Epiphanie

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Qui que nous soyons, nous butons un jour ou l'autre sur les questions ultimes : personne n'échappe à l'interrogation sur la vie, la mort, le sens. Et à ce niveau, nulle science ne répond.

LE GRAND LIVRE DE L' UNIVERS

Dans la navette spatiale, l'astronaute est rejoint par des questions devant l'immensité et la beauté stupéfiante du cosmos. Il connaît bien la réponse des savants : le big bang, l'apparition de la vie sur la terre, l'évolution des espèces, etc....Mais rien à faire : cette explication scientifique n'apporte pas la sérénité définitive. Comme disait André Malraux : " A quoi bon aller sur la lune si c'est pour s'y suicider ?".

Certains, naïfs, croient que le ciel donne des réponses à leurs questions : la marche régulière des planètes, les dessins qu'elles tracent seraient des messages divins à décrypter. En calculant bien, on doit pouvoir connaître l'avenir, prévenir les accidents de la vie, découvrir les recettes de la fortune et de l'amour. En tout cas, aujourd'hui comme jadis, les fabricants d'horoscopes ont trouvé le moyen de bien vivre : leur clientèle ne tarit pas dans les salons de voyance.

Dans l'antiquité, on appelait ces astrologues "des mages" et les plus renommés d'entre eux habitaient la Chaldée (Irak actuel) : ils gravissaient les tours de Babel pour scruter avec passion le ciel fascinant de beauté et de mystère et détecter les annonces de l'avenir.

LE GRAND LIVRE DE LA BIBLE

Un jour, dit-on, quelques-uns de ces mages - qui n'étaient ni trois ni rois - furent intrigués par l'apparition d'une étoile ou le passage d'une comète. Ils l'interprétèrent comme un mystère, un signe, un appel : laissant là leurs lunettes, ils se mirent en route vers l'ouest et arrivèrent à Jérusalem, capitale de la Judée. Curieusement les habitants de ce pays n'avaient construit aucune tour, aucun observatoire du ciel. Leurs prophètes les avaient convaincus qu'il n'y a pas de destin écrit dans les astres, pas de fatalité à subir.

Mais par contre ils proclamaient que la signification essentielle de la vie humaine se trouvait dans le temps. Qu'il ne fallait pas vouloir connaître l'avenir à travers les énigmes du cosmos mais écouter le seul et unique Dieu dans un grand LIVRE qui racontait comment Dieu se révélait aux hommes afin qu'ils guérissent de leur égoïsme et de leur cruauté pour enfin, un jour, communier dans la paix universelle.

Mais ce grand LIVRE (La Torah - pour nous la BIBLE) annonçait, par touches successives, que cette paix mondiale ne s'instaurerait que par l'intervention décisive d'un envoyé consacré, oint par Dieu et qui donc s'appellerait le MESSIE (en grec "Christ" - càd. OINT).

LE SIGNE DE DIEU EN L' HOMME : J E S U S

Nos mages païens racontèrent le signe royal qui les avait conduits jusqu'à Jérusalem et les scribes leur expliquèrent que, effectivement, dans leur fameux LIVRE, des prophètes annonçaient que le Messie promis par Dieu devait survenir dans un petit village au sud appelé Bethléem. Nos mages reprirent leurs montures....tandis que les scribes, persuadés que cette démarche de païens ne pouvait qu'être illusoire, refusèrent de les accompagner. Arrivés à Bethléem, que découvrirent les voyageurs ? Non un palais avec un petit prince mais une humble demeure avec un couple et un nouveau-né qu'ils avaient appelé "IESHOUAH", en français Jésus = "Dieu sauve". Convaincus et ravis, les visiteurs présentèrent leurs cadeaux qui symbolisaient l'identité de ce Messie et veulent définir leur foi. De l'OR , cadeau royal. De l' ENCENS, les graines qui brûlent en l'honneur de Dieu. De la MYRRHE, l'aromate de l'amour et qui sert à embaumer les cadavres.

LA FOI OUVRE UN NOUVEAU CHEMIN

Et St. Matthieu conclut son beau récit en notant :

" Et les mages repartirent par un autre chemin".

La découverte de Jésus, ce curieux Messie sans palais ni fortune ni armée, cet enfant pauvre et vulnérable, méconnu par les scribes juifs - ces spécialistes des Ecritures qui auraient dû être les premiers à le reconnaître - détourne ses fidèles de leur conduite précédente, les pousse à adopter un nouveau comportement et les engage "sur une autre route".

Les mages ne chercheront plus la solution de leurs problèmes dans le ciel : reconnaissant en Jésus leur ROI, leur DIEU, l' HOMME qui aime à en MOURIR, ils mèneront une existence nouvelle. Jamais plus ils ne quêteront une autre étoile, une star, une idole - ces fantoches qui conduisent leurs adorateurs sur des chemins de perdition.

Remplis de bonheur, ils resteront extasiés de savoir désormais que cet univers grandiose n'a de sens que pour accueillir cet HOMME, Jésus, Messie, le seul Roi, l'unique Guide, le vrai Berger, le grand Signe qui donne à Dieu un visage d'homme.

Les 12 signes du Zodiaque seront remplacés par les DOUZE APOTRES, douze chemins qui divergent à partir du Christ pour aller porter la Bonne Nouvelle à toutes les nations. Car il ne faudra plus attendre que les voyageurs fassent le pèlerinage vers Jérusalem mais, en toute hâte, aller vers eux, chez eux, pour leur parler du Sauveur, celui qui montre la route et conduit à la vraie VIE.

La science ne résoudra jamais les problèmes ultimes de l'homme. L'univers fait signe, interpelle, pose question, met l'humanité en perpétuelle recherche de sens. Il renvoie à un autre livre, la Bible ; la géographie renvoie à l'histoire ; la cosmologie aux Ecritures. Mais attention ! on peut très bien connaître les Ecritures et ne pas suivre leurs indications ! Des chrétiens ressemblent encore aux scribes du récit : ils connaissent les textes, les expliquent mais ne vont pas voir où ils sont en voie de réalisation.

EPIPHANIE : fête de la "Manifestation". Sans parole, l'Enfant se dévoile à tous les chercheurs en quête de lumière : puissions-nous devenir désormais missionnaires de la Bonne Nouvelle dans notre région, être non les "étoiles " du spectacle mais les signes discrets qui clignotent dans la nuit, montrant qu'une autre vie est possible quand on a découvert en Jésus le Messie du monde.

Epiphanie

Auteur: Arnould Alain
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008
Si froid que soit encore l'hiver,
Ses jours brefs et ses nuits longues,
Le fier été vient à grand pas
Qui de tristesse nous libère :
Voici la saison nouvelle,
Les noisetiers font des chatons :
Il n'est signe plus fidèle.

...

Que Dieu nous donne le sens nouveau_

D'un amour plus libre et plus noble :_
Qu'en lui, notre vie renouvelée_
Reçoive toute bénédiction ;_
Que le goût nouveau donne vie nouvelle
Comme l'amour peut le donner
Dans sa pure fraîcheur ;
L'amour est puissant et nouvelle récompense
De ceux dont la vie se renouvelle pour lui seul.

...

La saison se renouvelle avec l'année,
Les jours, sombres naguère, brillent à présent. ...
Que nouvelle lumière vous donne nouveau zèle,
Nouvelles ½uvres, plénitude de nouvelles délices,
Nouveaux assauts d'amour et nouvelle faim si vaste
Qu'éternellement nouvel amour dévore
Ses dons nouveaux.

C'est ainsi qu'au treizième siècle la béguine Hadewijch dans ses Poèmes strophiques décrit le printemps qu'elle voit pointer. Une nouvelle époque débute, une nouvelle lumière apparaît, des signes de renaissance pointent de partout. Nous sommes dans une période de l'année où les calendriers nous confrontent avec ce renouveau : nouvelle année liturgique, nouvelle année civile, la naissance de Dieu parmi les hommes qui inaugure une nouvelle ère dans l'histoire des hommes. Nous l'entendons sans cesse ces jours-ci : Dieu vient rompre notre hiver en ce faisant homme ; un nouveau rameau pousse sur l'arbre de Jessé ; au milieu de la nuit, Dieu vient offrir une nouvelle lumière. N'est-ce donc pas un moment judicieux pour nous émerveiller de ce continuel renouvellement que Dieu nous offre. Le renouveau est par excellence le temps de la foi. Comme le dit Dieudonné Dufrasne dans son livre sur les béguines dont j'ai tiré cette citation de Hadewijch, l'histoire de l'Eglise est d'abord une histoire de printemps, beaucoup plus que d'hiver ou d'été . Quand les ténèbres semblent nous envahir et nous priver d'espérance, Dieu est là pour raviver nos forces et nous permettre de renaître. De crise en crise, de doute en doute, de souffrance en douleurs, Dieu vient à chaque fois renouveler notre humanité par sa présence d'amour. C'est vrai pour l'histoire de l'Eglise et c'est vrai pour notre vie personnelle.

Pour ces mages venus d'ailleurs et de nulle part, ou de partout, c'est dans les étoiles qu'ils décèlent ce renouveau. Les étoiles, c'est leur quotidien. Ils sont toute la journée avec leur tête dans les astres. Les étoiles des mages, c'est notre bureau, notre cuisine, notre ville, notre pays, notre monde. Oui, les mages nous invitent à chercher la nouveauté de Dieu dans notre quotidien, là où nous travaillons, vivons, là où nous nous détendons, là où nous nous engageons et tissons nos relations. C'est à partir de là que Dieu nous invite à nous mettre en marche et nous renouvelle. Pas besoin d'aller voir en haut d'une montagne ou dans les profondeurs de la mer, même si Dieu peut se révéler là aussi bien-sur.

Les mages que les évangélistes ont inclus dans leur récit de l'enfance du Christ ne pensaient sans doute pas à Dieu et encore moins au Messie quand ils ont repéré un astre inconnu. Ce conte d'évangile ne nous le dit en tout cas pas : c'est un roi qu'ils cherchent et non Dieu. Mais leur curiosité les a ouverts à la nouveauté et ils se mettent en route. Arrivés au but de leurs pérégrinations, ils reconnaissent la présence de Dieu et s'inclinent en adoration reconnaissant que c'est Dieu qui a offert quelque chose de neuf dans le ciel des humains.

N'est-ce pas cela aussi qui nous est demandé comme chrétiens ? D'abord repérer la nouvelle source de lumière et de vie qui timidement, fragilement essaie de naître dans notre quotidien. Ensuite, nous mettre en route pour l'identifier et enfin, reconnaître en ce renouvellement la présence de l'Emmanuel. Car Dieu fait preuve de confiance dans notre humanité en la renouvelant sans cesse. C'est de cette espérance là qu'il nous permet de vivre. C'est ce qui fait que le printemps est la saison par excellence de l'Eglise. Il n'y a pas lieu de se décourager. Dieu est là pour nous renouveler et pour nous guider sur la route du renouvellement.

En ce début d'année, avec Hadewijch, je vous souhaite donc Que nouvelle lumière vous donne nouveau zèle, Nouvelles ½uvres, plénitude de nouvelles délices, Nouveaux assauts d'amour et nouvelle faim si vaste Qu'éternellement nouvel amour dévore Ses dons nouveaux.

Amen.

Epiphanie

Auteur: Dollé Emmanuel
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Épiphanie dont l'embellissement légendaire donnerait envie d'en parler comme dans les contes de fée. Une fois par an, l'homélie aimerait faire du magnifique, des histoires de roi, des cadeaux princiers, du brillant. Et puis rêver comme dans les romances princières qu'alimentent une certaine presse permettant au lecteur de croire encore possible un prince charmant que la banalité du quotidien n'a pas encore révélé. Cependant ce que nous commémorons aujourd'hui est trop important, trop riche pour s'égarer dans les vapeurs parfumées de l'encens ou pour se laisser éblouir par l'étincellement d'une cassette d'or.

Seul Matthieu parle de mages (sans en donner le nombre). Des sages, probablement plus de la première jeunesse, assez fortunés pour entreprendre un grand voyage, assez humbles pour aller se prosterner devant celui qu'ils pensent être roi des juifs. Qui se souciait des juifs à cette époque et de leur royaume plus proche d'une principauté d'opérette dans un pays occupé que d'une cour impériale vers laquelle accourent les grands du monde. Quoi qu'il en soit ils viennent de loin vénérer un roi encore inconnu. En fait ils s'inclineront devant un nouveau-né sans fortune dans une simple maison d'une bourgade appelée Bethléem. Dérisoire ! Et c'est ça l'Épiphanie. L'étymologie nous enseigne que le mot veut dire révélation, manifestation, apparition de quelque chose qui devient évident. Est-ce Jésus qui se révèle à des gens venus d'un monde lointain et païen ou bien ces voyageurs révèlent-ils que ce modeste enfant est roi et qu'il est digne de cadeaux en accord avec son rang : or, encens et myrrhe ?

Épiphanie, révélation, fruit de la rencontre de deux mondes jusqu'alors étrangers. Et là devient évident que le nourrisson n'est pas un bébé comme les autres. L'évangile de Matthieu n'en dit pas plus. On ne sait ce que sont devenus ces riches visiteurs après leur passage en Palestine. Cela a-t-il changé quelque chose dans leur histoire, dans leur c½ur, dans leur relation à Dieu ? Qu'ont-ils raconté à leur retour ? Comment cela a-t-il été perçu par leur entourage. L'Epiphanie n'est donc pas la connaissance du Christ par les mondes lointains. L'Epiphanie est la révélation qui apparaît dans la rencontre. Les conséquences n'en étaient probablement pas pour les contemporains de mages d'Orient mais pour nous récepteurs, auditeurs, élèves de l'Évangile en 2008.

Dans la crèche devant l'autel, il n'y a pas de représentation des mages ? Mais vous avez remarqué que chacun des personnages était un miroir. En approchant, vous vous voyez apparaître parmi ceux qui entourent l'Enfant Jésus. Peut-être ce dimanche, c'est vous les mages. Comme eux, venez-vous de loin ? Je ne le pense pas si on considère la distance, mais reconnaissez que votre c½ur est encore éloigné de la pureté et de la divinité de l'enfant de la crèche. Si votre humanité a la chance de se comprendre invitée, alors oui, comme les mages vous venez de loin, de très loin. Ne venez pas comme des curieux, comme des badauds, mais arrivez avec la certitude qu'en approchant ce bébé encore sans pouvoir, c'est le Dieu incarné pour notre salut que vous vénérez. Cette visite devient alors pour vous Épiphanie. La rencontre à laquelle vous êtes conviés est un rapport vrai et personnel avec ce nourrisson sauveur en devenir. o Épiphanie, Il se révèle à vous si vous acceptez que ce petit enfant soit porteur de salut. o Épiphanie, si malgré la distance entre Dieu et vous, vous acceptez d'aller vers cet incompréhensible nouveau-né avec l'espérance sereine qu'Il peut quelque chose pour vous. o Épiphanie, démarche de votre c½ur pour adorer ce qui de l'extérieur n'est pas évident, mais qui dans votre âme s'installe comme une certitude recherchée depuis longtemps. o Épiphanie si vous acceptez de lui offrir quelque chose de précieux et d'important. Cherchez ce qui compte dans votre histoire et que vous estimez digne de cet enfant-roi. Dans votre vie qu'est ce qui est or c'est-à-dire cadeau royal, qu'est ce qui est encens, symbole d'un présent que l'on ne fait qu'à Dieu, qu'est ce qui est myrrhe, onction bienfaisante et parfumée pour les blessures de celui qui sera crucifié quelques trente ans plus tard. Où sont l'or, l'encens et la myrrhe dans nos aventures humaines ? En laissons-nous une part pour Dieu.

Les mages de l'évangile ont cette belle chance d'être guidés par une étoile, astre curieux qui s'arrête devant la maison qu'ils recherchent. Matthieu précise qu'en la voyant ils sont remplis de joie. A la recherche de l'improbable roi des juifs, chaque élément les mettant sur la route est pour eux un bonheur. Nos vies sont encore ces itinéraires de mages. Y a-t-il quelque chose qui nous mette en joie dans notre errance vers ces Bethléem où nous risquons de ne pas voir ce roi pauvre et nu et pourtant Dieu parmi les hommes. Dans quelle crèche allons-nous le rechercher, dans le regard sur l'autre, sur le conjoint, sur les enfants, sur les passants croisés dans la rue, sur ceux qui nous tendent la main et que nous ne voyons pas, dans des bidonvilles lointains ou dans l'attention à la simplicité de l'environnement ? Il y a une multitude de crèches possibles dans le monde contemporain. Vous y laissez mener avec joie ?

Pour chacun ici, il y a une épiphanie possible ce matin. Je vous invite à quelques instants de silence pour que s'y passe cette évidente rencontre avec ce Dieu. Cette révélation encore incomplète rend manifeste qu'il nous aime et qu'il est là pour nous. Révélation que sa royauté si elle n'est pas de ce monde nous fait le royal cadeau d'un Dieu venu porter avec nous nos blessures. Je vous invite au silence pour y déposer l'or l'encens et la myrrhe et comme l'écrit Eugène Guillevic devenir « non possédant pour posséder l'impossessible ». Qu'une Épiphanie soit possible pour vous aujourd'hui et que vous repartiez chez vous joyeux comme les mages au sortir de Bethléem.

Je vous souhaite non pas une belle mais une vraie fête de l'Épiphanie.

Fête de la Dédicace (année A)

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

L'homme est paraît-il un être mono tâche, c'est-à-dire qu'il ne peut faire qu'une seule chose à la fois. Quand il a terminé une activité, il peut en commencer une autre. Je me retrouve personnellement assez bien dans cette définition. Si l'homme était un meuble, il pourrait se comparer à une commode à tiroirs. Il faut toujours fermer l'un avant de pouvoir commencer à ouvrir un autre. Une chose à la fois, tel semble être notre devise. Honnêtement, comment est-il possible d'arriver à faire plusieurs choses en même temps ? Cela semble être de l'ordre de l'utopie, sauf si vous êtes une femme. En effet, la femme quant à elle est multi tâches. Elle est capable de faire plusieurs choses en même temps et de plus, de tout mener à bien. Permettez-moi de vous féliciter mesdames devant une telle compétence qui ne peut susciter que de l'admiration de notre part à nous les hommes. Alors si la femme était un meuble, elle pourrait se comparer à une garde-robe. Il suffit d'ouvrir les portes et tout est là, en substance. Une commode pour l'un, une garde-robe pour l'autre. Voilà ce qui nous différencie. Toutefois, heureusement pour l'humanité entière, dans la foi, nous pouvons nous comparer à un même objet mobilier puisque, en Jésus Christ, nous sommes les Tabernacles vivants de la présence de Dieu en notre monde. « N'oubliez pas que vous êtes le temple de Dieu et que l'Esprit de Dieu habite en vous », clame Saint Paul en ce jour. Nous sommes donc la maison que Dieu construit. Notre fondation s'enracine dans la foi en son Fils Jésus qui se révèle à nous. Quelle merveilleuse aventure. Nous devenons ainsi les architectes de nos destinées. Aucun d'entre nous, nous avons choisi de venir dans ce monde. La vie nous a été donnée et lorsque son souffle se fait ressentir de manière plus fragile dans l'expérience de la maladie ou du deuil, nous prenons encore plus conscience de toute sa valeur, de toute sa force et de toute sa beauté. La vie est ce que nous avons reçu de plus précieux. Dès l'instant de notre conception, notre grande aventure humaine a commencé. Pendant plusieurs mois, nous avons fait confiance à celles et ceux qui ont guidé nos premiers pas puis au fil des années nous avons découvert les joies de l'autonomie, les bienfaits de pouvoir participer à la réussite de sa propre histoire. Il est vrai que nos fondations sont solides puisqu'elles s'enracinent dans les eaux de notre baptême. L'Esprit de Dieu est avec nous. Il est en nous. Il nous accompagne discrètement comme une brise légère venant caresser tout en douceur l'océan intérieur de nos sentiments. Il est bien là et, grâce à toute la tendresse reçue, il nous insuffle les forces nécessaires pour nous permettre de devenir le seul et unique architecte de notre vie. En effet, petit à petit, c½ur à c½ur, pas à pas, comme le dit la chanson, nous avons commencé à nous construire. Cette construction intérieure se réalise bien évidemment grâce à toutes les formes d'amour reçu. Cet amour est à la fois, le ciment, les briques. En fait tous les matériaux nécessaires à notre réussite architecturale. De la sorte, nous devenons responsables de nos histoires. Il est vrai qu'il peut nous arriver de vivre des temps de lassitude, peut-être même de solitude. Nous pouvons être pris de ce sentiment étrange d'être submergé par ce que nous traversons. Il nous reste alors la foi, l'espérance et l'amour. L'amour est le moteur de toute vie humaine. Nous ne pouvons nous en passer. Il est au c½ur de notre c½ur. Il est notre nourriture terrestre et céleste. Toutes et tous, nous avons besoin d'aimer et d'être aimés. C'est une nécessité existentielle. Par le don de l'amour offert, nous pouvons trouver en d'autres les forces nécessaires pour continuer la route de la vie. Il y a également l'espérance. Cette dernière nous permet de ne pas nous laisser pousser par notre passé mais plutôt d'accepter d'être tiré par notre avenir aussi incertain celui-ci puisse-t-il être. L'espérance est ce mouvement intérieur qui nous fait entrer dans un chemin de confiance qui est de l'ordre de l'indicible puisqu'il se vit dans la foi. La foi nous invite alors à prendre conscience que nous ne sommes jamais seuls. L'Esprit de Dieu vit en nous et nous sommes le temple vivant de Dieu. Celui-ci n'est pas à rechercher en regardant le ciel. Nous sommes le Ciel de la Terre, c'est-à-dire des femmes et des hommes inhabités de la présence divine. Dieu se laisse ainsi rencontrer au plus profond de notre être, au plus intime de notre intimité. Il est là. Il est la fondation solide à partir de laquelle nous pouvons construire notre destinée. Il ne nous abandonne jamais. Mieux encore, lorsque le temps se fait ressentir, il vient mettre un peu d'ordre en nous, pour que nous puissions à nouveau vivre en plénitude ces dimensions si essentielles de la foi, de l'espérance et de l'amour. Dieu est en nous. Partons à sa rencontre. Nous sommes les Tabernacles vivants de sa présence.

Amen

Fête de la Dédicace (année A)

Auteur: Van Aerde Michel
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Comme me l'a bien rappelé au téléphone notre ami Franck, nous fêtons, ce dimanche, la dédicace de la Basilique du Latran. C'est peu commun qu'une telle fête l'emporte sur le dimanche, alors parlons-en. Mais par quoi commencer ? J'ai trop d'idées. Laquelle vous présenter ?

Je peux vous parler du Président de la République Française qui est d'office chanoine du Latran. Nicolas Sarkozy s'y est donc rendu il y a quelques mois pour y rencontrer le pape et prononcer un discours remarqué sur la laïcité, positive, décontractée etc. Mais vous allez me dire que cette question très « franco-française » n'a aucun intérêt pour des bruxellois.

Alors je pourrais vous parler de la symbolique de la Basilique pour l'Eglise catholique, et préciser que c'est elle, la cathédrale de Rome, et non pas Saint Pierre au Vatican. Le pape est l'évêque de Rome et la Basilique du Latran est sa cathédrale. Les curés de son diocèse, ce sont les cardinaux. Chacun a son église attitrée, même s'ils vivent principalement à l'étranger. Cela n'a l'air de rien mais c'est important. Notre Eglise est une communion d'Eglises locales, une communion de diocèses. Il n'y a pas un super évêque. Il y a l'évêque de Rome, le premier parmi ses pairs. Il préside les Conciles. Il n'est pas en dehors ni au-dessus. Il n'y a pas, comme le disait un imbécile « Pierre et les douze ». Pierre fait partie des douze sinon ils seraient treize ! Il est un des douze. Et si le diocèse de Rome a la primauté, c'est en raison des martyrs de Pierre et de Paul et de beaucoup de chrétiens. Il s'agit d'une primauté dans le témoignage de la foi et de la charité.

Mais je m'éloigne de la basilique du Latran. Pour y revenir, je pourrais vous parler du bâtiment et faire une conférence d'architecture, avec, pourquoi pas, des projections de photos, de plans et d'½uvres d'art. Nous pourrions ainsi passer ensemble un bon moment. Notre ami Franck serait-il content ? Je passerais peut-être à côté de l'essentiel ?

Mais où est donc l'essentiel ? Le bâtiment, c'est important. Ici l'église a été remise à neuf, elle est agréable et bien chauffée, c'est important pour nous retrouver. Les célébrations en plein air, je connais mais il y a toujours une difficulté : trop de vent, la pluie, le froid, le bruit ou l'excès de soleil. L'Eglise, c'est la communauté et c'est aussi en français le même mot que le bâtiment où l'on se réunit. Dans d'autres langues on dit « Temple », comme en espagnol.

Je pourrais vous parler du Temple, du temple de Jérusalem. Je pourrais vous parler des marchands que Jésus met dehors violemment. Je pourrais essayer d'actualiser, et dénoncer les petits commerces que l'on trouve un peu partout sur les lieux de pèlerinage, mais ce serait vraiment forcé car ici, à part quelques cierges, il n'y a pas de b½ufs, de moutons ni de tourterelles à acheter pour les sacrifier. Les temps ont changé !

Alors, plus sérieusement, je pourrais m'attacher à ce mot étonnant dans la bouche de Jésus : « détruisez ce temple » ! Mais « il parlait du temple de son corps » et saint Paul nous dit que nous sommes aussi le Temple de Dieu, chacun de nous, et tous ensemble, comme peuple, comme communauté, comme corps du Christ vivant.

Remarquez bien que lorsque Jésus nous parle du Temple, ça n'est pas pour l'admirer, c'est pour nous dire qu'il va être détruit ! Remarquez aussi qu'il s'agit là du seul chef d'inculpation qui sera retenu pour condamner Jésus : il a dit qu'il allait détruire le Temple ! Un blasphème, comme s'il allait détruire la Grand Place, le Palais Royal, la Cathédrale ou le Parlement Européen. Mais Jésus utilise un langage imagé. D'une part il ne faut pas s'attacher aux bâtiments parce que le plus important, c'est la communauté, et d'autre part tout va passer, aussi bien le bâtiment que le Temple vivant que nous formons ! Cette lucidité pourrait nous inquiéter mais Jésus parle avant tout de reconstruction : « détruisez, je rebâtirai ». Il affirme la résurrection.

L'Eglise est donc le lieu du passage, du passage de la destruction à la reconstruction, de la mort à la résurrection. Il s'agit bien du baptême, plongée dans la Pâque du Christ pour vivre pleinement avec lui. Cela veut dire qu'il ne faut pas s'attacher à ce qui passe, aux formes que l'on voit, qu'elles soient architecturales, hiérarchiques, administratives ou liturgiques. Tout est provisoire et tout ne cesse d'évoluer par suites de crises et de restaurations. L'Eglise est le lieu du passage, de la Pâque, du baptême, le Christ en est la porte, il est le chemin. Il est la présence de Dieu parmi nous. Il fait de nous sa présence visible dans l'histoire des humains.

Fête de la Dédicace (année A)

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Au lieu du 32ème dimanche ordinaire, la liturgie nous demande aujourd'hui de célébrer l'anniversaire de la dédicace de la basilique du Latran qui est la véritable cathédrale de Rome et donc du Pape. Un magnifique édifice où les vagues incessantes de touristes n'en finissent pas de flasher sur des chefs-d'½uvre. Profitons de l'occasion pour méditer sur la réalité profonde de l' EGLISE.

L'EGLISE EST D'ABORD UNE COMMUNAUTÉ

Dans le langage actuel courant, le mot "église" désigne d'abord un bâtiment dans lequel se célèbrent les cérémonies du culte : "nous allons à l'église" veut dire se rendre dans un édifice sacré.

Or, pour toutes les premières générations chrétiennes, le mot "Eglise" veut dire la communauté des croyants, l'assemblée qui se réunit pour prier et célébrer. Quand Saint Paul écrit "à l'église de Dieu qui est à Corinthe", il s'adresse à la communauté des fidèles qui habitent cette ville. "Aller à l'église" en ce temps-là veut bien dire "rejoindre la communauté en réunion" L'Eglise, ce sont des personnes de toutes origines, de toutes conditions, juifs ou païens, hommes ou femmes, jeunes ou vieux, riches ou pauvres qui ont entendu l'appel du Christ et qui sont sortis de l'incroyance ou de l'idolâtrie pour se retrouver ensemble et former un peuple nouveau (Le mot français "église" vient du mot grec "ek-kaleo" qui signifie "appeler hors de").

Tous nos ancêtres chrétiens, pendant trois siècles, n'ont jamais disposé d'églises, de chapelles, d'édifices spéciaux : ils se rassemblaient chez l'un d'eux, un chrétien dont la maison était assez spacieuse pour accueillir le groupe. L'engagement du chrétien riche n'était pas de distribuer sa fortune ou de vendre sa maison mais d'y accueillir ses frères et s½urs, d'offrir l'hospitalité à ceux qui partageaient la même foi.

Longtemps les chrétiens n'ont jamais connu que des messes à domicile et ils inventaient de la sorte quelque chose d'inouï. Car dans la société, les gens se réunissent parce qu'ils appartiennent à la même classe, parce qu'ils goûtent telle espèce de musique, tels spectacles, tel sport ou telle distraction ( philatélie, bridge...), ou encore parce qu'ils collaborent à telle oeuvre. Les chrétiens, eux, se rassemblaient, toutes distances disparues, unis par la même foi, le 1er jour de la semaine (jour du soleil qui deviendra "jour du Seigneur", domenica dies, donc dimanche) pour célébrer leur Seigneur Vivant.

Il s'agissait bien d'une nouveauté absolue, prodigieuse : au même endroit, dans la même demeure, le même jour, chaque semaine, riches et pauvres, armateurs et dockers, professeurs et élèves, patrons et ouvriers, vieux et jeunes, juifs et païens se retrouvaient dans l'allégresse. On ne se jugeait plus d'après le costume, le niveau de vie, la culture, la nationalité... On partageait un repas "tiré du sac" comme on dit aujourd'hui, en échangeant les nouvelles, en s'intéressant les uns aux autres. Puis on se recueillait pour célébrer le mémorial du Seigneur. Des lecteurs proclamaient la Parole de Dieu : on détaillait les prophéties, on expliquait clairement l'Evangile du Seigneur, on discutait pour discerner comment le vivre parmi les difficultés du moment. Puis le président prenait le pain, prononçait la bénédiction, en distribuait un morceau à chacun. De même avec la coupe qui circulait de l'un à l'autre...On priait, on chantait des cantiques, on portait ensemble les malheurs de certains, les joies des autres. On était une famille, UN SEUL CORPS, LE CORPS DU CHRIST. Evidemment la réunion durait plus des 45 minutes d'aujourd'hui !!

NAISSANCE DE LA "CHRETIENTE"

Et puis, un jour, au 4ème siècle, l'empereur de Rome se convertit : il offrit des terrains et fit construire d'immenses et luxueux édifices que des artistes ornèrent de mosaïques, de peintures et de sculptures. Le christianisme devint religion officielle ; la majorité de la population fut baptisée. On était fier de visiter la Basilique du Latran ou celle de Saint Pierre, garnies de chefs d'½uvre, où des foules de prêtres célébraient avec faste tandis que des chorales chantaient à 4 voix... Et les fidèles cessèrent de s'accueillir les uns chez les autres, ils allèrent à des maisons sacrées, à des cérémonies sans plus se connaître, sans même parfois se saluer. On ne partagea plus un seul pain mais on donnait à chacun une hostie ; et on cessa de donner le calice sous prétexte du grand nombre de participants. La messe dominicale devint une habitude : on pouvait y arriver en retard, on en sortait dare-dare ( ce qu'on ne se permet jamais ni au théâtre ni au stade) . "Qui sont mes voisins ? Je ne sais pas !...J'ai eu ma messe"". L'intimité, la cordialité, la charité fraternelle s'étaient terriblement amoindries.

LE TEMPLE DU CORPS DU CHRIST

Or, aujourd'hui où l'on fête justement un des plus magnifiques édifices sacrés de la chrétienté, la liturgie nous fait entendre la fameuse scène où Jésus purifie le temple de Jérusalem. Ce temple totalement rénové se dressait comme une véritable splendeur, faisant l'admiration béate des multitudes de pèlerins qui venaient y offrir des sacrifices...Mais Jésus ce jour-là fit un esclandre qui allait lui coûter cher - car si on admirait ses guérisons et ses sermons, les pontifes ne lui pardonneraient jamais d'avoir osé lancer aux marchands installés sur l'esplanade :

" Enlevez cela d'ici : ne faites pas de la maison de Mon Père une maison de trafic"....Et il ajouta : "Détruisez ce temple et en trois jours je le relèverai". Les Juifs répliquèrent : " Il a fallu 46 ans pour bâtir ce temple et toi, en trois jours, tu le relèverais ???".....

Jésus tourna les talons sans se justifier : c'était peine perdue. Mais plus tard, après Pâques, saint Jean éclaira la déclaration :

"Le Temple dont il parlait, c'était son corps. Aussi, quand il ressuscita d'entre les morts, ses disciples se rappelèrent qu'il avait dit cela ; ils crurent aux prophéties de l'Ecriture et à la Parole que Jésus avait dite"

Après Pâques, transfigurés par les apparitions de Jésus vivant, par l'Esprit qu'il leur avait communiqué, et par l'Eucharistie qu'ils commençaient à "faire", comme Jésus leur en avait donné l'ordre, les apôtres comprirent l'énigme : oui le temple de Dieu, ce sont les croyants unis au Christ vivant !

Et saint Paul, le premier, le déclara aux chrétiens de Corinthe ( 2ème lecture)

"Frères, vous êtes la maison que Dieu construit... Les fondations, c'est Jésus Christ... N'oubliez pas : vous êtes le temple de Dieu, et l'Esprit de Dieu habite en vous. Si quelqu'un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira car le temple de Dieu est sacré, et CE TEMPLE, C'EST VOUS !"

Aujourd'hui, les jeunes générations connaissent nos multiples institutions et nos ½uvres sociales mais ils ne nous rejoignent pas. Ils guettent ce que personne ne peut leur offrir : une EGLISE DES PERSONNES, une assemblée vivante où l'on s'accueille dans la simplicité, toutes barrières disparues, où l'on est porté par la même espérance, où l'on partage le même amour. ¼uvre gigantesque...bien plus colossale que de construire la Basilique du Latran ! Mais là serait le vrai chef-d'½uvre de Dieu !

Fête de la Pentecôte

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Cela faisait plusieurs mois que j'avais eu le privilège de l'accompagner dans sa maladie. Il est vrai que la perte accidentelle d'un enfant l'avait profondément touchée. Elle devait se battre en même temps contre son corps et vivre le temps de son deuil. Un jour, elle me demanda tout simplement si je pouvais célébrer une messe en famille pour demander à Dieu de la guérir. Je lui ai fait alors part de me foi profonde. Je crois que Dieu ne peut pas changer le cours des événements mais qu'Il nous accompagne dans ceux-ci. Dès lors, je me voyais mal célébrer une eucharistie avec une telle demande. D'autant plus que si elle n'arrivait pas à vaincre sa maladie, comment expliquerais-je après à ses enfants que Dieu n'a pas voulu entendre leurs prières. Je me voyais assez mal leur dire que Jésus aimait tellement leur maman qu'il la voulait auprès de lui. Cette maman comprit mes arguments. Je lui fis également savoir que j'étais tout prêt à célébrer une eucharistie pour demander que l'Esprit Saint accompagne toute cette famille dans ce qu'ils avaient à traverser. Sitôt dit, sitôt fait. Une dizaine de jours après cette célébration, quelque chose d'étonnant se produisit : une amie de la famille vint proposer d'organiser une tournante de repas pour permettre à cette maman de ne plus devoir s'occuper de cuisine et de garder les quelques forces vives qui lui restaient pour ces enfants. Cette amie contacta une trentaine d'autres familles et pendant plus de deux années, en fait jusqu'au décès de la maman, chaque soir un papa ou une maman venait apporter un repas tout prêt. Nous ne saurons jamais avec certitude s'il y a un lien entre cette eucharistie demandant l'aide de l'Esprit Saint ou bien si c'était le fruit du hasard. Cela importe peu. Ce qui est clair, c'est que durant tout ce temps, ces personnes ont pu découvrir la manière dont Dieu les accompagnait. Toutes et tous, un jour, nous avons reçu un merveilleux cadeau : le don de la vie. Nous n'avons jamais rien reçu d'aussi précieux même si la vie a pu nous apporter un lot de soucis et de souffrances. Ils sont un peu comme l'ombre de nos histoires. N'oublions toutefois jamais que pour qu'il y ait de l'ombre, il faut d'abord du soleil. Nous avons donc également toutes ces attitudes qui rendent la vie belle et heureuse. Quel cadeau, la vie ! Dans la foi, nous avons reçu à notre baptême un autre merveilleux cadeau : l'Esprit Saint. Il est cette flamme divine qui éclaire constamment notre c½ur. Il est ce souffle fragile inhabitant au plus profond de nous. Il est cette force intérieure qui nous pousse à accomplir la destinée de notre vie. Pour plusieurs d'entre nous, nous avons confirmé ce choix de nos parents quelques années plus tard ou nous allons le faire dans les prochaines semaines à l'occasion de la confirmation. Dans ces événements, le Christ vient dire à chacune et chacun d'entre nous : recevez l'Esprit Saint. Ce don reçu ne peut se vivre dans la solitude. Il est un appel à la plénitude de la vie et un envoi à participer à l'accomplissement du monde et des personnes de qui nous nous faisons proches. Par le don de l'Esprit Saint, nous devenons partie prenante et surtout partie présente de Dieu au c½ur de notre humanité. Il passe par chacune et chacun d'entre nous. Et la fête de la Pentecôte est là pour nous rappeler que nous avons reçu cet Esprit Saint, qu'il vit en nous. Nous en sommes pétris. Il fait un avec nous. Une vie dans l'Esprit devient ainsi une invitation constante à être tout simplement les « mains » de Dieu sur notre terre. Dieu passe par nous. Il a besoin de nous pour Lui permettre d'accompagner celles et ceux qui le demandent à vivre des traversées parfois difficiles mais peut-être plus légères grâce à tous les gestes et paroles de tendresse qui pourront s'exprimer. L'Esprit Saint, nous pouvons également le demander dans le sacrement des malades que nous allons vivre dans quelques instants. Il est signifié dans le temps de l'imposition des mains par l'appel de Dieu à ce que chacun réalise sa vocation. Puis, il se marque de la croix sur le front et sur les paumes des mains comme une caresse de Dieu, symbole de toute sa tendresse à l'égard de celles et ceux qui le recevront. L'Esprit Saint ne changera pas le cours des événements mais nous accompagnera dans ceux-ci en nous donnant une force intérieure qui nous permettra d'ouvrir les yeux sur celles et ceux qui nous tiennent par la main dans le temps de l'épreuve de la maladie. Par l'Esprit de la Pentecôte, Dieu fait un avec nous. Soyons alors les uns pour les autres, signes vivant de sa présence. La tendresse divine se déclame dès à présent dans nos vies.

Amen.

Fête de la Pentecôte

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Pentecôte : l'humanité déifiée

Dans notre société actuelle, le mot Pentecôte ne signifie plus rien : une fête, oui, avec un jour de congé supplémentaire. Même chez les chrétiens, peu sans doute ont conscience qu'il s'agit de l'aboutissement de l'histoire biblique, du sommet de l'histoire du monde !

20 siècles en effet ont passé depuis l'événement primordial, la 1ère Pentecôte. Des milliers, des millions d'années se succèderont peut-être encore tandis que les sciences et les techniques modifieront considérablement notre cadre de vie. Mais le statut du croyant n'aura pas changé d'un pouce. Nous ne pouvons pas aller plus loin que Saint Pierre, Marie-Madeleine et les quelques autres qui, cette année-là, à Jérusalem, ont reçu l'Esprit de Dieu.

Les derniers temps sont arrivés, la condition humaine ne peut, sur terre, rêver d'un statut supérieur : par l'Esprit de Jésus, l'homme est devenu participant de la nature divine, l'homme est déifié. Il lui reste à basculer dans le Royaume du ciel, à l'abri définitif du mal, mais l'essentiel est acquis.

PREMIERE ETAPE DU SALUT DE L'HOMME : LA LOI ECRITE

En une première étape, Dieu avait révélé sa Loi au peuple d'Israël, Loi grandiose, code insurpassable de la conduite humaine. Les droits de l'homme, la devise "Liberté, Egalité, Fraternité", les constitutions modernes ( "Tous les hommes naissent libres et égaux", " La personne humaine est d'une dignité inaliénable",etc....) en sont issus.

Hélas, en dépit des prières, des sacrifices au temple, des objurgations des prophètes, Israël faisait l'expérience perpétuellement renouvelée de son incapacité à mettre la Loi de Dieu en pratique. Même les rois, même les prêtres, devaient avouer leurs manquements, leur faiblesse congénitale. Ils bafouaient l'Alliance divine.

La catastrophe survint : en 587 avant le Christ, Nabuchodonosor et les Babyloniens s'emparèrent de Jérusalem, détruisirent la ville, incendièrent le temple et déportèrent la population. Le projet de Dieu semblait réduit à néant.

LA PROMESSE DE LA NOUVELLE ALLIANCE

Mais des visions nouvelles sont données aux yeux qui ont beaucoup pleuré. Le désastre, la ruine de l'orgueil humain ( qui croit toujours que l'on est capable d'instaurer le royaume du bonheur par ses seules ressources, par la seule connaissance des lois, par une spiritualité plus affinée, ...) conduisit certains à annoncer des prophéties inouïes, une promesse de Dieu tout à fait inédite :

"Des jours viennent où je conclurai une NOUVELLE ALLIANCE : je déposerai mes directives au fond d'eux-mêmes, les inscrivant dans leur être. Je deviendrai Dieu pour eux, ils deviendront un peuple pour moi. Ils me connaîtront tous, petits et grands. Je pardonne leur crime"... (Jérémie 31, 31)

Et : " Ce n'est pas à cause vous que je vais agir ; je montrerai la sainteté de mon grand Nom qui a été profané...Je vous prendrai de tous les pays.... Je ferai sur vous une aspersion d'eau pure et vous serez purs. Je vous purifierai de toutes vos impuretés. JE VOUS DONNERAI UN C¼UR NOUVEAU ET JE METTRAI EN VOUS UN ESPRIT NOUVEAU. J'enlèverai de votre corps un c½ur de pierre et je vous donnerai un coeur de chair ; je mettrai en vous mon propre Esprit. Je vous ferai marcher selon mes lois... " ( Ezéchiel 36, 23...) Donc comprenons bien : pas question de supprimer la Loi ( l'anarchie mène à la ruine), ni d'en donner une autre, différente, ni de l'édulcorer en gommant ses exigences trop dures. La Loi reste la Loi définitive, insurpassable. Mais Dieu promet de donner un jour une Loi qui aura en elle la puissance de son application, une Loi qui ne sera pas seulement un texte mais une Force qui donnera capacité de l'observer. Là résidera la NOUVEAUTE . La Loi nouvelle, c'est l'Esprit-Saint !

Mais quand donc Dieu allait-il réaliser sa Promesse ? Dans les siècles suivants, la situation politique d'Israël ne s'améliorait pas : on vivait sous la coupe des grands Empires. Pouvait-on encore espérer ?...

LE DON DE L'ESPRIT : LA NOUVELLE ALLIANCE REALISEE

On imagine l'effarement, l'incrédulité de la foule lorsque les anciens disciples de Jésus réapparurent sur la scène publique et crièrent : " La Promesse est réalisée : Jésus a donné sa vie pour notre pardon et Dieu nous a offert l'Esprit ! LA NOUVELLE ALLIANCE est réalisée !"

Or on pouvait en effet constater le changement total de ces hommes et de ces femmes. Ils avaient lâché leur maître lors de son arrestation ; le premier d'entre eux racontait qu'il avait renié Jésus arrêté dans la cour du Grand Prêtre ; tous reconnaissaient leur aveuglement, leur faiblesse, leur ignominie. Maintenant ils n'avaient pas inventé une méthode pour se guérir ; ils ne montaient pas une légende car ils savaient tout de suite que ce qu'ils vivaient et disaient allait les entraîner à la persécution et parfois à la mort. Mais ils ne pouvaient se taire.

ILS AVAIENT UN C¼UR NOUVEAU ...UN ESPRIT NOUVEAU

Voilà l'oeuvre de l'Esprit ! Les enseignements de Jésus n'avaient pas suffi puisque, à Gethsémani, les disciples s'étaient éparpillés. Mais, ensuite, en recevant Jésus Ressuscité, Vivant, en acceptant son Pardon qu'il signifiait par ses plaies, par l'Esprit reçu au cénacle, ils avaient été transfigurés.

L'Esprit n'améliore pas l'homme, il ne change pas son caractère : il le recrée. Il est pardon, il est Vie, il est re-naissance, il est la Bonne Nouvelle. Car l'Evangile, ce n'est pas un livre, ce n'est pas un texte, ce n'est pas une loi - fût-ce celle, sublime, des Béatitudes ! "Si nous n'avons que le texte de l'Evangile, nous sommes condamnés" dit St Augustin repris par St Thomas d'Aquin .

Aujourd'hui, en 2008, après 50 jours de temps pascal et de prière, allons-nous nous laisser prendre ? Cesserons-nous d'être des chrétiens "essoufflés"et résignés pour "être soufflés" en avant ? Trop souvent nous fermons nos volets, nous renâclons, nous mettons les freins, nous craignons une aventure qui provoquera des dépouillements. Allons-nous oser ?...car il y faut du courage ! " Esprit-Saint, n'entrez pas !!!...je crains les courants d'air" disait P. Claudel.

Car l'Esprit ne nous télécommande pas, il ne force pas notre liberté. A chacun de l'accueillir, d'ouvrir ses bras, son c½ur, sa vie.

Il ne se confond pas avec l'allégresse ressentie dans la fusion avec un groupe ( même s'il chante des Alléluias !). L'Eglise n'a vraiment l'Esprit que si elle accepte de marcher à la croix à la suite de son Seigneur.

Alors l'Eglise n'est plus une organisation mais une communion. La foi n'est plus une habitude mais un élan. L'Eucharistie n'est plus une routine mais le foyer où est communiqué le FEU de l'Esprit. La Loi devient Grâce. La piété devient Joie. La paroisse devient famille où l'on partage. La mission n'est plus propagande mais nécessité, contagion du bonheur de croire. Levons nos voiles ! Que souffle le grand Vent de Dieu ! En avant vers de nouveaux rivages ! La Bonne Nouvelle est libération des carcans, même ceux des lois !!!


Fête de la Sainte Trinité

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Dieu est Trinité : Grâce, Amour et Communion

Au terme du cycle pascal, à la lumière définitive de l'Esprit venu à la Pentecôte, l'Eglise contemple Dieu tel qu'il s'est révélé à elle peu à peu au long de l'histoire et elle confesse que DIEU EST TRINITE. Ce mot n'a été utilisé pour la première fois que vers la fin du 2ème siècle mais la réalité qu'il désigne fut bien présente très vite parmi les premières générations chrétiennes. Une des preuves en est la célèbre bénédiction finale qui clôture la 2ème Lettre de Saint Paul aux Corinthiens que l'on date des années 56-57 et qui est lue aujourd'hui.

Alors que, dans ses autres lettres, l'apôtre terminait plus simplement : "Que la grâce de notre Seigneur Jésus Christ soit avec vous", ici il déploie une formulation plus ample, plus solennelle :

"La grâce du Seigneur Jésus Christ, l'amour de Dieu et la communion de l'Esprit Saint soient avec vous tous".

Ce souhait, nous le reconnaissons tout de suite puisque, depuis la réforme liturgique du concile, il est prononcé par le célébrant à l'ouverture de la célébration eucharistique, au moment où, avec lui, toute l'assemblée vient de se signer en disant : " Au Nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit". Au cours de la messe, les prières seront toutes adressées "au PERE...au nom de Jésus son FILS...dans l'unité du SAINT-ESPRIT". Et l'assemblée ne se dispersera pas sans avoir à nouveau reçu la bénédiction : " Que Dieu tout-puissant vous bénisse : le Père, le Fils et le Saint Esprit. Allez dans la paix du Christ". Donc le culte chrétien est bien un culte trinitaire. Comme le disait magnifiquement saint Cyprien : " L'Eglise apparaît comme un peuple qui tire son unité de l'unité du Père et du Fils et de l'Esprit-Saint"  [1]

L'habitude transformant toute merveille en banalité et d'ailleurs le fait que certains pratiquants, en retard, ne l'entendent pas, nous incitent aujourd'hui à méditer cette magnifique bénédiction de saint Paul : sa splendeur nous introduit parfaitement dans la profondeur de l'acte communautaire que nous vivons à la messe de chaque dimanche.

" LA GRÂCE DU SEIGNEUR JESUS CHRIST..."

Jésus le Nazaréen, notre Messie et notre Seigneur, nous a obtenu le bienfait suprême, la grâce des grâces : le pardon des péchés, la libération du mal et l'accès à la Vie divine. Cette ¼uvre divine est actualisée à l'Eucharistie. L'Eglise qui y vient célèbre son Seigneur présent en elle, elle est le Corps qui s'unit à sa Tête et ainsi se manifeste la présence réelle de Dieu parmi les hommes. Nous ne sommes pas des gens impeccables venus recevoir une "petite bénédiction" mais des graciés qui ne se lassent jamais d'accueillir l'amour gratuit, généreux, bienveillant, inconditionnel de Jésus. La Grâce accordée par son Seigneur provoque donc en réponse l'"action de grâce" (eucharistie) : la messe est l'épiphanie de la Grâce, l'exultation de l'humanité sauvée et heureuse.

".....L'AMOUR DE DIEU...."

A la Source de tout brûle le brasier de l'amour infini de Dieu - qui est toujours "LE PERE" chez Paul. Dieu n'est ni la projection de notre sur-moi, un justicier implacable, ni un Absolu lointain, ni un décati bonasse indifférent à ses créatures. En Jésus, l'humanité a pu découvrir qui était le seul vrai Dieu et saint Jean le dit magnifiquement dans l'évangile du jour :

" Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas mais il obtiendra la Vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde non pas pour juger le monde mais pour que, par lui, le monde soit sauvé" (Jean 3, 16)

La mort de Jésus en croix n'était pas le prix à payer pour satisfaire un Dieu sadique. La croix n'est pas le tribunal où Dieu foudroie l'humanité coupable : elle est la preuve de l'Amour - donc le lieu où les hommes se jugent eux-mêmes à partir de l'attitude qu'ils ont devant elle. Quiconque lui fait confiance est sauvé.

"...ET LA COMMUNION DE L'ESPRIT SAINT..."

S'offrant sur la croix, Jésus a non seulement acquis le pardon de nos fautes mais en outre il a permis que naisse une authentique communication d'amour entre Dieu et les croyants car "l'amour de Dieu a été répandu en nos coeurs par l'Esprit Saint qui nous a été donné"( Rom 5, 5). Par la foi, Dieu est en vérité Notre Père et nous sommes ses enfants. Il y a communion, union-commune, vie-ensemble : l'Alliance est définitivement établie.

"...SOIENT AVEC VOUS TOUS" s'écrie Paul.

Une bénédiction n'est pas un v½u pieux, une formule rhétorique, une belle phrase : elle réalise ce qu'elle dit...si elle est prononcée et écoutée avec foi. La messe commence donc par un dialogue qui crée la communauté telle que Dieu la veut et la réalise. Il est très dommage de manquer ce début car c'est comme un portique qui nous introduit d'emblée dans la grandeur divine que nous vivons chaque fois que nous nous rassemblons. L'Eucharistie est la Grâce du Seigneur Jésus Sa Source est l'Amour infini du Père Son effet est la communauté unie dans l' Esprit-Saint.

AMOUR A RECEVOIR DE DIEU ET A VIVRE ENTRE NOUS

Il reste que Dieu ne nous sauve pas sans nous. En terminant sa lettre et avant d'écrire cette bénédiction finale, Paul a multiplié 5 exhortations pour solliciter notre engagement nécessaire afin que nous correspondions à la grâce offerte.

"Frères, soyez dans la joie (Est-ce un peuple joyeux qui sort de l'église ?)...Cherchez la perfection (selon la version liturgique mais il vaudrait mieux traduire : "Formez-vous...Travaillez à votre redressement". La vie chrétienne ne tolère pas la stagnation : elle doit rester tendue vers un avenir meilleur)...Encouragez-vous (les membres de l'Eucharistie sont solidaires, il importe qu'ils s'interpellent, se consolident mutuellement)...Soyez d'accord entre vous ( s'il est fatal que surviennent des altercations, tous doivent rechercher sans cesse la réconciliation)... Vivez en paix..." "Et le Dieu d'amour et de paix sera avec vous"

Paul ajoute : "Exprimez votre amitié en échangeant le baiser de paix". Se disposer les uns derrière les autres, se juxtaposer dans le calme mais sans échanger un mot ne serait pas réaliser l'assemblée telle que le Christ la veut. Les retrouvailles du dimanche doivent s'exprimer par des signes chaleureux : quel lien plus profond pourrait-il exister entre nous que celui de la foi ?

Et l'Apôtre dit encore : "Tous les fidèles vous disent leur amitié" Il est essentiel que les assemblées communiquent, montrent des signes de solidarité entre elles. Chaque petite Eglise locale est une cellule de la grande Eglise universelle : aucune ne peut se refermer sur elle-même. L'ouverture aux autres témoignera de la profondeur et de la vérité de la foi vécue. Dans le Dieu Trinité, la multitude des communautés est UNE

 

  
 

Notes :

[1] (cité dans Vatican II ; De l'Eglise, § 4)

 

 
 

La Croix Glorieuse

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Fêtes du Seigneur et Solemnités durant l'année
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Dans le monde entier, je crois, le dessin du serpent enroulé sur un bâton signale l'½uvre thérapeutique : médecine et pharmacie. Ce symbole très antique qui se retrouve dans la plupart des civilisations ( cf. Dictionnaire des symboles) se rencontre également dans la Bible.

LE SERPENT ÉLEVÉ DANS LE DESERT

Lors de leur longue marche à travers le désert du Sinaï, les Hébreux sortis d'Egypte se mirent à nouveau à critiquer Dieu et Moïse mais ils eurent le malheur d'installer leur campement en un lieu infesté de petits serpents venimeux - ce qui fut interprété comme une punition de YHWH. Alors

" Moïse fit un serpent d'airain et le fixa à une hampe ; et lorsqu'un serpent mordait un homme, celui-ci regardait le serpent d'airain et il avait la vie sauve" ( Livre des Nombres, chap. 21 = 1ère lecture du jour )

 

Cette effigie était tellement populaire que, en dépit de l'interdiction formelle de toute image et toute représentation, elle était dressée dans le temple de Jérusalem et devint l'objet d'un culte : on l'appelait "Nehoushtân" ( en hébreu, "nahash" = serpent). Mais le roi Ezéchias procéda un jour à une grande réforme religieuse et fit détruire cette idole ( 2 Rois 18, 4). Peu d'années avant notre ère, un sage publia son interprétation des prodiges de l'Exode et il expliqua ce curieux épisode du désert : le serpent d'airain était "un gage de salut qui leur rappelait le commandement de ta Loi. En effet, quiconque se retournait était sauvé non par l'objet regardé mais par Toi, le Sauveur de tous...Ta Miséricorde vint à la rencontre de tes fils et les guérit...Ni herbe ni pommade ne vint les soulager mais ta Parole, Seigneur, elle qui guérit tout. Tu as pouvoir sur la vie et la mort..." ( Livre de la Sagesse, chap. 16).

Cette relecture visait à détruire tout culte du serpent et toute pratique magique : ce qu'il faut, dit-il, c'est que l'homme se détourne de son mal, "se convertisse" c'est-à-dire se retourne vers Dieu, se remette à l'écoute de sa Parole et lui obéisse. Alors le mal ne domine plus sur lui, le serpent qui tue est mort : l'homme vit de la Vie de Dieu. Car seul Dieu sauve.

JESUS TORDU EN HAUT D'UNE CROIX

Le disciple bien-aimé - saint Jean, dit-on - se trouvait avec Marie et quelques femmes au pied de la croix où agonisait Jésus (Jean 19, 25). Plus tard, à la lumière de Pâques et sous l'inspiration de l'Esprit qui conduit vers la vérité tout entière ( Jean 16, 13 ), il comprit : dans l'enfer des souffrances du Golgotha, se tordant de douleur sur le gibet, Jésus avait en quelque sorte accompli le symbole antique !! Pour ses juges, il était un blasphémateur, un malfaiteur qu'il fallait exécuter comme on écrase un serpent venimeux. Mais non, proclame Jean, ce Jésus était le FILS, la PAROLE DE DIEU qui s'offrait pour faire miséricorde au monde.

D'où l'évangile de ce dimanche, extrait de l'entretien de Jésus avec le pharisien Nicodème mais qui est une révélation perçue à la lumière de Pâques :

Nul n'est monté au ciel sinon celui qui est descendu du ciel, le Fils de l'homme. De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l'homme soit élevé, afin que tout homme qui croit obtienne par lui la Vie éternelle. Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas mais il obtiendra la Vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde non pas pour juger le monde mais pour que, par lui, le monde soit sauvé".

 

Extraordinaire intuition ! Jésus est à la convergence unique de plusieurs figures mystérieuses des Ecritures : Il est le Fils de l'homme, l'homme que le prophète Daniel voyait s'approcher de Dieu et " il lui fut donné souveraineté, gloire et royaume". Au contraire des Empires bestiaux qui s'effondrent les uns après les autres, le Fils de l'homme inaugure "un royaume éternel qui ne passera pas" ( Daniel , chap. 7)

Il est le mystérieux Serviteur Souffrant dont le 2ème Isaïe avait eu la vision :

" il se tordait, il n'avait nul aspect, ...méprisé, déshonoré, broyé par les pires souffrances...mais ce sont nos douleurs qu'il supporte...il est broyé à cause de nos perversités...Le Seigneur a fait retomber sur lui la perversité de nous tous... Seigneur Dieu, daigne faire de sa personne un sacrifice d'expiation, qu'il voie une descendance... ( Livre d'Isaïe, chap. 53)

Il prend la place du serpent élevé sur le bois. Et c'est pourquoi saint Jean parlera non de la "Passion" de Jésus mais de son "élévation" : Lorsque vous aurez élevé le Fils de l'homme, vous saurez que JE SUIS" ( Jean 8, 28...)

La haine des hommes l'a cloué sur le gibet de la croix - mais son c½ur était sans rancune, plein de miséricorde. A Pâques, les disciples ont compris : ayant renié leur maître, ayant commis un péché qui entraînait la mort, ils étaient malades d'un mal que nul médecin, nul médicament ne pouvait guérir. Mais Jésus s'était offert pour leur guérison. En croyant en lui, ils étaient pardonnés, soignés, guéris de façon définitive. Là était vraiment la Présence de Dieu !

Tout être humain est pécheur, participe au règne du serpent assassin mais s'il se convertit en se retournant pour regarder le Fils suspendu à la croix, alors il peut entendre la Parole qui vient du haut du gibet : Tu es pardonné et je te donne la Vie éternelle. Au moment où nous le supprimons, il se donne à nous. La croix du Golgotha n'est pas la mort d'un martyr ni la glorification de la souffrance : elle est la manifestation, la révélation de l'amour infini du Père :"Dieu a tant aimé le monde...".

C'est pourquoi la croix n'est pas l'échec de Jésus mais sa victoire : du haut de ce "trône", il est réellement "Roi" ainsi que le proclame la pancarte que Pilate a fixée au-dessus de sa tête. Donc la croix, instrument d'ignominie, devient glorieuse : elle est le foyer rayonnant de l'Amour "qui est plus fort que la mort "( Cant.des Cant.8, 6)

Désormais les apôtres, messagers, prophètes, hérauts du Christ, s'élancent dans le monde en proclamant le "kérygme", le véritable message du salut : " Jésus est mort pour nos péchés et il est ressuscité par la puissance de son Père". Sous les yeux de tous, ils élèvent fièrement l'authentique "caducée", la croix de Jésus : ils demandent à tous les humains de regarder ce signe de la Miséricorde car un prophète l'avait écrit : " Ils regarderont vers celui qu'ils ont transpercé" - prophétie, dit encore saint Jean, qui s'est réalisée au Golgotha.(Zach 12, 10 = Jean 19, 37)

Le Corps et le Sang du Seigneur

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

En mémoire de JULIENNE DE CORNILLON, la religieuse de Liège, décédée il y a 750 ANS, le 5 avril 1258, qui est à l'origine de cette fête.

Suite à l'insertion, grâce à Sainte Julienne, de la "Fête du Corps et du Sang du Christ"dans le calendrier, on peut dire que l'année liturgique catholique culmine avec la chaîne des 7 sommets :

Jeudi Saint : mémorial de la Dernière Cène Vendredi Saint : mémoire de la mort de Jésus en Croix Pâques : Jésus est ressuscité ! alléluia ! Ascension : Jésus est glorifié au ciel, mais Il reviendra Pentecôte : l'Esprit Saint vient constituer l'Eglise Trinité : Dieu enfin révélé comme Unité "Père, Fils et Esprit" Saint-Sacrement : l'Eucharistie proposée à l'adoration de tous.

On remarque que la série commence et se termine par l'Eucharistie :
-   à la Dernière Cène, Jésus se donne aux siens et entre dans son mystère pascal de mort et résurrection
-   et la Célébration d'aujourd'hui permet à l'Eglise de poursuivre sa route (la longue série des "dimanches ordinaires" ) en vivant à son tour ce même mystère pascal actualisé dans l'Eucharistie.

OÙ EST LA PRESENCE REELLE ?...

Comment ne pas se souvenir aujourd'hui des processions de la "Fête-Dieu" quand toute la paroisse endimanchée, au chant des cantiques populaires et dans l'odeur de l'encens et des pétales de fleurs piétinés, parcourait les rues en escortant le Saint-Sacrement porté par Mr le curé transpirant à grosses gouttes sous sa lourde chape ?...Ce temps paraît si loin déjà !!... Mais au fait s'agit-il d'exhiber une Hostie consacrée à travers un quartier...ou de montrer une communauté chrétienne unie par la même communion à son Seigneur ? La célébration d'aujourd'hui a sans doute perdu de son pittoresque mais elle ne cesse de nous provoquer à l'authenticité et à la vérité.

Immense sujet : quelques remarques en écho aux lectures.

1. "Frères, le pain que nous rompons n'est-il pas communion au Corps du Christ ? Puisqu'il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons part à un seul Pain" ( 1 Cor. 10, 17 - 2ème lecture)

Le 1er texte qui nous a été conservé à propos de l'Eucharistie vient de St Paul, un ancien persécuteur de l'Eglise, et il met le doigt tout de suite sur l'essentiel : le Repas du Seigneur a pour but d'unir les croyants.

St Paul n'aurait jamais accepté d'utiliser de petites hosties comme nous le faisons aujourd'hui : devant lui, sur la table, il n'y avait qu'un pain sur lequel il prononçait la bénédiction et qu'il rompait pour offrir un morceau à chacun. C'est parce qu'il avait appris qu'à Corinthe, des chrétiens se regroupaient par affinités ou classes sociales que Paul leur rappelle le but du signe : UN PAIN -- DONC NOUS SOMMES UN CORPS. La consécration vise la communion. Aller à la messe, c'est accepter de se laisser adjoindre aux autres croyants. Réduire la messe à un acte de piété individuelle est une aberration. L'Eucharistie a été inventée pour FAIRE L'EGLISE, pour rassembler, pour unir. Et cela doit se voir, se manifester. On ne peut prétendre avoir la foi et aimer la messe si on n'accepte pas qu'elle effectue, visiblement, l' UNITE DES PERSONNES. Cessons d'employer cette ridicule expression : "faire sa communion" !!! Seul Christ, par son amour crucifié et ressuscité, est capable de nous unifier ; seul il crée la communion par son Esprit. La messe est la convocation du peuple dispersé afin qu'il "entre en communion", qu'il soit une COMMUNAUTE. En nous accostant, en nous regroupant, en clamant haut et fort nos réponses aux invitations du président, en prenant part aux chants, nous exprimons que nous voulons sortir de notre coquille, nous nous prêtons au Dessein unificateur de Dieu.

2. "Si vous ne mangez la chair du Fils de l'Homme et si vous ne buvez son Sang, vous n'aurez pas la Vie en vous".

Jésus ne cherche pas à nous expliquer comment il peut être présent dans le Pain et le Vin mais son affirmation est catégorique. D'où la question : peut-on se dire "chrétien" si l'on abandonne la pratique de la messe ? Lorsqu'il trace le portrait de la toute première communauté chrétienne de Jérusalem, St Luc énumère les 4 activités de base : " Ils étaient assidus à l'enseignement des apôtres et à la communion fraternelle, à la Fraction du Pain et aux prières" ( Actes des Apôtres 2, 42).

Donc dès la naissance de l'Eglise, ses membres ont compris que l'on ne peut vivre l'Evangile sans célébrer le Repas du Seigneur. Il ne s'agit pas d'un règlement mais d'un instinct vital : les sarments de la vigne ne peuvent subsister que s'ils demeurent attachés au Cep.

3. " Je suis le Pain vivant, descendu du ciel...Le Pain que je donnerai, c'est ma chair, donnée pour que le monde ait la Vie.....De même que le Père qui est Vivant m'a envoyé et que je vis par le Père, de même celui qui me mangera vivra par moi".

L'Eucharistie est le don suprême de la Vraie Vie, la Vie de Dieu. Mais Dieu a tant aimé le monde qu'il a envoyé son Fils pour sauver le monde. Jésus a vécu une spiritualité d'Envoyé : ne réservant rien pour lui, il s'est "pro-jeté" à la rencontre des hommes afin de leur proposer le partage de cette Vie éternelle...jusqu'à accepter de donner sa vie corporelle !!! Conséquence : l'Eglise qui célèbre l'Eucharistie ne peut s'enfermer dans un ghetto, le chrétien ne peut s'enclore dans une piété individuelle. La "communion" est de soi tension vers le large, ouverture aux autres, proposition de Vie. La messe est un acte missionnaire. Ceux qui y vont ne s'y rassemblent dans l'unité que pour se disperser et offrir la joie de la Vie divine aux autres. Test pour toute paroisse : sommes-nous heureux de nous retrouver ? sommes-nous encore plus heureux lorsque quelqu'un nous rejoint ?...

Noël

Auteur: Lens Patrick
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A, B, C
Année: 2007-2008

Chaque année, je suis frappé par la vitesse du temps. Tout d'un coup, c'est Noël. On n'a même pas le temps d'écrire ses cartes de v½ux, ni d'acheter des cadeaux. Les rues sont illuminées comme chaque année, le sapin de Noël bien planté... mais c'est comme si tout cela nous est advenu sans qu'on le sache. Certains ont décrit Noël comme une maladie chronique et collective qui retourne chaque année. Le plus pénible, c'est qu'il faut être heureux et romantique ce jour-là. Mais beaucoup de gens ont d'autres occupations ou ont vécu des choses qui leur ont confronté avec la solitude.

Et bien, c'est précisément cela, Noël. Le Fils de Dieu naît inattendu lorsque tout le monde était occupé par le recensement décrété par l'empereur Auguste. A Bethléem, c'était la pagaille complète. Pas de place dans l'auberge. Toutes les images d'un Noël romantique semblent s'effondrer devant nos yeux. On sait très bien que le monde, ni ma famille ou mon partenaire, ni mes enfants, ni moi-même, ne seront changés. Quelle histoire ! Mais aujourd'hui c'est Dieu qui fait histoire. A un monde qui se demande pourquoi il est comme il est, Dieu dit : me voici ! A un monde qui ne se comprend plus, Dieu nous dit : je vous expliquer la logique que j'ai toujours voulu mettre dans le monde. Et la Parole est devenu chair, le Fils de Dieu est devenu homme, Dieu avec nous.

Au commencement était le Verbe, la Parole, le seul instrument que Dieu a utilisé pour faire le monde. Il a dit sa Parole qui fait sens. Cette Parole, c'est l'humanité de Jésus. Si tu veux connaître le sens de ce monde, le sens de ta vie, même à ses moments creux, regarde celui qui est descendu du ciel pour être solidaire avec nous, pour nous expliquer la vie, pour nous expliquer Dieu de la part de Dieu lui-même, de l'intérieur d'un c½ur vraiment humain. La Parole s'est faite chair. La logique, le sens que Dieu a voulu mettre dans toute sa création, dans toute notre histoire, est visiblement quelqu'un parmi nous, notre Seigneur Jésus-Christ. Savez-vous pourquoi ? Parce que c'est le seul qui a vaincu la mort. C'est pour cette raison que je crois au Christ. En lui était la vie, et cette vie a vaincu la mort, et nous avons vu sa gloire ! Son mystère éclaire tout homme en venant dans ce monde. Ayant parlé aux hommes depuis des siècles par les prophètes, en ce jour-ci, il nous a parlé dans la chair, par l'humanité de son Fils, mort et ressuscité. Pour moi, la plus grande merveille de Noël, c'est que Dieu est devenu homme ; c'est la proximité de Dieu en Jésus-Christ qui fait histoire.

Le Verbe c'est fait chair. Sa grâce et son amour pour les hommes, oui, son humanité, nous sont apparus. Le Père nous a envoyé son Fils bien-aimé pour proclamer parmi nous le temps de sa miséricorde. Son Esprit nous est donné pour que nous devenions, nous aussi, des enfants de Dieu. Aujourd'hui commence l'avenir de l'humanité. Je suis de plus en plus frappé par l'aspect politique de Noël. La solidarité inattendue de Dieu avec les hommes, provoque aussi notre solidarité. La bonne nouvelle de la naissance du Christ était d'abord annoncé aux bergers qui n'avaient peut être rien à perdre mais en tout cas tout à gagner. Justement à ce point, Dieu fait irruption dans leur vie. Quel est le point de ta vie où Dieu vient à ta rencontre ?

Aujourd'hui est né Dieu Emmanuel, Dieu avec nous, merveilleux conseiller, Dieu fort, Père à jamais, prince de la paix : quelle mission ! Mais c'est la gloire de Dieu qui sera notre force. Rien de plus humanisant que la gloire de Dieu, parce qu'elle rend les hommes meilleur. Nous avons vu sa gloire, nous dit St Jean aujourd'hui. Et de la gloire de Dieu découle la paix. Quand Dieu règne, la paix sera sans fin, le droit et la justice seront fermement établis lorsqu'on prend au sérieux la solidarité de Dieu avec nous. Réconciliation et paix sont possibles, si la gloire de Dieu habite cette terre. Nous sommes en route vers un bonheur qui durera et qui surpassera toutes nos attentes ! Venons et adorons ! Joyeux Noël à vous tous !