étudiant libre-penseur presse toujours sa vieille grand-mère de prier beaucoup pour sa réussite. Or si Jésus a bien guéri quelques malades, il est manifeste que pour lui ces actions étaient secondaires et portaient au malentendu. D'ailleurs il a vite cessé d'en faire. Et aucun malade ou handicapé bénéficiaire de ses bienfaits ne s'est levé pour le défendre lors de son procès. Le miracle demeure à la périphérie de la foi. La foi n'est ni magie ni superstition. Jésus n'est pas le sorcier qui résout nos problèmes à coup de baguette magique.

LE JESUS SAGE PHILOSOPHE

Les enseignements de Jésus ont fini par imprégner les esprits, on les connaît, certains de ses aphorismes sont même devenus des proverbes. Mais on ne peut confondre Jésus de Nazareth avec un sage qui donne des leçons de morale. L'évangile n'est pas un code de bonnes manières et de civisme. Vouloir la paix du monde et la justice, défendre les droits de l'homme, se conduire en homme poli et généreux n'est pas encore être chrétien. Si, à l'école catholique, le cours de religion se contente de brosser les traits d'un idéal humain, on comprend que les élèves ne voient plus la différence avec un cours de morale. Le christianisme induit des leçons de moralité mais ne s'y réduit pas. On se trompe si on cherche dans l'Evangile un code de conduite, un réservoir de valeurs, la liste de ce qu'on peut ou ne doit pas faire. Jésus n'est pas un philosophe ni un philanthrope.

LE JESUS EN CROIX

C'est le Jésus le plus représenté, le plus populaire. Le crucifix a envahi toutes les églises et toutes les maisons catholiques (du moins jusqu'à récemment). Non sans entraîner certaines déviations. Car il ne faut pas en conclure que Dieu a voulu que le sang coule, qu'il a exigé le sacrifice de son Fils ni qu'il faudrait rechercher la souffrance, se résigner au malheur comme chemin du salut. En tout cas, les premiers siècles chrétiens n'ont jamais représenté leur foi dans l'icône d'un Jésus mort. Ce qui faisait leur force dans la tempête des persécutions, c'était leur certitude que Jésus était vivant et ils le représentaient en Seigneur éblouissant de Lumière, promesse d'éternité bienheureuse pour ses frères et s½urs qui suivaient fidèlement son chemin. Jésus n'est pas un héros mort, un martyr à commémorer.

JESUS EST RESSUSCITE.

Tel est le cri primaire que Pierre, Paul et tous les apôtres ont lancé au lendemain de Pâques. Tel est le n½ud de la foi, son c½ur. Ce sans quoi elle s'effondre. Là seulement retentit la Bonne Nouvelle. C'est cela même qui constitue l'Evangile (qui n'est pas d'abord un livre ni moins encore une leçon de catéchisme ). "Si le Christ n'est pas ressuscité, notre prédication est vide et vide aussi votre foi" écrit saint Paul ( 1 Cor 15)

Mais si Jésus a été re-suscité, c'est bien parce que, au préalable, il est mort. Plus exactement, il faut dire parce qu'il a été condamné et exécuté". Et il a fini sur une croix parce que les autorités (religieuse et politique, Caïphe et Pilate) se sont liguées pour le supprimer. Et s'ils se sont acharnés contre lui, ce n'est pas parce qu'il guérissait des malades, ni parce qu'il donnait de belles leçons de morale ni parce qu'il demandait que l'on se soucie des pauvres et des misérables( bien d'autres rabbins en ce temps-là disaient et faisaient les mêmes choses que lui )

On a voulu le supprimer parce qu'il disait qui il était, parce qu'il dénonçait les dérives de sa religion, parce qu'il annonçait la venue d'un royaume de Dieu ouvert à tous les peuples, parce qu'il exigeait un changement radical de conduite - même de la part de ses coreligionnaires. Parce qu'il refusait un clivage "bons Juifs / Romains impies", "braves gens pharisiens / malfaiteurs maudits".

La poussée de haine chez ses ennemis a éveillé en lui un élan d'amour incoercible. Ils l'ont livré au supplice : c'est lui qui s'est livré par amour de son Père et des hommes.

" Il s'est dépouillé...obéissant jusqu'à la mort...et la mort sur une croix. C' EST POURQUOI Dieu l'a souverainement élevé, et lui a donné le Nom au-dessus de tout Nom, afin qu'au NOM DE JESUS toute langue proclame que LE SEIGNEUR C' EST JESUS CHRIST" (S. Paul : Lettre aux Philippiens chap. 2)

La mort/résurrection du Christ a tellement bouleversé les premiers disciples qu'ils ont décidé de la célébrer non une fois par an au printemps mais chaque semaine, au lendemain du samedi, c'est-à-dire en ce 1er jour de la semaine où Jésus leur était revenu. Les 1ères générations chrétiennes ne connaissaient qu' UN jour de fête : LE DIMANCHE. Le concile Vatican II dit :

"L' Eglise célèbre le Mystère pascal...chaque 8ème jour, qui est nommé à bon droit le JOUR DU SEIGNEUR ou DIMANCHE. Ce jour-là, les fidèles doivent se rassembler pour que, en entendant la Parole de Dieu et participant à l'Eucharistie, ils se souviennent de la Passion, de la Résurrection et de la Gloire du Seigneur Jésus et rendent grâce à Dieu qui les a régénérés par la résurrection de Jésus-Christ... Aussi, le jour dominical est-il le JOUR DE FÊTE primordial qu'il faut proposer et inculquer à la piété des fidèles. De sorte qu'il devienne aussi jour de joie et de cessation du travail " ( Constitution sur la Liturgie § 106)

Alors la Pâque de Jésus, son triomphe sur la mort, a créé une nouvelle manière de vivre où chaque croyant est renouvelé au c½ur d'une communauté :

" Frères, vous êtes ressuscités avec le Christ : recherchez donc les réalités d'en haut où est le Christ près de Dieu. Tendez vers les réalités d' en haut et non pas vers celles de la terre..."

Dimanche des Rameaux

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Agiter des Rameaux pour devenir Rameaux Vivants de l'Eglise

La fête des Rameaux conserve encore une certaine popularité : ce jour-là, bien des non-pratiquants viennent à la messe pour recevoir un brin de buis que l'on accrochera au crucifix à la maison ou que l'on ira planter sur la tombe d'un être cher au cimetière. Mais attention, il n'y a nulle magie dans la foi chrétienne : aucun objet, aucun geste n'achète la grâce ! Il faut nous rappeler que la Joyeuse Entrée de Jésus à Jérusalem lorsque la multitude l'acclamait en agitant des rameaux fut une tragique méprise.

En effet on avait appris à Jérusalem que ce jeune Galiléen était un authentique descendant de la famille royale de David, qu'il emballait les foules par ses discours enflammés et surtout par les guérisons spectaculaires qu'il opérait sur les malades. Aussi la multitude immense des pèlerins montés en ville pour la fête de la Pâque en était persuadée : Jésus allait donner le signal de l'insurrection contre les occupants romains. Sûr ! avec un tel chef, "On va gagner !!! On va gagner !!". Les apôtres eux-mêmes rêvaient des places d'honneur qu'ils allaient occuper dans le Royaume enfin restauré.

L' HUMBLE SIGNE DE L' ANE

Or il y avait un signe très clair qui aurait dû ouvrir les yeux et faire comprendre : Jésus avait emprunté un âne sur lequel il s'était assis pour entrer en ville, accomplissant ainsi une ancienne prophétie qui disait : "Tressaille d'allégresse, fille de Sion ! Pousse des acclamations : voici que ton Roi s'avance vers toi, humble et monté sur une ânesse... Il supprimera le char de guerre...Il brisera l'arc de guerre et il proclamera la paix pour les peuples" ( Zacharie 9).

Donc loin d'appeler à la révolte, Jésus venait en homme DOUX ET HUMBLE afin précisément de mettre fin aux violences. Au lieu de lancer l'assaut contre la citadelle de Pilate, le gouverneur romain, Jésus se mit à appeler à se convertir à la simplicité et à la non violence des Béatitudes. Et son appel visait en premier lieu son peuple et les autorités religieuses du temple.

Les foules, hélas, préfèrent partir en guerre contre l'ennemi que de s'appliquer à changer de comportement. Devant la faiblesse de Jésus qui ne croyait qu'à la parole et au dialogue, l'opinion publique se retourna et ses apôtres eux-mêmes qui avaient pourtant juré de donner leur vie pour lui l'abandonnèrent à son sort. Jésus le DOUX allait s'enfoncer dans un isolement atroce : peu à peu tous s'écartèrent de lui et, à la croix, seul, sans révolte, il s'offrit pour que toute l'humanité soit pardonnée. Mais alors s'accomplit la véritable révolution : Dieu son Père lui rendit la Vie et, le dimanche suivant, à Pâques, ses disciples, stupéfaits, émerveillés, incrédules, purent éclater d'une folle allégresse. Hosanna ! Jésus a vaincu notre ennemi à tous : LA MORT ! Pâques est son triomphe réel, définitif. Pas celui d'un peuple sur l'autre. Mais celui de toute l'humanité.

SUIVRE LE CHRIST PENDANT LA SEMAINE SAINTE

L' Eglise a souvent oublié "le signe de l'âne" : elle a cru parfois qu'il fallait exhiber sa puissance et déployer ses fastes afin d'attirer les foules. Aujourd'hui, elle s'est débarrassée de ces prétentions : parfois moquée par les médias, ne rassemblant que quelques fidèles dans de grandes églises vides, elle est plus simple, plus modeste. Elle ne monte plus sur ses grands chevaux, elle marche plus lentement au rythme de l'âne. A partir d'aujourd'hui, elle va accompagner son maître au long des journées qui ont suivi l'Entrée des Rameaux et surtout elle s'arrêtera aux grands moments. Sommes-nous prêts à revivifier notre foi en ces heures bénies ?

LUNDI : Imitons Marie, la s½ur de Lazare, qui s'assied aux pieds de Jésus et gaspille un parfum de grand prix. " Folle !" murmure le disciple. Mais Jésus prend sa défense. Il nous faut passer ces jours-ci aux pieds du Christ, prendre du temps pour lui seul. Quand le monde lui tourne le dos, y aura-t-il quelques chrétiens pour demeurer avec lui ?

JEUDI SOIR : lors du dernier repas, Jésus se donne à manger à ses disciples. On ne me prend pas la vie : je vous la donne pour que vous viviez. L'eucharistie, c'est la souffrance qui devient amour, la personne unique de Jésus qui devient peuple et qui veut continuer à être présent à tous les temps et tous les lieux.

JEUDI NUIT : les heures atroces de l'agonie dans l'attente du supplice. Et voir ses amis endormis, inconscients ! "Priez donc pour ne pas tomber dans le piège de la tentation !". Et Judas qui vient me donner un baiser !???...Et Pierre qui me renie trois fois !!! Que de lâchetés !

VENDREDI MATIN : il est arrêté, condamné sur des préjugés, giflé, flagellé, moqué, traité comme un pantin, un malfaiteur. Accepterai-je mépris et moqueries au nom de ma fidélité chrétienne ?...

VENDREDI APRES- MIDI : la mort la plus atroce et la plus ignominieuse après des heures d'étouffement et de cris. ............... ........LA CROIX EST POUR NOUS. De la fournaise incandescente de la souffrance jaillit le pardon gratuit.

VENDREDI SOIR : temps d'arrêt, de prière, de contemplation de la Croix, l'arbre de la mort qui va devenir l'Arbre de Vie. "Père, entre tes mains, je remets mon esprit"

SAMEDI : le grand silence. Dieu est mort ! Nous repentir, pleurer nos fautes car nous sommes tous responsables.

SAMEDI SOIR : ...et tout à coup, l'incroyable nouvelle : Oui, c'est vrai, Jésus est ressuscité. Avec son Esprit, nous sommes son Corps.

DIMANCHE DE PÂQUES : la pâque (= le passage") est réalisée. Une humanité nouvelle est recréée. ALLELUIA. Nous sommes les Rameaux vivants du grand Arbre de l'Eglise.

Sommes-nous d'accord de faire cet itinéraire ? Aucun autre chemin ne peut nous sauver. Il ne faut pas agiter un rameau puis tourner le dos au Christ et à son Eucharistie ! Lentement, au pas de l'âne, laissons-nous convertir : chaque Pâque nous christianise.

Epiphanie

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Est-il encore besoin de les nommer : Gaspard, Balthasar et Melchior. Un africain, un européen, un asiatique. Un jeune, un d'âge moyen et un plus âgé. À trois, les mages représentent tant de choses : l'annonce de la venue de Dieu dans notre monde et ce, à toutes les cultures et pour tous les âges, sans discrimination aucune. L'incarnation du Fils de Dieu n'est pas révélée à un petit nombre. Elle vaut pour toutes les nations, de tout temps et en tout lieu. Le tout résumé dans les trois personnages venus à la crèche. Chiffre d'ailleurs étonnant puisqu'il n'est même pas cité dans l'évangile où est seulement mentionnée l'expression « des mages venus d'Orient ». Ils étaient peut-être finalement plus nombreux. Nous n'en savons rien et cela n'a aucune importance. Alors permettez-moi de vous présenter celui dont la tradition n'a jamais voulu parler. En exclusivité pour vous ce matin, mes recherches personnelles ont pu le remettre au jour : un légionnaire romain qui s'est lui aussi rendu à la crèche peu après le départ des mages et juste avant la fuite en Egypte de la sainte famille. Celui-ci apporta comme cadeau à l'enfant Dieu toute une collection de livres. Lorsque Jésus vit ce cadeau, il se mit à pleurer parce qu'il avait compris que le centurion se débarrassait de cet auteur qu'il avait tant adulé et qu'il exécrait à présent. Ce n'était pas un vrai cadeau. Le centurion se séparait de ce qui l'encombrait.

Permettez-moi l'outrecuidance d'oser nous demander si nous aurions été si différents de ce centurion qui été a très vite oublié par la tradition. En effet, si nous avions été invités à suivre l'étoile de Noël conduisant à la crèche afin de nous agenouiller devant celui qui s'est fait l'un de nous pour que nous partagions pleinement sa vie divine, qu'aurions-nous apporté comme cadeaux ? Il semble d'après le récit entendu que le Christ Jésus n'a pas besoin à ce moment précis de ce que nous nous désencombrions de tout ce qui nous empêche de devenir nous-mêmes. Nos trébuchements, il les reprendra avec lui sur le bois de la croix. Or nous sommes à plus de trente années d'un tel événement. A la crèche, Dieu s'est fait homme pour que chaque être humain puisse découvrir sur son propre chemin l'abondance de la vie qui est promise à tout un chacun. Alors que certains l'ont parfois oublié, même si l'être humain n'avait jamais trébuché, Dieu se serait incarné de toute éternité. Dieu est Dieu et parce qu'il est Dieu, il ne peut que se réjouir de sa Création. Cette dernière n'est pas bonne mais très bonne nous relate le récit de la Genèse. Il y a comme un peu de fierté dans le chef de Dieu. Oui, et heureusement pour nous, il est fier de l'humanité et c'est sans doute la raison pour laquelle il choisit de devenir l'un de nous. Il participe ainsi pleinement à cette création continue confiée à l'humanité entière. Dieu s'est fait l'un des nôtres et dans l'événement de l'Epiphanie, il ne veut se réserver à quelques uns. Il s'offre à chacune et chacun de nous et attend peut-être qu'à la crèche, nous déposions toutes les richesses qui nous constituent. Dès l'instant de la Création, il a eu besoin de nous pour poursuivre ce qu'il avait commencé. Devenir pleinement participant à la poursuite de l'½uvre divine exige que nous donnions le meilleur de nous-mêmes. Toutes et tous, nous avons reçu des talents, des qualités, des dons. Aujourd'hui, osons les déposer au c½ur de notre crèche intérieure. Offrons-nous à Dieu non pas comme un holocauste ou une victime mais comme un être humain debout, heureux de sa condition humaine qui lui permet de la sorte de participer à quelque chose de merveilleux qui le dépasse : la construction du Royaume de Dieu, un royaume de douceur et de tendresse, un royaume de rires et de joie. Nous sommes encore loin d'une telle réalité, c'est vrai. Mais si au plus profond de nous, nous acquérons la conviction que la création est belle et que tout être humain est appelé à la vie divine alors nous pouvons nous déposer aux pieds de l'enfant-Dieu. Celui-ci nous ouvrira ses bras pour nous prendre avec lui dans cette merveilleuse histoire de la Vie. Dieu n'attend plus, il nous attend dans la beauté de ce que nous advenons. S'il en est vraiment ainsi, alors heureuse fête de l'Epiphanie.

Amen.

Epiphanie

Auteur: Van Aerde Michel
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

En fait, les rois Mages ne voient pas une étoile mais deux. Deux étoiles jumelles très brillantes, deux étoiles qui communiquent l'espoir. Deux étoiles amicales qui les invitent au voyage.

Ils n'ont pas bu ! Ce n'est pas l'alcool qui leur fait voir double. Ils voient deux étoiles scintiller parce que deux yeux se posent sur eux, brillants et clairs. Deux étoiles dans leur nuit, parce qu'allongés le plus souvent, le regard de leurs amis vient d'en haut, comme un sourire de Dieu.

Bonne fête mes amis ! Aujourd'hui : les rois mages, c'est vous ! Comme les trois Mages de l'Evangile, vous n'êtes pas rois, vous n'êtes pas trois, vous n'êtes pas non plus magiciens, mais vous êtes chercheurs, chercheurs de vie, de sens et d'amour. Et les grands yeux attentifs des soignants et des amis vous rappellent l'essentiel.

Quand on n'aime pas quelqu'un, on dit « celui-là, je ne peux pas le voir ». Ici c'est le contraire : « vous me regardez, donc je suis. Vous me regardez donc j'existe pour vous, j'ai du prix à vos yeux ».

Dans le grand labyrinthe des parcours de santé, et, quand le temps est long, dans les relectures de votre vie, vous n'êtes pas seuls, vous n'êtes pas abandonnés. Des yeux vous font signe, un regard vous guide, un sourire vous réchauffe le c½ur. Comme les mages à la recherche du Salut, vous parcourez couloirs, ascenseurs et salles de soin pour trouver la santé, traversant des espaces étranges et des lieux inconnus. Où cela vous mène-t-il ? Vous ne savez pas plus qu'eux ! Vers des choses grandioses ? Pas du tout. Je vais vous dire vers quoi cela vous mène. Comme les mages de l'Evangile, vous rencontrez finalement le mystère d'un corps humain, silencieux et frissonnant. Où cela vous mène-t-il ? Au plus près de la misère humaine, fragile et menacée, celle des corps de chair, souffrants et craintifs, cela vous mène au plus près des autres, au plus près finalement de vous-même. Mystère de l'enfant de Bethléem, totalement démuni, mystère des corps à l'hôpital, nus et fatigués, mystère de cette pauvreté humaine que Dieu vient épouser.

Les yeux des mages se posent sur l'enfant, Dieu manifesté qui se laisse regarder. Dans les yeux de nos amis nous voyons des étoiles scintiller. Des étoiles jumelles nous indiquent le chemin, celui de notre propre c½ur, parce que Dieu y est présent, quoi qu'il arrive et pour toujours. Il est l'Emmanuel.

Epiphanie

Auteur: Lens Patrick
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

La fête de l'Épiphanie que nous célébrons aujourd'hui a ses racines historiques dans le fait que les empereurs dans le temps de Jésus faisaient leur joyeuse entrée dans une ville. Ils faisaient leur première apparition en publique. Aujourd'hui c'est Jésus qui se montre au public. Se montrer au public, ce n'est pas si évident en nos jours. Car : qui est ce public ? Qu'est-ce qu'ils attendent ? On dit souvent que l'Église a une mauvaise presse, qu'elle apparaît aux yeux de nos contemporains plutôt comme quelque chose de vieillot ou quelque chose qui n'est plus crédible. Ses points de vue semblent être retardés. Et Jésus ? Il appartient au mémoire collectif, qui est bien chargé des images traditionnelles. Jésus, c'est déjà vu. Sa seule possibilité de survie, c'est d'être actualisé, adapté aux exigences de notre temps. Mais il s'agit dans beaucoup de cas d'une sorte manipulation inconsciente de Jésus. On fait de Jésus une image, une théorie plausible, mais qui parle encore de Jésus lui-même, toujours vivant ? Et qui parle encore à Jésus ? Je pense que l'histoire des trois rois mages n' pas encore perdu son intérêt. Ce sont des gens de tous les temps qui cherchent un sens à leur vie, le sens de la vie, mais en dehors de l'univers biblique, en dehors du christianisme. Ils cherchent un sens dans les étoiles. Cela ressemble un peu à l'horoscope qu'on lit seulement quand il faut attendre chez le docteur ou chez le coiffeur. Mais il y a du vrai dans la recherche d'un sens dans les étoiles. En fait, c'est croire qu'un sens de vie nous est donné, qu'il n'est pas seulement le fruit de notre cerveau ou de notre manière de regarder le monde. Il y a quelque chose qui nous surpasse. Je vois chez les rois mages une authenticité et une recherche sincère. Une recherche sincère, cela veut dire : une recherche qui veut trouver et qui est prêt de quitter ses opinions si la vérité s'avère être autrement. La recherche peut être aussi une sorte de sport intellectuel, un exercice de penser, mais pas plus. Nous vivons un peu, surtout dans des milieux qui ont connu la tradition chrétienne, dans une sorte d'ambiance déconstructiviste : une tradition trop connu, qui dans le temps était devenu trop lourde et étouffante, qui pèse et qui est encore mal digéré à nos jours, surtout, je crois, chez les croyants de traditions. Les gens ne veulent plus de cela et ils jettent le joug. Ils vont chercher ailleurs, ou justement pas : ils se plaisent dans leur attitude de scepticisme et ne veulent justement pas trouver. Jésus, que peut-il encore signifier dans ce climat de pensée ? Mais il faut peut être avoir traversé le nonsense de la vie, et je ne parle pas des problèmes de luxe, mais de l'expérience que la vie et la culture d'aujourd'hui semblent plutôt offrir le vide, pour comprendre l'attitude des rois mages qui cherchaient le sens de la vie un peu partout, même dans les étoiles. Et Dieu ne nous facilite pas toujours cette recherche de sens, surtout lorsque l'univers de notre pensée est fermé, même si cela s'est fait de manière inconsciente. Mais il donne la lumière aux rois mages qui ont le courage de quitter leur vie et de s'agenouiller devant ce qui est le plus invraisemblable : Dieu présent dans l'enfant le plus pauvre de Bethléem. Les rois mages nous ont quelque chose à dire. Ils ne nous disent pas qu'il faut croire aux horoscopes. Ils nous disent : quitte ton pays pour trouver le sens, quitte tes préjugés, tes opinions, tes sûretés, et peut être tu trouveras. Ils nous disent qu'il faut être ouvert à un sens de vie que nous n'avons pas construit nous-mêmes, mais qui nous a été donné. Épiphanie, c'est le moment de se réveiller, de quitter son égocentrisme ; l'épiphanie, c'est le moment où devient claire qu'il ya un Autre qui se laisse découvrir et qui vient à nous à sa manière. Le Dieu du Nouveau Testament n'est pas une invention humaine, car penser le paradoxe de l'incarnation du Fils de Dieu est trop difficile et compliqué. Mais un paradoxe est fait, non pas pour manipuler ou réduire, mais pour ouvrir nos esprits. Puissent nos c½urs également s'ouvrir à Dieu qui se fait paradoxalement proche en Jésus Christ.